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245515 janvier 2016 – Nous avions choisi d’abord le titre de “Notes sur la dissolution du pouvoir (suite)” avant d’opter, toutes réflexions faites et texte déjà avancé, – on le verra et on le vérifiera plus loin, – pour celui qu’on lit en tête de ce texte.
... Il est donc tout de même question de “dissolution du pouvoir”. Par ailleurs, ce n’est certes pas la première fois que nous en parlons (voir, le 14 juin 2010, les « Notes sur la dissolution du pouvoir [dde.crisis] ») ; c’est qu’il s’agit d’un processus évolutif, qui mérite de nouveaux constats et de nouvelles analyses à chaque étape où le processus semble avoir, à notre estime, avancé de manière significative. C’est le cas avec la présente analyse, qui prend pour référence essentielle le pouvoir du système de l’américanisme, au moment de l’entame de la campagne pour les présidentielles de 2016.
Le dernier article consacré à ce sujet est du 14 janvier et concerne Hillary Clinton, l’hyper-favorite pour 2016 après l’avoir été pour 2008, et dont il est désormais manifeste qu’elle a du plomb dans l’aile. Cela nous conduit à faire une analogie entre le parcours d’Hillary Clinton, qui semblait promise à tous les honneurs, qui en a déjà eu déjà quelques-uns aussitôt entachés des soupçons les plus honteux, et qui se trouve présentement devant la possibilité d’une embardée décisive dans sa carrière ; le résultat pourrait constituer l’archétype d’une très-grande carrière politique piteusement et honteusement ratée, en même temps qu’un signe puissant et convaincant de l’état de dissolution avancée, jusqu’au coma chronique sinon jusqu’à l’agonie, du pouvoir du système de l’américanisme. (Extrait de notre texte du 14 janvier.)
« Hillary Clinton devient ainsi à la fois un symbole et un symptôme d’une évolution importante, et cela assez marquant lorsqu’on compare 2016 à 2008. L’attitude anti-establishment n’est pas nouvelle mais elle se nourrit désormais, à la fois d’un sentiment populaire plus actif, à la fois de circonstances de plus en plus chaotiques au niveau de l’establishment, à la fois de la perte de repaires (des bornes, si l’on veut) de la part des membres de l’establishment dans l’exercice de leurs privilèges. Ainsi Clinton deviendrait-elle, par sa carrière, une parabole illustrant l’évolution du pouvoir à Washington durant ces dix dernières années. Du fait de sa situation et de son évolution, ce pouvoir a perdu complètement, jusqu’à l’inversion complète désormais, les capacités d’impunité et de puissance par rapport au public qu’il conservait encore jusqu’ici malgré une réduction régulière depuis plusieurs décennies. »
La situation washingtonienne, considérée aujourd’hui dans une perspective chronologique significative, présente un caractère extraordinaire qui n’est nulle part mis en évidence. Il est vrai que le silence est devenu, depuis quelque un ou deux ans, l’arme favorite du commentaire-Système devant la multitude grandissante d’évènements à caractère potentiellement ou explicitement antiSystème, et pour lesquels le Système n’a pas d’explications rassurantes disponibles.
Le caractère extraordinaire dont nous parlons est le basculement qui s’est opéré entre le printemps 2015 et le début de l’hiver 2015, concernant le processus préparant les primaires des présidentielles de 2016 aux USA, suivies de la phase finale jusqu’en novembre. Au début 2015, jusqu’à la fin du printemps, la situation constituait un cas classique d’hyper-verrouillage du processus électoral jusqu’en novembre 2016 : une super-candidate, considérée comme désignée (démocrate) sinon élue d’avance, comblée de donations financières de toutes les forces d’argent sur le marché et avec les “valeurs” requises (sexe féminin, carrière-Système sans accroc, institutionnalisation confirmée, opinion générale de type-neocon) ; une confusion de bon aloi chez les républicains, à première vue entre des candidats probables conformes aux vœux de Système, avec comme favori implicite un Jeb Bush qui avait la vertu inoxydable d’un nom archi-connu et archi-conforme dans le sens le plus catastrophique possible. Il s’agissait, à perte de vue, des présidentielles les plus homogénéisées (sanitized) depuis longtemps. En temps d’hypercrise et du point de vue du Système, cela était la sagesse même...
Huit-neuf mois plus tard, on connaît la situation : les deux branches du “Parti unique” en complet désarroi, l’une avec un favori complètement out of the blue, incontrôlable, venu de l’extérieur du monde politique et décidé à secouer ce monde politique comme un prunier ; l’autre avec sa super-favorite entrée dans un processus de déstabilisation agissant comme un tourbillon sans fin et sans fond, laissant le parti démocrate avec la perspective désormais de la possibilité d’un candidat absolument improbable du point de vue du Système, qui ose s’enorgueillir de l’étiquette de “socialiste”.
Le plus étonnant est qu’au silence des commentateurs s’est ajouté le désordre des actes nécessaires des tâcherons du Système pour tenter de remettre de l’ordre. Pour prendre l’exemple le plus pressant et le plus spectaculaire parmi les deux situations embrouillées que nous décrivons, nous noterons qu’il y a bien eu jusqu’ici quelques déclarations semi-officielles menaçant Trump de foudres épouvantables, jusqu'à certaines hypothèses d'élmimination comme au bon vieux temps des cow-boys et de John Kennedy mais il semble bien que rien de décisif n’ait pu être monté, ni même déterminé contre lui. Peu à peu se répand le sentiment de l’inéluctable, savoir qu’il faudra traiter Trump comme un autre, et le laisser évoluer à sa guise au sein du parti républicain.
Le rédacteur en chef du Washington Times, Wesley Pruden, écrivait donc il y a trois jours, le 12 janvier 2016, que l’on commence effectivement à s’y faire : « Les élites républicaines qui, il y a encore quelques semaines, jouaient au jeu du “Qui pourrait nous débarrasser de ce type ?” pour trouver le moyen d’être quitte de Donald Trump au meilleur prix, abandonnent la partie l’un après l’autre. Plus personne ne jure désormais de se retirer à Tombouctou si The Donald est le candidat désigné... »
Dans ce même éditorial Pruden mentionne les derniers développements politiques du côté démocrate, pour constater là aussi l’installation d’un vaste désordre. Pruden écrit sur un mode sarcastique qui montre que ce républicain pur jus, de plus en plus désenchanté et de plus en excédé par ce désordre-Système, n’a plus aucun goût de séparer l’un de l’autre, le camp républicain du camp démocrate devenus dans son jugement deux facteurs équivalents de désordre et de confusion. (« Hillary est prise entre Bernie Sanders et le sheriff [le FBI], avec les chiffres de sa position dans la course présidentielle en chute libre, avec un nouvel épisode de ce jeu stupide au moins une fois par semaine, et une panique en constante augmentation dans son royaume du féminisme. Tout ce qui lui reste est son charme personnel et son pouvoir d’enchanteresse. Elle ne parvient pas à se décider de quoi elle a plus à craindre, du prochain meeting de Sanders dans l’Iowa ou d’un entretien serré auquel la convierait le FBI. »)
Le sarcasme de Pruden est certes une excellente indication du climat et du jugement des rares commentateurs parlant ouvertement bien qu’ils fassent tout de même partie du Système, devant cet extraordinaire désordre qui continue à se développer dans les deux camps alors que commencent les primaires, c’est-à-dire le moment où il est impératif que chaque camp regroupe ses forces dans l’ordre le plus strict pour faire aller le processus de la façon la plus ordonnée et la plus contrôlée possible. Jamais, jamais, on n’a assisté à un tel spectacle à ce stade du processus ; « But this is a campaign like no other... » conclut Pruden, après avoir cité l’un ou l’autre cas de conventions bloquées devenues surréalistes (comme celle des démocrates de 1924 où il fallut descendre au scrutins individuels dans les délégations, qui dura trois semaines [au lieu de 3 jours] et nécessita 103 votes pour se terminer dans un hôtel minable, budget dépassé, par une nomination au petit bonheur contre le républicain Coolidge qui l’emporta) : « Mais c’est une campagne qui ne ressemble à aucune autre et si elle conduit à une course finale entre une escroc et un clown, une des deux ou les deux conventions de nomination plongées dans le désordre seraient un prélude parfait à cet événement... »
D’une certaine façon, on pourrait juger que l’incapacité d’instaurer un peu d’ordre d’un côté comme de l’autre, de stabiliser les candidatures et de les ranger dans le flux des primaires symbolise bien l’absence de réaction du Système devant cette situation si dangereuse. Mais ce silence n’est autre que celui du créateur, plein d’incompréhension devant les à-coups spasmodiques et insensés de la machine qu’il a lui-même créée : le processus de sélection par les primaires doit constituer aux USA le meilleur régulateur, la meilleure machine à blanchir pour éliminer les candidats antiSystème et d’une façon générale écarter la possibilité de développement de situations antiSystème. Au contraire, c’est exactement ce qu’il produit aujourd’hui, la prolifération de situations antiSystème.
Le système des primaires, adopté bien entendu dans une France éperdue d’américanisme particulièrement à ce moment où le Titanic entame son ultime plongée, produit également des situations antiSystème en exposant les tensions internes au deux partis-Système (les deux ailes du “Parti unique”) qui l’utilisent, mettant plus en évidence la version française de la crise politique générale que n’aidant à la résoudre. Dans ce cas, cette technique sert à exacerber la situation politique avant même de parvenir à l’élection présidentielle, essentiellement au sein des partis-Système qui auraient besoin d’unité mobilisatrice pour préparer les échéances électorales. Pour le cas français, on ajoutera qu’il nous paraît évident que les élections US, avec tous leurs aspects inattendus, joueront un rôle d’influence important sur l’évolution de la campagne vers 2017, avec l’exemple d’un système (celui de l’américanisme) qui perd tout sens de l’ordre et du rangement selon les consignes du Système.
D’autres pays, qui n’utilisent pas cette technique, notamment parce qu’ils n’ont pas de régime présidentiel, évoluent selon des processus plus simples vers des situations où des partis “douteux” mais jusqu’alors utilisés par le Système, se révèlent finalement avec une tendance antiSystème dominante. C’est le cas du PiS en Pologne, qui a d’abord joué un rôle utile au Système dans les années 2000, dans les occasions où il s’est rapproché du pouvoir, et aussi durant la crise ukrainienne où il a suivi clairement une russophobie qui convenait parfaitement au Système. Entre mai et octobre 2015, sa situation s’est brusquement inversée et il est devenu un parti dont le résultat de l’action est clairement antiSystème.
Il existe un autre facteur, moins connu et qui ne dispose de guère de publicité, qui se manifeste notamment au sein de la puissante bureaucratie de l’UE. Il s’agit d’une augmentation remarquable du nombre de cas de fonctionnaires, dont certains occupant des postes de hautes directions, notamment dans les services chargés d’élaborer des politiques dans les grands domaines des relations extérieures, qui interviennent de moins en moins sinon plus du tout dans le travail général. Il s’agit en général d’une évolution bureaucratique absolument négative portant sur le travail qui leur est demandé, évolution qui peut être effectivement être interprété d’un point de vue bureaucratique mais qui, dans la situation générale présente, doit aussi être interprétée politiquement. Cette évolution a lors la signification extrêmement politique en même temps que psychologique de l’expression d’un profond malaise avec le sentiment que cette réaction bureaucratique a indirectement une réelle dimension de censure pour ceux qui la subissent.
Ce malaise reflète d’une part l’impuissance grandissante des politiques de l’UE, d’autre par l’extrême défiance et le soupçon grandissant portés contre tout manquement à la “ligne” rigide de l’UE. Il s’agit, dans le chef de la mécanique bureaucratique, et sans que la moindre consigne à cet égard soit donnée, de prévenir toute potentialité de manquement (prévention du délit avant le délit lui-même) conduisant à écarter du travail courant des personnalités et des fonctionnaires qui pourraient, – peut-être, qui sait, on ne sait jamais, – montrer quelques velléités de jugement indépendant. Il faut insister sur le caractère quasiment automatique du processus et noter que, d’une manière générale, l’UE s’enferme ainsi dans des politiques de plus en plus réduites à l'ombre d'elles-mêmes, de plus en plus “selon la ligne” elle-même réduite à la caricature d'elle-même, de moins en moins capables d’initiatives, d’adaptation, voire de la simple respiration de la survie... Ainsi caractérisées par ces rigidités extrêmes et censureuses, ces “politiques-zombies” font ressembler ces conglomérats bureaucratiques qui les produisent à des systèmes de type soviétique, essentiellement de la période Brejnev, surtout sur la fin avec Brejnev absolument gâteux, en état de paralysie et de décomposition complètes.
Pour nous, il y a un lien dans cette évolution dans différents pays, même si la situation aux USA est aujourd’hui la plus significative et la plus remarquable. Il faut d’abord noter l’importance de cette position de leadership des USA, – une fois de plus à la satisfaction du président Obama sans doute, – à cause de l’importance des présidentielles US comme évènement dans le système de la communication, de leur proximité, de leur caractère dynamique auquel on s’est accoutumé comme d’une démonstration d’une démocratie “vibrante” dans la narrative convenable, et par conséquent de l’effet l’influence et d’entraînement qu’elles suscitent.
D’un point de vue symbolique également, l’événement est d’une extrême importance dans la mesure où il met en évidence combien le système d’accession au pouvoir le plus strictement contrôlé, le plus gendarmé par le Parti unique, se trouve aujourd’hui pris en défaut d’une façon extrêmement inquiétante pour lui. Il ne s’agit en aucun cas d’un accident ou d’une exception; ce qui est mis en cause, c’est la qualité qu’on pourrait dire équivalente à celle de quasi-zombies des sapiens-Système de la direction politique aux USA, “zombie” dans le sens où une part très importante d’eux-mêmes est complètement morte puisque totalement annexées par le Système producteur d’entropisation mortifère.
Cette situation explique en bonne partie les deux aventures en cours. Dans le cas de Trump, cette situation individuelle de “zombie” affecte ses concurrents et les empêche de lui opposer une défense sérieuse alors qu’ils (le Système) n’auraient du en faire qu’une bouchée lorsqu’il n’était qu’un “clown” au début de son aventure ; dans certains cas même, cette situation conduit certains d’entre eux à se rapprocher du “modèle Trump” en le singeant, comme c’est le cas du sénateur Cruz, qui s’est imposé comme deuxième candidat sérieux à la nomination derrière Trump. C’est cette même condition de “zombie” qui ôte chez Hillary Clinton tout sens de la mesure disons civique, – le mot est surréaliste dans son emploi à son propos, – et l’a conduit à une corruption totale, vénale et psychologique, extrêmement dangereuse comme on le voit aujourd’hui. Ce cas-là est remarquable dans le sens de l’inversion et transforme rapidement Clinton en une sorte de “perdante” chronique (2016 après 2008 ?) : ses remarquables états de service qui devraient en faire une candidate-Système idéale la transforment en son inverse ; son expérience de secrétaire d’État devient une sorte de rappel lancinant de sa condition de corrompue, une énorme casserole affreusement bruyante et qui ne cesse de la couler aux yeux des électeurs.
Quoi qu’il en soit, il devient extrêmement difficile, sinon impossible d’envisager une option pour le cours des présidentielles-2016 aux USA qui ne soit pas profondément déstabilisante et n’entraîne pas des remous très dangereux pour le Système, aussi bien pendant la campagne que pour son terme, voire pour l’installation de la nouvelle administration. Ces remous peuvent aussi bien dépasser le seul cadre du monde politique et affecter la population elle-même avec la formation d’initiatives de sédition. Il s’agit de la conséquence de la perception d’un système de l’américanisme qui apparaît incroyablement fragile et vulnérable, et en complet état de confusion. La complète absence d’Obama réfugié dans sa “bulle aux narrative impénétrable”, confirmée par son discours sur l’état de l’Union (“Obama in Wonderland”), complète le tableau d’une situation d’irréalité prodigieuse, d’une situation de complet flottement dans un vague insaisissable, complètement instructurée, incapable d’opposer la moindre résistance à un événement inattendu ou l’autre qui aurait une certaine substance.
Il est enfin très difficile, sinon impossible d’envisager que cette élection US, dans le climat qu’on décrit, ne contribue pas d’une façon massive à une fragilisation générale de tous les pouvoirs-Système en place au sein des pays du bloc-BAO. L’influence des USA est un fait essentiel du Système, mais elle s’avère encore plus puissante lorsqu’il s’agit de l’effondrement et d’entraîner vers les abysses ceux qui y sont soumis.
Le thème principal de notre époque est bien, comme une des principales opérationnalisations de l’effondrement du Système, que l’affaiblissement dramatique des grands points de référence du Système ne fait pas naître des forces nouvelles par contraste, mais au contraire généralise cette affaiblissement dans les autres centres de force/de pouvoir. Cette logique est bien entendu propre au Système essentiellement et affecte en priorité tout ce qui fait partie du bloc-BAO.
La même logique vaut pour les différentes sortes de pouvoir qu’on affectionne de distinguer en croyant à leur spécificité sinon à leur concurrence. On ne passe pas, – par exemple, mais exemple favori du la narrative antiSystème, – de l’affaiblissement du pouvoir politique au surgissement du pouvoir économico-financier, ou du Corporate Power si l’on veut, avec tous ses cénacles de “tireurs de ficelles”, parce qu’il y a longtemps que les deux sont intimement fusionnés et que les qualificatifs “politique” “économico-financier” n’ont plus aucune vérité spécifique. L’affaiblissement vertigineux du pouvoir politique entraîne dans sa chute qui n’est d’ailleurs pas spécifique un pseudo-pouvoir hyperpuissant mais sans aucune structure capable d’imposer ses propres options qu’est le pouvoir économico-financier, ou Corporate Power.
L’affaiblissement littéralement par dissolution du pouvoir aux USA est, dans ce cadre général, un moteur très puissant de la situation générale, et notamment de la situation des pouvoirs d’une façon générale. Il s’en déduit une conséquence remarquable : alors que tous les pouvoirs, et notamment dans le bloc-BAO, s’arment, sous prétexte de terrorisme mais aussi de “dissidence”, de législation d’exception et lancent des actions dans ce sens, suscitant des prospectives de dictature en allant jusqu’aux stéréotypes du passé (fascisme & Cie), les acteurs du pouvoir deviennent de plus en plus faibles et inconsistants, sinon si inexistants qu’on finit par les définir avec la plus grande facilité du monde comme des “zombies”. Lorsque la Commission européenne envisage des sanctions contre la Pologne, c’est d’abord parce qu’elle y est contrainte par ses propres règlements ; que certains s’en réjouissent, certes, mais que d’autres y voient là une véritable dictature, agissant comme telle en toute conscience, certainement pas sinon au contraire ; le Collège des Commissaires est aussi et plus que jamais une assemblée de zombies transportés dans leurs luxueuses 4x4 aux vitres scrupuleusement teintées de noir, comme s’il était des messagers du Diable, – sauf que le Diable commence à se demander ce que valent ces messagers-là....
Il est difficile jusqu’à l’absurde d’accepter le concept grotesque d’un zombie devenant un dictateur, avec tout ce que le concept de “dictateur” suppose de fermeté, de capacité de contrôle, de maîtrise, de capacité centralisatrice, etc. La dictature c’est le contraire du désordre du pouvoir ; et ce que nous offre les perspectives actuelle c’est un pouvoir en cours de dissolution complète et s’abimant dans le désordre complet. En cela, notre situation est réellement exceptionnelle, avec tant de puissance inutile rassemblée pour ne produire que du désordre et sa propre dissolution...
Dominant ce spectacle unique du désordre devenant presque, par effraction et pour le temps d'une escapade, d’une substance métaphysique, donc gagnant sa place dans la dimension métahistorique de la séquence, dominant tout cela il y a le silence du Système. Nous voulons dire par là que n’existe plus guère cette inspiration (maléfique certes, mais inspiration quand même), cet élan subversif qui, pendant des années, a entretenu la surpuissance du zèle et de l’autosuffisance conceptuelle des acteurs et des serviteurs du Système. Ce n’est pas pour rien que nous sommes conduits de plus en plus à les identifier et à les définir comme des zombies et à les situer sans aucun doute dans la logique de la grande Crise d’effondrement, comme acteurs à la fois symboliques et significatifs.
Le silence du Système, c’est un peu comme s’ils (les devenus-zombies) avaient perdu leur Dieu-le-Père, et c’est même beaucoup cela jusqu’à rencontrer l’évidence. Plus rien ne semble devoir les obliger à quoi que ce soit. Le brutal silence du Système a ouvert les vannes à leur dissolution, à commencer par la dissolution du pouvoir-Système. Certes, l’événement (la dissolution) ne fait pas grand’bruit et l’on sent bien que nombre d’antiSystème, y compris dans le chef de lecteurs de dedefensa.org, préféreraient d’autres évènements, plus spectaculaires, plus bruyants, où l’esprit peut se livrer à des analyses savantes qui le laissent patois d’admiration pour lui-même. Ce n’est pas le cas, à notre sens. L’effondrement, le seul évènement à peser de tout son poids, à contenir toute la signification catastrophique de cette époque, se déroule de cette façon subreptice, insipide, mais fondamentale et décisive de la dissolution... Et c’est bien dans ce cadre que le Système est devenu silencieux parce qu’il se tait, irrité à un degré qu’on ne peut imaginer.
Il faut dire, pour tout dire... La ridicule-grotesquerie d’un président-poire à l’allure de notaire allant saluer solennellement la commémoration d’un événement historique sans précédent (l’assassinat de moins de 10 personnes en janvier 2015 suivis par un immense manifestation pour la liberté d’esprit mené par une kyrielle de dictateurs et ponctué de mesures contre la liberté d’expression et ainsi de suite), cette ridicule-grotesquerie-là est dévastatrice pour le Système lui-même. En vérité, s’il se tait (“Le silence du Système”), c’est qu’il commence à en avoir marre, des zombies...
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