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5453Le nouveau secrétaire à la défense US désigné (“faisant fonction” pour l’instant) a rencontré ses homologues de l’OTAN pour les exhorter à se regrouper autour des USA en cas de conflit avec l’Iran. L’accueil a été plutôt réservé, sinon glacial.
« Mark Esper rencontrait ses homologues de l'OTAN à Bruxelles cette semaine pour tenter d'amener les membres de l'OTAN du côté de Washington alors que la confrontation avec Téhéran s'intensifie.
» S'adressant aux journalistes du siège de l'OTAN jeudi après une session à huis clos, M. Esper a déclaré que les autres alliés doivent condamner publiquement le “mauvais comportement” de l'Iran, affirmant que cela contribuerait à éloigner les événements de “la voie militaire”.
» Mais il semble y avoir du scepticisme parmi les Européens au sujet des efforts de Washington pour former une coalition contre l'Iran. Au cours de la réunion, Esper a été “averti par la France de ne pas impliquer l'alliance de l'OTAN dans une mission militaire dans le Golfe”, a rapporté Reuters. Avec d'autres poids lourds européens comme Berlin, Paris a appelé les États-Unis à “faire respecter l'accord nucléaire iranien”, que les États-Unis ont rompu il y a plus d'un an dans ce qui peut être considéré comme le point déclencheur de l'escalade actuelle. »
C’est la première sortie internationale du nouveau secrétaire-à-la défense-par-intérim, qui semblerait presque devenue une nouvelle fonction. Certes, Shanahan, qui l’avait occupée pendant une grosse moitié d’année, venait d’être nommé secrétaire à la défense “plein” et s’apprêtait à passer ses auditions de confirmation au Sénat, lorsqu’il a démissionné ; ou bien doit-on dire “mais il a démissionné”, ou bien encore laisser sous-entendre que c’est parce qu’il aurait laissé entendre qu’il partirait qu’il a été nommé ? (Bien que son départ ait été officiellement du à la publicité faite sur des problèmes familiaux suite à l’enquête de routine du FBI pour tout nouveau ministre.) Il y a dans le flou remarquable qui règne à la tête du Pentagone bien du grain à moudre pour les explorateurs d’hypothèses, comme on l’a déjà vu, et comme Jack Hunter, de Strategic-Culture.org, le dit encore au moment où Shanahan est sur le point de partir :
« Barbara Boland, de American Conservative, signalait au début de juin que le but de bloquer [alors]Patrick Shanahan dans son poste de secrétaire à la Défense par intérim était de placer Bolton en position de contrôler tous les moyens de la politique de sécurité nationale. (Le nouveau “faisant fonction” Mark Esper pourrait remplir un rôle similaire.)
» “Il est susceptible d’agréer à tout ce que Pompeo ou Bolton exige”, a déclaré Douglas Macgregor, colonel à la retraite de l'armée américaine et analyste de la défense, à propos de Shanahan. “Pompeo et Bolton ont des projets et un plan. Ce ne sont pas ceux de Trump, mais en l'absence d'un leadership fort, Shanahan ne résistera probablement pas beaucoup.”»
La même chose pour Esper ? Ou bien ; Esper à la place de Shanahan n’est-ce pas une nouvelle façon pour la doublette/triplette Bolton-Pompeo-GinaCIA de mettre le Pentagone dans leur poche commune dans la mesure où Esper, semble-t-il au contraire de Shanahan, a “des projets et un plan” en tous points similaires à ceux de la triplette ? La description qu’en fait ci-dessous Darius Shahtahmasebi montre en effet un homme idéologiquement très marqué, évidemment dans le sens-neocon.
Au fait, est-ce un avantage ? L’épisode de l’OTAN vu en introduction, tout comme l’hostilité assez générale de la plupart des pays “alliés” qu’on appelle sous le drapeau d’une coalition anti-Iran, montreraient plutôt qu’ajouter un extrémiste aux extrémistes déjà en place et qui déclenchent la fureur, notamment des Européens, n’est peut-être pas la meilleure idée du monde. Le seul apport d’Esper, semble-t-il, est qu’à une attaque contre l’Iran, il aimerait ajouter une attaque contre la Chine (sans parler de la Russie, c’est chose faite) et y embarquer l’OTAN au grand complet. (Y compris Erdogan et ses S-400 ?) C’est un peu maigre, et surtout fort salé.
Ainsi en revient-on à la question centrale : pourquoi Trump s’entoure-t-il de tels hommes, alors qu’il n’a nul besoin d’une guerre en ce début de campagne pour USA-2020, qu’il serait même gravement desservi par un tel événement ? (Il est très probable que, dans ses contacts bilatéraux au G20 d’Osaka, Trump assure tous ses interlocuteurs qu’il ne veut surtout, surtout pas la guerre...) Mise à part l’hypothèse de Trump marionnette du DeepState, qui est couturée de cicatrices diverses lui ôtant tout crédit tant Trump a fait ce qu’il a voulu depuis son arrivée au pouvoir, balançant notamment les uns après les autres les personnes prétendument placées pour le surveiller et le manipuler (Mattis, McMaster, Kelly, etc.), on en vient à penser que Trump s’arrange de ces extrémistes pour faire avancer sa politique commerciale agressive et prédatrice, appuyée sur une menace perpétuelle diverse, où la menace de l’agression militaire a sa place à côté des sanctions effectives.
Nous disons bien “menace d’agression militaire” et non pas “agression”, parce que Trump ne veut pas d’un conflit alors qu’il entre en campagne de réélection ; par conséquent, ce serait la situation incertaine du “manipulateur manipulé”, ou “qui manipule qui ?”. L’idée d’un Bolton qui rassemble sur lui autant de pouvoir que Cheney sous GW Bush, selon l’analogie de Barbara Boland citée plus haut, a beaucoup moins de validité si Trump tient effectivement le pouvoir pour réaliser son obsession du capitaliste prédateur soumettant tous ses partenaires et adversaires aux exigences d’une guerre commerciale appuyée sur la menace. L’essentiel pour un tel “plan” est que la menace militaire soit toujours présente, et même “follement présente” (Bolton & le reste font l’affaire), mais qu’elle ne soit jamais mise à exécution (l’abandon de l’attaque sur l’Iran dix minutes avant le coup d’envoi).
(Le cas GW Bush-Cheney était complètement différent. Le jeune Bush, aux capacités limitées, n’était pas du tout hostile aux aventures militaires, que du contraire s’il trouvait chez les aventuriers la solidité conceptuelle qui lui manquait. Il était chambré par son conseiller Rove, le “faiseur d’Empire” fort peu préoccupé par l’obsession commerce/dollar de Trump ; Rove, l’homme du « Nous sommes un empire maintenant et quand nous agissons nous créons notre propre réalité. Et alors que vous étudierez cette réalité, – judicieusement, si vous voulez, – nous agirons de nouveau, créant d’autres nouvelles réalités, que vous pourrez à nouveau étudier, et c’est ainsi que continuerons les choses. Nous sommes [les créateurs] de l’histoire... Et vous, vous tous, il ne vous restera qu’à étudier ce que nous avons [créé]. »)
A cette lumière, les effets de l’entrée dans le jeu d’un Esper tel qu’il est décrit ci-dessous sont assez complexes à évaluer. S’il est idéologiquement plus “structuré” type-neocon,, comme cela semble le cas, il n’est pas assuré que la position des idéologues (la triplette, Bolton en tête) soit meilleure, parce que Trump reste en place et entend exercer au maximum ses prérogatives de manipulateur de la “menace non-exécutoire” d’une intervention militaire. C’est-à-dire que s’il est vrai que Bolton (prenons son cas), avec Esper devenu “membre actif” du club, contrôle énormément de puissance à l’image de Cheney en 2002-2003, par contre il a au-dessus de lui un président auto-bloquant et imprévisible, avec une puissante idée fixe (commerce-dollar) et un formidable narcissisme pour paradoxalement “structurer cette imprévisibilité”, cela revenant donc à un président impossible à manipuler à cause de son désordre. Il s’agit du contraire de ce qu’était GW Bush pour Cheney, un GW Bush sans idée précise, facilement impressionnable, d’une personnalité peu affirmée, peu sûr de lui, cherchant toujours des appuis solides chez ses subordonnées.
Nous irions même jusqu’à envisager que la venue du secrétaire à la défense par intérim avec une certaine structure idéologique allant dans le sens de Bolton, puisse se révéler comme un concurrent de Bolton dans le contrôle de la puissance, s’il choisit par exemple de s’appuyer sur les chefs militaires qui sont d’instinct hostiles aux extrémistes civils. Dans ce cas, la référence Cheney serait valable, mais le Cheney seconde période, notamment à partir du départ de Rumsfeld (novembre 2006), lorsque le nouveau secrétaire à la défense Gates s’appuya sur ses généraux (et surtout sur ses amiraux) pour contrer certains projets du clan Cheney, simplement (pour le cas de Gates) pour contrer la puissance de Cheney. Dans le cas actuel, et malgré l’idéologisation conformiste-unitaire des directions de la sécurité nationale qui n’empêche aucunement les affrontements bureaucratiques internes extrêmes, c’est Trump qui pourrait jouer des rivalités de pouvoir entre ses divers chefs de la sécurité nationale. On en revient toujours à Trump, comme ce qu’un simulacre de latin désignerait dans notre infernale sarabande de la communication, comme le Clownus Ex Machina imprévisible et tout-puissant...
Le texte ci-dessous, de Darius Shahtahmasebi, avocat international et commentateur politique spécialisé dans les affaires US, et basé en Nouvelle-Zélande, est en ligne sr RT.com le 26 juin 2019.
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Pour quelqu'un qui a fait campagne électorale en vue de mettre fin à des guerres inutiles et de faire en sorte que son pays redevienne ”grand”, Donald J. Trump a choisi de truffer son administration de certaines des personnes les plus bellicistes à Washington. Je pourrais écrire tout un essai sur ce seul fait, mais le passé tristement célèbre de gens comme John Bolton, Mike Pompeo et Elliot Abrams est en train de devenir rapidement connu de tous.
Le dernier hyper-faucon de Trump, qui semble prêt à entrer dans la mêlée de l’une des administrations les plus catastrophiques de tous les temps, est Mark Esper, actuellement ministre de l’armée de terre. Esper est le choix de Trump pour diriger le Pentagone, suite à la démission de James ‘Mad Dog’ Mattis en novembre dernier. Apparemment, personne n'est assez “chien fou” pour le goût de Donald Trump.
Esper s'intéresse particulièrement à la Chine depuis des décennies (c'est du moins ce qu'il dit). Selon Reuters, Esper a déclaré qu'il considérait la Chine comme une priorité personnelle dès les années 1990, à l'époque où il travaillait comme assistant au Capitole après avoir servi plus de dix ans dans l'armée.
« La question de la Chine, de la concurrence avec la Chine, des capacités de la Chine, n'est pas nouvelle pour moi... C'est à la fois le fondement et le constant renforcement de mon point de vue sur les questions de sécurité nationale, parce que j'ai suivi l’évolution depuis 20 ans maintenant », a dit M. Esper, qui rappelle qu’il était un planificateur de guerre dans le Pacifique au sein de l'état-major de l'Armée au milieu des années 1990.
Alors, à quoi ressemblerait une armée américaine dirigée par Esper dans un avenir proche ?
L'an dernier, lors d'un événement de politique étrangère à Brookings, M. Esper a expliqué sa vision de l'avenir de l'armée américaine. Après avoir expliqué que son mantra personnel est « la seule façon dont les êtres humains peuvent gagner une guerre est de l'empêcher... la meilleure façon d'empêcher une guerre est d'être prêt à la gagner », Esper a poursuivi en expliquant comment, pour contrer la Russie et la Chine, l'armée américaine devrait faire croître l'armée régulière au-delà de 500 000 soldats, entre autres choses.
(Il est intéressant de noter à ce stade que Bolton lui-même est également friand de cette sorte de formule, citant notamment souvent la plus fameuse, celle de la Rome antique, sur la guerre et la paix : « Si tu veux la paix, prépare la guerre », – mais je suis sûr que ce n'est qu'une coïncidence.)
« L’une des situations les plus dangereuses est le conflit de haute intensité. C'est là que nous pourrions [avoir] une guerre majeure, et cela aurait un impact très important sur les Etats-Unis », a aussi récemment déclaré M. Esper au Washington Examiner. « Nous devons donc bâtir une armée, une armée si vous voulez, capable de faire face à la Russie ou à la Chine, car nous savons qu'au cours des 18 dernières années, alors que nous nous sommes concentrés sur l'Irak et l'Afghanistan, les Russes et les Chinois se sont efforcés de moderniser leur force et de combler l'écart avec les États-Unis. C'est ce qui retient notre attention en ce moment. »
Malgré cet accent mis sur la Chine, il ne serait pas trop difficile de déterminer où se situera la loyauté d'Esper à long terme. Dans un passé pas si lointain, Esper a passé sept ans comme vice-président des relations gouvernementales chez Raytheon, un entrepreneur de la défense, où il a gagné des millions.
Dans son rôle bientôt confirmé de secrétaire à la Défense, il est susceptible d'avoir la décision finale sur les armes que le Pentagone achète. Cela dit, Patrick Shanahan, récemment démis de ses fonctions de ministre de la défense par intérim, était un dirigeant de longue date chez Boeing, ce qui démontre une fois de plus à quel point la démocratie américaine est constante dans ses choix.
Esper a également servi dans la guerre du Golfe en 1991 en tant qu'officier d'infanterie et a reçu l'étoile de bronze, indiquant que son implication dans la machine de guerre américaine est aussi profond et sérieux qu'on peut l'être. Sans compter qu'en 1986, lui et Pompeo ont fréquenté ensemble l'Académie militaire américaine. Même à la lumière des obstacles juridiques monumentaux qui devraient se dresser sur la route d'Esper avant qu'il ne puisse techniquement occuper le siège de secrétaire américain à la Défense, il semble qu'Esper soit déjà un acteur de première main dans l’administration Trump. En fait, Esper aurait été à la Maison-Blanche jeudi dernier pour une réunion avec le président américain sur la façon de réagir à la destruction par l'Iran d'un drone militaire américain RQ-4C. Si la querelle actuelle entre les États-Unis et l'Iran s'intensifie davantage, nous pourrions être témoins de ce qu'Esper apportera à l'establishment de la politique de sécurité nationale américaine.
L'annonce de la nomination d'Esper intervient au moment même où les chefs d'état-major interarmées américains annoncent une nouvelle doctrine nucléaire qui implique que le Pentagone estime que l'utilisation des armes nucléaires pourrait « créer les conditions nécessaires à des résultats décisifs et à la restauration de la stabilité stratégique ». Une doctrine d'opérations nucléaires publiée pendant l'administration de George W. Bush a également contribué à ouvrir la voie à la possibilité de frappes nucléaires préventives et à l'utilisation de l'arsenal nucléaire américain contre un éventail élargi de cibles.
Le Pentagone étend également sa rivalité avec la Chine pour inclure une nouvelle course aux armements dans l'espace. Dans une nouvelle évaluation de la menace qui pèse sur l'armée chinoise, le Pentagone cite 86 foisle mot “espace”, avertissant que l'armée chinoise s'emploie à « permettre des frappes de précision à longue portée » et à mettre au point des armes à énergie dirigée pour l'espace.
Du côté de Pékin, un général chinois de très haut niveau qui a cosigné un livre intitulé : La guerre sans restriction : Le maître-plan de la Chine pour détruire l’Amérique, a avertique les dirigeants américains qui se préparent à une course aux armements dans l'espace devraient être prêts à la perdre.
« La Chine n'est pas l'Union soviétique », a-t-il déclaré dans une interview accordée au South China Morning Post (SCMP). « Si les États-Unis pensent qu'ils peuvent aussi entraîner la Chine dans une course aux armements et la faire tomber comme ils l'ont fait avec les Soviétiques... au bout du compte, ce pourrait bien ne pas être la Chine qui retrouverait à terre. »
Si les États-Unis voulaient éviter un conflit avec une puissance nucléaire comme la Chine, il faudrait envisager qu'ils puissent au moins prendre davantage de mesures de précaution pour éviter une telle catastrophe. S'abstenir de nommer des gens comme Esper, qui doivent travailler en étroite collaboration avec des super-faucons établis comme John Bolton et Mike Pompeo, serait un bon début dans cette direction. Bien qu'on n'en parle pas souvent, M. Bolton s'est fait l'ardent défenseurd'une riposte contre la Chine, allant même jusqu'à contester la politique d'une seule Chine de Beijing à l'égard de Taïwan, une mesure qui pourrait aussi mener à la guerre.
Brian Weeden, directeur de la planification des programmes à la Secure World Foundation, a fait remarquer avec perspicacité: « L’une de mes plus grandes préoccupations est que, malgré tous les discours sur l'horreur d'un conflit armé avec la Chine pour tout le monde, toutes les politiques et actions actuelles semblent se préparer au conflit armé plutôt que de l'éviter. »
Cependant, éviter les conflits n'est tout simplement pas à l'ordre du jour d'Esper. Ce n’est pas une spéculation de ma part :
« Ma première priorité sera l'état de préparation,– veiller à ce que l'ensemble de l'armée soit prête à combattre tout au long du conflit », a déclaré M. Esper devant la Commission des forces armées du Sénat en novembre 2017. « Avec l'armée engagée dans plus de 140 pays à travers le monde, pour inclure des opérations de combat en Afghanistan et en Irak, des rotations d'entraînement en Europe pour dissuader la Russie et des unités déployées dans le Pacifique pour se défendre contre une Corée du Nord belliqueuse, la préparation doit être notre première priorité. »