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46562 septembre 2014 – En septembre 1980, brusquement, un mot connut une fortune sensationnelle : le mot stealth (“furtif”). Il apparut pour la première fois dans le mensuel spécialisé Armed Forces Journal International (AFJI), qui publia un article ce mois-là de septembre 1980, sur un projet secret de développement d’un “bombardier invisible”, l’ATB, pour Advanced Technology Bomber. C’était le futur B-2. A cette époque, en 1980, on prévoyait d’en produire au moins 132 à $180 millions l’exemplaire ; finalement l’USAF en produisit 21 à $2,6 milliard l’exemplaire, et certaines évaluations secrètes de l’Armée de l’Air française donnaient à la fin des années 1990 le coût total d’un B-2 à quelque part entre $4 et $6 milliards l’exemplaire. L’aventure ne faisait que commencer.
La Stealth Technology, terme générique recouvrant toutes les technologies et techniques utilisées pour ce concept jugé absolument révolutionnaire, était alors considérée comme devant totalement bouleverser l’aviation de combat. Dans le même numéro de AFJI de septembre 1980, le rédacteur en chef de la revue, Benjamin Schemmer, écrivait :
«A senior defense official told AFJ that by the end of this decade, he expects to see roughly one-tenth of the US military air arm comprised of the new stealth airplanes. That would mean that about 300 to 400 of the planes might be operational [by 1990].»
...On connaît la réalité : 59 F-117A en 1984-85, réduits à 50 puis déclassés à partir de 1995, 21 B-2 depuis 1996, réduits à 20 à la suite de la destruction accidentelle d’un exemplaire, 186 F-22 dont l’emploi est limité à moins de 40% de ses capacités, tout cela sur un parc d’avions de combat vieillissant situé entre 2 500 et 3 000 avions de combat, – on est très, très loin du compte... Mais pas du tout ! s’exclame-t-on aussitôt... Rien n’est perdu et au contraire tout est gagné ! Avec l’avion de combat JSF, que nos lecteurs connaissent fort bien, qui doit équiper l’USAF et le reste, notamment tout le bloc BAO, à des milliers d’exemplaires au moins jusqu’en 2075, on réalisera, et même au-delà, la prédiction de 1980. Une précision tout de même, en observant que ce tour de passe-passe n’est possible qu’en réalisant et en parachevant la transmutation de la Stealth Technology d’une réalité espérée du triomphe du système du technologisme en un artifice du système de la communication et rien d’autre...
(A ce point, une précision rapide s’impose. La Stealth Technology est largement utilisée dans le domaine des drones. Mais il ne s’agit plus de l’aviation de combat, qui est un des domaines fondamentaux du technologisme de la puissance militaire. Il s’agit d’abord de la robotique, taillable et corvéable à merci pour ce qui est des qualités fondamentales du vol de combat qui assure la mission non moins fondamentale de la supériorité aérienne, voire de la domination aérienne qui est la reine des batailles selon les penseurs du bloc BAO. Les drones n’ont jamais été soumis au défi d’assurer seuls la domination aérienne. Il est assuré que, face à une défense sérieuse, – celle des Russes, par exemple, – leur absence de capacités d’adaptation, leur vulnérabilité intrinsèque à toutes les formes d’interférences de communication [voir l’affaire du RQ170 détourné par les Iraniens, notamment le 9 décembre 2011], leur absence de capacités d’initiatives, leur “stupidité mécanique” dans les conditions d’une vraie guerre conduiraient à de très graves déconvenues. En aucun cas, ils ne peuvent figurer comme le système qui a montré l’incontestable maîtrise de la Stealth Technology ; en fait d’opérationnalité, ils font de la Stealth Technology au rabais, en solde, sacrilège suprême...)
On trouve sur ce site, notamment, le 23 juillet 2005, un historique complet de l’histoire de la Stealth Technology (nommée comme elle doit l’être en français, “technologue furtive”) là où elle s’est d’abord imposée, qui est l’aviation militaire des USA (l’USAF essentiellement sinon exclusivement, l’US Navy n’ayant jamais vraiment accepté le concept et n’ayant présentement aucun avion de combat stealth ; et l’on connaît bien son manque d’enthousiasme pour le JSF...). Dans ce cadre, la Stealth Technology est devenue un mythe, avec toute la puissance irrationnelle de cette catégorie de signification, qui tend à balayer la critique rationnelle qu’on peut lui opposer comme hors de propos (irrelevent). Par là même, nous sommes passés du domaine du technologisme à celui de la communication ... Nous terminions cette analyse de juillet 2005 par ces observations, dans un dernier passage présenté par le sous-titre «Une “arme” de communication ?» :
«La technologie furtive a ainsi quitté la sphère des appréciations militaires et stratégiques, — le réel, — pour tenir une place essentielle dans le monde nouveau qui s'est créé ces dernières années. Elle fait partie désormais, et de façon quasiment exclusive, de l'illustration du monde virtualiste. Seulement alors s'expliquent les faits qu'elle est extrêmement marginale dans l'arsenal américain, qu'elle joue un rôle opérationnel négligeable, que son utilité et son efficacité sont largement contestables jusqu'à être niées dans le monde réel, alors que des sommes considérables sont dépensées pour elle et que son importance opérationnelle est sans cesse réaffirmée.
»La technologie furtive est essentiellement destinée à exercer une influence, à participer à l'entretien constant de l'image de quelque chose de très complexe. Il s'agit de l'image de la puissance américaine, de l'ingénuité américaine, de l'impunité américaine ; l'image, enfin, de l'exceptionnalité américaine, la technologie furtive figurant alors comme si elle garantissait à la fois que l'Amérique, grâce au caractère prétendument invisible de cette technologie, choisit son heure pour intervenir dans le reste du monde et n'est jamais comptable des conditions physiques et techniques existantes dans ce reste du monde.
»La technologie furtive doit donc être apprécié comme un outil technologique fondamental d'évasion du monde réel, voire de négation du monde réel. Il s'agit par conséquent plus d'une “technologie de communication” que d'une technologie au sens courant qu'on utilise. La technologie furtive nous “dit quelque chose” plutôt qu'elle n'effectue des missions ; elle nous en “raconte” bien plus que des volumes de bandes dessinées et des bandes de films série B devenues série A dans le Hollywood postmoderne dont le pionnier fut Arnold Schwarzenegger. On peut s'arrêter d'ailleurs à ce rapprochement car il complète les deux phénomènes et il s'avère n'être pas fortuit, en aucun cas, et définir aussi bien l'Amérique postmoderne : la technologie furtive est devenue une technologie de communication de la même façon que Arnold Schwarzenegger est devenu gouverneur de Californie, — ceci vaut bien cela et l'on comprend que seule l'image compte, que tout le reste n'est que poussière (la poussière du réel, sans doute)...»
Ayant lu cette conclusion (pour ceux qui reculent devant l’effort de la lecture complète de l’article), on ne s’étonnera pas une seconde si l’“invasion” russe de l’Ukraine, “perpétrée” quelque part entre le 27 août et le 29 août 2014, après avoir été annoncée à plusieurs reprises dans d’autres occasions, soit quasi-officiellement présentée comme une “Stealth Invasion”. Le terme commence à faire florès, comme le signale Justin Raimondo, le 1er septembre 2014 sur Antiwar.com...
«... And speaking of hoaxes, here’s a biggie: they’re telling us that the long-awaited Russian invasion of eastern Ukraine has finally arrived! Yay! You can almost hear the sigh of relief all the way from Washington. The War Party’s journalistic camarilla – which has been telling us for the past six months or so that Putin’s move was “imminent” – yelped “we told you so!” in unison. Neocon hysteric Anne Applebaum screeched that this proved that we have to prepare for “total war” with nuclear-armed Russia – which, she claims, is planning to “use nuclear weapons to bomb Poland and the Baltic countries.”
»There’s just one problem with this alleged “invasion” – there’s zero evidence for it. Normally when one country invades another, troops pour over the border, missiles strike their targets, and the invaders proclaim their victory. So where are the Russian tanks, the missiles raining down death, the tens of thousands of troops marching in to take possession of their newly-conquered territory? They’re nowhere to be seen. The best NATO could come up with was a series of murky satellite photos showing a column of military vehicles going somewhere from some place else – and that’s it. Apparently the Ukrainian army is so under-equipped that the poor things don’t even have a single cell phone camera to take a quick shot of the invading hordes. (This just proves they need more American aid!) Washington avers that one thousand Russian troops are now in Ukraine – but why would Putin send in such a paltry “army” and risk defeat? Why not just send in the troops, as he did in Crimea, and be done with it?
»Oh, but the new cold warriors have a ready answer for the absence of solid evidence: this, we’re told, is no regular old-fashioned conquest. In this case, it’s a “new” kind of invasion – a “stealth invasion.” Which just goes to show that words can be twisted to mean their exact opposite...»
Il semble bien que ce soit le New York Times soi-même, référence prestigieuse oblige, qui ait introduit l’expression Stealth Invasion pour définir cette situation ukrainienne. Le 28 août 2014, un article, décrivant les opérations en Ukraine, qui sont (ou bien seraient, ou bien vont être, etc... chi lo sa ?) en plein tournant stratégique, commençait de cette façon :
«Determined to preserve the pro-Russian revolt in eastern Ukraine, Russia reinforced what Western and Ukrainian officials described as a stealth invasion on Wednesday, sending armored troops across the border as it expanded the conflict to a new section of Ukrainian territory.»
Plus loin dans le texte, pour bien montrer de quoi il s’agit, – et effectivement comme s’il s’agissait d’une preuve que la Stealth Invasion avait bien lieu, – l’article citait le sergent de l’armée tout à fait régulière ukrainienne Aleksey Panko :
«“I tell you they are Russians, but this is what proof I have,” said Sgt. Aleksei Panko, holding up his thumb and index finger to form a zero.»
... Néanmoins, et pour que justice soit faite, il faut reconnaître que le terme a déjà été employé, – par Robert Canfield, dans son livre d’il y a douze ans déjà, Stealth Invasion : Red Chinese Operations in North America (voir le 1er mai 2002). Canfield désignait alors, de façon bien plus orthodoxe et logique, certains investissements chinois dans certaines matières stratégiques dans les années 1990, telle la compagnie de transport maritime COSCO, transportant certaines matières déstabilisatrices vers les ports US. Mais cette origine est oubliée, si elle est seulement mentionnée. La communication s’est emparée depuis quelques jours du concept comme s’il était entièrement nouveau et le développe conformément aux circonstances, et notamment à l’affirmation qu’il y a bien “invasion” russe de l’Ukraine. Le concept triomphe, notamment dans la presse-Système US, et il ne tardera plus à devenir l’une de ces expressions pavloviennes qui dispensent de toute autre explication concernant la situation décrite. Le concept a l’avantage d’agir comme ces mots-clés qui semblent absorber comme du buvard toutes les critiques et toutes les évidences contraires ; dans ce cas, Stealth Invasion explique tout, qu’on ne voit rien de l’invasion, qu’on n’en ait aucune preuve, aucun signe, aucune évidence ; et même non, au contraire, il n’explique rien, il met en évidence triomphalement la chose même qui n’explique rien car le fait de n’avoir aucun signe de la stealth Invasion est l’indubitable évidence de sa réalité, la preuve éclatante, fulgurante, de sa véracité...
Réfléchissons à ce détail que n’oublie pas de nous préciser le New York Times, qui est la démonstration imparable de ce qui précède. Il s’agit de cette intervention du sergent Panko («“I tell you they are Russians, but this is what proof I have,” said Sgt. Aleksei Panko, holding up his thumb and index finger to form a zero»). Donnons aussitôt l’interprétation suggérée par les auteurs de l’article, eux-mêmes sous l’influence de la suggestion quasi-hypnotique impliquée irrésistiblement par l’expression Stealth Invasion. On comprend aussitôt alors que “tout se passe comme si”, – formule scientifique bien connue pour suppléer à l’absence d’un pseudo-constat scientifique, – “...comme si” l’absence de preuve d’invasion était la preuve même, la preuve suprême que l’invasion a bien lieu. Puisqu’il s’agit d’une Stealth Invasion, il importe absolument qu’il n’y ait rien du tout qui ressemble à une invasion. Par conséquent, pas de preuve, – la preuve est là, l’invasion a bien lieu puisque rien ne montre qu’il y a invasion.
Sont-ils malades ? (Nous posons cette question à propos de la Stealth Invasion, mais sans aucun rapport avec une réalité quelconque d’une invasion ou pas, simplement par l’observation du fait qu’ils acceptent unanimement la réalité de l’invasion parce qu’il n’y a pas de preuve, ni de signe, etc., de l’invasion.) Bien sûr qu’ils sont malades, on le sait depuis longtemps, – et même, notre thèse est qu’ils le sont depuis le “siècle du persiflage”, le XVIIIème siècle. (Voir notamment un extrait de La Grâce de l’Histoire, le 28 novembre 2013.) Mais nous sommes tout de même dans une phase bien particulière, bien remarquable, où la pathologie arrivée en bout de course devient elle-même une sorte de Stealth Pathology, quelque chose qui se dissimule même aux yeux de ceux qui étaient habitués à en farder les symptômes, – et alors, ceux-ci qui ne prennent même plus la peine de farder, comme si la maladie était devenue normalité... La maladie devient la norme, l’asile psychiatrique a été étendu aux bornes de l’univers pour pouvoir dire “ceci est la bonne santé même” ; conclusion, un Hollande ou un Obama, tous deux fort mal éduqués à cause de la dégénérescence des établissements universitaires du Système, ne songe même plus à ôter son entonnoir en guise de couvre-chef lorsqu’il lit le discours que le Système lui a gribouillé ; dit autrement et brièvement, l’un et l’autre s’en foutent littéralement et, finalement, qu’il y ait invasion ou pas ne leur importe guère car, au fond, ils ignorent ce qu’est une invasion... La seule chose qu’ils n’ignorent pas, c’est que la Russie est coupable.
Ce que nous décrivions le 28 août 2014 (un nouveau “Moment MH17”) a bien eu lieu :
«Ce qu’on décrit de la vérité de la situation en Ukraine, qui est une direction qui pourrait se révéler être aux abois à cause des défaites du Donbass et de sa prodigieuse incompétence pour conduire cette guerre “anti-terroriste” qui devait se réduire à une boucherie type épuration ethnique bien organisée, tout cela explique donc la réaction du bloc BAO. C’est une réaction type “destruction du vol MH17”. Aggravation générale, tocsin, civilisation en danger... [...] Cet appel à l’aide du “roi du chocolat” a été l’occasion pour lancer une offensive de mobilisation générale.»
Ce qui est formidablement nouveau, c’est l’argument de communication, la transmutation de l’opérationnel de type-fantasy-narrative (voir le 1er septembre 2014) en un somptueux argument de communication. Nous entrons alors, tambours battant, dans un phénomène de civilisation.
Nous le reconnaissons évidemment, avec empressement : ce mot de stealth a sonné à notre esprit comme un signal magique ... “Magique” est bien le qualificatif qui convient, et il est dit ici avec une intentionnalité évidente. Dans les milieux de l’aéronautique d’abord, étendus à ceux de l’armement et du renseignement, puis ceux de la communication apparentée, – c’est-à-dire dans une partie non négligeable et influente par son apparente maîtrise du technologisme des directions-Système, – “stealth” est sans aucun doute un mot “magique”. Il est, dans le domaine de la technologie opérationnelle militaire qui est la composante essentielle de la puissance, le concept fondamental synonyme du progrès et de la maîtrise des moyens de cette puissance, avec en plus la charge symbolique puissante de l’idée d’invisibilité.
(Si l’on tient à la précision qui conduit à l’évidence du constat d’inversion, on observe que cette idée mythique d’invisibilité doit être radicalement nuancée lorsqu’elle est confrontée à la réalité, puisque les technologies stealth supposent l’invisibilité à la seule détection des radars, donc l’invisibilité par rapport à une capacité elle-même technologique, celle des radars, et nullement par rapport à la visibilité naturelle des choses. Plus encore, cette “invisibilité” par rapport aux moyens du technologisme est toute relative et peut être mise en échec par certains types de radar, – les Russes, encore eux, sont les spécialistes de cette riposte annihilatrice. La solution opérationnelle magique, stealth, est finalement un simulacre dans le domaine du technologisme, comme nous le montrons dans le texte référencé et d’autres. Cela fait partie du courant général de simulacre et d’inversion du Système, – mais la “magie” subsiste, simplement en passant du domaine du système du technologisme à celui du système de la communication, auquel nos psychologies malades sont totalement soumises, – on verra cela plus loin, d’une façon plus fondamentale.)
D’autre part, la Stealth Technology a un poids politique et surtout idéologique extrêmement grand. Apparue au public en 1980, elle s’est installée publiquement comme cet artefact “magique” dans les années 1980 et est apparue de facto comme l’un des facteurs du “triomphe” du monde occidental-libéral (futur bloc BAO) sur l’URSS et le communisme. (Cette interprétation du “triomphe” de l’Ouest sur l’Est est également faussaire, sans surprise certes... [Voir le 2 juillet 2008 et le 6 août 2014].) Par conséquent, la Stealth Technology constitue une partie intégrante de la conception communicationnelle qui forme la substance même de notre époque. Cette conception communicationnelle conduit également à notre appréciation actuelle, – complètement méprisante, – de la Russie, et de la tension présente entre le bloc BAO et la Russie, – responsabilité de la Russie “revancharde”, irresponsabilité russe, duplicité russe, etc., en plus de la conception rétrograde et antimoderne de la Russie.
Le problème, on l’a signalé plus haut et on le connaît au travers des textes innombrables sur le JSF, c’est que la Stealth Technology est un échec total si l’on conçoit le concept dans sa globalité et au sein du système du technologisme auquel il appartient à l’origine ; qu’il n’obtient aucun des résultats radicaux qu’il avait promis ; qu’il charge en plus le véhicule dans lequel il est intégré (le JSF, pour le cas) de handicaps irréversibles, qui en font un avion de combat largement en recul par rapport à ses prédécesseurs, sinon complètement inopérant ; que les plus optimistes de ses partisans jugent qu’il ne sera pas pleinement opérationnel avant 2030-2035 (si l’on parvient à résoudre l’énigme de son software et à l’intégrer) et que les autres jugent qu’il ne dépassera jamais 20 à 25% de ses capacités, faisant de lui une sorte de matériel d’exposition. Le JSF, qui est l’archétype du véhicule stealth et qui porte sur lui la quasi-entièreté du poids magique du concept, est par conséquent un échec complet. Cette situation étant complètement impensable pour le Système (les USA), la force même des courants contraignants de ce même Système a poussé à créer un monde complètement artificiel où le JSF est proclamé malgré tout et contre toutes les évidences comme le plus puissant, le plus formidable, le plus au-delà de tout ce qui est concevable dans son domaine du système du technologisme, –, le système du technologisme, un des deux composants du Système, atteignant enfin à travers lui (le “JSF de communication”) l’éther de sa perfection. L’opération est pur simulacre : au travers du JSF et dans cette branche fondamentale de la puissance, le système du technologisme arrivé à son échec ultime et catastrophique et devant être sauvé par tous les moyens, ou paraître sauvé par tous les moyens, est transmuté et intégré dans le système de la communication où est proclamé son triomphe. (Voir les rapports entre le système du technologisme et le système de la communication dans le Glossaire.dde du 14 décembre 2012.)
Eh bien, c’est un peu ce qui est arrivé avec l’Ukraine... La crise ukrainienne a démarré dans les conditions chaotiques et désordonnées qu’on sait, entre l’ultimatum de l’UE de novembre 2013 et l’accord du 21 février 2014 immédiatement transformé en chiffon de papier par l’activisme de Pravy Sektor, et elle a été très vite transmutée en une version géopolitique, politique, culturelle et idéologique inspirée de la mission de sûreté de l’hégémonie mondiale du programme JSF dans son domaine. L’Ukraine allait être “occidentalisée”, avec la liquidation, physique et génocidaire s’il le faut, des russophones de l’Est ; cela, installant une base irrésistible pour attaquer la Russie par les mêmes moyens à la fois de diffusion du concept (la crise ukrainienne comme base de départ d’un “JSF géopolitique et idéologique”) et des pressions qui vont avec, pour faire sauter ce dernier verrou sur la route du programme complet de domination du Système, – c’est-à-dire, déstructuration accomplie, la dissolution et l’entropisation du monde (programme dd&e). Tout cela va tellement de soi, – sorte de mission ultime et solution finale de Stealth Hegemony, – qu’il est inutile de perdre son temps à le démontrer, encore moins à le prouver.
Comme l’on sait, rien ne s’est passé de la sorte, exactement comme dans le cas du JSF. On connaît les divers avatars ukrainiens, version-Kiev : le pouvoir-guignol, les extrémistes, les oligarques, le “roi du chocolat”, l’effondrement économique, les opérations catastrophiques de l’armée ukrainienne avec un moral en-dessous de zéro, laissée dans la nature sans soutien logistique, avec une direction corrompue et totalement incompétente ; cela, jusqu’au tournant stratégique de ces derniers jours, avec les forces armées du Donbass passant à l’offensive (voir le 29 août 2014).
Là aussi, comme dans le cas du JSF, il s’agit d’une évolution rapide vers la même situation d’“échec ultime et catastrophique” du système du technologisme. En effet, si l’on veut bien admettre, dans le cadre de la très vaste définition du système du technologisme qui décrit la surpuissance brute du Système, que la crise ukrainienne fait partie, comme le JSF, d’une poussée de surpuissance comme l’est dans son domaine le JSF, on conclut effectivement que “l’échec ultime et catastrophique” en marche en Ukraine est aussi celui du système du technologisme. La manœuvre de récupération, elle aussi, n’est pas différente : le passage du système du technologisme au système de la communication. La crise ukrainienne, du point de vue du bloc BAO, n’est plus une affaire dépendant du système du technologisme (puissance des armes, batailles, conquête de régions rebelles de l’Ukraine ; bientôt attaque de la Russie par les divers moyens habituels d’influence et de subversion, démission de Poutine, défilé des Pussy Riot sur la Place Rouge, etc.) ; c’est une affaire dépendante désormais du système de la communication .... Dans ce cas, pour en revenir à notre sujet, l’invasion devient une Stealth Invasion comme l’aspect stealth du JSF est passé du technologisme à la communication pour ne pas sombrer définitivement mais au contraire triompher décisivement.
Tout cela ayant été écrit et fort catégoriquement démontré sans preuves comme c’est désormais la coutume, reste l’évidence que l’Ukraine n’est pas le JSF. Avec le JSF, le Système dispose de toutes les cartes, il peut poursuivre l’animation, le talk-show permanent, avec articles, discours et vol prudent par très beau temps de l’un ou l’autre exemplaire, bref il peut poursuivre une activité de promotion publicitaire et de communication selon laquelle le JSF existe et qu’on peut même le rencontrer et saluer sa splendeur sans égale. Il y a derrière ce plan promotionnel de communication tous les “idiots utiles” nécessaires ; c’est-à-dire tous les sous-fifres du bloc BAO qui commandent le JSF, le dernier en date pouvant bien être la Belgique avec son futur gouvernement. L’Ukraine, ce n’est pas ça du tout, et à partir de ce brutal constat tout diverge et la machine dérape...
L’Ukraine est le même cas que le JSF, jusqu’au constat brutal du contraire, avec bifurcation assurée : il s’agit du cas, nous apparaît-il révélé, où le Système n’a pas toutes les cartes en main. Le système a commis l’imprudence insigne due à sa dynamique de surpuissance de s’attaquer directement à la Russie, qui se révèle ne pas être un de ces “crétins utiles“ auxquels on est habitué. Par conséquent, il n’est pas évident que la réalité obtempère au diktat de communication comme elle l’a fait jusqu’ici dans le cas du JSF. Dans ce cas qui semble chaque jour plus probable, le concept de la Stealth Invasion rencontrerait beaucoup d’avatars, de plus en plus, – avatars de commentaires, avatars des soubresauts de la vérité de la situation, etc., – qui compromettraient de plus en plus gravement son opérationnalité, jusqu’à des situations avec des possibilités d’inversion catastrophiques pour ses initiateurs. Dans ce cas de l’Ukraine, le Système est face à ses outrances, à son imprudence insigne où, cas classique mais soudain accéléré jusqu’à la perte de contrôle, sa dynamique de surpuissance est menacée de sombrer dans sa dynamique d’autodestruction sans que personne ne le réalise, sans preuve nécessaire, comme dans le cas de la Stealth Invasion... Il s’agirait alors de rien moins que de l’accomplissement sublime du processus dans une sorte de Stealth Autodestruction apocalyptique ; pour ainsi dire et pour solde de tous comptes, – Stealth Apocalypse...
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