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263618 avril 2016 – Les crises se déclarant et se déroulant jusqu’à la plus soudaine maturité à la vitesse de l’éclair, il est difficile à la fois de les percevoir, de les identifier, d’en saisir l’importance, de les déclarer “crises” et de commence à en supputer les conséquences. Le Ciel va très vite, à son rythme, et il faut pouvoir suivre... Celle (la crise) des “28-pages”, comme nous la surnommons depuis octobre 2014 (en fait, tiret ajouté le 4 juin 2015), n’en était pas vraiment une, même dans nos esprits sagaces à l’affut du moindre signe crisique, jusqu’à cette émission de CBS, 60 Minutes, il y a une semaine. Et puis... Boum ! Soudain, “28-pages” devient une crise.
De l’aveu même de ZeroHedge.com, la chose a effectivement éclaté comme un “coup de tonnerre dans un ciel bleu” (“out of the blue”), – bien qu’on puisse douter du bleu de ce ciel, déjà encombré d’éclairs crisiques de toutes sortes. Bref, une crise de plus, “venue de nulle part” (quoique...) ; mais, dans ce cas ZeroHedge.com rend bien compte du sentiment général, ne cherchant pas une seconde à dissimuler la surprise qui frappe et la dimension soudain considérable du fait avec la mise en cause de l’Arabie dans 9/11 et la mise en péril des liens entre les USA et l’Arabie (l’utilisation du caractère en gras dans la citation est de notre fait) :
« First, a quick tangent: we have been greatly surprised by the reemergence of the topic of September 11 in recent weeks, and specifically the taboo – in official circles – issue whether there was a “Saudi connection” in the biggest terrorist attack on US soil. Just last weekend, out of the blue, 60 Minutes held segment on the “28 pages” that were classified in the Congressional investigative report into 9/11 – pages that allegedly confirm the Saudi connection. »
Ce qui fait l’importance soudaine des 28-pages jusqu’à la transmutation de l'affaire en “crise-28-pages”, c’est l’annonce d’une menace de l’Arabie du retrait de ses avoirs en bons du trésor US, estimés à $750 milliards, pour ne pas avoir à risquer un éventuel gel de ses avoirs, sinon une saisie. Deux logiques, l’une juridique et l’autre législative, sont cernées et assemblées dans ce cas : celle des moyens (JASTA) et celle du fond (28-pages) qui a besoin de ces moyens pour s’exprimer.
• Le vote possible par le Congrès de la loi dite JASTA (Justice Against Sponsors of Terrorism Act) qui rend comptable devant la justice des États-Unis un gouvernement étranger reconnu coupable de soutenir des actes de terrorisme des organisations djihadistes en action auourd’hui (type-Daesh), et notamment à partir de la saisi de ses avoirs aux États-Unis. JASTA doit être considérée, du point de vue des Saoudiens, directement en rapport avec la possibilité de la déclassification des 28 pages du rapport du gouvernement concernant l’attaque 9/11. Les Saoudiens font tout pour empêcherr ce vote, Obama, sympathique président révolutionnaire, leur donnera certainement un coup de main.
• Bien entendu, la publication en sources ouvertes des 28-pages permettrait à divers particuliers et associations de porter plainte contre l’Arabie et d’obtenir gain de cause. Une précision très-importante à ce propos est celle de l’ancien ministre de la Marine, John Lehman, qui fut président de la commission d’enquête spéciale sur l’attaque du 11 septembre, et qui a lu les 28-pages en raison de sa position officielle. Interrogé lors de l’émission 60 Minutes sur le fait de savoir si ces 28-pages permettaient d’identifier par leurs noms des responsables saoudiens, il répondit « Oui ! Un auditeur moyen de 60 Minutes les reconnaîtrait instantanément... » (« [Former Senator] Graham’s reference to the “highest levels” of the Saudi government is reminiscent of a statement former Navy secretary and 9/11 Commission member John Lehman made to 60 Minutes on Sunday. Asked if the 28 classified pages names names, he replied, “Yes. The average intelligent watcher of 60 Minutes would recognize them instantly.” »)
Le site 28Pages.org, dont on sait le rôle central qu’il joue dans le processus vers la déclassification des 28-pages, explique ainsi le mécanisme qui a poussé les Saoudiens à évoquer cette menace de retrait des avoirs saoudiens, notamment devant des parlementaires autant que pour des officiels du gouvernement US. Il semble que ces menaces aient été formulées le mois dernier, alors que la législation JASTA progressait au Congrès
« Saudi Arabia has warned the Obama administration and federal legislators that it will sell off U.S. Treasury debt worth $750 billion if Congress passes a law clearing the way for 9/11 victims to sue the kingdom for its alleged role in aiding the hijackers. according to a story in today’s New York Times. Appearing on Michael Smerconish’s CNN program Saturday morning, former Senator Bob Graham, a leading advocate of declassifying 28 pages that allegedly implicate Saudi Arabia in the attacks, said, “I’m outraged but not surprised.” According to the Times report, the kingdom’s caution was personally delivered last month by Saudi foreign minister Adel al-Jubeir, who reportedly told legislators that, if the bill passes, Saudi Arabia would sell up to $750 billion in Treasury debt before it could be potentially frozen by U.S. courts.
» Though presented as a necessity for Saudi Arabia’s own financial protection, Saudi Arabia’s cautionary statement is de facto economic threat against the United States. A sell-off would prompt an increase in U.S. Treasury interest rates, raising borrowing costs for the American government, businesses and consumers and potentially triggering an economic downturn that extends beyond our own shores. The Saudi warning was triggered by the legislative progress of the Justice Against Sponsors of Terrorism Act (JASTA), which would amend the Foreign Sovereign Immunities Act (FSIA). Last fall, Saudi Arabia was dropped from a lawsuit filed by 9/11 families, victims and insurers after a federal judge said the plaintiffs had failed to meet the high jurisdictional hurdles that FSIA imposes for claims against foreign governments. »
Ainsi découvre-t-on que la situation générale a évolué d’une façon inattendue, hors de tout contrôle sérieux, vers un point polémique où des hypothèses explosives d’un point de vue financier rencontrent des hypothèses explosives d’un point de vue politique, le tout sur le fond de ce qui fut considéré si longtemps par la plupart des commentateurs-Système, comme une narrative obsessionnelle de la part du “parti des complotistes”, des plus sérieux aux plus fantaisistes. Les “hypothèses explosives d’un point de vue financier” concernent les avoirs saoudiens aux USA à la lumière de relations de plus en plus tendues ; les “ hypothèses explosives d’un point de vue politique” concernent de leur côté le rôle joué par l’Arabie Saoudite dans l’attaque du 11 septembre 2001.
C’est ce que ZeroHedge.com résume ainsi, à propos d’une supputation qu’il explorait au mois de janvier, envisageant le cas de la décision saoudienne de retrait de ses avoirs des USA, comme riposte saoudienne au pseudo-rapprochement entre les USA et l’Iran. Dans cette description, on distingue le rôle important de l’enchaînement inattendu, alors qu’à cette époque les épisodes des relations entre les USA et l’Arabie, de la législation JASTA et des pressions pour la déclassification des 28-pages suivaient chacun une voie différente, répondant à des logiques différentes et pour des buts différents... C’est manifestement le choc de communication qu’a constitué l’émission de la CBS sur les 28-pages et le brouhaha qui accompagne la chose qui ont constitué la dynamique d’intégration de ces divers évènements... (« We have been greatly surprised by the reemergence of the topic of September 11 in recent weeks, and specifically the taboo [...] Just last weekend, out of the blue, 60 Minutes held segment on the “28 pages”... ») L’ensemble contribue à placer le gouvernement US, – celui d’aujourd’hui comme celui de demain, – devant la véritable nature de la question des relations entre les USA et l’Arabie.
« We closed with a simple, if suddenly very prophetic question: “who would be the new patron saint of the US Treasury Department in the event the Saudis drawdown all of their reserves and decide to diversify away from USD assets... Put differently, who will monetize the US deficit if relations between Washington and Riyadh hit the skids over Iran?”
» It is this question that has suddenly reemerged with a bang, and could rock the US administration to its core as what until recently was a “fringe conspiracy theory” is suddenly exposed as an all too unpleasant fact, and becomes the biggest political scandal to rock the U.S. in years, in the process maybe even crushing the friendly diplomatic relations the U.S. has held for years with its biggest Mid-East ally, Saudi Arabia. »
Dans un texte du Washingtonblog.com, l’historien et commentateur Eric Zuesse développe cette affaire du point de vue des Saoudiens, sinon des membres de la famille royale, des kyrielle de princes divers, des fortunes sans nombre du royaume, plus ou moins impliqués dans des donations faites aux mouvements terroristes et qui se trouveraient dans le cas de possibles inculpations d’eux-mêmes, ou de saisies de leurs avoirs aux USA, notamment à cause de la loi JASTA. Zuesse fait une description qui ressemble alors à une opération de chantage comme il en existe entre bandes rivales, ce que résume bien le titre de son article du 17 avril (« Saudi King & Princes Blackmail U.S. Government »)
Il s’agit bien d’une affaire qui, à côté de ses implications politiques et stratégiques, implique directement des individus et leur sécurité, y compris des individus passibles d’emprisonnements, c’est-à-dire de dommages personnels, malgré leurs fortunes et leurs hautes fonctions. Il s’agit donc d’une logique qui rejoint celle des gangs où les affrontements finaux, lorsque des questions d’intérêts antagonistes ne peuvent être résolues, sont résolues effectivement par des actes personnels et physiques, en général d’élimination physique. Dans le cas qui nous occupe, l’on parle moins de cette possibilité de l’élimination physique parce que les différents joueurs de cette partie sont dans des systèmes de sécurité et de protection barbouillés d’une légalité et d’une légitimité totalement faussaires, et se trouvent en partie protégés par des narrative qui mettent en avant quelques principes de pseudo-civilisation s’interdisant les uns les autres et les uns contre les autres la pratique de l’élimination physique sauf dans des cas exceptionnels et urgents.
(Si l’on veut, les directions–Système impliquées dans ce cas USA-Arabie ont la même position du type-“gang politique” que celle qui se développa en 1953-1956 dans la direction soviétique, après la mort de Staline, lequel avait terrorisé depuis la fin des années 1920, après l’élimination de Trotski forcé à l’exil, son entourage et ses subordonnés directs par ses méthodes de terreur policière et d’élimination physique. Un accord fut conclu à partir de la mort de Staline entre les membres de la direction soviétique selon lequel les dirigeants mis en minorité ou battus, ou écartés du pouvoir par un changement d’équilibre ou un coup de force bureaucratique, ne seraient plus éliminés mais simplement “mis à la retraite”. Krouchtchev, en 1964, “bénéficia” de ce modus vivendi plus confortable. A l’issue du putsch interne qui eut raison de lui, il cessa simplement toute activité politique et se retira dans un appareil de retraite acceptable pour un ancien dirigeant ; du temps de Staline, il aurait été physiquement liquidé : on n'arrête pas le progrès humaniste.)
D’une façon très spécifique, Zuesse explique ainsi ce qui implique actuellement les Saoudiens et les dirigeants-Système du gouvernement US ; et sa dernière phrase (soulignée de gras par nous) est extrêmement significative par le fait de parler de “possession du gouvernement saoudien” par la “famille Saoud” comme l’on parle de “familles” dans la Mafia, et cette remarque pouvant être aussi justes pour le gouvernement US, les “familles“ républicaine et démocrate, ou bien la “famille Clinton” et la “famille Bush”, etc., qui s’estime “possédantes” du gouvernement US (cela expliquant la panique devant l’entrée dans le jeu électoral de candidats qui ne font pas partie de “la famille”, Sanders et Trump)... Tout cela et perçu dans ce qui apparaît être sa vérité-de-situation, à un point où l’on en vient à concevoir que, d’une certaine façon, tous ces gens, Saoudiens et US pour ce cas, sont d’un même ensemble, d’un même esprit, des mêmes mœurs malgré les différences, – bref, qu’il s’agit, finalement, de la même contre-civilisation, quelles que soient leurs chapelles et leurs idoles, c’est-à-dire de la même “famille”... (Prince Bandar, dont on connaît le zèle activiste et corrupteur, était in illo tempore considéré quasiment comme un membre de la “famille Bush”, et traité comme tel.)
« The report of the threat by the Saud family comes in veiled form in an April 15th news-story in The New York Times, headlined, “Saudi Arabia Warns of Economic Fallout if Congress Passes 9/11 Bill.” It says that the Saud family’s Foreign Minister is “telling [U.S.] lawmakers that Saudi Arabia would be forced to sell up to $750 billion in [U.S.] treasury securities and other assets in the United States before they could be in danger of being frozen by American courts.” The NYT says that this threat is nothing to take seriously, “But the threat is another sign of the escalating tensions between Saudi Arabia and the United States.” While the carrying-out of this threat would be extremely damaging to the Saud family, the NYT ignores the size of the threat to the Sauds if their 9/11 immunity were removed — which could be far bigger. Consequently, this matter is actually quite a bit more than just “another sign of the escalating tensions between Saudi Arabia and the United States.”
» Russian Television is more direct here: “Saudi Arabia appears to be blackmailing the US, saying it would sell off American assets worth a 12-digit figure sum in dollars if Congress passes a bill allowing the Saudi Government to be held responsible for the 9/11 terrorist attacks.” (The Saudi Government is owned by the Saud family; so, even that statement is actually a veiled way of referring to the possibility that members of the royal Saud family [...] could be held responsible for 9/11.) »
En un sens, on pourrait observer que ces pratiques sont courantes, surtout depuis les années 1980 et la chute de l’Union Soviétique, et passent en général inaperçues, et qu’il s’agit effectivement d’une sorte du même gouvernement commun des “copains et des coquins”, et que ces “copains et coquins” assurent, selon les mêmes rites, la gouvernance mondiale” que nous craignons tant de voir s’installer, – et qui est déjà là et bien là, et depuis pas mal de temps.
... Puisqu’il s’agit de l’Arabie, on peut aussi bien rappeler, et d’une façon enrichissante au moins pour la mémoire et l’esprit, la situation de l’establishment britannique par rapport à l’Arabie Saoudite, via l’argent de la corruption des contrats Yamamah (“vente” d'avions de combat Tornado et Typhoon à l'Arabie), c’est-à-dire via l’énorme conglomérat BAE Systems. Cela conduisit le Guardian à écrire le 15 décembre 2005, lors d’un épisode paroxystique de la corruption saoudienne de l’establishment britannique, marqué par une enquête (rapidement étouffée) du service officiel des fraudes sur les conditions de cette corruption saoudienne au Royaume-Uni, selon une citation où BAE Systems apparaît alors comme un faux-nez de l’Arabie et rien d’autre : « Cela fait deux décennies que Margaret Thatcher a signé le premier des énormes contrats Al-Yamamah avec l’Arabie Saoudite, et depuis les ventes d’armes ont été la principale activité des relations des Britanniques avec les Saoudiens. La mainmise de BAE Systems sur le sommet de l’establishment britannique est extraordinaire. »
On peut observer également que la puissance anglo-saxonne, – justement au travers de ces liens incestueux qui concernent les USA et le Royaume-Uni d’une part, l’Arabie d’autre part, par le biais des affaires 9/11 et Yamamah, – est ainsi soumise, d’une façon bien différente jusqu'à l'inversion des autorités de la puissance de l’ombre et de l’influence civilisationnelle directrice qu’on lui prête, à de bien étranges liens qui exerce sur elle des contraintes d’une puissance considérable. L’Arabie est, à cet égard, comme une sorte de caricature monstrueuse du Système, sortie des sables pour se couvrir elle-même de pétrole, de $milliards et de terrorismes sans fin, quelque chose qui nous donne une parfaite indication de la répartition des forces qui soutiennent le Système et auxquelles le Système délègue sa puissance. Les USA, comme le Royaume-Uni, sont ligotés dans ces rets, et l’empire de l’anglosaxonisme que détaillait superbement, par exemple, le professeur Quigley (*), apparaît comme une sorte d’énorme foire d’empoigne de la corruption où le soi-disant indiscutable suprémacisme de l'anglosaxonisme se trouve réduite à des décomptes d’épicier en $milliards où ses dirigeants sont généralement perdants, avec une politique influencée à mesure de ce rapport de forces comptabilisé en comptes en banque et en activités subversives.
Personne n’a rien pu faire de sérieux contre cela, depuis des décennies puisqu’effectivement la chose est établie dans le même laps de temps ; aujourd’hui, avec les affaires-crises dont nous parlons qui mettent à jour dans le système de la communication cette vérité-de-situation il se pourrait bien que l’on soit en train d’assister à ce qui pourrait bien être l’entame de son implosion. Pour autant et pour l’immédiat des jours qui viennent, on peut juger que rien ne sera changé du fait des protagonistes. Zuesse observe qu’Obama, qui sera en Arabie jeudi (arrivée mercredi), aura nécessairement la question de cette crise actuelle à l’agenda (« Without a doubt, this topic will be on the agenda, if it won’t constitute the agenda... ») ; et Zuesse continue en proposant l’alternative suivante, – ou Obama “représente la population américaine” ou “Obama représente plutôt la famille des Saoud elle-même” ...
« If President Obama represents the American public, then the Sauds will have real reason to fear: the U.S. President will not seek to block passage of that bill in Congress. However, if the U.S. President represents instead the Saud family, then a deal will be reached... »
Là-dessus, Zuesse détaille les nombreux arguments, qui sont évidemment justifiés et complètement solides, selon lesquels le deuxième terme de l’alternative est le bon, et comment par conséquent l’“on s’arrangera” : « Furthermore, the impunity of the Saud family is taken simply as a given in Washington... »
Il n’y a rien de faux dans tout cela, et le raisonnement s’appuie sur tant de précédents... Sauf ceci, tout de même : si “l’impunité de la famille des Saoud est considérée comme un fondement de l’activité washingtonienne”, pourquoi et comment cette affaire des 28-pages est-elle (re)montée à la surface après un bref épisode dans ce sens il y a 12-13 ans, et un complet désintérêt (on ne parle même pas d’étouffement) depuis ? Il y a de bonnes raisons expliquant comment la chose s’est faite, mais aucune ne nous disant “pourquoi” alors que “l’impunité de la famille des Saoud, etc...”.
De fait nous devons nous tourner vers les mécanismes du système de la communication pour comprendre la montée de cette affaire et conclure par l’évidence que nous ne savons pas vraiment, d’une manière rationnelle dans tous les cas, pourquoi cela s’est produit maintenant, alors que “maintenant” est un des plus mauvais moments qu’on puisse imaginer. En d’autres termes, Obama ne va pas affirmer une fois de plus une tonitruante victoire de l’alliance USA-Arabie, à Ryad le 21 avril, parce qu’il n’y a pas eu de bataille, et que personne ne cherchait la bagarre ; il va essayer de colmater une voies de plus, et drôlement inquiétante, dans la coque de leur énorme barcasse pourrie, et cela n’étonnera personne si l’on propose pour cette belle intervention le nom d’“Opération Titanic”.
La puissance d’influence et de contrôle de l’Arabie sur l’establishment washingtonien, comme sur l’establishment britannique, comme la puissance de contrôle du lobby sioniste dans le même sens, et ainsi de suite, rendent compte du même phénomène qu’on prête à la puissance d’influence du courant anglo-saxon dans le reste du monde, – même puissance, même sens extrême de la corruption, mêmes enchaînements de soi-même jusqu'à l'impuissance, mêmes limites que le système de la communication qui leur est nécessaire à tous fait sortir régulièrement de son chapeau, parce qu’il a besoin de mouvement, de changement, de sensationnalisme, et finalement l’affaire des “28-pages”, sujet pourtant maudit par le système et désigné comme absolument tabou, finissant par tomber dans les mains d’un Steve Koroft, de CBS, qui se dit qu’il tient le bon bout pour faire une bonne audience pour ses 60 Minutes du 10 avril 2016. Pour le reste, qui est l'essentiel, on peut brûler quelques cierges à ceux qui ont inventé les réseaux et la toile, et permis ainsi à l’organisation 28Pages.org de se développer depuis octobre 2014 et de développer le mouvement de soutien et de renforcement constant, avec écho public permanent, en faveur de la déclassification. Le système de la communication est toujours un Janus à qui le Système ne peut rien confier de tout à fait sérieux (création des réseaux et de la toile) sans pouvoir craindre un coup de fouet en retour.
Ainsi l’affaire dont personne dans l’establishment arabo-washingtonien ne voulait ni n’avait besoin en aucune façon s’est-elle nouée au plus mauvais moment et dans les plus mauvaises circonstances. La presse-Système a peu parlé des 28-pages et s’est mise à en parler après le coup des 60 Minutes, parce qu’il le faut bien, parce qu’il faut bien suivre les confrères ; mais c’est dans le genre, “oh ces 28-pages de toutes les façons il faudra du temps pour les déclassifier, de toutes les façons elles ne nous apprendront rien de nouveau, de toutes les façons tout le monde sait bien que c’est l’Arabie qui a financé 9/11-et-alors ?”, etc. (L’article du 17 avril de NBC.News est un bon exemple, qui semble envisager l’hypothèse de la complicité et de l’action quasi-organisatrice de l’Arabie dans l’attaque 9/11 comme une péripétie sans grand intérêt alors que tous les “complotistes” du monde furent voués aux gémonies pour seulement en avoir fait l’hypothèse.)
Le ton est au scepticisme légèrement méprisant, à l’incrédulité amusée, à l’hypocrisie un peu agacée, au nihilisme mondain et de bonne tradition, ce qui montre que la résurrection du spectre mythique de 9/11 n’est pas accueillie avec un grand enthousiasme. Il faut dire qu’en fait de mythe, 9/11, avec ses narrative et avec ses complots divers et variés, se montre d’une résilience exceptionnelle en même temps qu’il a été scrupuleusement mis à une place de choix, sinon la plus haute place, dans l’assortiment mémoriel qui est imposé par le système de l’américanisme lui-même, aux citoyens de la Grande République... Cette sacralisation qui semblait si avantageuse au Système se retourne donc contre lui, avec un terrible esprit de vengeance.
Plus que jamais, dans ce chaos général qu’est aussitôt devenue cette “crise des 28-pages”, cette affaire chargé de cette dimension mythique en plus des arguments de la politique ordinaire doit être considérée dans la “logique” des élections présidentielles, c’est-à-dire dans son évolution chaotique défiant toute logique-Système, avec des candidats complètement atypiques et des sujets de campagne complètement hors des standards. On observera tout de même, de façon plus précise, qu’il est aisé d’attaquer Hillary Clinton sur les questions de terrorisme, des relations avec l’Arabie autant que de ses relations avec l’Arabie. (La fondation Hillary & Bill [Clinton] a bien entendu reçu des dons et des cadeaux amicaux de la part des amis saoudiens.) Il serait assez surprenant que l’un ou l’autre incendiaire de service ne se saisisse pas de l’interrogation des 28-pages et du mythe 9/11 pour un tournant ou l’autre de la campagne.
On rangera donc avec précaution cette nouvelle “poussée crisique” en se demandant une fois de plus et plus que jamais par quels voies et moyens le Système compte-t-il se défaire de l’irrésistibilité de sa tendance à l’autodestruction, au travers d’exemples aussi déplorables d’inattention et de légèreté. Avoir permis au fantôme du mythe 9/11 de ressortir, dans des conditions si défavorables pour lui, le Système, est le signe d’une très grande maladresse, une sorte de faute professionnelle grave”. L’histoire de ces 28-pages n’est certes pas finie et il est évident qu’elle nous intéresse plus, dans tous les cas pour l’instant, par son maniement de l’art du suspens politique qu’elle entretient et des dégâts collatéraux qu’elle suscite que par les hypothèses sur le contenu des dites-pages.
(*) Histoire secrète de l’oligarchie anglo-américaine, publié en 1981 après la mort de Quigley, traduit en français et publié en 2015 par les éditions Retour aux Sources.
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