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232423 juillet 2016 – L’horreur est sans bornes : The Donald, l’immonde bestiole, en train de nous dire, dans les augustes pages du New York Times, lui déjà habillé de la toge semi-impériale de l’un des deux candidats de l’une des ailes du Grand Parti-Système, – en train de nous dire que l’OTAN, hein, après tout, on pourrait bien s’en passer, parce que ce n’est vraiment pas un business rentable... Pour le conformisme-Système, comme pour tous les gens de ce monde, dans les couloirs du Berlaimont comme dans ceux d’Evere, comme au Congrès, comme sur les plateaux-télé de France 24, du Petit Journal lorsqu’il existait encore, Trump n’existait pas. Ils ont donc tous dénié son existence, son ombre, ses paroles, ses hurlements, ses pouces en l’air, comme ferait un vulgaire négationniste passible de la loi Gayssot.
Trump a réussi ce tour de force de faire de la Convention-circus de Cleveland, qui devait démontrer au monde qu’il ne pouvait prétendre être accepté dans le parti à moins de se métamorphoser en petit zombie-Système bien discipliné, sa chose enthousiaste ; les foules autant que les caciques républicains furent unanimes pour dénoncer un seul traître, un seul indigne d’être républicain et profondément haïssable : Ted Cruz, le seul orateur à n’avoir pas endorsed Donald Trump. Cruz joua donc le rôle de l’exclu promis à Trump, doublé d’un Brutus d’opérette, en enterrant sans doute ses dernières espérances présidentielles (même pour 2024, lorsque les USA auront disparu), tandis que le parti acclamait unanimement celui qu’elle avait mis à l’index en déniant son existence pendant plus d’une année.
Plus encore pour les affaires du monde : Trump réussit à faire cette unanimité et ce triomphe alors qu’on pouvait lire cette interview au New York Times qui définit une politique extérieure qui, dans ses fondements et lorsqu’on va à ses effets les plus puissants, s’annonce comme le contraire cruel et dévastateur de celle que le parti républicain a défendue avec toute son ardeur-Système durant les 60 dernières années. (Voyez les réactions d’un enthousiasme à peine contenu de quelques libertariens et paléos-conservateurs, retrouvant le parti républicain isolationniste de l’immédiat après-guerre : Raimondo, McAdams, Buchanan. Raimondo termine son analyse par cette courte phrase : « Somewhere, Bob Taft is smiling... »)
Arrêtons là ce qui pourrait sembler une hagiographie et qui, fidèle à nos conceptions, ne peut prétendre en être une à l’heure où les événements mènent l’Histoire ; par conséquent, célébration d’un événement bien plus que d’un homme... Nous n’avons pas besoin d’un prophète, nous avons besoin d’une clef qui déverrouille, par quelque moyen que ce soit, la porte ultime de l’accès à l’effondrement du Système. L’Histoire se charge du reste...
Pour bien situer notre conception à cet égard, c’est-à-dire cette conception qui fait de Trump un antiSystème (un “être-antiSystème”, disons-nous), sans aucun doute, – sans aucun doute jusqu’à maintenant, interview au NYT compris, car cela est acquis, – nous citons l’un et l’autre extraits d’un Glossaire.dde sur l’antiSystème, à paraître très rapidement, sinon absolument imminent. Il s’agit d’un article du Glossaire.dde où nous décrivons la “fonction antiSystème” telle que nous la percevons, c’est-à-dire ayant d’ores et déjà opérationnalisé deux phases successives qui l’ont formidablement renforcée, – la “phase Ron Paul” puis “la phase The Donald” :
« Passer à la “phase The Donald”est une expression symbolique de pure communication, qui ne donne aucune prépondérance créatrice ou conceptuelle au personnage, mais tient compte de son énorme effet de communication l’ayant d’ores et déjà constitué, – quoi qu’il en soit de sa vérité-de-situation, – comme un acteur volontairement et consciemment antiSystème, quel que soit son destin désormais. (Il y a ainsi deux vérités-de-situation : Trump lui-même et ce qu’il est, qui reste et restera à déterminer dans la perspective historique le temps de sa carrière, et l’effet de communication de Trump, qui est d’ores et déjà acquis comme étant antiSystème et qui est symbolisé par l’expression “phase The Donald”.) [...]
» ... La vertu de Trump est justement, de notre point de vue principiel et sans juger de la personne, de n’en pas avoir, et la seule chose qui importe est le désordre et la réaction de fureur haineuse, signe de la faiblesse de celui qui réagit, qui a embrasé le Système contre lui ; Trump n’est antiSystème que parce qu’il est désordre absolu par rapport au Système et se proclamant antiSystème, et que, au cœur du Système, le désordre qui se proclame antiSystème peut être mortel pour le Système... [...]
» ... D’une façon générale, cela signifie que nous n’avons nul besoin d’une espèce de prophète qui, en quelque sorte, porterait dans son caractère et ses actes les vertus d’une ère nouvelle qu’il annoncerait prétendument. Nous avons besoin d’un démolisseur, d’un déclencheur, d’un être-mécanisme qui brise le mécanisme du Système pour achever sa chute dans l’autodestruction (définition même de l’être-antiSystème). »
Nous allons donc passer à l’essentiel du propos, qui est déjà annoncé dans une des remarques de ces citations : « [... L]a seule chose qui importe est le désordre et la réaction de fureur haineuse, signe de la faiblesse de celui qui réagit, qui a embrasé le Système contre lui. » Nous allons parler du désordre que Trump a semé dans cet épisode de sa désignation et de ce qui va avec (l’interview au NYT), puis également du désordre qui accompagne cet épisode, le tout (Trump dans sa fonction antiSystème et le désordre semé dans le Système) formant le “chaos-nouveau”, ou “chaos-Système” qui nous est cher, celui effectivement qui rejoint la conception de Virgile telle que nous l’a rappelée Nicolas Bonnal : « Le chaos étant ainsi débrouillé, les éléments occupèrent le rang qui leur fut assigné, et reçurent les lois qui devaient maintenir entre eux une éternelle paix. »
A tout seigneur, tout honneur : d’abord les réactions-Système, dans la presse-Système de la “nation exceptionnelle” après l’interview au NYT, qui est vraiment le grand événement caché et paradoxalement le plus grand événement de cette Convention de Cleveland, Oregon. Dean Parker, de Russia Insider, a rassemblé quelques-unes de ces réactions, avec titre de l’article et un court extrait. Nous les donnons ici, parce que, vraiment, les idées ainsi présentées donnent la mesure de la haine, de la rage et de la panique du Système, d’une façon à la fois fleurie et hyperbolique (surtout dans les titres, certes) ; le sérieux du commentaire est ainsi assuré, avec une observation qui revient un peu partout, comme on dirait en “boucle”, de plume-Système en plume-Système, qui vous fait penser tout simplement que si Trump l’emporte en novembre, c’est Poutine qui sera le prochain President Of The United States (POTUS).
« How a Trump presidency could destabilize Europe Anne Applebaum - The Washington Post: But now it is 2016, truth is stranger than fiction, and we finally have a presidential candidate, Donald Trump, with direct and indirect links to a foreign dictator, Vladimir Putin, whose policies he promotes.
» Trump would wreck, not restore, America’s standing in the world - Editorial Board - The Washington Post : This is an extraordinary willingness to question 70 years of bedrock political consensus on U.S. foreign policy — one that includes Mr. Obama, who has dispatched U.S. troops to defend the Baltics.
» Trump proves he’s a Putin lapdog - Jennifer Rubin - The Washington Post: Trump continued on, promising to advance the “America First” mantra — an isolationist dog-whistle recalling Charles Lindbergh’s opposition in the 1930s to fighting Hitler.
» It's Official: Hillary Clinton Is Running Against Vladimir Putin - Jeffrey Goldberg - The Atlantic: The Republican nominee for president, Donald J. Trump, has chosen this week to unmask himself as a de facto agent of Russian President Vladimir Putin, a KGB-trained dictator who seeks to rebuild the Soviet empire by undermining the free nations of Europe, marginalizing NATO, and ending America’s reign as the world’s sole superpower.
» Donald Trump's Dark Vision - Editorial Board - Bloomberg: He called for a new era of isolationism in which America would retreat from the world order that generations of citizens sacrificed so much to build and sustain. It was the most disturbing, demagogic and deluded acceptance speech by any major party nominee in the modern political era.
» Trump Ignores the Reason America Defends the World - Editorial Board - Bloomberg: The biggest cause for alarm, however, may be Trump's casual dismissal of a global system that the U.S. invented and which has served it well for decades.
» Remember When Republicans Wanted to Stand Up to Putin? - Eli Lake - Bloomberg: The same guy who muses about killing the families of terrorists is open to abrogating America's treaty commitments to an alliance that has prevented a major European war for the last 70 years.
» Donald Trump Torpedoes ‘Peace Through Strength’ - Massimo Calabresi - TIME Magazine.
» Donald Trump Is Sucking Up and Selling Out to Putin - Michael Weiss - The Daily Beast: Would Americans die for Narva? What an ugly and stupid question. Estonians have already died for New York.
» Trump Is Dangerously Incompetent on National Security - Fred Kaplan - Slate: His promise to abandon NATO allies is a huge gift to Russia and China.
» The Real Winner of RNC: Vladimir Putin - Franklin Foer - Slate: Donald Trump’s convention has been marked by gross incompetence in all areas save one: He’s been highly effective in moving the Republican Party toward Vladimir Putin.
» Putin's Puppet - Franklin Foer - Slate: Vladimir Putin has a plan for destroying the West—and that plan looks a lot like Donald Trump.
» Donald Trump’s NATO comments are the scariest thing he’s said - Zack Beauchamp - Vox: Wednesday night, Donald Trump said something that made a nuclear war between the United States and Russia more likely. With a few thoughtless words, he made World War III — the deaths of hundreds of millions of people in nuclear holocaust — plausible.
» Of course Donald Trump wouldn't honor NATO obligations - Josh Barro - Business Insider: What is surprising is the way other Republicans, who claim to care about America's commitments to allies and leadership in the world, have brought themselves to endorse this man. »
En Europe, dans l’Europe transatlantique qui va, de plus en plus vociférante à mesure qu’on avance vers l’Est, jusqu’aux frontières de la Russie, les déclarations de Trump éclatent comme un coup de tonnerre. L’éminent et si représentatif Financial Times exprime parfaitement ce sens de la vertu outragée et de la fidélité constante ainsi foulée aux pieds. ZeroHedge.com résume assez bien l’affaire : si nous prenons les premières lignes du début et la ligne de fin de son article du 21 juillet, on a la substance de la réaction...
« Having entertained America for the past three days, overnight Donald Trump's rhetoric crossed the Atlantic and as the FT puts it, “has sparked a wave of alarm across Europe” as well as calls for solidarity from the head of NATO after warning that the US might not come to the defense of an alliance ally under attack from Russia if that country had not fulfilled its obligations to America. [...]
» The FT stopped short of accusing Trump of being a Kremlin spy. »
Le nœud de cette affreuse occurrence consiste en un passage de l’interview du NYT, reproduit un peu partout, où Trump affirme que, lui président, il n’ira pas nécessairement au secours d’un membre de l’OTAN faisant l’objet d’une attaque, principalement à la mesure de ce que ce membre aura fait ou n’aura pas fait, en $dollars sonnants et trébuchants, dans ses engagements vis-à-vis de l’OTAN. Celui qui n’aurait payé que 50% de sa contribution n’aurait droit qu’à 50% des forces nécessaires pour repousser l’évidente invasion russe que tout le monde à l’OTAN attend comme les Tartares du fameux désert de Buzzati.
La terreur trumpiste envahit donc l’Europe transatlantique. Les commentateurs chuchotent qu’il s’agit de rien moins que d’un “protection racket” (expression assez redondante puisque le “racket” est en soi une protection certes coûteuse, à laquelle nous préférerions “security racket”, – cela pour rendre compte de la beauté du concept trumpiste). Le sémillant Secrétaire Général de l’OTAN fait aussitôt un statement sur les vertus de la solidarité et les ministres, commissaires, députés, adjoints, etc., des pays sans nombre de l’Alliance renforcée de l’Union, qui pullulent entre l’OTAN et l’UE, tous ont donc sorti leurs calculettes et peaufiné leur indignation, qui pour dire que la sécurité ne se calculait pas, qui pour dire que son pays remplissaient bien plus que les normes. Le spectacle fut donc grotesque, comme avait été grotesque l’argument trumpiste.
Le plus étonnant et finalement le plus grotesque de cette formidable tempête dans un verre d’eau (Much Ado For pas grand’chose) porte sur l’essentiel qui est l’argument massue du traité, c’est-à-dire du respect de la loi de la solidarité entre alliés du bloc-BAO selon les termes du traité, c’est-à-dire selon l’article 5. Tout le monde avait donc à l’esprit de mettre Trump en accusation dans son intentionnalité de ne pas respecter l’article 5 en contestant, pour telle et telle raisons, la solidarité automatique des USA envers ses alliés. Mais tout le monde avait tout faux, y compris Trump, puisqu’il suffit de citer l’article 5 pour voir qu’effectivement n’importe quel membre de l’OTAN a le droit le plus absolu, 1) de juger s’il doit apporter une aide à un autres États-membres agressé, et 2) de déterminer quelle aide il doit apporter s’il se décide dans ce sens. Pour vérification, voici donc cet Article 5, avec, souligné de gras de notre chef, tous les termes qui rendent cette obligation de solidarité extraordinairement vague, insaisissable et incertaine, et surtout qui montre qu’elle est déterminée par chaque État-membre en toute souveraineté (voyez l’utilisation du terme “individuel” ou “individuellement” et du verbe “juger” qui est laissé à la discrétion de chacun)...
« Les parties conviennent qu'une attaque armée contre l'une ou plusieurs d'entre elles, survenant en Europe ou en Amérique du Nord, sera considérée comme une attaque dirigée contre toutes les parties, et en conséquence, elles conviennent que, si une telle attaque se produit, chacune d'elles, dans l'exercice du droit de légitime défense, individuelle ou collective, reconnu par l'article 51 de la Charte des Nations unies, assistera la partie ou les parties ainsi attaquées en prenant aussitôt, individuellement et d'accord avec les autres parties, telle action qu’elle jugera nécessaire, y compris l'emploi de la force armée, pour rétablir et assurer la sécurité dans la région de l'Atlantique-Nord.»
L’un des rares à remarquer ce quiproquo qui survient très souvent dans les longues discussion sur la sécurité otanienne, le soir au coin du feu, fut Justin Raimondo, et pour les meilleures raisons du monde : isolationniste et bon historien, Raimondo sait bien qu’un traité avec un Article 5 plus contraignant n’aurait jamais été ratifié par le Sénat des États-Unis dans cette période des années 1945-1950, en raison des sentiments isolationnistes (et donc du refus de l’interventionnisme et de contraintes politiques extérieures) qu’on y trouvait encore très répandus. Ainsi écrit-il dans l’article déjà référencé, à propos de l’interview de David Sanger, etdu New York Times, et de cette question de l’intervention de solidarité en fonction de l’Article 5 : « Article 5 of the NATO treaty says if another NATO member is attacked each member “shall take such action as it deems necessary.” Republican opposition to the NATO treaty in 1949, led by “Mr. Republican” Sen. Robert A. Taft, would have defeated it in the Senate if any more binding language had been included. Since neither Sanger nor Trump seems to realize what the NATO treaty actually says, the discussion continues along these lines... »
Certains diraient que c’est un débat léonin, arguant de l’“esprit de la loi” qui recommande une solidarité sans limite ; au contraire, on arriverait là au cœur du débat que Trump lui-même a posé d’une manière beaucoup plus raisonnable et convaincante lorsqu’il a parlé de l’obsolescence de l’OTAN. Dans le cas où l’on en appelle à l’“esprit de la loi”, en effet, c’est pour constater que c’est la loi elle-même (le traité de l’Atlantique Nord) qui est obsolète, c’est-à-dire dépassée, absurde, comme l’OTAN elle-même, et l’“esprit de la loi” ne peut être naturellement et en conséquence que pervers et dérangé.
Finalement, Trump s’est beaucoup plus découvert et avancé lorsqu’il a répondu très précisément sur la question de la Turquie, sur la question très concrète de l’attitude que doivent, que devraient avoir les USA vis-à-vis des événements en Turquie, et notamment du comportement répressif d’Erdogan. Il s’agit réellement d’une question, avec sa réponse certes, qui peut être pris comme “modèle“ d’une éventuelle politique générale trumpiste, entre l'interventionnisme en termes postmodernes (globaliste-hégémoniste) qui est rejeté, et repli par respect de la souveraineté même si l’argument s’appuie, d’une façon très pratique, très businesslike, sur la simple logique de la réciprocité.
Ce passage-là mérite effectivement citation : à défaut d’avoir l’“esprit de la loi (absurde)”, nous pouvons distinguer l’esprit d’une politique générale en complète rupture avec ce qui est en cours aux USA depuis plus d’un demi-siècle, et sur un mode-turbo depuis 9/11. (Voir les révolutions de couleur, les manœuvres de regime change, les constantes interférences dans les souverainetés des autres et ainsi de suite.)
Sanger: « Erdogan put nearly 50,000 people in jail or suspend them, suspended thousands of teachers, he imprisoned many in the military and the police, he dismissed a lot of the judiciary. Does this worry you? And would you rather deal with a strongman who’s also been a strong ally, or with somebody that’s got a greater appreciation of civil liberties than Mr. Erdogan has? Would you press him to make sure the rule of law applies? »
Trump: « I think right now when it comes to civil liberties, our country has a lot of problems, and I think it’s very hard for us to get involved in other countries when we don’t know what we are doing and we can’t see straight in our own country. We have tremendous problems when you have policemen being shot in the streets, when you have riots, when you have Ferguson. When you have Baltimore. When you have all of the things that are happening in this country — we have other problems, and I think we have to focus on those problems. When the world looks at how bad the United States is, and then we go and talk about civil liberties, I don’t think we’re a very good messenger. »
Sanger: « So that suggests that you would not, as, say, President Bush did, the last President Bush, make the spread of democracy and liberty sort of a core of your foreign policy. You would say, “We need allies, we’re not going to lecture them about what they do inside their borders.” »
Trump: « We need allies. »
Sanger: « And lecture inside their borders? »
Trump: « I don’t know that we have a right to lecture. Just look about what’s happening with our country. How are we going to lecture when people are shooting our policemen in cold blood. How are we going to lecture when you see the riots and the horror going on in our own country. We have so many difficulties in our country right now that I don’t think we should be, and there may be a time when we can get much more aggressive on that subject, and it will be a wonderful thing to be more aggressive. We’re not in a position to be more aggressive. We have to fix our own mess. »
Finalement, la partie sur la Turquie rachète la partie sur l’Article 5, et même, bien au-delà finalement, elle l’éclaire dans toute sa cohérence profonde malgré la vanité de l’argument et la puérilité du débat autour d’un point de droit (l’Article 5) interprété faussement et finalement, en vérité et ceci expliquant amplement cela, considéré avec une sorte de ferveur religieuse (voir plus loin). Ainsi obtient-on une vision plus intégrée de la “politique générale” de Trump, qui est néo-isolationniste par esprit pratique, sans fioritures inutiles, toujours businesslike, face à un réseau de zombies-Système tout entier animé d’une foi religieuse, d’un zèle de croyant prêt à monter un bûcher pour le premier hérétique venu... (Trump est évidemment un hérétique et voilà qu’on ne peut pas directement le griller devant les escaliers du Congrès puisqu’il est candidat officiellement adoubé par un parti-faisant-partie-du-“Parti-unique”.)
A cette lumière-là, on comprend la vigueur des réactions du Système, aux USA et en Europe ; mais on comprend également ou plutôt l’on mesure, justement à cause de la faiblesse de l’exposé initial sur l’OTAN/l’Article 5, l’extraordinaire fragilité de la psychologie qui caractérise les défenseurs et les employés du Système, – les zombies-Système, si l’on veut et pour faire court, – devant la perspective entrevue, et l’extrême vulnérabilité de cette psychologie. Dès que le moindre souffle du premier alizé venu, – dont on réfutait d’ailleurs l’existence jusqu’ici puisque Trump n’existait pas pour les zombies-Système en général, – dès que ce souffle léger frôle l’objet de la foi (l’OTAN), l’alizé devient tempête, ouragan apocalyptique, tsunami de Fin des Temps.
Ce n’est pas tant ce que Trump a dit que ce que Trump a laissé entrevoir de ce que pourrait être une politique, moins sous sa conduite que sous son exécution, – comme si Trump, effectivement, se préparait à un programme dont les événements disposeront pour aller au cœur du sujet, c’est-à-dire la destruction de la politique-Système, et le Système lui-même par enchaînement de cause à effet. Non que Trump ait cela en tête, bien entendu, lui qui ne goûte guère les grandes théories et les idées complexes ; mais parce qu’il a la démarche, les réflexes, la simplicité pour déchaîner sans le vouloir les événements dans ce sens : plus qu’un “American Gorbatchev”, un “Gorbatchev à l’américaine”. Il s’agit, The Donald, d’un personnage typiquement américain et même américaniste, qui fonctionne comme tel, et qui déclenche des tempêtes “à l’américaine”, mais pas au Kosovo ni en Irak, non, mais au cœur de l’américanisme.
Ainsi parle-t-il de l’OTAN comme l’on parle business alors qu’il s’agit de rien moins que d’une religion : peut-être est-ce cela qui a déclenché l’hystérie, cette façon de parler de l’OTAN comme on parle business, de savoir si celui-ci paye bien sa cotisation, si tel autre est en règle dans ses avoirs bancaires... Comme le dit justement le libertarien ami de Ron Paul, Daniel McAdams, en réponse à la question de RT sur l’ébouriffante réaction après l’interview de Trump au NYT de la presse-Système US, dont on a vu plus haut quelques échantillons : “Parce que l’Empire US est une religion pour les élites aux USA [et pour le bloc-BAO] ... et parce que l’OTAN est l’une des plus grandes cathédrales où se disent la messe et les homélies, et où se comptent eux-mêmes les paroissiens”. (Traduction très imagée et symbolisée, comprimée et approximative, de ceci : « It is because the US Empire is the religion of the elites in the US, whether they are left or right. And to do that, you have to have NATO; you have to have the US telling the rest of the world what to do. So, he [Trump] is challenging a central tenet of the religious faith of the elites in the US. And they cannot abide this. They are in full panic mood over Donald Trump’s interview in the New York Times recently. »)
Ainsi se poursuit l’aventure déclenchée par The Donald plutôt que son aventure à lui, déclenchée comme l’on ouvre, par inadvertance, un placard où se trouvaient rangés religieusement et hiérarchiquement un nombre absolument prodigieux de “cadavres exquis”. Il faudra voir jusqu’où ira l’hérétique inconscient, – la meilleure catégorie possible, ceux qui ne savent pas ce qu’ils provoquent parce qu’ils ne sont attachés qu’au “faire” sans soucis des conséquences. Le temps, ou plutôt la Fin des Temps, est celui et celle des esprits simples ; d’ailleurs, la simplicité n’est pas nécessairement exempte de grandeur, – et si l’on regarde le monde dont nous avons hérité et que les zombies-croyants veulent défendre jusqu’au bûcher, on est encore plus affirmatif.
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