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2238De plus en plus est citée la thèse selon laquelle “l’affaire du poison” (la rocambolesque affaire qu’on sait, des espions Skripal & Co) est liée à l’éventuel regain d’agression du bloc-BAO en Syrie (essentiellement, USA, UK et France), pour préparer le brave public d’abord à une attaque chimique, modèle standard “Assad-coupable”, montée de toutes pièces selon la technique éprouvée (false-flag, modèle déposé BAO), ensuite au parachévement triomphal par l’apothéose d’une frappe considérable des trois pays cités contre Assad bien entendu.
• Les Russes insistent sur ce lien entre “l’affaire du poison” et la Syrie. Pour eux, cette interprétation politique ne fait pas de doute. (Maria Zakharova, porte-parole du ministère des affaires étrangères russe, sur Rossiya 24 : « Il faut en quelque sorte montrer au monde que la Russie n'est pas pacificatrice, mais joue son propre jeu. Et voilà que fait son apparition un nouveau tournant de la campagne antirusse sous la forme de déclarations de la Première ministre britannique. C'est le premier lien entre ces deux histoires [l'opération militaire russe en Syrie et l'affaire Skripal]. Le deuxième point, c'est le célèbre sujet des armes chimiques [attaques chimiques en Syrie]. »)
• L’état-major russe signale les préparatifs à la fois du montage false-flag de l’attaque et des concentrations navales US qui semblent préfigurer l’attaque contre les forces d’Assad. Le général Sergueï Roudchkoï, chef du commandement opérationnel à l’état-major général russe, a indiqué : « Nous notons des signes de préparation à d'éventuelles frappes [... L’US Navy] a déjà mis sur pied des groupes d'assaut équipés de missiles de croisière dans la partie orientale de la mer Méditerranée, dans le golfe Persique et dans la mer Rouge. » Auparavant, le 13 mars, le chef d’état-major général russe, le général Valeri Guerassimov, avait indiqué : « La Russie est prête à riposter contre une éventuelle frappe américaine sur Damas. En cas de menace contre la vie de nos militaires, les Forces armées russes prendront des mesures de riposte contre les missiles ainsi que contre les porteurs de ceux-ci. »
Cette crainte des Russes d’une attaque en Syrie est partagée par de nombreux observateurs antiSystème, alors que le lieu direct fait entre “l’affaire du poison“ et ce même projet d’attaque est moins évident. Certains montrent un scepticisme discret, renforcé par l’appréciation qu’ils font d’une victoire de plus en plus assurée de la coalition Syrie-Russie-Iran, etc. C’est le cas du colonel Pat Lang, de Sic Semper Tyrannis, le 17 mars 2018 : « Le ministère de la défense russe a déclaré que les États-Unis envisageaient des attaques de missiles de croisière contre la Syrie en réponse à une attaque chimique présumée dans la région de Gouta. C'est quelque peu amusant étant donné la récente capture d'une usine de gaz de chlore jihadi à East Gouts, mais, nous verrons. »
Ci-dessous, nous reprenons un texte de Elijah J. Magnier, un grand spécialiste de la région avec trente ans d’expérience journaliste, qui rassemble en un éditorial toutes ses craintes sur l’évolution de la situation. Il ne tient pas pour essentiels les évènements de “l’affaire du poison” ni des menaces de frappes aériennes. Pour lui, aucun doute ne peut être entretenu : la Syrie est le champ d’affrontement final entre les USA et la Russie, particulièrement dans la région de Ghouta, mais surtout en préparation pour ce que Magnier juge être une sorte de bataille “finale”, à Daraa.
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• La Syrie sera-t-elle la cause d’une guerre totale entre la Russie et les USA ? • Rassemblement à Daraa des forces alliées de la Syrie, dont le Hezbollah, en préparation à un déploiement militaire. • La ligne de démarcation régionale et internationale à Daraa sur le point de s’embraser.
Aujourd’hui Ghouta, demain Daraa …
Ce dont il s’agit, ce n’est pas de la Syrie, ni de la guerre sur son sol : nous avons affaire ici à une guerre ouverte entre l’axe dirigé par les États-Unis d’Amérique, l’Europe et leurs alliés au Moyen-Orient, et l’axe dirigé par la Russie et ses alliés. C’est une guerre pour le contrôle, l’influence et la domination au Moyen-Orient et dans le reste du monde.
Il est naturel que les USA résistent à la perte de la domination unilatérale qu’ils ont exercée après l’effondrement de l’Union soviétique, de 1991 à 2015. Car c’est en septembre 2015 que Moscou a décidé de déployer son armée de l’air, sa marine et des forces spéciales terrestres au Levant pour montrer sa présence à la face du monde et sa renaissance comme superpuissance après des décennies d’absence.
Il est par conséquent naturel que les USA défendent leur unilatéralisme et tentent d’empêcher le réveil de l’ours russe en mobilisant toutes leurs énergies et celles de leurs alliés occidentaux et arabes pour contrer les tentatives (fructueuses) de la Russie de faire valoir ses habiletés diplomatiques et sa puissance militaire en se servant du Levant comme levier.
Il est donc tout naturel aussi que les USA tentent de frapper le maillon faible (Téhéran) de l’alliance russo-sino-iranienne, en essayant de faire échouer l’accord sur le nucléaire iranien signé par les Nations Unies et les cinq membres permanents du Conseil de sécurité plus un (l’Allemagne).
Tout cela découle du résultat concluant (aux yeux de Moscou) de la guerre en Syrie, qui a empêché les USA de redessiner la carte du Moyen-Orient, de diviser l’Irak et la Syrie, de frapper le Hezbollah au Liban et d’accaparer des parties du nord de la Syrie pour eux et la Turquie et du sud pour Israël.
Washington a tiré avantage des slogans religieux et sectaires qu’ont fait circuler le groupe armé État islamique (Daech) et al-Qaeda, qui insinuent que le conflit en Syrie ne touche que « des musulmans de sectes différentes ». Le faux message est le suivant : « Ces Arabes musulmans ne manquent pas une occasion de se disputer et de s’entretuer au nom d’Allah ». Mais la vérité est ailleurs. C’est une lutte pour le pouvoir, le contrôle et la domination. C’est une lutte où tous les coups sont permis, où tous les moyens et prétextes tordus sont bons, y compris « l’extrémisme religieux », pour empêcher le retour de la Russie au Moyen-Orient et être en mesure de diviser la région.
Les faucons à Washington seraient-ils donc parvenus à leurs fins? La réponse la plus simple serait : « Non, ils n’y sont pas parvenus ».
Mais ces faucons américains cherchent toujours de nouveaux moyens d’accuser la Russie de soutenir le président syrien Bachar al-Assad, discrédité depuis des années par le martèlement incessant des médias institutionnels (qui sont devenus carrément des outils entre les mains des décideurs), qui considèrent les membres d’al-Qaeda comme des « modérés » depuis sept ans de guerre.
Les USA ont cherché à discréditer les dirigeants de Moscou à l’ONU afin d’intimider le président Vladimir Poutine, d’enrayer ses efforts visant à mettre fin à la guerre en Syrie et à arrêter la partition du Moyen-Orient, et d’empêcher la Russie d’éliminer entièrement l’essentiel de la présence djihadiste en Irak et en Syrie.
Moscou a dû apposer 11 « vetos » à l’ONU pour rejeter les multiples tentatives de Washington et de ses alliés d’attaquer la Syrie et de faire tomber le président Assad. La Russie a joué ses cartes diplomatiques de manière très astucieuse en Syrie en créant des zones de désescalade et de « déconfliction » dans le nord, autour de la capitale et dans le sud, afin de diviser la Syrie en carrés et de faire cesser la guerre dans différentes zones stratégiques, de façon à pouvoir consacrer suffisamment de forces armées à la lutte contre Daech d’abord, puis contre al-Qaeda et ses alliés.
La présence de Daech a été réduite à petite poche sous la protection des USA au nord-est de la Syrie. Cette zone située à l’est de l’Euphrate est devenue aujourd’hui le lieu sûr de Daech, où la Russie et les forces gouvernementales syriennes se sont vues interdire toute frappe contre le groupe terroriste. Les tentatives précédentes en ce sens se sont soldées par un bombardement massif des USA contre les forces locales et leurs alliés.
Cependant, la Russie a donné à la Syrie le temps qu’il lui fallait pour regrouper ses forces, frapper al-Qaeda et dégager diverses enclaves, limitant ainsi la mainmise d’al-Qaeda et de ses alliés dans la ville d’Idlib et aux alentours, autour de Damas (la Ghouta et Yarmouk) et dans le sud (Daraa et Quneitra).
L’armée syrienne a réussi à diviser les secteurs de la Ghouta malgré la campagne frénétique contre la Russie montée par les médias institutionnels et les tentatives ratées des USA aux Nations Unies de faire cesser les combats dans la Ghouta et de laisser cette enclave comme un ulcère sur le dos de la capitale syrienne.
La colère américaine que suscite l’attaque syro-russe de la Ghouta mérite qu’on s’y attarde. Les USA ont occupé la zone frontalière d’al-Tanf entre la Syrie et l’Irak pour s’en servir comme plateforme de lancement de ses opérations militaires en direction de Deir Ezzor au nord et de la Ghouta à l’est. Les USA comptaient occuper les villes de Deir Ezzor et d’al-Qaïm au nord-est, ainsi que la capitale Damas. Sauf que l’Iran s’est déployé dans le secteur où les forces américaines occupaient des positions, les isolant ainsi dans la poche d’al-Tanf, pour ensuite faire un saut qualitatif afin de libérer Deir Ezzor et al-Qaïm en défaisant les forces de Daech, qui se sont retirées dans les zones sous l’influence des USA, à l’est de l’Euphrate.
De plus, la Ghouta fait ressortir clairement l’échec du plan américain consistant à attaquer Damas. La planification militaire stratégique de lier al-Tanf et la Ghouta aurait pu se concrétiser si l’armée syrienne et la Russie n’étaient pas intervenues à temps pour enclore ces zones et attaquer les djihadistes en vue de les forcer à se rendre et à se retirer à Idlib. Les USA voulaient constituer une menace réelle contre Damas ou du moins empêcher la tenue des élections parlementaires et présidentielles prévues l’an prochain. En contrôlant la Ghouta, les djihadistes étaient censés poursuivre le rythme des bombardements et ainsi rendre la capitale syrienne « insécure ».
Les USA et la communauté internationale ont bien tenté de mettre fin à la bataille dans la Ghouta, mais en vain. Ce qui a incité Washington à pratiquer son passe-temps préféré, l’imposition de sanctions contre la Russie, sans pour autant réussir à empêcher l’armée syrienne (qui combat sans ses alliés, sauf la Russie) de reprendre son contrôle de la Ghouta. La réponse de Moscou a été immédiate, en bombardant Daraa et en frappant la zone d’influence d’al-Qaeda pour montrer vers où se déplacera le théâtre des opérations militaires par la suite.
Mais les choses continuent de se précipiter. La réponse des USA ne s’est pas fait attendre, par l’entremise de l’allié britannique, qui a tiré profit de l’empoisonnement de l’ancien espion Sergey Skripal à Londres pour accuser Moscou d’être derrière son assassinat. Le message envoyé est clair : tous les moyens sont bons pour assurer le contrôle du Moyen-Orient, plus particulièrement de la Syrie.
Israël a renchéri en demandant le retour des forces de la FNUOD, qui se sont retirées en août 2014 à la suite de l’enlèvement de 47 membres des forces de maintien de la paix de l’ONU par al-Qaeda (le Qatar a payé la rançon pour leur libération). La demande israélienne coïncide avec le rassemblement à Daraa des forces alliées à la Syrie, dont le Hezbollah, en préparation à un déploiement militaire de grande envergure (ce que j’ai appris de sources bien informées). Les USA considèrent que la bataille de Daraa les vise directement, eux et leur allié israélien, d’autant plus qu’ils sont partie prenante, avec la Russie et la Jordanie, à l’accord visant à limiter l’escalade dans cette région, et qu’ils sont résolus à servir les intérêts d’Israël et à assurer sa sécurité dans le sud de la Syrie.
Dans un climat politique aussi tendu, il est facile de faire le lien entre l’affaire de l’ancien espion russe et la déclaration sans équivoque du président Vladimir Poutine et d’autres dirigeants russes, qui ont menacé de recourir à la force militaire contre les USA et tout autre pays en Syrie s’il le faut.
La guerre en Syrie est loin d’être une guerre ordinaire. C’est LA guerre entre les deux superpuissances et leurs alliés, où des soldats américains et russes sont directement engagés sur le terrain, où se déroule une lutte pour la domination et le pouvoir. Aux yeux des Américains, l’absence de victoire est pire que la perte d’une bataille. Qui plus est, la victoire de la Russie et de ses alliés sur le sol syrien à l’issue de chaque bataille est un coup porté directement au cœur de Washington et de ses alliés.
La Russie a compris le message des USA, du Royaume-Uni et de l’OTAN, dont celui colporté par les médias institutionnels, et n’a eu d’autre choix que d’intensifier le rythme de la guerre en Syrie le plus durement possible.
Les superpuissances étant au bord du précipice, le risque de se trouver engagés dans une guerre d’envergure cosmique n’est dorénavant plus un pur produit de l’imagination ou un simple résultat sensationnel de calculs irréalistes.
Les portes de Damas s’ouvriront-elles vers une guerre majeure qui détruira tout? C’est une question qu’il est très important de se poser, mais à laquelle il est très difficile de répondre.
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