Poutine officialise le Silent Coup contre Trump

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Poutine officialise le Silent Coup contre Trump

Le président russe a, dans des déclarations publiques, pour la première fois rendue “officielle” dans la communication internationale au plus haut niveau l’hypothèse d’un “Coup” (“Silent Coup”, “Maidan Style Coup”, comme il vous plaira) contre le président-élu Donald Trump. Cette intervention n’a pas eu l’heur de déclencher quelque émotion que ce soit dans les mêmes sphères les plus hautes de la communication internationale... Étrange vérité-de-situation de ces temps où la narrative et le déterminisme-narrativiste ont tant de force et d’influence sur les psychologies affaiblies, avec l’esprit et le jugement à mesure, qu’ils interdisent des réactions rationnelles et normales de la part des directions en charge dans les relations internationales.

De telles déclarations d’un président russe concernent en effet la situation aux USA, qui sont cette puissance que l’on sait, au statut exceptionnaliste sinon quasi-divin que l’on sait ; elles concernent la possibilité d’un “coup d’État” de type postmoderne d’habitude réservé à des pays de seconde zone, – républiques bananières ou rejetons marginaux de l’ex-URSS ; c’est assez dire si, in illo tempore vraiment pas si lointain, elles eussent fait l’effet, ces déclarations, d’une bombe et auraient ouvert une “crise sans précédent et sans équivalent” avec de nombreuses réactions officielles, d’ailleurs dans divers sens, soit pour s’en inquiéter affreusement, soit pour les condamner catégoriquement comme injurieuse et insupportable.. Ce n’est absolument pas le cas et les déclarations ont été enregistrées, quand elles ont été signalée et si même elles ont été entendues, sans grand émoi ; après tout pourrait-il se dire chez les plus avisés, on sait qui est Poutine, on nous l’a assez répété, inutile de s’inquiéter de ses manœuvres d’intoxication, etc.

Tout cela contribue à éclairer d’une façon radicalement crue, voire tout simplement transcendantale, selon une appréciation métahistorique expliquant le quasi-autisme devant de telles déclarations, la profondeur quasiment abyssale de la déformation pathologique affectant la perception et les psychologies du personnel-Système engagé dans cette crise. D’un autre côté, et sans doute pour atténuer le propos autant que la réaction dont il voudrait se faire l’écho, on dira, peut-être d’une façon au moins amèrement ironique, qu’il y a certainement le fait qu’il se trouve que la “crise sans précédent et sans équivalent” évoquée ci-dessus comme étant ce qui aurait dû être déclenché par de telles déclarations, nous y sommes depuis tellement longtemps et depuis si longtemps qu’on pourrait même créer un acronyme pour faciliter le discours (crise SPSE pour “Sans Précédent & Sans Équivalent”), et tout cela sans vraiment y prêter attention... Dans ce cas, effectivement, les déclarations extraordinaires de Poutine reprennent toute leur logique, viennent à leur heure, et ne provoquent effectivement pas de réactions particulières parce qu’elles ne sont plus qu’une illustration d’un aspect d’une vaste situation que nous comparons depuis un certain temps à un “tourbillon crisique”, et dont le cœur, ou le trou noir, se trouve aujourd’hui, désormais, au cœur du Système, à Washington D.C.

Même chose ou même type de remarque d’ailleurs, dans le même sens mais venue de l’autre côté, pour ce tweet de l’ambassadrice des USA sortante (jusqu’au 21 janvier), Samantha Power tweetant ès qualité, avec cette phrase chargée d’un tel sens à peine dissimulé qu’elle (la phrase ou Power ?) mériterait, dans les temps d’une telle tension, une explication formelle, une mise au point officielle, un blâme officiel, une mise à pieds, ce qu’on veut dans ce sens, si l’on se trouvait dans un univers normal ; tant cette courte phrase exprime dans ce temps de tension de cette crise-SPSE, beaucoup plus une menace réelle qu’une simple affirmation de la poursuite d’une opposition dont elle (Power) ne pouvait pourtant être en aucune façon l’expression dans les fonctions officielles qu’elle occupait (qu’elle occupe encore pour quatre jours) ; cette phrase disant à peu près, comme des combattants provisoirement vaincus quittent une position pour en occuper une autre et passer de nouveau à l’attaque, ou bien même, profitant de la trêve d’une pause administrative pour lancer cette contre-attaque :  “Nous n’allons pas disparaître, comme ça, aimablement, dans la nuit” :

« Changing twitter accounts in 6 days when Donald Trump enters the Oval. Follow me ‪@SamanthaJPower . We are not going gently into the night. »

Cette sorte de déclarations écrites de la part de hauts fonctionnaires officiels, faites sans le moindre souci de dissimulation et ès qualité, donne une fois de plus, après tant d’autres manifestations du genre, une bonne mesure du climat régnant à Washington D.C. au sein des structures mêmes du pouvoir et du gouvernement américanistes. On pourrait bien sûr ajouter, dans le délai rapproché, les déclarations du directeur de la CIA Brennan à destination du président-élu, telles que nous les avons présentées. On pourrait sans aucun doute encore y ajouter, – il y a là vraiment une tendance à l’autodestruction inarrêtable, – la remarque faite hier par John Kerry à Davos, souligné par des gloussements de rire venus du poulailler des 0,0001% assistant à la conférence, sur la durabilité de l’administration Trump, – un an, peut-être deux ans au grand maximum, hein, pas plus... – jusqu’à ce que, bien entendu, l'on implore le retour de Sa Grandeur Elle-Même, Her majestueuse Majesty BH Obama...

« Speaking at the World Economic Forum in Geneva on Tuesday, Secretary of State John Kerry said that he does not believe that president-elect Donald Trump will repeal everything he says he will when his administration comes into power on Friday, but if he does it could cause significant damage for “a year, two years, whatever, while the [Trump] administration is there.”

» John Kerry : We’ll have injured our own credibility in, conceivably, an irreparable way. Not irreparably. There's time, and that's just too dramatic. But we will have done great injury to ourselves. And it will hurt for the endurance of a year, two years, whatever, while the [Trump] administration is there.

» [crowd laughs and claps]... »

Il s’agit bien entendu d’un processus extraordinaire de puissance impliquant directement la destruction de la légitimité du pouvoir américaniste en même temps que la déstructuration et la dissolution des composants de son architecture, comme nous l’observions précisément à l’occasion des déclarations de Brennan :

« Plus encore que la trace d’un Silent Coup qui n’en finit pas de faire un bruit assourdissant, c’est à cette implosion que nous pensons lorsque, par exemple, l’on assiste à ces échanges surréalistes entre l’actuel directeur de la CIA Brennan (directeur-sortant) et le président-élu, où le premier estime (sur FoxNews) que le président-élu parle beaucoup trop, qu’il ferait mieux de mesurer ses paroles, “to watch what he says” (“sinon...“, pense-t-on aussitôt comme l’on pense à Dallas-JFK) ; où le second riposte (à coups de tweets) que Brennan ferait lui aussi mieux de se taire puisqu’il s’avère qu’il est l’instigateur de tant de montages, et notamment la diffusion “fuitée” des fausses nouvelles et nouvelles fabriquées, dossiers-montages, FakeNews, etc., contre lui-même (Trump). »

L’expansion de ce climat officiellement affiché et audible par tous, par des dirigeants US es qualité, est donc décisivement renforcé, au niveau international, par l’intervention de Poutine. Voici ci-après les déclarations de Poutine, telles que les synthétise ZeroHedge.com, notamment à partir de Sputnik.News et Bloomberg.News (liens référencés dans le texte).

« Warning that a “soft coup” is being waged against Donald Trump, Russian President Vladimir Putin said that he sees attempts in the United States to “delegitimize” US President-elect Donald Trump using “Maidan-style” methods previously used in Ukraine, where readers will recall president Yanukovich was ousted in 2014 following a violent coup, which many suspect was conducted under the auspices of the US State Department and assorted US intelligence operations.

» Putin said he doesn’t believe that Donald Trump met with prostitutes in Russia, calling the accusations part of a campaign to undermine the election result, and suggested that an internal political struggle is underway in the United States despite the fact that the presidential election is over, and added that reports of alleged Russian dossier on Trump are fake as “our security services do not chase every US billionaire.”

» Unsubstantiated allegations made against Trump are “obvious fabrications,” Putin told reporters in the Kremlin on Tuesday. “People who order fakes of the type now circulating against the U.S. president-elect, who concoct them and use them in a political battle, are worse than prostitutes because they don’t have any moral boundaries at all,” he said. The Russian president, cited by BBG, said that Trump wasn’t a politician when he visited Moscow in the past and Russian officials weren’t aware that he held any political ambitions. Putin did not stop there and said that the compromising report compiled on Trump was a “hoax”, and said those who ordered the Trump dossier are “worse than prostitutes.”

» Putin, who reiterated he had never met Trump, said he hoped that Moscow and Washington could eventually get their troubled relations back to normal, adding he has no reasons to “attack or defend him.” “I don't know Mr. Trump personally, I have never met him and don’t know what he will do on the international arena. So I have no grounds to attack him or criticize him for anything, or protect him or whatever,” Putin said. Putin noted that there is a category of people who leave without saying goodbye, “out of respect for the present situation,” while others say goodbye all the time, but do not go away. “The outgoing administration, in my opinion, belongs to the second category,” he said»

On peut voir aussi une reprise complète des déclarations de Poutine dans un article d’Alexander Mercouris, sur The Duncan.com. (La déclaration se retrouve sur le site officiel du Kremlin, dans la retranscription d’une conférence de presse donnée par les présidents de la Fédération de Russie et de Moldavie, à la fin d’une visite de Poutine en Moldavie, hier après-midi.) Mercouris appuie sur ce qu’il estime être la colère de Poutine qui, à son avis, pousse le président russe à faire de telles déclarations ; lesquelles sont, selon lui (Mercouris), “inhabituellement rudes”, sinon “grossières” par dérision, et complètement inhabituelles chez lui, dans ses déclarations publiques... Poutine est personnellement concerné, – ce qui ne veut pas dire impliqué certes, – par les événements en cours à Washington D.C. où il voit, justement, la destruction d’un édifice de pouvoir dont le poids et la stature restent, qu’on le veuille ou non, une poutre-maîtresse des relations internationales...

« Having twice seen Putin in action in person – in 2014 and 2016 at SPIEF – I noted one notable aspect of his personality, which so far as I am aware never gets mentioned.  This is that Putin likes to mask his anger behind a veil of humour. These comments, with their jokes about “trying to get closer to life”, about not asking the Nobel Committee to award Trump a Nobel Prize (an obvious dig at Barack Obama), and about Russian prostitutes being “the best in the world”, are a classic example.

» Putin has obviously been seething for weeks over the US campaign to discredit Trump by alleging non-existent Russian links and Russian interference in his election victory, and the Trump Dossier has clearly caused this anger to boil over.  Anyone familiar with Putin will have noticed that he struggled during this press conference to keep his anger under control. The extent of Putin’s anger is clearly shown by what he had to say about those whom he clearly believes are behind the anti-Trump campaign.

» First and foremost these are US President Obama and his administration.  Putin recently gave a scathing assessment of Obama, and in these comments he did so again, ridiculing the award to him of the Nobel Peace Prize, and talking of Obama’s administration as “people who keep saying goodbye but don’t leave”.  These comments were clearly intended to refer to Obama himself, but as is invariably the case Putin was careful not to name him. The other people are clearly the US and possibly the British intelligence agencies, who Putin clearly believes intentionally fabricated the Trump Dossier in order to discredit Donald Trump, though his comments leave open the possibility that the Obama administration (including the outgoing President) was involved as well.  His comments about these people are damning, whilst interjecting a for Putin very unusual note of self-pity. »

Ainsi Poutine joue-t-il, avec colère comme le suppose Mercouris, le rôle du petit garçon de la fable, celui qui s’exclame “Mais le roi est nu”, – quoique ce serait plutôt, dans son cas, colère plutôt qu’étonnement : “Mais bon Dieu, vous ne voyez donc pas que le roi est nu ?!”. Il y a bien longtemps que les Russes ont mesuré le désordre et la confusion déstructurante où se trouve le pouvoir américaniste, et derrière lui tout le bloc BAO. Dés 2012, le très-impressionnant et très-avisé Lavrov avait commencé à jouer au psychanalyste bénévole de ses divers “collègues” du bloc-BAO, Hillary en tête. Il avait été stupéfait par la réponse de Kerry lorsque lui, Lavrov, lors de leur première rencontre du printemps 2013, l’avait félicité d’avoir écarté cette “féministe guerrière” type-R2P Victoria Nuland, pour s’entendre répondre qu’au contraire elle était promue. Nous n’avons pas affaire à des comportements “normaux”, même vicieux, méchants, traîtres, hier avec la Syrie et l’Ukraine,  et bien moins encore aujourd’hui, avec USA-2016 enchaînant sur USA- 2017, poussant le paroxysme vers des territoires inconnus, terra incognita de l’hystérie. Il s’agit d’une pathologie collective qui s’arrangerait fort bien de porter la marque du Diable...

Il nous apparaît évident qu’en laissant éclater sa colère, y compris celle qu’il dissimule derrière l’humour, Poutine ne fait pas la promotion de Trump, ou quelque chose de cette sorte, – comme cela serait interprété aussitôt, le chose vue du nid de coucous qui leur sert d’asile du bloc-BAO, si les coucous s'en avisaient... Sa colère concerne bien entendu l’ensemble de la situation washingtonienne, cet extraordinaire amas d’impuissance, d’aveuglement, d’invectives et d’affectivisme allant dans tous les sens et de toutes les façons ; cette façon, pour cette Grande République qui ne cesse depuis plus de deux siècles d’être si satisfaite d’elle-même pour la magnifique machinerie constitutionnelle mise en place à l’origine pour sa direction, de massacrer la susdite machinerie, à la façon d’un enfant gâté qui fait tomber les pots de confiture les uns après les autres. (Inutile de s'expliquer longuement sur l'évidence : on sait que Poutine est homme d'ordre, et un conservateur modéré, qu'il recherche d'abord la stabilité et nullement quelque regime change que ce soit à Washington...)

Finalement, et pour aller au terme, Poutine, dans de tels instants de colère, se fiche de savoir qui va aller à la Maison-Blanche, ce qui lui importe est qu’il y ait quelqu’un à la Maison-Blanche ; et quelqu’un dont le secrétaire d’État sortant n’ait pas le culot incroyable et irresponsable de dire in fine à la basse-cour gloussante de Davos, et pour bien traduire son propos : “Trump, il durera un an, peut-être deux ans...” Cela venu du représentant de la plus catastrophique administration si satisfaite d’elle-même qu’il y ait eu depuis longtemps à Washington, peut-être bien une administration-SPSE pour ce qui est de la création de chaos ; et la crème de la représentation des 0,001% du monde, dito “Les Maîtres de l’Univers”, de glousser de plus belle dans son poulailler bardé de $milliards et de $milliards.

En d’autres mots, on voit partout, et particulièrement à Washington D.C., qu’en vérité le Système ne se supporte plus lui-même et qu’il a choisi la solution-Lincoln (« ...nous devons éternellement survivre [issue définitivement écartée], ou mourir en nous suicidant »). Nous comprenons ce sentiment d'insupportabilité, et compatissons à mesure.

 

Mis en ligne le 18 janvier 2017 à 16H47