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2454Nous accompagnons ici un texte de notre ami Maurizio Blondet, que nous nous sommes permis d’adapter à partir de la sommaire traduction Google. Cet article a pour thème un sujet très actuel aujourd’hui, après l’élection de Macron et avant les élections générales de la fin du mois en Allemagne. Il s’agit de rien moins que le désir d’hégémonie de l’Allemagne, déjà abordé récemment ; désir d’hégémonie, parfaitement fardé et maquillé en “désir de guerre” qui se signale à travers les capitales qui comptent dans le paysage européen. Qu’on soit en faillite, endetté ou sorti de l’UE, qu’on soit l’Allemagne enfin, tout le monde ne parle plus que de “défense européenne”. Dans son “discours aux Ambassadeurs” le président Macron en fait, devrait-on croire, une des trois grandes priorités de la France, ce qui n’a rien pour surprendre et encore moins choquer puisque ce même président nous annonce que, pour la France, ce grand pays souverain dans tous les cas, « le lieu de notre souveraineté aujourd’hui c’est l’Europe ».
(Par contre, on signalera que, si nous connaissons désormais “le lieu de notre souveraineté”, – curieuse chose que “le lieu d’une souveraineté”, concept qui est par essence hors des standards de la géographie, – il ne nous est pas dit grand’chose, ni de la forme, ni du contenu de cette souveraineté. La chose est peut-être en cours de réalisation ou bien en réfection. Soyons patients.)
Dans son article, Blondet signale les diverses dispositions développées ou suggérées en Allemagne pour acquérir la maîtrise de cette “armée européenne” devenue un des principaux projets de l’UE, et affirmer par là son hégémonie militaire en Europe avec une stratégie expansionniste, antirusse et de projection de forces. Blondet note justement l’entente tacite des deux principaux concurrents aux élections (Merkel et Schulz) sur ce projet, dans la perspective d’une probable coalition CDU-SPD. Si sa prévision se confirme comme c’est probable, un vice-chancelier Schulz qui se verrait confier, comme c’est l’usage, le ministère des affaires étrangères, deviendrait un promoteur brutal de cette hégémonie allemande dans un style à tendance totalitaire d’une brutalité rare. Il en a l’habitude et une réelle entente avec Merkel de ce point de vue, comme on l’a vu dans les crises avec la Grèce et avec la Pologne. On a donc déjà vu les atouts et les intentions probable de l’Allemagne à cet égard, à l’intérieur des structures de l’UE et, indirectement, vis-à-vis et aux dépens de son “partenaire français”. Pour autant, un tel projet trouverait plusieurs obstacles de taille, et au moins à sa taille, sur sa route.
• Jusqu’ici discrète, l’OTAN devrait commencer à faire aller sa voix pour faire entendre sa complainte habituelle (Selon Spoutnik-français, cette observation qui relève d’une évaluation ossifiée et datant du XXème siècle quant à l’engagement et aux capacités US-UK : « L'Europe n’est pas capable de se défendre elle-même, sans l’Otan et ses deux acteurs clés que sont les États-Unis et le Royaume-Uni, prétend le secrétaire général de l’Alliance Jens Stoltenberg, se prononçant invariablement contre une armée européenne. ») Bien entendu, la situation de l’argumentaire de l’OTAN est complètement dépassée, UK n’ayant plus aucune capacité sérieuse et se trouvant dans une position politique absolument affaiblie par le Brexit et les USA connaissant autant les incertitudes d’un pouvoir divisé que le désordre qui marque la situation civile, en outre avec des capacités extrêmement réduites.
(Un récent recensement de bonne source concernant une possible guerre terrestre avec la Corée du Nord montre l’actuelle faiblesse extrême des capacités US : tout le poids de cette guerre échoirait à la Corée du Sud avec ses 600.000 hommes, l’US Army ne pouvant dégager au mieux qu’une division supplémentaire [la 25ème d’infanterie] pour un renforcement d’urgence, à cause de ses autres engagements. La même situation prévaut évidemment pour l’Europe/l’OTAN, en cas de nécessité, – à moins que la 25ème division soit déjà à l'ouvrage en Corée, – et dans ce cas, plus rien à attendre des USA.)
L’argument Stoltenberg, sans doute soutenu par une partie de la bureaucratie du Pentagone, se heurte de front à la position du président Trump réclamant que les Européens assument eux-mêmes leur défense : l’OTAN est, dans cette affaire qui concerne surtout la répartition des directions, dans une posture très affaiblie par les contradictions de ses tuteurs. Les Allemands ne veulent pas sortir de l’OTAN, ils veulent prendre une sorte de leadership de l’OTAN, ce qui menace effectivement les avantages de la bureaucratie de l’OTAN qui s’est toujours appuyée pour légitimer sa prépondérance sur le “parrainage” US. Trump est un “parrain” capricieux, désireux de changer les règles de l’ancienne mafia atlantiste, et dans ce cas l’antagonisme Trump-Merkel avantage le projet allemand.
• Le deuxième point, c’est la position française. L’entente Macron-Merkel est en théorie remarquable nous dit-on, mais lorsqu’on en viendra à la pratique elle risque de se dégrader gravement sur cette question de la défense, quand on lit les détails du projet développé par le groupe Stiftung für Wissenschaft und Politik, que signale Maurizio Blondet. La part du lion est faite à l’Allemagne pour ses projets d’hégémonie ; mais le président français se révèle de plus en plus d’un autoritarisme brutal qui rend sa position délicate, et dans cette position justement où il ne peut prendre le risque supplémentaire et sans doute mortel pour lui de soumettre la France à l’hégémonie allemande dans le domaine militaire.
On peut même dire qu’une telle occurrence pourrait être le déclencheur d’une crise sans précédent entre la France et l’Allemagne, et par conséquent pour l’Europe elle-même. Selon notre sentiment, ce serait même la crise la plus grave qu’on puisse imaginer, car la seule capable de provoquer une “insurrection” antiallemande et anti-européenne s’il le faut au plus haut niveau en France (dans la direction politique elle-même, pourtant ultra-européiste mais confrontée à une possibilité de rupture interne autant qu’à son propre projet de ne pas céder le seul instrument lui assurant la participation obligée au leadership européen). Cette crise n’a jamais été envisagée parce qu’il n’y a jamais eu une Allemagne capable d’envisager un projet aussi provocant, aussi déstructurant pour l’entente franco-allemande qui reste désormais la seule véritable force empêchant l’effondrement de l’UE.
Ce qui est caractéristique dans cette évolution crisique dont Maurizio Blondet décrit un développement de plus, c’est les positions des deux directions, jusqu’aux caractères des dirigeants des deux protagonistes. L’autoritarisme qui se révèle de plus en plus chez Macron trouverait un répondant antagoniste dans une paire Merkel-Schulz, qui présagerait d’un affrontement franco-allemand d’une belle intensité. Chaque pays se croirait rationnellement justifié dans sa position, laissant libre cours à des engagements passionnés sinon irrationnels qui seraient ainsi dissimulés sous l’apparence de la rationalité. Cela signifierait l’effondrement de la confiance et de la complicité entre les deux directions.
En termes postmodernes, qui s’exercent essentiellement dans le domaine de la communication plus que dans celui des divisions blindées bien que celles-ci en seraient l’enjeu, il s’agirait de la résurrection d’un conflit ancestral et dévastateur pour l’Europe. Pourtant et bien entendu, les deux directions se veulent absolument européennes et ne cessent de clamer leur conviction que l’UE est justement le grand projet qui a écarté tout risque d’affrontement entre nations en Europe au nom de l’hégémonie d’une nation. C’est cette croyance d’apparence politique mais quasiment d’essence religieuse (la “religion européenne” des ultralibéraux serviteurs du Système) qui rendrait possible, en donnant aux deux côtés la bonne conscience qui écarte la mesure des risques, un conflit d’une telle intensité et qu’on juge bien entendu toujours impensable encore aujourd’hui. Comme il n’est pas question de véritable “guerre”, il s’agirait d’un facteur de désordre supplémentaire extrêmement violent pour une Europe en lambeaux, sinon pulvérisée, avec l’évolution probables de situations internes (surtout en France) caractérisées par la violence et la nécessité de l’apparition et la montée en puissance de forces antiSystème.
Nous pensons à cet égard que les “menaces” créées de toutes pièces par les narrative-simulacres du Système, comme l’antirussisme et la menace russe, perdraient rapidement le peu de substance, sinon l’insubstance qui est la leur. En attendant, en provoquant dans les capitales européennes des mobilisations qui ne sont que des artifices grotesques de communication, elles renforcent le mythe de la nécessités d’une défense européenne et alimentent par conséquent les éléments potentiels de la crise possible que nous avons décrite.
Voici donc le texte de Maurizio Blondet. Nous en avons fait l’adaptation française à partir de la traduction très approximative des robots Google, en espérant en restituer tout le sens. (Le texte original est sur le site de Blondet, ce 8 septembre 2017. Le début du texte est justifié par une photo du ministre britannique des affaires étrangères en Estonie, équipé en guerrier avec treillis camouflé et casque de tankiste, dans un char britannique Challenger, sans oublier le pouce levé... Que fait un ministre du prestigieux Foreign Office dans un char ? Boris Johnson étant d’abord un clown, sa prestation ne choque personne.)
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Ce qui vous apparaît sur cette image, c'est bien le ministre britannique des Affaires étrangères Boris Johnson. Il est allé en Estonie pour pouvoir se déguiser à l’aise et il a (selon le Telegraph) « grandement apprécié » une balade à bord d’un char Challenger des forces armées britanniques déployées en Estonie dans le cadre de la grande stratégie de l’OTAN de containment agressif de la Russie. Ces chars, a-t-il dit, sont « une présence rassurante pour les alliés face à l'antagonisme russe en Europe du Nord et dans la région balte ».
Avec la déclaration du président français Macron selon lequel « 70 ans de paix sont une aberration de notre histoire », l'image d’un diplomate qui reprend le casque guerrier montre qu’il existe dans notre soi-disant classe dirigeante un désir de guerre étrange dans cette pose antagoniste vis-à-vis de la Russie ; et, au travers de telles manifestations simultanées, on pourrait voir une sorte d’obéissance à un “signal convenu”.
Quiconque a vu le débat pré-électoral entre les deux prétendants à ma chancellerie allemande, Angela Merkel et Martin Schulz, a pu mesurer le simulacre de leur affrontement : bien plus qu’antagoniste et concurrent, Schulz était celui qui tient le rôle du faire-valoir notamment dans la comedia dell’arte italienne, celui qui est chargé de mettre en valeur la performance de la vedette comique. Aucune critique de la conduite de l'UE, de l'euro, de la réduction de la Grèce à la mendicité, aucune élaboration sur les questions délicates que Schulz avait posée concernant la victoire inscrite dans les astres de Mutti. La plus grande prudence était de mise pour un débat à sens unique parce qu’aucun autre n’est possible (il faut parler comme il faut, il s’agit de la démocratie allemande).
Une raison de cette retenue complice se trouve probablement dans le fait que les deux pseudo-compétiteurs se préparent à former un gouvernement de coalition. L’autre raison est que les projets concernant le type d’hégémonie que l’Allemagne doit imposer à l'Europe sont bien compris par les acteurs concernés et il n'est pas nécessaire d'alarmer quelque auditeur ou spectateur non averti avec un débat à ce propos.
Laquelle hégémonie, cela va sans dire, doit être militaire.
« Le groupe de réflexion fédéral, SWP (Stiftung für Wissenschaft und Politik), propose que Berlin prenne le leadership militaire de l'UE sinon de l'OTAN, – écrit le site German Foreign Policy. Selon ce centre de réflexion stratégique, l'Allemagne doit montrer un “leadership fort” au sein de l'OTAN et inciter l'ensemble “occidental” à adopter une nouvelle orientation stratégique ».
Et quel est ce “nouveau” concept stratégique ? Vous le reconnaîtrez sans peine : « La réorientation de la politique mondiale germanique, qui, après la prise de contrôle de la Crimée par la Russie, ne doit plus envisager que des interventions militaires dans le monde entier pour protéger et assurer les intérêts stratégiques ou économiques [c'est-à-dire participer à des guerres du type-neocon] et pour lutter contre les « conceptions concurrentes de sa [propre] conception » de la politique internationale. Les projets de “conception concurrentes” sont ceux de la Russie et de Pékin, et ils sont détestables et nuisibles parce qu'ils représentent « un ordre multipolaire en formation » et qu’ils « exercent une influence croissante sur le plan économique, politique et militaire » – réduisant ainsi la liberté d’intervention militaire de l'Occident par projection des forces, comme en Syrie, en Irak, en Afghanistan, en Libye ...
L'agressivité de Moscou est définie par le fait qu'il « apparaît comme un centre d’influence indépendant à l'échelle mondiale ». Tant que Moscou insiste sur « la capacité d’opérer indépendamment » [notamment par rapport aux intentions de Merkel et de Mogherini], il s’agit d’un « un défi [inacceptable] pour notre continent », dit le groupe de réflexion allemand.
L’Allemagne, estime le SWP, devra assurer le commandement de cette dynamique d’hégémonie qui se manifestera dans la création de trois divisions multinationales « pour assurer le complément des troupes de l'OTAN stationnées dans les pays baltes et en Pologne », qui constituent le “fer de lance” de l'Alliance contre l’agressive Russie. Deux des trois divisions multinationales devront être constituées à partir « du personnel et des structures des divisions allemandes » ; en bref, elles seront allemandes et commandées par des Allemands. En outre, l’élément aérien qui viendra renforcer l'OTAN « s'appuiera pour plus de 75% des capacités sur la République fédérale », explique le “Livre blanc” du SWP, ignorant complètement la contribution française, du seul pays européen qui dispose d’une production complète indépendante d’armements. En ce qui concerne la Marine, le projet implique « un commandement naval dans la Baltique dominé par l'Allemagne » ; ce qui se résume par le constat que « [l]e rôle de l'Allemagne dans ces alliances et structures est important sur terre, dans le ciel et sut mer". En d’autres termes, Berlin se prépare à remplacer les États-Unis « dans le rôle traditionnel du leader de l'Alliance », qui aujourd'hui « ne l’assurent plus de façon satisfaisante ». Tout cela coûtera beaucoup plus que les €130 milliards prévus par le ministère de la Défense jusqu'en 2030, « mais le leadership politique-militaire a son prix », et Mutti, de concert avec les Allemands comme il est habitué à faire, est prêt à payer pour cela.
La Bundeswehr deviendra alors « l'une des armées les plus importantes du continent », proclame le SWP. De même, les formations de combat multinationales dirigées par les Allemands « devront pouvoir être utilisées » dans les opérations de l'UE : donc en dehors du cadre de L'OTAN, dans une sorte d'armée européenne hégémonique allemande.
L’UE se comporte en fait comme un ennemi de guerre de Moscou. Lorsque Poutine a lancé une initiative inattendue en proposant qu’une mission de Casques Bleus de l’ONU soit déployée dans le Donbass pour tenter de contrôler et d’arrêter les affrontements sporadiques dans cette région, quelle a été la réponse de l’UE ? Le 6 septembre, l'Union européenne a étendu les sanctions contre la Russie pendant six mois, y compris le gel des biens et l'interdiction d'entrer dans l'UE faite au responsables russes et aux séparatistes ukrainiens « soutenus par Moscou ». Dans le même temps, il était annoncé que le nouvel ambassadeur russe aux États-Unis, Anatoly Antonov, « devrait rester sur la liste des sanctions », selon Spoutnik. En cela, l'Europe dépasse même l'Amérique : contre Antonov, Washington n'a pas fait de restrictions, notamment puisqu’il l’a accepté comme nouvel ambassadeur de Russie.
Bref, un grand désir de guerre emporte Mutti, Macron, Boris Johnson... comme suivant un “signal convenu”. Pour vous autres, Italiens, tout va bien n’est-ce pas ?