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417827 août 2013 – D’abord, les précisions concrètes... La publication-papier du premier tome de La Grâce de l’Histoire, en tant que livre enfin concrétisé, est désormais très précisée. Cette publication se faisant selon une collaboration, qui pourrait être une co-édition, entre dedefensa.org et les éditions Mols, nous explorons les possibilités de distribution du livre sur le circuit normal, en plus de sa présence sur le site, avec livraison aux souscripteurs et vente directe. L’éditeur ayant une disponibilité pour le premier trimestre 2014, et nous-mêmes étant prêts pour la publication dès la fin de l’automne 2013, il a été décidé de coordonner la parution du livre sur le site et dans le circuit de distribution de l’éditeur au début de l’année 2014 (janvier). En même temps que cette décision était prise, l’éditeur s’informait d’une approche de communication qui permettrait la promotion du livre, charge à l’auteur, qui semblait le connaisseur privilégié de la chose, c’est-à-dire du contenu du livre, de déterminer des éléments dans ce sens.
Comme l’on sait, ce premier tome couvre la période qui va de la rupture de la fin du XVIIIème siècle/début du XIXème siècle jusqu’à notre époque de crise générale, à partir de l’événement dit du “déchaînement de la Matière” qui soutient la thèse générale. Le thème était si complètement fixé que l’appréciation de l’auteur était elle-même “prisonnière” de ce qui en fait sa structure fondamentale. Ainsi a-t-il fallu un effort particulier de réflexion pour parvenir à la réunion, – désormais évidente lorsqu’elle est réalisée, – de deux faits.
• Le premier est le fait qui n’a guère besoin d’être démontré, que l’année 2014 est celle du 100ème anniversaire de la Grande Guerre... Là-dessus, nous avons la sensation, que nous allons développer plus loin, que la commémoration de cet anniversaire sera un événement symbolique de communication d’une force peu ordinaire.
• Le second est la réalisation que ce premier tome de La Grâce présente la thèse qu’on a dite en s’appuyant sur le “déchaînement de la Matière”, certes, mais également sur la Grande Guerre. Dans la thèse développée au stade où elle l’est dans ce premier tome, la Grande Guerre (et surtout la bataille de Verdun dans la Grande Guerre, dont nous avons un autre exemple de publication avec Les Âmes de Verdun) tient une place essentielle comme le second événement fondamental, faisant le lien entre le “déchaînement de la Matière” et notre crise actuelle. Du coup, certes, la Grande Guerre est abordée à plusieurs reprises dans ce premier tome, de plusieurs façons et de plusieurs points de vue, selon une ligne d’interprétation et d’analyse qui ne s’aligne nullement sur les thèses et les conceptions habituellement développées. Ainsi, La Grâce tome I peut-elle être présentée sans être trahie le moins du monde comme un livre qui développe une thèse nouvelle sur la Grande Guerre, et donc qui peut à bon escient se targuer de correspondre chronologiquement et dans le champ du système de la communication au centième anniversaire.
Il ne s’agit pas seulement d’un artifice de communication ni d’un argument pro domo (un argument de promotion pour un livre), lorsque nous parlons de ce 100ème anniversaire. Notre conviction est que ce centième anniversaire de la Grande Guerre est un événement important, que cette commémoration qui sera nécessairement très longue, qui baignera toute l’année 2014, qui imprégnera la psychologie, formera un événement politique réel dans la mesure où il nous tiendra constamment éveillé à cette mémoire de la Grande Guerre. Dans cette époque absolument dépendante de la communication, ce constat nous paraît une évidence.
Bien entendu, nous ne parlons pas une seconde de la pompe, des discours, des documentaires et des livres qui tendront pour la plupart à suivre la “ligne officielle”, c’est-à-dire la mémoire conformiste du conflit. (Nous affirmons fermement, bien entendu, que La Grâce n’est pas de cette sorte... Ce n’est pas tant par souci d’originalité que par épuisement de l’esprit devant la banalité et la manipulation de la mémoire conformiste devant le poids terrible de nos préoccupations présentes.) Nous voulons parler de l’excitation permanente de la psychologie dans le sens du souvenir de ce conflit, perçu confusément mais puissamment comme terrible, cruel, immense, bouleversant. C’est ici l’effet qui compte puisqu’il s’agit de psychologie, et nullement la signification qui, nous le répétons, sera en général conforme à la susdite “ligne officielle”. Cet effet sera celui d’une tension permanente et, surtout, d’une tension identifiée au travers d’une référence incontestable et connue de tous. En un sens, dans notre époque chaotique, secouée de crise et même structurée selon les seules crise (infrastructure crisique), le référence de la grande Guerre, toute effrayante qu’elle soit, tendrait curieusement ou d’une façon révélatrice à offrir la perspective d’un certain sens. Il s’agit là du passage de notre réflexion au domaine politique...
Souvent, la comparaison vient à l’esprit, entre la période actuelle et l’époque d’il y a cent ans, pour envisager une possibilité de conflit général. (Voyez, par exemple le texte du 28 mars 2013, «L’Europe et sa crise de nerfs modèle-1914».) Nous pensons que la puissance de la crise est telle, l’évidence du blocage et de l’impasse que constitue cette crise tellement pesante, que la référence de 1914, même si elle est brandie avec horreur, apparaît presque comme un soulagement inconscient, selon la vague croyance qu’une guerre au bout d’une crise insoluble peut permettre la résolution de cette crise. (Nous parlons de “vague” et de “croyance” parce que cette idée elle-même, qui dépend d’un fatalisme nihiliste et sanguinaire, est également extrêmement contestable d’un point de vue rationnel même si empreint de cynisme ; qu’elle l’est plus encore pour la Grande Guerre qui a, selon l’historiographie classique, créé bien plus de problèmes qu’elle n’en a résolu.)
Plus encore, comme nous le répétons souvent, la comparaison avec 1914 et la possibilité d’une guerre mondiale se heurtent à des obstacles techniques et humains considérables, sinon infranchissables. Nous n’avons plus la capacité militaire et sociale d’envisager de tels conflits, l’option guerrière se ramenant à une alternative entre d’une part des guerres asymétriques, parcellaires, réunies sous le signe bien connu de la guerre de 4ème génération, et l’option d’une guerre de destruction et d’annihilation totales avec l’emploi du nucléaire très probable. Les grandes guerres conventionnelles, avec mobilisation massive, sont hors de nos capacités. Sans parler des questions de cohésion sociale et des divers aspects sociétaux, des capacités budgétaires en temps de crise, etc., on rappellera l’exemple pour nous significatif d’un rapport de simulation fait dans le cadre des évaluations de l’US Army, en 2007, portant sur le cas d’une invasion terrestre de l’Iran : un corps de bataille de plus d’un million d’hommes était jugé nécessaire, avec un temps de mobilisation et de préparation jusqu’à une capacité opérationnelle acceptable, de 18 à 24 mois. Quand on pense que la mobilisation d’une armée russe de plusieurs millions d’hommes en nécessitant six à sept semaines pour la Russie en 1914 était considérée comme un handicap presque fatal par rapport aux autres pays entrant en guerre...
Ces constats nous conduisent à observer que l’importance politique de la référence à la Grande Guerre, à l’occasion de ce 100ème anniversaire, se situe sur un tout autre champ que celui de la répétition opérationnelle. De ce point de vue, nous retrouvons notre thèse, en passant au domaine de la communication : la référence de la Grande Guerre (et pas à la Deuxième Guerre mondiale, par exemple) est présente dans notre psychologie parce qu’elle implique une référence à un événement catastrophique de la crise de la modernité, tel que nous le percevons dans La Grâce.
D’un point de vue politique, comme d’un point de vue psychologique, ce n’est pas le phénomène de la guerre que nous sollicitions dans la référence de la Grande Guerre, mais le phénomène de la crise selon une interprétation le plus souvent plus inconsciente qu’élaborée, et qui est sans aucun doute la nôtre d’une façon complètement assumée. Il s’agit par conséquent d’un phénomène dépendant le plus largement possible du système de la communication qui, seul, peut véhiculer les éléments permettant l’identification de la crise ...
En effet, pour nous, pour notre thèse, la Grande Guerre, cet “événement catastrophique de la crise de la modernité”, c’est d’abord l’épisode central et paroxystique entre l’événement du déchaînement de la Matière ouvrant la période de la “contre-civilisation” de la modernité, et notre époque présente marquant la crise de l’effondrement du Système. La Grande Guerre forme le pendant “opérationnel” et paroxystique de l’épisode de la fin du XVIIIème/début XIXème ouvrant la modernité de notre “contre-civilisation”, et se situe ainsi à une distance temporelle égale de notre époque. La puissance du symbole, sa cohérence, est pour nous un argument considérable pour arguer de l’importance de la Grande Guerre d’une part, de l’importance symbolique et même au-delà de son centième anniversaire d’autre part.
Cette puissance du symbole de la Grande Guerre ainsi interprété dans “toute sa modernité” explique, à notre sens, que le souvenir et la commémoration de la Grande Guerre constitueront un événement de communication d’une importance majeure, avec des effets directs et des effets indirects qui pourraient être politiques, et par conséquent tout cela très fortement présent dans le système de la communication. (Comme on l’a vu plus haut, ce phénomène a commencé à affirmer sa présence, puisque la référence de la Grande Guerre est aujourd’hui une référence favorite pour la situation crisique que nous traversons. Cette référence permet de “fixer” et de substantiver certaines craintes politiques et autres d’une réelle importance, donc elles leur donnent de la substance.) Bien entendu, nous pensons que la commémoration sera d’autant plus un événement que la communication répercutera, sans l’expliquer le plus souvent, et certainement pas selon notre appréciation cela va sans dire, cette puissance de la référence qui est faite aujourd’hui à la Grande Guerre.
...On aura remarqué, ou peut-être pas qu’importe, que “la grâce” porte désormais une majuscule dans le titre, – et nous passons ainsi de La grâce de l’Histoire à La Grâce de l’Histoire. L’orthographe semble ainsi mieux adaptée à l’ambition du propos, et ainsi soit-il.