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52134 janvier 2019 – Il est en train de se créer autour de Trump ce que l’on pourrait effectivement qualifier de “tourbillon-crisique”, l’intitulé même de cette rubrique (T.C.) à l’intérieur du Journal-dde.crisis. C’est-à-dire, un événement dynamique essentiellement sinon de pure communication, tournoyant par l’addition d’actes crisiques qui s’alimentent les uns les autres, créant un “climat” spécifique (et crisique naturellement), lequel active une modification de la tendance politique, puis de la situation politique elle-même. Cela concerne l’un des deux volets principaux (avec la lutte contre l’immigration illégale) des promesses électorales spécifiques de Trump, qui est la voie de l’attaque, sinon de la destruction de l’interventionnisme américaniste. Le tourbillon a pris naissance bien entendu à partir de la décision du retrait de Syrie suivi de la démission de Mattis.
Le point le plus remarquable, le plus puissamment significatif par son symbolisme, toujours au niveau de la communication, c’est le commentaire historique de Trump fait avant-hier sur un ton presque anecdotique, affirmant ou rappelant c’est selon que l’intervention de l’URSS en Afghanistan (en décembre 1979) conduisit le régime soviétique à la banqueroute. C’est reprendre la thèse que cette intervention est un des facteurs importants de l’effondrement de l’URSS, et que l’analogie vaudrait bien aussi pour les USA ; effondrement d’un “empire” par excès d’extension dans les deux cas...
Ce jugement historique contredit la narrative “officielle” et complètement faussaire du War Party, affirmant que ce sont les dépenses de la pseudo-“course aux armements” des années 1980 qui eurent la peau de l’“empire” soviétique, face au dynamisme imaginatif et prodigue (IDS, ou “guerre des étoiles”) du Pentagone. Le signe de l’importance de cette déclaration “anecdotique” se trouve dans la réaction furieuse de la presseSystème, et jusqu’à un commentaire d’un des directeurs de l’AEI, le think tank des néo-conservateurs martelant avec une égale fureur que l’intervention soviétique en Afghanistan n’eut qu’en effet mineur sur le PIB soviétique, donc ne peut être considérée comme une des causes essentielles de l’effondrement de l’URSS.
Ainsi le War Party est-il mis sur la défensive, du jamais-vu à Washington D.C. et à “D.C.-la-folle” depuis le Vietnam.
L’affirmation n’est pas justifiée par cette seule passe d’armes. D’autres signes de communication la justifient, comme cette déclaration de Trump sur la Syrie à nouveau, où les USA ne récoltent selon lui « que du sable et de la mort » ; ou cette autre, encore plus remarquable parce qu’elle signale son désintérêt nouveau pour une politique de confrontation avec l’Iran, où Trump observe que « les Iraniens peuvent faire ce qu’ils veulent en Syrie », – littéralement, que ce n’est pas, que ce n’est plus l’affaire des USA... Il y a même ce cas, qui fait grand bruit parce qu’il sort du seul domaine favori des antitrumpistes, des lubies deThe-Donald, pour jaillir du cœur même, sacré et religieux, de la presseSystème : la démission tonitruante, lundi, du présentateur et analyste prestigieux de la NBC William Arkin, explicitement justifiée par l’hérétique lui-même, par l’emprisonnement volontaire du réseau dans la narrative du War Party et dans la promotion des “guerres sans fin”.
Que se passe-t-il chez Trump ? Est-ce simplement un caprice, une foucade, un tour de valse de plus ? Peut-être et possible mais pas complètement assuré si l’on considère la constance et la fermeté de sa trajectoire des dernières semaines et la liquidation des “généraux” qui étaient là en principe pour tenir la bestiole, et la tenir dans la ligne... D’autre part, certaines interventions de Trump, notamment celle sur l’URSS en Afghanistan, révèlent une culture politique qui ne lui est pas naturelle. A moins que notre héros se soit mis à lire les bons auteurs ou que Bolton soit soudain devenu fou, on parierait plutôt sur une influence majeure hors du cadre connu. Cette hypothèse n’est pas gratuite.
L’on chuchote de plus en plus fort qu’il y a là l’effet de l’influence d’un homme, ami de Trump et joueur de golf comme lui et avec lui, et “en même temps” anti-interventionniste désormais bien installé et disposant d’une formation de grande qualité. Il s’agit du sénateur Rand Paul, fils de Ron et chef de file à bonne école et au Sénat des antiwar. Ce n’est pas pour rien ni pour le goût des coïncidences, bien entendu, que le directeur de cabinet adjoint de Paul Sergio Gor a diffusé le communiqué suivant, après une intervention du sénateur contre Mitt Romney qui vient de publier une critique acerbe de Trump :
« Le sénateur Rand Paul considère le président Trump comme un ami, mais il est également ravi de sa politique conservatrice, qui comprend des réductions d'impôt historiques, des réductions massives de la réglementation, la nomination de juristes, et la mise en œuvre d'une politique étrangère ‘America First’ en mettant l'accent sur l'Amérique et pas sur tous les problèmes dans le monde. Ce président tient ses promesses, et les républicains modérés devraient travailler avec lui pour accomplir encore plus. »
Ron Paul n’aurait pas dit mieux... Certains commencent à marmonner, à “D.C.-la-folle”, que tout se passe comme si nous avions “le président Rand Paul”. Ils pourraient aussi bien dire “Président Ron Paul”, ce qui est un juste retour des choses si l’on considère la campagne électorale sabotée de Ron en 2012. Par conséquent, les chuchotements qui aiment bien vaticiner dans leur boule de cristal nous disent aussi que Trump offrirait la vice-présidence à Rand en 2020, s’il est réélu, c’est-à-dire quand il sera réélu puisqu’il ne doute de rien, de façon à lancer un Rand Paul-2024 à la Maison-Blanche.
On verra, on verra car tout cela est bien loin et tant de choses se passent si vite par ces temps qui courent à bride abattue... En attendant, la possible/probable évolution des choses pour le plus court qui nous importe, loin de conduire à une victoire et à un apaisement, conduit exactement au contraire : l’intensification de la “Guerre civile froide” aux USA, et de la folie à “D.C.-la-folle”. Voyez par exemple combien les ordres de désengagement ne sont pas aussitôt suivis d’effets, et l’on est passé de un mois à trois mois pour évacuer les soldats US de Syrie, manœuvre évidente du Pentagone.
On observera alors, plus simplement et plus sobrement, mais avec une étincelle festive au bout de la plume : de plus en plus de désordre et la validité renforcée de l’analogie collapsologique entre l’URSS et les USA.
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