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2086Nous nous sommes permis de beaucoup apprécier le travail de maître de Castelnau concernant “le complot de l’été” comme l’a nommé PhG, c’est-à-dire le “Benallagate” qui a diverti notre fin torride de ce mois de juillet. Cette affaire est suffisamment originale et diverse pour annoncer des jours difficiles pour le mandat impérial du président Macron et faire de la France, par ses excès et ses extravagances mieux accordés à l’air du temps (“Paris-la-folle” pour “D.C.-la-folle”), un acteur intéressant du tourbillon crisique qui agite notre étrange époque. Nous garderons donc désormais un œil sur le site de Régis de Castelnau, Vududroit.com, pour y pêcher quelque commentaire de qualité sur une situation devenue brûlante. Nous commençons dans cette voie par lui emprunter son dernier texte qui met en perspective la crise actuelle, au travers de l’élection française de 2017 ; Castelnau donne ici la nomenclature des commentaire qu’il a fait tout au long de la campagne de cette élection qui s’avère historique, au moins par les conditions où elle s’est faite.
D’une façon assez significative, nous ressentons la sensation extrêmement forte que la présidence Macron est intimement liée à la campagne qui a conduit à son élection, dans l’esprit de la chose si l’on veut en plus de l’évidence du cause à effet. Tout se passe comme si la présidence Macron était marquée par les mêmes caractères que la campagne, qui sont ceux d’un événement sans précédent (observation sans jugement de valeur), d’un événement à la puissance semblant irrésistible mais finalement artificielle, d’un événement lui-même restant inaccompli et donc fragile et vulnérable derrière son assurance trop souvent affirmée. Pour dire autrement, disons qu’il s’agit d’un événement de communication (la campagne et l’élection) qui n’a pas réussi à se transformer en un fait politique, par absence de capacité de création d’une essence propre, – ce qui conduit si souvent à jauger l’emphase du personnage, sa posture et le personnage lui-même,comme du “rien”... Peut-être pourrait-on nommer cela “illégitimité”, l’élection n’ayant pas réussi à donner sa légitimité au président malgré la posture du candidat-devenu-président à cet égard.
Ce sentiment se traduit notamment par un débat sur la souveraineté, dont Jacques Sapir donne une excellente analyse à partir des contorsions et des éclats divers du “Benallagate”, dans son texte « De quoi Macron est-il le nom ? » (2 août 2018). Les rapports du président avec la souveraineté relevant de la filiation usurpée malgré les cris d’orfraies à cet égard, de l’imposture absolument achevée là aussi dans l’esprit de la chose, c’est dans la splendeur caractéristique de l’histoire de l’Empire de Rome que Sapir va chercher ses références, pour désigner “de quel nom” Macron est l’héritier, – c’est-à-dire celui de Caligula ou bien celui de Sylla... Mais il s’agit bien d’un « lointain écho » avec les modifications de forme qui vont avec, car si Macron peut renvoyer à de tels personnages historiques c’est sans aucun doute sous une forme qui tend à la caricature (« Représentation qui, par la déformation, l'exagération de détails, tend à ridiculiser le modèle. »).
La conclusion du texte de Sapir : « La comparaison avec Caligula s’avère alors purement de forme et ainsi futile et vaine. Ce qu’il y a en Macron, et le traitement de plus en plus violents de manifestations de discordes et d’opposition en témoigne, c’est bien plus le personnage de Sylla. Et, de là peut-on comprendre sa volonté de constituer une police et une haute administration qui soit entièrement sous ses ordres, qui ne réponde plus à aucun contrôle démocratique.
» De fait, l’affaire Benalla, pour aussi scandaleuse qu’elle soit, pour aussi déplorables qu’aient été les tentatives de la part de la Présidence de la République de la masquer, ou d’en diminuer l’importance, n’est qu’un symptôme. Ce qui se révèle au travers de cette affaire et du comportement du Président est bien le projet d’Emmanuel Macron de se constituer comme pouvoir en surplomb de la société française, par le biais d’une usurpation de la souveraineté.
» Macron n’est pas le lointain écho de Caligula mais bien celui de Sylla. »
« Lointain écho » ou “domaine du ‘rien’”, – comme si Macron n’existait pas encore sinon comme président par effraction malgré le luxe des moyens et des fariboles, et était promis, à moins d’un geste de mansuétude des dieux, à ne jamais exister vraiment... Et voici le texte de Régis de Castelnau qui nous conte cette étrange ascension de l’insignifiance comploteuse, du 6 août 2018 et dont le titre complet est « Élections présidentielles 2017 : chronique d’une curée de campagne ».
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Il semble que l’affaire Benalla ait enfin brisé le charme qui s’attachait à l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron. Je dis enfin, car dès le déclenchement du « procès Fillon » c’est-à-dire du raid judiciaire organisé et lancé par le triangle Élysée/Canard enchaîné/Parquet National Financier, la volonté de fausser l’élection la plus importante de la Ve République m’avait sauté aux yeux. La participation ensuite à l’opération, du pôle d’instruction financier n’avait pu que renforcer cette conviction. J’avais d’abord pensé que l’objectif premier, surtout pour les magistrats, était de se débarrasser du candidat de la droite républicaine présenté très tôt comme un suppôt de l’extrême droite. Mais la partialité incroyableavec laquelle la procédure a été menée contre Fillon a eu sa contrepartie avec la protection judiciaire dont ont bénéficié et bénéficient toujours d’ailleurs les amis de François Hollande et d’Emmanuel Macron (qui sont souvent les mêmes). Kader Arif, Bruno Leroux, Faouzi Lamdaoui, Richard Ferrand, Muriel Pénicaud, Gérard Collomb, les organisateurs de la campagne d’Emmanuel Macron qui ont explicitement reconnula commission d’infractions pénales, et François Bayrou et le MoDem accusés des mêmes faitsque ceux reprochés au Front National, ceux-là dorment sur leurs deux oreilles. Et depuis 18 mois, l’affaire Fillon si urgente ne bouge plus du tout. C’était donc bien l’avènement de Macron qui était voulu par ceux qui se sont occupés de l’exécution de Fillon et de la protection des amis du jeune roi.
Cependant, je continue de constater qu’est encore contestée l’idée que notre pays a assisté à une forme de coup d’État. Qui combinait le soutien de l’oligarchie financière et de sa grande presse, celui d’une partie de la haute fonction publique d’État et notamment celle de Bercy, et d’une instrumentalisation de l’institution judiciaire à des fins directement politiques. L’élection d’Emmanuel Macron et d’une Assemblée nationale introuvable grâce à ces manipulations et à l’abstention massive qu’elle a provoquée, l’ont en partie délégitimée et provoqué une notable et inquiétante fragilisation des institutions. L’aversion du petit roipour les libertés publiques, son autoritarisme solitaire et son sentiment de toute-puissance nourri de celui de son impunité ne peuvent lever ces inquiétudes. Cela explique l’intensité de la réactionau spectacle donné par ce qui entoure la promotion et la protection du gorille d’Emmanuel Macron et de ses épigones.
Je remets donc à disposition de façon ordonnée chronologiquement les articles que j’avais rédigés sur ces sujets au fur et à mesure du déroulement de la campagne pour les élections présidentielles de 2017. On y trouvera beaucoup de redites évidemment, mais on me fera le crédit d’avoir pointé très tôt l’invraisemblable dysfonctionnement de la justice pénale. Aucun observateur du monde judiciaire ne peut dire de bonne foi que les procédures visant François Fillon se sont déroulées normalement. Voici donc pour les autres quelques arguments utiles. Qui peuvent bien évidemment être discutés, mais que je pense difficiles à réfuter.
27 janvier 2017. Où l’on observe ce qui arrive à François Fillon, le triste candidat que s’est donné la bourgeoisie de province lors des primaires de la droite. Il est question du missile envoyé par le Canard enchaîné et repris de façon fulgurante par le PNF. Où l’on croit encore naïvement que le Front National peut tirer les marrons du feu.
30 janvier 2017. Où l’on décrit ce qui attend François Fillon sur le plan de la procédure à partir du raid lancé par le PNF. Et l’on commence à s’interroger sur ses conséquences en regard de l’élection présidentielle.
3 février 2017 : quand on jette un coup d’œil sur l’explosion qui vient de se produire. Et qu’on est très pessimiste sur l’avenir du candidat Fillon.
6 fevrier 2017. Où l’on trouvera un premier regard sur la campagne d’Emmanuel Macron. Avec les premières questions qui s’en déduisent. Et notamment le soutien acharné des médias mainstream et des milieux de l’argent.
14 février 2017. Petite saynète publiée sur Facebook histoire de détendre l’atmosphère et de dessiner ce qui attend François Fillon : la nomination pour s’occuper de lui, du juge d’instruction Tournaire jusqu’alors spécialisé dans l’acharnement contre Nicolas Sarkozy. Et sa prochaine et rapide mis en examen avec un tel magistrat. Ce sera fait une quinzaine de jours plus tard.
19 février 2017. Où on voit que les écailles commencent à tomber des yeux et que la stratégie politico-judiciaire enclenchée contre Fillon apparaît comme vraiment destinée à tuer sa candidature. Avec maintien de l’erreur d’analyse qui consiste à penser que Marine Le Pen peut en profiter.
28 février 2017. Où l’auteur prend la mesure de l’ampleur de l’opération judiciaire visant à tuer le candidat Fillon. Par le spectacle de la multiplication des manœuvres du PNF dont on prend la mesure à ce moment-là qu’elles sont surtout destinées à favoriser Emmanuel Macron.
9 fevrier 2017. Où l’auteur à la lumière de sa connaissance de la façon dont fonctionne habituellement la justice pénale, constate le caractère concerté de l’opération lancée par le triangle Élysée/Canard enchaîné/PNF pour détruire la candidature Fillon. Et favoriser Macron.
4 mars 2017. Quand l’évidence de la manipulation en faveur de Macron saute désormais aux yeux. Et que le choix se réduit entre la peste et le choléra.
7 mars 2017. Où l’auteur constate effaré la mobilisation d’une partie de la magistrature parfois au plus haut niveau pour justifier sans barguigner le raid judiciaire destiné à assurer la présence de Macron au deuxième tour.
15 mars 2017. Où l’on s’aperçoit qu’au-delà du haut appareil judiciaire, les plus hautes autorités de contrôle de la république ont décidé d’intervenir dans l’élection présidentielle. Pour la fausser et permettre l’élection du candidat choisi par l’oligarchie financière et la caste de la haute fonction publique d’État.
22 mars 2017. Où l’auteur constate que des gens dont la mission constitutionnelle est de veiller au respect de la loi, s’acharnent de façon compulsive contre un candidat à l’élection présidentielle pour en favoriser un autre.
27 mars 2017. Dans ce chapitre, on pourra pointer la collusion de François Hollande avec l’opération anti Fillon. On pourra également constater les contorsions des journalistes du Canard enchaîné, plus soucieux de créer les conditions de l’élection de Macron que de déontologie professionnelle.
28 mars 2017. Où il apparaît que les journalistes du Canard enchaîné ne sont pas les seuls à vouloir détruire la candidature de Fillon en favorisant celle de Macron. Le service public radiotélévisé ne se gênant pas pour violer son obligation de neutralité.
19 avril 2017. Où l’auteur constate que la tragédie est consommée. Que le candidat qui sera élu le 7 mai ne disposera pas de la légitimité républicaine indispensable.
2 mai 2017. Où l’on constate que la stratégie électorale des castors est grosse de dangers. Et que le mieux est de ne pas céder au chantage, l’élection d’Emmanuel Macron ne reposant que sur un dévoiement des institutions républicaines.
12 mai 2017. Où l’auteur au travers d’un petit bilan de ce qui vient de se produire entrevoit les difficultés auxquelles le pays va se trouver confronté avec une élection présidentielle faussée. Qui a porté au pouvoir un inconnu inquiétant, et vu le dévoiement des institutions républicaines.
Le temps est passé, et Emmanuel Macron a pu continuer à faire un peu illusion. Désormais, et les études d’opinion le montrent son socle de confiance ne va pas au-delà de celui dont il a bénéficié pour le premier tour, et encore… Dans la bataille politique qui va désormais se dérouler sur des bases différentes et dont personne ne peut connaître l’issue, il est possible que ce déficit de légitimité initiale constitue un handicap sérieux.
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