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203814 septembre 2016 – Le “graphisme” de la campagne USA-2016 est d’une exceptionnalité sans aucun précédent, à la fois pour le rythme des événements, leur aspect complètement insolite, l’absence totale de contrôle stratégique des forces qui d’habitude dominent le processus et qui sont par ailleurs les seules à pouvoir dominer le processus. C’est-à-dire que la perte de contrôle de l’événement central de processus de régénération nécessaire du pouvoir du système de l’américanisme est aujourd’hui hors de tout contrôle : que ce soit pour la chronologie, pour la forme des événements, pour la maîtrise du processus lui-même.
L’impression est remarquable : à chaque nouvel événement dont on savait qu’il pouvait se produire mais dont on disait “c’est trop gros pour qu’il survienne”, on se dit qu’on est nécessairement au terme des surprises que nous réserve cette campagne ; chaque fois, on se trouve démenti par la suite... Les événements parviennent même à trouver, dans le prévisible et l’annoncé (assortis du “c’est trop gros” mais qui se produit tout de même), quelque surprise supplémentaire, une cerise sur le gâteau si l’on veut. Nombre de sources antiSystème était persuadées qu’Hillary était malade, et prévoyait qu’un incident grave le montrerait mais pensait “c’est trop gros...”, après que divers incidents plus anodins aient été complètement étouffés ; pourtant l’incident grave s’est passé, et en plus le 11 septembre, pour la cérémonie du quinzième anniversaire de 9/11, comme une sorte de nouveau 9/11 pour le Système, que l’on conservera dans la mémoire sous la forme d’une expression telle que “le 9/11 d’Hillary”.
Avec “le 9/11 d’Hillary”, le campagne engagée full swing dans le mensonge nécessité par le déterminisme-narrativiste qu’implique la narrative-Système, est désormais ivre et folle de mensonges de toutes les sortes, et plutôt les plus grotesques que les mensonges courants parce que la perception de l’acteur du déterminisme-narrativiste lui fait bien sentir sent que seul l’effet du grotesque pourra confronter l’effet puissant des vérités-de-situation qui éclatent. Car cette campagne qui s’est nécessairement définie dans le chef du Système dans le sens de la narrative, donc du mensonge complet, se réalise dans le climat, le “bruit de fond” assourdissant d’une communication hyperpuissante où les vérités-de-situation, hors de tout contrôle du Système, éclatent avec autant de force que les mensonges du déterminisme-narrativiste.
L’on voit ici que le déterminisme-narrativiste conduit au délire dialectique que la puissance de la communication institue en une sorte de démence collective des partisans du Système, qui sont évidemment de toutes les sortes, de tous les acabits, dans un chaos niveleur qui n’a certainement jamais été atteint du point de vue de l’ampleur de la clameur et de son effet. Bien plus qu’à l’occasion de la crise ukrainienne, où le déterminisme-narrativiste s’est constitué comme une obligation de la narrative imposée par le Système, et justement parce que l’absence de maîtrise du Système ne peut empêcher les vérités-de-situation, les contradictions furieuses de cette situation ne cessent de créer une tension formidable. C’est tout cela qui se tend comme un arc prêt à décocher sa flèche, sans qu’on sache à quel moment, ni vers quel cible, ni pour quel effet le trait sera décoché.
Pour l’exemple, et pour montrer que l’Ukraine n’était qu’un galop d’essai, on donne ici quelques exemples de ce déchaînement où plus aucune borne, plus aucune digne ne retient le flot de la déraison et de la démence. Tout est nécessairement du parti d’Hillary Clinton, clinquante ou titubante, parce que seul ce parti a pris la logique et la dynamique du déterminisme-narrativiste, – d’ailleurs, parce qu’il ne pouvait faire autrement.
• Une grande place est faite au plus méritant et au premier d’entre tous, au président Obama qui montre son visage de sauvage par l’inculture et de barbare par ignorance de la tradition, un de ces barbares postmodernes dont parlait Mattei (voir plus loin). Homme-lige parfait du Système, sans opinion, sans engagement de fond, il est l’outil impeccable de calme des ukase du Système, en l’occurrence du politically correct puisque c’est l’expression qu’on utilise pour l’un d’entre ces ukase. On peut dire de BHO qu’il est, pour les Noirs US, un simulacre de Martin Luther King (deuxième période : l’opposant au Système de 1967-1968), de Malcolm X et de Muhamad Ali ; il a radicalement transmuté la cause des Noirs en transformant leur “libération” en un nouvel esclavage, l’esclavage-Système. Aujourd’hui, après et avec “le 9/11 d’Hillary”, il agit à visage découvert, entièrement soumis au mensonge-Système. On l’entend comme tel lorsqu’il “démonise” Trump pour avoir parlé à Larry King sur RT et compare Poutine à Saddam Hussein, lui-même (Obama) hors de tous les usages civilisés, réduit ainsi aux batailles de rue et aux règlements de compte des gangsters de Chicago, sa ville favorite.
• Parmi d’autres exemples, on citera un article de Huffington Post décortiqué par Infowars.com, parce qu’on y trouve une attaque “fratricide” contre ceux de la presse-Système qui osent demander des explications à Clinton concernant sa santé. Ce sont des “chacals” qui attaquent une courageuse femme politique en proie à une pneumonie comme vous et moi ; qui, justement, a montré par le travail magnifique accomplie alors qu’elle avait une pneumonie, qu’elle était absolument digne, et la seule d’ailleurs, d’être présidente des États-Unis. L’élégance du paradoxe conduit ainsi à ériger le Mensonge compulsif et perpétuel, marque du comportement d’Hillary, en Vertu Absolu de la politique.
• L’attaque de la campagne-Clinton contre “Pepe-the-Frog”, grenouille de bande dessinée, vaut également citation comme exemple et stéréotype des réactions convulsives du Système : « “That cartoon frog is more sinister than you might realize,” declared HillaryClinton.com. “Pepe is a cartoon frog who began his internet life as an innocent meme enjoyed by teenagers and pop stars alike.” “But in recent months, Pepe’s been almost entirely co-opted by the white supremacists who call themselves the ‘alt-right.’” »
• Par ailleurs soyons rassuré, l’inévitable est réalisée : la pneumonie d’Hillary est le résultat d’un complot de Poutine, sans doute un Poutine lui-même transmuté pour l’occasion en virus. « Bennet Omalu, a forensic pathologist who discovered a pattern of chronic traumatic encephalopathy in dead NFL players, has suggested that the candidate should have blood work done to see whether she’s been poisoned. Omalu didn’t stop there. He then asserted that the reason for his worry is that he does not trust Russian President Vladimir Putin or Republican presidential candidate Donald Trump (“I do not trust Mr. Putin and Mr. Trump. With those two all things are possible”). [...] Notably, his fringe musings on a poison plot by the Republican nominee or the Russian president made headlines in several publications that previously wrote off left-of-center concerns about Clinton’s health as “conspiracy theories.” »
...Ainsi l’élection apparaît-elle effectivement comme l’illustration la plus avancée, puisque la chronologie va toute entière dans le sens de la dissolution et de la Chute, de ce que Jean-François Mattei décrivait dans son beau livre sur La barbarie intérieure (PUF, 1999). Nous le présentions, déjà, le 24 janvier 2012, à propos de “la situation en cours”, et ce livre est toujours, non de plus en plus valable à propos de la “situation en cours”, à mesure que cette “situation en cours” s’approche du terme de la Chute, qui ne peut être que l’effondrement achevé du Système.
« Dans son introduction à son essai sur ‘La barbarie intérieure’ (nous lui avons emprunté l’expression, bien sûr, tant elle est bienvenue et juste), Jean-François Mattei écrit : “Dans son règne rationnel sur toute la planète, la civilisation européenne n’a pas dissous la barbarie en conquérant de lointaines steppes ou de nouveaux déserts ; elle l’a introduite en son sein et s’est laissée gagner par son propre processus de dissolution, irriguant de son sable ses déserts intérieurs.” Ce jugement, qui embrasse l’essentiel le développement de la civilisation européenne à partir de l’apparition de la modernité, s’applique particulièrement aujourd’hui, selon un rythme extraordinairement accéléré, comme si le temps se contractait et comme si l’Histoire s’accélérait (ce qui est notre thèse pour notre époque). Cela engendre une situation présente où l’“irrigation par le sable” des “déserts intérieurs” du bloc BAO atteint un rythme dément, et la dissolution idem par conséquent. Dans ce cas, on comprend que ce jugement sur “notre barbarie” concerne aussi bien les soldats en Afghanistan que la presse-Système pratiquant l’autocensure (autocensure, équivalente au “sable d’irrigation”), que tout le reste... »
L’enjeu plus général de l’élection est étrangement semblable à celui de l’Europe, il est aussi intense, aussi profond dans les matières culturelles et de l’être même, de son identité, il est aussi intensément civilisationnel ; comme si les USA, toujours loin et indifférents aux problèmes européens, sinon inoculés contre ces problèmes, les avaient soudain tous absorbés pour leur compte, pour tous les confronter avant que l’Europe elle-même ne le fasse pour son compte.
La conclusion de ce texte de Patrick Buchanan, opposant les USA blancs et chrétiens aux USA de l’immigration non-blanche, pose la question, dans le cas d’ailleurs de plus en plus problématique d’une victoire d’Hillary, de la légitimité de la présidente Clinton pour les vaincus, c’est-à-dire ouvrant ainsi l’option de l’impossibilité de la paix civile qui doit suivre une élection présidentielle traditionnellement, au profit d’un appel à l’insurrection comme seule voie légitime pour ce que serait cette Amérique “vaincue” (les guillemets sont nécessaires en raison de l’illégalité absolue des moyens déployés contre cette partie de l’électorat). Nous donnons la traduction de cette phrase-clef, la dernière de la citation : « Pourquoi l’Amérique de la classe moyenne, étant donné ce qu’elle [Hillary Clinton] pense d’elle et de son régime, leur ferait-elle plus allégeance et leur montrerait-elle plus de loyauté que [le joueur de football américain] Colin Kaepernick pour l’Amérique qu’il abhorre avec tant de passion ? »
« Politically and demographically, America is at a tipping point. Minorities are now 40 percent of the population and will be 30 percent of the electorate in November. If past trends hold, 4 of 5 will vote for Clinton. Meanwhile, white folks, who normally vote 60 percent Republican, will fall to 70 percent of the electorate, the lowest ever, and will decline in every subsequent presidential year. The passing of the greatest generation and silent generation, and, soon, the baby-boom generation, is turning former red states like Virginia, North Carolina, Colorado, Arizona and Nevada purple, and putting crucial states like Florida and Ohio in peril.
» What has happened to America is astonishing. A country 90 percent Christian after World War II has been secularized by a dictatorial Supreme Court with only feeble protest and resistance. A nation, 90 percent of whose population traced their roots to Europe, will have been changed by mass immigration and an invasion across its Southern border into a predominantly Third World country by 2042. What will then be left of the old America to conserve?
» No wonder Clinton was so giddy at the LGBT bash. They are taking America away from the “haters,” as they look down in moral supremacy on the pitiable Middle Americans who are passing away.
» But a question arises for 2017.
» Why should Middle America, given what she thinks of us, render a President Hillary Clinton and her regime any more allegiance or loyalty than Colin Kaepernick renders to the America he so abhors? »
La question n’est pas ici de savoir qui a raison et qui a tort dans ce débat, – même si nous-même avons/avions une opinion ce qui n’est pas tranché aussi nettement en tout état de cause, – mais bien de faire le constat de cet appel non dissimulé et considéré en soi comme légitime à considérer comme illégitime une présidente Clinton s’il y en avait une ; c’est-à-dire un appel à la sédition et à une sédition qui dit le Droit pour son compte et qui le met de son parti, ce qui est le même langage que tenaient les futurs États confédérés lors de la campagne présidentielle de 1860. Encore ce texte, certainement écrit avant le 11 septembre, ne prend-il pas en compte l’“incident de santé” de Clinton du 9/11, qui bouleverse encore plus le paysage politique des USA et, dans tous les cas, rend désormais extrêmement improbable une victoire de Clinton, non dans des conditions politiques normales mais dans les conditions politiques que nous avons connues jusqu’à 9/11 et qui échappaient d’ores et déjà à la normale. Cela signifie, en tout état de cause, que l’aspect dramatique, voire tragique du texte de Buchanan s’en trouve multiplié parce que l’“incident de santé”-9/11 de Clinton n’a bien entendu pas été un événement rassembleur de la nation, mais une démultiplication de la situation de division antagoniste.
Bien entendu, cette campagne USA-2016 est d’abord et essentiellement un signe absolument confondant de la fragilité et de la vulnérabilité exceptionnelles d’un système (le système de l’américanisme) jusqu’alors réputé pour la puissance et la stabilité de son cadre de contrôle politique de la situation du pays. A chaque nouveau soubresaut, on est confondu de constater : “Ils ont laissé faire ça, ils n’ont pas vu venir ?” Nous plaignons les spécialistes des interprétations “auto-complotistes”, qui doivent à chaque fois trouver une explication nouvelle pour satisfaire leur thèse principale. (“Comment le Système complote contre lui-même pour avoir l’air encore plus fort qu’il n’est en triomphant d’obstacles qu’il érige lui-même sur sa route ?”).
En attendant, les gens plus posés et réfléchis tirent leur conclusion, tandis que les USA n’ont plus aucune capacité, ni aucun intérêt de manœuvre dans les domaines les plus stratégiques pour eux. L’exemple le plus caractéristique de cette situation est le recul général des USA, voire l’abandon de toutes leurs positions dans l’affaire syrienne, qui est en réalité la signification de l’accord Lavrov-Kerry. DEBKAFiles, qui a particulièrement suivi cette évolution, explique que l’accord Lavrov-Kerry contient nombre de clauses secrètes pour la seule raison que la direction US ne veut pas faire apparaître trop visiblement que ce qu’elle fait n’est rien d’autre que l’application de la “politique-Trump” en Syrie (c’est-à-dire laisser le champ libre aux Russes pour qu’ils se chargent de la lutte contre le terrorisme, c’est-à-dire en même temps renoncer à toute influence sérieuse dans le conflit)... Ainsi les troupes d’infanterie de marine russe ont-elles pris position depuis hier pour contrôler aux portes d’Alep le route stratégique dite “Castello”, seule voie menant d’Alep au Nord de la Syrie, – situation stratégique impensable durant des années, et même, si l’on tient compte des différents contextes, depuis des décennies...
« The Syrian cease-fire agreement that US Secretary of State John Kerry and Russian Foreign Minister Sergey Lavrov announced Friday night, September 9, in Geneva hands Syrian affairs over to Russia’s President Vladimir Putin and the country’s military. The accord marked a sharp reversal for Washington. In his meeting with Putin in China last week, US President Barack Obama did not agree to those steps for the simple reason that such an agreement would be in line with the policy and stance of Republican presidential nominee Donald Trump, not those of the Democratic nominee Hillary Clinton. Trump suggested several months ago that the US should let Putin finish the war in Syria, asserting that the Russian leader would be able to do it better.
» Under the current situation it is no wonder that Kerry and Lavrov agreed not to release the details of the agreement. Publication of the details would reveal that the rebels in the Aleppo area, and perhaps in all of Syria, have been abandoned. The Syrian rebels now find themselves trapped by both the Russian-Turkish agreement and the Russian-US agreement, with a noose seemingly closing around them. »
Comme on le comprend aisément à lire ce qui précède, les Russes suivent discrètement mais très précisément le déroulement de la campagne USA-2016 et ils sont décidés à en profiter, non pas tant pour faire avancer leur influence mais pour réduire autant que faire se peut celle des USA qu’ils jugent, avec combien d’arguments, nocive, déstabilisatrice et affreusement dissolvante. Bref, les Russes ont une attitude stratégique de puissance, d’une façon rationnelle et sur un rythme discrètement empressé tant ils connaissent le danger du bellicisme américaniste. (Et si c’est Trump qui est élu, le nouveau président trouvera un peu de son travail déjà préparé...) Les autres puissances et centres de puissance suivent aussi USA-2016 avec l’intérêt nécessaire. Seule l’Europe occupe une place à part.
L’espèce d’atonie de l’Europe vis-à-vis de ce qui se passe aux USA est de l’ordre du stupéfiant, au sens véritable du mot, comme sous l’empire d’un stupéfiant. L’Europe est paralysée dans cette espèce de certitude de la globalisation réalisée, et du cousinage atlantique devenue une réalité géographique et cosmique intangible, elle-même co-génitrice adoubée de cette même globalisation. Au-delà des évaluations de la campagne, du spectacle que ses yeux aveugles contemplent sans le voir, elle ne peut concevoir que l’Amérique puisse être autre que cette chose omniprésente et omnisciente à laquelle elle s’est soumise et qui a lui a offert une place privilégiée dans sa Manifest Destiny. (Elle ne peut concevoir que la Maison-Blanche s’ouvre à un Trump, qu’elle considère comme un voyou ou un galopin puisqu’il ose dire tout haut que la globalisation est une malédiction.)
Le cas français est exemplaire autant qu’il exprime parfaitement la situation de ce pays, enfoncée et enchaînée dans une inextricable situation de querelles et de débats sans fin autour de problèmes internes qui ne sont que les effets inéluctables des grandes situations du monde dont ce même pays ignore délibérément les données et les constituants. La France est un pays à la dérive dans un continent à la dérive, qui observe comme un spectateur “désengagée” une bataille (USA-2016) dont elle ne veut ni ne peut comprendre ni le sens ni la proximité destructrice. Les effets de cette bataille, qu’elle ne verra pas venir et qu’elle ne saura identifier, ne cesseront de frapper l’Europe de plein fouet sans qu’elle ne puisse rien faire. On vous confiera simplement cette révélation stupéfiante que l’Europe institutionnelle est préoccupée actuellement d’une “stratégie européenne” absolument mythifiée tandis que les seuls actes de politique extérieure qu’elle est capable de concevoir sont rassemblés dans le renouvellement automatique des absurdes sanctions antirusses, qui la privent des seuls contacts fructueux qu’elle pourrait avoir en attendant que l’énigme américaniste se résolve.
... Car, bien entendu, il s’agit plus que jamais d’une énigme. Nul, aujourd’hui encore moins qu’hier, n’est capable de prédire ce qui va se passer aux USA d’ici le 8 novembre, encore moins après le 8 novembre ; nul n’est capable de dire si Hillary Clinton restera candidate ou si elle partira, car le niveau incroyable de montage et de manipulation déployé par son équipe témoigne des capacités disponibles pour la maintenir dans la course malgré les avatars qu’elle a connus, et malgré ceux qu’elle va connaître encore (on attend l’October Surprise promise par Assange et WikiLeaks avec une nouvelle cargaison d’e-mails). Les USA aujourd’hui sont à la fois churchilliens (« It is a riddle, wrapped in a mystery, inside an enigma... ») et shakespeariens (« It is a tale told by an idiot, full of sound and fury, signifying nothing »).
La sauvagerie de cette campagne présidentielle est telle qu’un commentateur l’a qualifiée d’une campagne où, contrairement à l’habitude où l’on se tire dessus entre partisans des deux camps, il s’agit d’une campagne où l’on “shoot to kill”, – “où l’on tire pour tuer”, – ou bien pourrions-nous suggérer, “pour se suicider”, comme si l’Amérique ne pouvait plus supporter elle-même... ? Comme nous l’avons déjà noté, l’image et le spectre de 1860 et de cette campagne fatale débouchant sur la Guerre de Sécession pèsent sur cette campagne USA-2016 ; ainsi pourrait-on aisément imaginer qu’au-dessus de tout cela trône, impérial, le président Lincoln, ce monument de vertu qui mena cette guerre la plus sauvage, la plus sanglante, la plus faussaire, la plus destructrice de l’identité qu’aient connues les USA qui n’ont pourtant mené que cette sorte de guerre, et plus qu’à leur tour, peut-être la guerre-Système dans toutes ses dimensions possibles...
Peut-être faisait-il alors, le président Lincoln, en bafouant l’habeas corpus et en ravageant à l’image d’un Attila postmoderne la Géorgie de la civilisation du Sud dans “la course jusqu’à la mer”, le premier pas de cette sombre destinée qu’il avait prévue in illo tempore (1838) par défaut, comme un défi au destin, ne doutant pas qu’en fait les USA seraient “condamnés” à “éternellement survivre” car l’alternative qu’il évoquait lui-même semblait si terrible, si absurde, comme si Dieu se contredisait Lui-même, ce qu’à Dieu ne plaise.... Le suicide, allons donc ! Incroyable alternative entre l’éternité et la mort infligée par soi-même à soi-même... « Si la destruction devait un jour nous atteindre, nous devrions en être nous-mêmes les premiers et les ultimes artisans. En tant que nation d’hommes libres, nous devons éternellement survivre, ou mourir en nous suicidant. » Lincoln installa donc les fondations d’un Empire que les USA ne pouvaient et ne pourraient jamais être puisqu’ils sont l’œuvre non de l’Histoire, mais du commentaire d’une histoire fabriquée à partir d’eux-mêmes (les USA) et “selon leur bon plaisir”, c’est-à-dire tout hybris au vent et sapiens à la barre. Piètre “empire de la communication”, simulacre d’Empire qui ne peut rien d’avoir d’impérial dans le sens de la majesté et de l’influence de haute culture, d’une façon ou d’une autre, qu’eurent les empires des Anciens Temps.
On comprendra donc que cette conclusion de notre commentaire, qui s’adresse toute entière à cette chose “qui aurait bien aimé avoir eu l’air” d’être l’Empire, en vérité ne peut concerner que le Système et lui seul, cette entité qui nous écrase et contre laquelle gronde la révolte de notre survivance, – ou de notre renaissance c’est selon. De toutes les façons et de tous leurs temps communs, les deux, le Système et les USA, sont trop intimement liés pour qu’on hésite à leur prédire un sort et un destin autres que communs ; car, en vérité, le suicide de l’un est inséparable du suicide de l’autre...
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