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2516Les analystes interviewés par Sputnik.News, cette institution absolument propagandiste d’où rien d’acceptable pour nos belles âmes ne peut sortir, semblent n’avoir pas une très haute idée de la capacité de compréhension des USA, de leurs soldats, de leurs chefs, etc. Pour autant, on notera qu’ils ne sont pas vraiment agressifs ; simplement, une certaine indulgence attristée, qui les fait considérer les agissements US avec une préoccupation compréhensive.
Ainsi en est-il d’un expert et analyste de haut niveau, le Directeur de l’Institut Scientifique et de Recherche de Sociologie Politique, Viacheslav Smirnov. Il observe que les soldats US et leurs chefs en Syrie sont très nerveux et n’osent s’engager dans de trop vastes opérations parce qu’ils ignorent précisément ce qu’ils font en Syrie. Chacun travaille de son côté, – les militaires, la bureaucratie civile du Pentagone, le renseignement, la direction politique civile, le Congrès, etc., et par conséquent aucune coordination, et encore moins la moindre coopération ne sont à l’ordre du jour. Ainsi Smirnov parle-t-il le 23 juin 2017 sur Sputnik.News :
« “The US military are getting very nervous, they try to demonstrate their presence, safeguard it and identify the objects which theoretically may pose any threat to them. This, in fact, explains why the Americans do not conduct any large-scale operations but mainly focus on their air defense and aviation,” Vyacheslav Smirnov told Sputnik. He further elaborated that there is no coordination between any parties involved: the commanders of the US-led coalition are acting by themselves, the [peaceful] negotiations are going on separately, while the US Senate and the Congress are living their own lives. There is no interconnection between all of them, and the US military are minding their own business.
» The US, he said, does not fully understand what it is doing in Syria. “There are certain elements of the Cold War. However I would not compare it with the situation during the war in Korea, Vietnam or during the Cuba crisis. The Americans have one definite problem: they do not understand why they are present in Syria,” Vyacheslav Smirnov told Sputnik. “They don’t have any particular interests in Syria apart from their unwillingness to lose face in leaving. That is why they are forced to react to the developments in the country,” the political analyst concluded. »
On notera que Smirnov dirige un institut chargé de la sociologie militaire, et nullement de la stratégie ou de la tactique, ou de l’armement, ou de la géopolitique, etc. On en déduira que le comportement US dans ses aventures extérieures que tant d’experts et de commentateurs nous expliquent lumineusement depuis des lunes selon de puissants concepts géopolitiques et de très-grande politique, est donc l’objet d’une étude sociologique spécifique. D’où l’accent mis par Smirnov sur le désarroi des soldats et de leurs chefs.
(Et l’on espère qu’il a dans son équipe des psychologues et des psychiatres car cette sorte d’approche sociologique poursuivie par la psychologie et la psychiatrie est très largement confirmée par l’ampleur phénoménale des troubles psychologiques [Post-Traumatic Stress Disorder, ou PTSD] frappant plus de deux millions de vétérans des “guerres” innombrables accouchées par le Système et sa courroie de transmission Washington D.C./Pentagone.)
Faut-il s’étonner de ces constats ? Naturellement pas, puisqu’effectivement, dès l’origine de cette séquence, la cause de ces entreprises bellicistes peut-être résumé par l’expression “Just Because”... (L’expression vient d’une plaisanterie au sein du Pentagone, en 1989, lorsque fut lancée l’intervention US au Panama. L’opération avait comme nom de code, – la vertu, déjà omniprésente, – Just Cause. Dans les couloirs du Pentagon, cela devint très rapidement Just Because.) Cela se rapproche de la fameuse intervention si souvent déformée par tous ceux qui aiment voir des complots partout, du général Wesley Clark en 2007. Nous l’avons évoquée à plusieurs reprises, et nous le ferons encore une fois car elle se suffit à elle-même, elle constitue une explication fondamentale, sinon la seule explication sérieuse du phénomène extraordinaire que constitue la politiqueSystème suivie par les USA, d’une façon si voyante et si furieuse, depuis le 11 septembre 2001.
« ... [L]a fameuse intervention radio (en mars 2007) sur Democracy Now !, intervention filmée à l’époque et diffusée depuis sous forme de DVD, où Clark révèle qu’en octobre 2001, le Pentagone annonçait à ses cadres le projet hautement secret d’envahir 7 pays en 5 ans. Cette “révélation” accrédita l’idée d’un plan de conquête du monde prêt avant même le 11 septembre, et réalisé depuis avec la perfection qu’on lui voit.
» L’intervention, qui date du 2 mars 2007 et qu’on peut trouver sur YouTube remis en ligne à la date du 31 janvier 2012, a été détaillée sur notre site le 5 mars 2007. La chose a été depuis constamment reprise, répercutée, remâchée, etc., comme la démonstration et la preuve évidente du plan, disons de conquête du monde pour rester dans la mesure, du Pentagone et du reste, agissant ou pas c’est selon pour le compte du “Nouvel Ordre Mondial”. (“Prendre le contrôle de l'Irak, l'Iran, Lybie, Syrie, Liban, Somalie, Soudan fait partie des plans du Nouvel Ordre Mondial” dit la présentation de la vidéo de Clark. Le titre présentant l’intervention est “un plan pour prendre le contrôle du Moyen-Orient avant fin 2012”, selon une chronologie complètement fausse qui fait se demander si l’entremetteur entend bien ce qu’on entend, ce qu’on traduit et ce qu’on lit puisque Clark parle en 2007 d’une information qui lui est donnée en octobre 2001 pour la conquête, à partir de cette date, de “sept pays en cinq ans”, c’est-à-dire affaire bouclée en 2007).
» En fait de montrer un plan de conquête du monde parfaitement mis au point, Clark montre surtout et essentiellement, en quelques phrases frappantes, l’extraordinaire confusion régnant au Pentagone en septembre et octobre 2001, après 9/11, avec la nécessité de “faire quelque chose” c’est-à-dire n’importe quoi, avec la décision d’attaquer (l’Irak puis le reste) selon une remarque d’un des interlocuteurs de Clark (un officier travaillant au Pentagone), présentant la logique que “lorsque vous avez un marteau-pilon, n’importe quel problème doit devenir une mouche qu’il faut écraser” (traduction-interprétation à notre façon, qui rend l’esprit de la chose). Donc, la véritable révélation qu’apportait Clark concernait bien la totale impréparation et la grotesque confusion du Pentagone devant l’attaque, ce qui a été amplement vérifié, amplifié et re-démontré à plusieurs reprises depuis. Les deux extraits de son intervention ci-dessous (on peut voir la traduction en français sur le DVD) en portent témoignage, ou bien c’est refuser de lire... Alors et après tout, il suffit d’affirmer que, de toutes les façons, les USA dominent le monde complètement et pour l’éternité, sans même que nous nous en apercevions et il n’est d’ailleurs pas nécessaire que nous nous en apercevions, – argument suprême, qui devient très en vogue ces derniers temps...
» Clark décrivant le Pentagone [lors de l’émission de Democracy Now ! du 5 mars 2007] ... “I knew why, because I had been through the Pentagon right after 9/11. About ten days after 9/11, I went through the Pentagon and I saw Secretary Rumsfeld and Deputy Secretary Wolfowitz. I went downstairs just to say hello to some of the people on the Joint Staff who used to work for me, and one of the generals called me in. He said, ‘Sir, you’ve got to come in and talk to me a second.’ I said, ‘Well, you’re too busy.’ He said, ‘No, no.’ He says, ‘We’ve made the decision we’re going to war with Iraq.’ This was on or about the 20th of September [2001]. I said, ‘We’re going to war with Iraq? Why?’ He said, ‘I don’t know.’ He said, ‘I guess they don’t know what else to do.’ So I said, ‘Well, did they find some information connecting Saddam to al-Qaeda?’ He said, ‘No, no.’ He says, ‘There’s nothing new that way. They just made the decision to go to war with Iraq.’ He said, ‘I guess it’s like we don’t know what to do about terrorists, but we’ve got a good military and we can take down governments.’ And he said, ‘I guess if the only tool you have is a hammer, every problem has to look like a nail.’
» “So I came back to see him a few weeks later, and by that time we were bombing in Afghanistan. I said, ‘Are we still going to war with Iraq?’ And he said, ‘Oh, it’s worse than that.’ He reached over on his desk. He picked up a piece of paper. And he said, ‘I just got this down from upstairs’ — meaning the Secretary of Defense’s office — ‘today.’ And he said, ‘This is a memo that describes how we’re going to take out seven countries in five years, starting with Iraq, and then Syria, Lebanon, Libya, Somalia, Sudan and, finishing off, Iran.’ I said,‘Is it classified?’ He said, ‘Yes, sir.’ I said, ‘Well, don’t show it to me.’ And I saw him a year or so ago, and I said, ‘You remember that?’ He said, ‘Sir, I didn’t show you that memo! I didn’t show it to you!’” »
Toute la “stratégie” US est enfermée dans cette anecdote fameuse, dont la source est directe et indéniable, et dont on a tant de fois voulu lui faire dire le contraire de ce qu’elle dit. Depuis l’origine, les USA sont en guerre sans savoir pourquoi, ayant eux-mêmes créé un enchaînement dont ils sont prisonniers, et qu’on recouvre en passant d’arguments de circonstances pour les justifier après-coup, de l’intervention humanitaire au regime change (autre application directe du Just Because), aux ressources pétrolières, à l’alliance sunnite, à la “refonte démocratique” du Moyen-Orient, au “chaos créateur”, à l’encerclement stratégique des uns et des autres, jusqu’à la Russie, et peut-être un jour l’encerclement stratégique des USA lorsqu’aura éclatée The Second Civil War, – c’est-à-dire dans fort peu de temps.
A ce compte, il se justifie d’autant plus de mettre les entreprises guerrières US sous surveillance sociologique, et même, et plutôt psychiatrique. Quoi qu’il en soit, il faut tout de même reconnaître désormais à l’intervention US en Syrie une certaine cohérence : son incohérence totale qui rend les soldats US si nerveux et si prudents puisque leur action se fait comme s’ils étaient dans une nuit totale, est désormais parfaitement en phase avec le pouvoir de l’américanisme à Washington. De ce fait, la nuit s’est éclairée et l’obscurité a été remplacée par bien pire qu’elle : le désordre total gouverné par l’obsession, la schizophrénie et la paranoïa.
Mis en ligne le 24 juin 2017 à 09H35
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