Il y a 4 commentaires associés à cet article. Vous pouvez les consulter et réagir à votre tour.
588911 juin 2012 – Les deux ont coutume de ne pas s’aimer beaucoup, comme deux vieilles stars jalouses de leur gloire ancienne. Il n’empêche, sur ce point fondamental de la forme de la politique extérieure US, des relations internationales à l’aune de cette monstruosité qu’est le bloc américaniste-européannistes (bloc BAO), Zbigniew Brzezinski et Henry Kissinger, vieux routiers de la realpolitik pure et dure, sont complètement d’accord… Donc, après Kissinger, voici Brzezinski.
…Qu’on nous pardonne, d’ailleurs, si ce fut avant : l’intervention de Brzezinski précède celle de Kissinger du 2 juin 2012, mais ce n’est qu’en lisant un rapport de PressTV.com du 7 juin 2012 que nous sommes revenus à l’émission Morning Joe de MSNBC, où Brzezinski était un des invités, le 30 mai 2012. Nous ne pensons certainement pas que le nouveau massacre en Syrie, celui d’un village proche de la ville de Hama, change quoi que ce soit aux opinions exprimées par les deux hommes, sinon pour les renforcer encore…
Quoi qu’il en soit, les deux réagissent aux réactions de “la communauté internationale”, dito du bloc BAO, aux évènements de Syrie. Si nous employons ce terme de “communauté internationale”, c’est à dessein, car il permet d’illustrer le problème que nous voulons traiter… Le bloc BAO s’arroge à lui-même cette personnalité implicitement perçue comme vertueuse, – la “communauté internationale”, – parce qu’il attend de cette fiction, – le bloc BAO n’est pas cette chose insaisissable qu’est la “communauté internationale”, – qu’elle le grandisse en sagesse et le conforte en légitimité. Au reste, cette prétention montrerait plutôt l’errement de l'esprit et l’illégitimité de la substance, autant que la vanité prétentieuse, également de l’ordre du pathologique, du bloc BAO, de se percevoir comme un tout, comme une représentation finie de la communauté humaine. En un sens, ce label auto-attribué est lui-même un aveu de sa propre subversion, de son destin faussaire et autodestructeur, – et aussi, on le verra plus loin et principalement, le signe de son versement complet dans l’affectivité comme moteur fondamental du jugement.
Brzezinski ne pense certainement pas en ces termes dans la mesure où il reste un esprit complètement américaniste, et, par conséquent, “américanisto-centré”. Mais on pourrait dire que cette question plus large de la structure et de la texture même des relations internationales ne l’intéresse pas. Comme Kissinger pour ce cas, ce qui lui importe c’est la caractère exemplaire de la crise syrienne pour ce qu’elle révèle de la pratique courante des relations internationales par les Occidentaux (le bloc BAO pour nous), de sa transformation par rapport à la façon dont lui-même (comme Kissinger) pratiqua ces relations. Il ne parle pas d’une transformation de l’essence de la chose, mais plutôt de la décadence de la chose par rapport à ce qu’elle fut. C’est justement l’intérêt de ces propos par rapport à l’étroitesse du cadre où il les place : la puissance de son propos montre bien que ce cadre qui leur assigne est insuffisant pour rendre compte de la puissance du phénomène, – et c’est bien cela qui nous intéresse…
Nous allons donc citer Brzezinski, comme technicien et expert avérés des relations internationales. (Nous laissons de coté le jugement moral qu’on peut porter sur lui, comme sur Kissinger bien entendu, – et jugement moral d’ailleurs bien connu et entendu. Là n’est pas le propos, car ce jugement moral ne doit en aucun cas interférer sur l’aspect fondamental de l’objet qui occupe exclusivement notre réflexion : ni Brzezinski, ni Kissinger, mais bien l’essence des relations internationales, et sa perversion et sa dissolution, encore plus que sa décadence.) Le compte-rendu des déclarations de Brzezinski se trouve sur The Daily Caller, de Jeff Poor, du 30 mai 2012.
«Council on Foreign Relations President Richard Haas, Brzezinski’s co-panelist on the morning program, asked if one of the appropriate measures would be for Syria’s neighbors in the Middle East to withdraw their diplomats from Russia to show their disapproval of Moscow’s support for Syria. “I don’t think the Russians will be terribly impressed by that,” Brzezinski said. “Ambassadors will be gone and what has changed in Syria is the consequence. I think the fact of the matter this issue is extraordinarily sensitive.”
»“At the same time,” he added, “it is not as horrible or as dramatic as it is portrayed. If you look at the world in recent years, the horrible war in Sri Lanka, the killings in Rwanda, and the deaths in Libya and so forth. You know, let’s have a sense of proportion here. This is a neurologic part of the world in which all of a sudden if we are not intelligent about it we can create a nexus between a difficult internal problem which has not assumed huge proportions yet and a regional problem and a global problem which involves our relationships with the other major powers, particularly Russia, but also the negotiations with Iran over the nuclear problem.” […]
» “It’s not going to be solved by recalling ambassadors from Moscow or telling the Russians they are acting like thugs,” he said. “The fact of the matter is unless there is international cooperation which results in some proposal that the Assad government can live with, and which involves some sort of supervised effort to establish some domestic consensus, this conflict is going to go on. And let’s not exaggerate this conflict.” […] He said that the Syrian uprising is distinct from other conflicts because violence isn’t widespread geographically, the army has remained intact and the business elite has remained supportive of the Assad government.»
D’une façon générale, les autres personnes, des experts également, qui participaient à cette table ronde, dont David Ignatius, du Washington Post, se récrièrent. Ils insistèrent, contre l’avis de Brzezinski, sur l’aspect horrible de la violence, comme le massacre de Houla, suggérant comme allant de soi que cette violence venait du régime Assad et qu'elle était presque sans équivalent... La réaction de Brzezinski est manifestement excédée.
« “Don’t put me in a position of defending brutality and knifing people,” Brzezinski said. “Frankly, that’s not the issue. We do know these things happen, and they are horrible. They also happened on a much larger scale in many other countries in which we have not intervened. My point here is we are dealing in a region with which all of these issues are interconnected. And if we act simply on the basis of emotion and sort of vague threats that the Russians have to be forced to be good boys, we’re going to produce a region-wide outbreak in which the issues within Syria will become linked with the conflict between the Saudis and the Shiites. Iraq will become destabilized. Iran will be involved. The Israelis on the side are also interested in not having a particularly strong Syria. So they are watching here carefully. “We are watching the breakdown of negotiations with Iran on top of it,” he continued. “And we’ll have a major international problem on our hands with political and economic consequences that are very serious. And what I hear is a lot of emotion and sloganeering. But I haven’t heard what the secret plans of the White House is conceiving actually are on how they’re going to be implemented unless we get international cooperation on it.”»
…Brzezinski va plus loin que Kissinger en un sens, bien qu’il soit sur la même ligne de critique fondamentale, parce qu’il se fait (le sait-il ou non ?) psychologue, tandis que Kissinger reste un expert qui joue à l’historien. Ce que Brzezinski met en procès, c’est la sensibilité, l’affectivité, qui remplace la froide raison, la mesure du monde qui permet d’apprécier un acte, si vil et monstrueux qu’il paraisse à la sensibilité, dans la globalité du contexte politique. Nous pouvons douter que cette “froide raison” soit, chez lui, tempérée par un jugement plus haut portant sur le fondement métaphysique de la chose, notamment par rapport à ce qui est infecté par la source du Mal, mais on doit lui reconnaître qu’il laisse la porte ouverte, par sa méthode, à cette échappée vers le haut. On entend Brzezinski, avec sa physionomie coupante comme une lame de rasoir, fulminer en subissant les geignements des autres (le valet du pouvoir Ignatius en premier) : “Ne m’enfermez pas dans vos geignements moralisateurs proliférant sur le monceau de cadavres du jour !” («Don’t put me in a position of defending brutality and knifing people, […] Frankly, that’s not the issue…») …Et puisqu’il nous laisse une échappée vers le haut, il serait indigne que nous n’en profitions pas.
La critique des deux anciens, qui ont également pratiqué la realpolitik et savent ce que sont les monceaux de cadavres puisque leurs politiques en produisirent plus qu’à leur tour, savent aussi qu’on ne peut laisser une politique se déterminer par le sentiment éprouvé par rapport à ces monceaux de cadavres (y compris et surtout si l’on en porte soi-même la responsabilité). Dans l’absolu de la raison politique, l’argument qui peut paraître ignominieux sous la plume d’un Kissinger, si l’on cède au moralisme sentimental, selon lequel il vaut mieux parfois, et parfois souvent, ne pas réagir impulsivement à un monceaux de cadavres aujourd’hui pour n’en pas susciter dix demain, cet argument ne peut être discuté… Or, il se trouve qu’aujourd’hui, on ne peut même pas dire de cet argument qu’il est discuté, on doit dire qu’il est honni, dénoncé, craché, vomi comme un sacrilège. La réflexion politique s’est réduite, à l’image de la tête d’un ennemi des Jivaros, à la taille de la réflexion du bouffon métaphysique qu’est ce BHL, aujourd’hui grand penseur de cette époque, le délégué indestructible et inoxydable chargé de la décoration intellectuelle du Système, docteur Faust en carton mâché ou en papier bouilli c'est selon, de l’ultime acte tragi-comique que veut bien nous présenter le Système sur la scène de son théâtre de l’absurde.
…Mais justement, s’agit-il de “réflexion” (“La réflexion politique s’est réduite…”, etc.) dans le sens où la raison intervient ? La raison peut-elle, est-elle encore en état d’intervenir ?
Brzezinski ne s’en cache pas : on ne peut pas intervenir selon une réaction émotionnelle… «And if we act simply on the basis of émotion… […] And what I hear is a lot of emotion and sloganeering….» Là-dessus, Brzezinski, qui est un homme informé à Washington et qui est un soutien de la politique extérieure des USA d’une façon générale, ajoute, pour renforcer son constat, qu’il n’y a aujourd’hui avec la Syrie qu’une réaction émotionnelle, qu’il n’y a aucun plan secret de la Maison-Blanche, rien du tout de construit rationnellement, – ce qui impliquerait évidemment la réaction rationnelle dont il déplore l’absence : «But I haven’t heard what the secret plans of the White House is conceiving actually are on how they’re going to be implemented unless we get international cooperation on it.»
Il y a deux aspects dans cette réaction, pour notre réflexion.
• Le premier est la signification politique de cette réaction de Brzezinski, couplée à la réaction de Kissinger déjà mentionnée (et d’ailleurs répétée, puisque dès le 5 avril 2012, Kissinger critiquait déjà violemment les appels à l’intervention en Syrie). Ces réactions sont si fortes, si affirmées, qu’on peut conclure sans crainte d’erreur qu’un Brzezinski, cet Américain d’origine polonaise et viscéralement anti-russe, est aujourd’hui bien plus proche de la politique syrienne de la Russie que de la politique du bloc BAO ; quant à Kissinger, plus encore, lui qui n’a jamais caché un penchant cynique pour le réalisme rationnel des politiques russe et chinoise, particulièrement musclées du temps du communisme…
• On peut en déduire très raisonnablement, en tenant compte de la notoriété des deux hommes et de leur loyauté à la cause américaniste, de leur absence complète de scrupules pour soutenir cette politique quand ils la jugent efficace, qu’ils démontrent indirectement, dans la capacité de leur jugement et de leur expérience autant que de la connaissance des arcanes du Système qu’ils découvrent dans cette circonstance aussi stratégiquement nu que le roi, qu’il n’y a effectivement aucune approche construite, rationnelle justement, à la crise syrienne dans le chef de la direction politique américaniste. On peut sans la moindre hésitation avancer l’affirmation que cette situation est similaire dans les autres pays importants du bloc BAO, notamment au Royaume-Uni et en France.
• Le second aspect est plus structurel, et découle évidemment du premier en nous permettant de passer au plan psychologique, voire plus profondément, au plan de la situation psychologique des directions politiques du bloc BAO par rapport à l’influence active du Système considéré en tant qu’entité à prétention métaphysique. Il s’agit du constat de l’effacement complet de la raison en tant que force structurante du jugement dans les attitudes politiques de ces directions vis-à-vis de la crise syrienne. Il n’est donc plus question, en vérité, d’attitudes politiques mais d’attitudes psychologiques comme détonateur d’une situation effectivement métahistorique.
Le constat est effectivement que l’effacement d’une raison efficace, une raison “loyale à la perception de la réalité”, ouvre la porte au déferlement de l’“affect” en termes psychologiques, ou pure affectivité, dans les réactions à la situation de Syrie. Cet affect n’est évidemment pas suscité par un plan de manipulation puisqu’on a vu que la raison, qui seule peut produire humainement de tels plans, est absente dans son rôle habituel de rangement des ambitions et des projets humains. L’affect prépondérant dans ces réactions est donc la cause autant que le produit des manipulations innombrables qui caractérisent le compte-rendu de la vérité de la situation syrienne, qui est bien entendu une vérité complètement fabriquée, – littéralement, selon notre jargon, une narrative. Il s’agit d’une auto-manipulation, ou techniquement d’une auto-mésinformation, suscitées par une affectivité qui a complètement pris le dessus dans l’attitude psychologique, et qui affecte l’observation des faits et le jugement selon des normes idéologiques de type hystérique elles-mêmes véhiculées dans la psychologie avant d’être transcrites en “idées” de type-standard et homogénéisées (droits de l’homme, humanitarisme, etc.).
(Cette auto-manipulation est facilitée par un aspect technique non négligeable, qui est l’atmosphère créée par le système de la communication, tel qu’il est lui-même intégré dans cette même auto-manipulation et cette auto-mésinformation. L’usage massif d’informations déformées par la presse-Système selon le processus qu’on a vu, de toutes les façons sans le moindre esprit critique qui disparaît avec la raison, la rapidité du processus de la communication qui interdit toute distance vis-à-vis du soi-disant fait exposé et la rapidité de la réaction émotive standard par conséquent, la profusion de l’emploi des mêmes images, la standardisation des réactions d’affectivité devant ce kaléidoscope ultra-rapide des mêmes éléments de communication présentés comme strictement objectifs, etc., tout cela crée cette atmosphère immensément favorable à la réaction affective, et seulement affective. Cette atmosphère agit comme un complément, sinon décisif, dans tous les cas très efficace, pour le phénomène constaté.)
Il s’agit d’une situation caractéristique de la psychologie de nos directions politiques, que nous avons déjà abordée dans notre texte du 16 avril 2012 (“LEUR psychologie terrorisée”), et que nous développons dans notre numéro de dde.crisis du 10 juin 2012. Nous parlons donc d’une terrorisation (terme anglais) des psychologies des directions politiques, essentiellement depuis le 11 septembre 2001. (Cela, quelle qu’ait été la participation de ces directions politiques à l’organisation des attentats de 9/11, – nous parlons d’un processus qui échappe, là aussi, à la maîtrise de l’esprit humain, et aboutirait dans ce cas hypothétique, à une “auto-terrorisation” des psychologies des directions politiques par elles-mêmes.) Le résultat de cette situation de terrorisation de la psychologie est une dégradation extraordinairement accélérée des capacités d’une raison déjà largement subvertie par l’influence du Système. La raison subvertie et extrêmement dégradée n’est plus qu’un “outil technique” au service de l’affectivité (au service du Système par conséquent, par délégation) pour construire la narrative et organiser l’action à l’intérieur de cette narrative ; et même, dans le chef de cette même raison réduite au rôle d’“outil utile” comme on dit “idiot utile”, organiser la dissimulation de sa propre subversion et de sa propre dégradation…
Les évènements accélèrent cette dégradation de la raison, de l’esprit en général, de la politique qui en est le produit. Ils mettent en lumière, par eux-mêmes, les effets des réactions catastrophiques d’une raison ainsi dégradée suscitant des politiques à mesure, et laissant la place au plus bas des composant de l’activité psychique générale, qui est l’affectivité. (L’affectivité n’a de réelle valeur que lorsqu’elle est contrôlée par la raison, et éclairée par l’intuition haute, ce qui lui donne noblesse et substance. Ce n’est bien entendu pas le cas dans notre situation, mais plutôt une situation de complète inversion à cet égard.) Cette situation générale est appuyée sur l’idéologie maximaliste, absolue, nihiliste, l’idéologie pour elle-même, qui est l’extrême et le cul de sac à la fois d’une chose (l’idéologie) qui est de toutes les façons une construction de l’affectivité pour faire accepter sous le couvert de la raison et d’un habillage d’une belle apparence logique ou morale, une politique absolument pervertie. (Résumons : l’idéologie, ou la complète perversion de la politique par l’affectivité.)
Les évènements du “printemps arabe” suivant la catastrophe de la crise de 2008 qui, tous deux, démontrent rationnellement la faillite et l’effondrement complets du Système, ont achevé cet effondrement de la raison dans le chef des directions politiques. Dans ce cas, l’influence active, sinon consciente du Système est à son zénith : il s’agit d’empêcher par tous les moyens la moindre occurrence où l’esprit du sapiens-serviteur peuplant les directions politiques et les “élites” qui les soutiennent pourrait se douter de cet état catastrophique du Système. Il n’y a donc plus de raison efficace et active chez nos dirigeants et dans nos élites, mais des raisons totalement subverties et dégradées même par rapport à cette situation de perversion. Plus aucun régulateur n’existe pour empêcher le déferlement de l’affectivité selon des termes et des orientations suscités par cette même affectivité. Seuls quelques esprits retors, expérimentés, bronzés par l’expérience de la politique dite “réaliste”, d’une pratique puissante d’une action rationnelle bien que le plus souvent sans le moindre scrupule et dans l’intérêt du Système, une raison littéralement cuirassée d’un cuir épais et difficile à entamer, comme celles d’un Kissinger et d’un Brzezinski, seuls ces quelques esprits résistent au déferlement de l’affectivité. Leur réputation et leur position dans le Système, qu’ils ont fort efficacement servi, empêchent qu’on étouffe leur fureur.
Maintenant, il reste la cause, au moins opérationnelle sinon fondamentale de ce déchaînement, de la raison subvertie et dégradée laissant la voie libre à l’affectivité. Notre hypothèse est plus que jamais la même, et touche au domaine métaphysique. Elle se réfère à ce que nous nommons le “déchaînement de la Matière”, la génération spontanée du Système comme courroie de transmission de ce déchaînement, enfin ce déchaînement n’étant pas autre chose que l’installation du Mal comme facteur dominant de notre contre-civilisation. Comme à l’origine de la séquence (le “persiflage” du XVIIIème siècle), cette force déstructurante et dissolvante dont le but est l’entropisation du monde, sait qu’elle n’a pas de meilleur moyen de se transmuter en force terrestre de dissolution que la psychologie du sapiens. Elle en use et, désormais, en abuse… Car c’est bien l’évidence qui s’impose : cette course folle, où la raison humaine qui était à l’origine faite pour recevoir la lumière de l’intuition haute est désormais précipitée dans les abysses de sa subversion et de sa dégradation, ne fait qu’accélérer la transmutation de la dynamique de surpuissance en dynamique d’autodestruction. Certains acteurs, qui sont moins touchés que ceux du bloc BAO par cette effrayante évolution, se chargeront volontairement ou non d’accélérer le processus, – on parle des Russes, des Chinois, des Iraniens et de quelques autres. Nième tentative du processus du “déchaînement de la Matière” d’aller à son terme, la crise syrienne présente une opportunité pas loin d’être parfaite d’y parvenir. Il y aura du sang, du feu et des larmes, et, peut-être, l’un de ces vastes évènements comme l’est une guerre majeure à l’échelle du monde, pour accomplir ce destin. Comme l’on sait, nous sommes dans un Moment métahistorique de l’histoire, un de ces Moments dont parle le comte Joseph, – à peine et dans tous les cas fort humblement modifié par nous-mêmes, pour la bonne cause :
«…Sans doute, la Providence n’a pas besoin de punir dans le temps pour justifier ses voies ; mais, à [certaines époques,] elle se met à notre portée, et punit comme un tribunal humain.»
Revenant très récemment, à propos d'un texte du 10 novembre 2014, sur ce texte ci-dessus du 11 mai 2012, un de nos lecteurs, monsieur Michel Donceel, a proposé fort justement (Voir le Forum de ce texte) le terme d’“affectivisme” plutôt que le terme d’“affectivité” que nous employions. Il a parfaitement raison, selon une perspective qui, à notre sens, mériterait un débat. Nous le remercions de sa suggestion, ainsi bien entendu que son amie de laquelle vient au premier chef cette proposition.
Forum — Charger les commentaires