Trump vs Congrès : le DeepState en a marre

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Trump vs Congrès : le DeepState en a marre

Première chose dont il faut instruire son esprit : la fin officielle de l’enquête Mueller sur le Russiagate dans sa dimension antiTrump, et qui blanchit officiellement le président de toute accointance avec la Russie, n’a absolument pas interrompu la bataille entre Trump et les démocrates du Congrès (essentiellement la Chambre des Représentants, où les démocrates ont la majorité). On pourrait même dire au contraire qu’elle l’a exacerbée. Elle a durci notablement la position de Trump qui estime que les démocrates doivent cesser leur “chasse aux sorcières” puisqu’il est enfin prouvé n’y a pas de sorcière à la Maison-Blanche mais au contraire un immense président d'une gloire sans précédent, et qu’il faut le laisser travailler comme il l’entend to Make America Great Again ; les démocrates, poussés par leurs extrémistes, se durcissent également au nom des pouvoirs constitutionnels du Congrès que le président bouscule sans le moindre ménagement.

Une réunion entre les chefs du groupe démocrate au Congrès (Chambre et Sénat) et Trump à la Maison-Blanche s’est conclue en trois minutes, dans des conditions catastrophiques d’affrontement. Trump a donc reçu Pelosi (Speaker de la Chambre), Schumer (président du groupe démocrate au Sénat) et d’autres démocrates, ne leur a pas serré la main et a déclaré qu’il n’y avait rien à négocier, que le Congrès devait “légiférer ou enquêter, mais pas les deux en même temps”.  « Les citoyens américains [tomberaient sur le cul] s’ils savaient ce qui vient de se passer dans cette réunion à la Maison-Blanche », a brièvement résumé Schumer.

L’attitude de Trump vient sans doute d’une déclaration de Pelosi, quelques heures plus tôt, dénonçant comme inconstitutionnelles, sinon illégales, les interférences du président pour “étouffer” (‘coverup’) les enquêtes en cours sur divers aspects du comportement et des activités de Donald Trump en général, dont ses activités professionnelles avant d’être élu. Trump a ordonné en effet à nombre de ses conseillers de refuser de témoigner devant le Congrès comme il le leur avait été officiellement enjoint et comme le Congrès a le pouvoir de faire. C’est la traduction de sa position : “Le Congrès doit légiférer ou enquêter, pas les deux à la fois”, – et comme il y a beaucoup de décisions en attente...

WSWS.org note à propos de cette position de Trump, puis des réactions démocrates : « Cet ultimatum est remarquable, surtout compte tenu de l'histoire politique des deux dernières décennies. Pendant la majeure partie de cette période, le pouvoir politique à Washington a été divisé entre les deux partis contrôlés par le ‘Corporate Power’, qui combinent régulièrement législation et enquêtes. C'était le cas même en 1998-1999, lorsque la Chambre des représentants, alors sous contrôle républicain, avait inculpé le président démocrate Bill Clinton pour une destitution [refusée par le Sénat].
» Trump exige effectivement que les démocrates abandonnent même la supervision habituelle du pouvoir exécutif, alors que l'administration Trump est engagée dans des politiques extrêmement agressives hors du contrôle du pouvoir législatif, dans une situation sans précédent dans l’histoire moderne des USA. Cela inclut sa contestation du pouvoir constitutionnellement conféré au Congrès de la répartition des fonds publics, en déclarant une urgence nationale sur la frontière américano-mexicaine et en ordonnant au Pentagone de détourner de l’argent de son budget pour la construction de son mur.
» Pelosi n’a pas répondu à la demande de Trump selon laquelle les démocrates devaient mettre fin aux enquêtes, mais elle a poursuivi la réunion manquée en réitérant son accusation de ‘coverup’ du président. Elle a dit devant la presse : “Le fait est que, au vu de tous et complètement dans le domaine public, ce président fait obstruction à la justice et tente d’étouffer des procédures d’enquête. Cela pourrait constituer un motif de destitution.”
» Elle a ajouté sur un ton suggérant que Trump, sinon Washington dans son ensemble, était sur le point de s'effondrer : “Je prie pour le président des États-Unis. Et je prie pour les États-Unis d'Amérique.” »

Cette crise entre Trump et les démocrates est d’autant plus remarquable que Pelosi est en train de ramer de toutes ses forces pour tenter d’empêcher qu’une majorité des 235 démocrates de la Chambre se décident en faveur d’une procédure de destitution, comme le recommande la Commission des affaires juridiques. Pelosi est donc, d’une certaine façon, l’alliée de Trump ; mais Trump, qui ne supporte plus les interférences du Congrès (de la Chambre), – c’est-à-dire qui ne supporte plus l’existence du Congrès comme pouvoir de contrôle de ses propres pouvoirs, – la rejette par sa brutalité vers ses ailes extrémistes tout en démontrant par le fait même de cette brutalité que ces ailes n’ont pas tort de pousser à une procédure de destitution. 

De son côté, Trump a fait ce commentaire tweeté : « La direction démocrate est en train de déchirer l’Amérique en morceaux, mais je tiendrai bon pour le peuple américain, – et Nancy, merci pour vos prières, je sais qu’elles sont sincères ! »

Mais l’on s’arrêtera surtout à la conclusion du texte référencé de WSWS.org, à partir d’un domaine auquel ce site s’est particulièrement intéressé, – l’infiltration des rangs parlementaires démocrates, d’ailleurs infiltration ouverte et parfaitement acceptée, par d’anciens agents et officiers venus de différents services de la sécurité nationale, (forces armées, CIA, etc.), qui sont chargés de surveiller de près la bonne marche de la politique de sécurité nationale ; une rude besogne, pour le moins... Le texte note que deux d’entre eux se sont signalés par une position qui mérite quelques commentaires.

« Deux démocrates de la Chambre des représentants, qui font partie des onze anciens agents et officiers de l'appareil de sécurité nationale élus en novembre dernier, se sont prononcés publiquement contre une campagne de destitution, signalant les inquiétudes des milieux de la sécurité nationale quant aux conséquences imprévisibles d'une telle procédure.
» La représentante du Michigan, Elissa Slotkin, qui effectua trois périodes de service à Bagdad comme agent de la CIA, a rejeté les questions constitutionnelles soulevées par la conduite de plus en plus autoritaire de Trump. Elle a déclaré au Washington Post : “Je pense que Washington a l'impression qu’il [Trump] se concentre davantage sur les entraves qu’il peut mettre à notre travail que sur l'aide qu'il peut apporter à la situation économique des gens et de leurs familles. Cette perception pose un vrai problème.”
» Le représentant Max Rose, un ancien combattant en Afghanistan qui a remporté le siège de Staten Island à New York, a dénoncé ce qu'il a qualifié de “querelle sur le sexe des anges” entre les démocrates de la Chambre et la Maison Blanche. “Le président ignore les demandes de la Chambre et les démocrates continuent de faire pression pour qu’il les acceptent, et ils nourrissent mutuellement leur antagonisme”,  a-t-il dit. “Cela commence à être franchement ridicule.” »

Cette intervention de Slotkin-Rose est effectivement révélatrice, comme le signale WSWS.org, qui a été très documenté et très attentif à ce point précis des élections de novembre 2018, – c’est-à-dire, pour employer les mots justes, la pénétration des parlementaires démocrates par des représentants quasi-officiels du DeepState. Rien que cette initiative de novembre 2018 montrait que le susdit DeepState s’inquiétait fortement du désordre formidable installé au cœur du pouvoir washingtonien ; l’intervention de Slotkin-Rose montre que l’inquiétude ne fait qu’augmenter.

(Comme le signale WSWS.org, la situation est loin d’être “ridicule” pour son importance, même si elle peut être jugée de la sorte par rapport aux intérêts des USA, du pouvoir washingtonien, du Système, etc. « La réunion à huis clos du caucus démocrate de la Chambre des représentants [hier, avant la “rencontre” de la Maison-Blanche] aurait révélé des divisions quant à la question de savoir s'il y avait lieu de pousser immédiatement à la destitution, bien qu'il y ait eu quasi unanimité d’appréciation sur le fait que les motifs juridiques de la destitution, – crimes et délits graves, – sont sans aucun doute fondés et avérés. Environ deux douzaines de démocrates à la Chambre ont lancé des appels publics à la destitution, y compris, plus récemment, les coprésidents du Congressional Progressive Caucus, Mark Pocan du Wisconsin et Pramila Jayapal de l'État de Washington. »)

Si l’on résume, l’on constate :

• Que les démocrates de la Chambre sont à peu près unanimes pour juger qu’une procédure de destitution est complètement justifiée, mais divisée sur l’opportunité de la lancer tout de soute, ou plus tard, ou pas du tout ?

• Que la direction démocrate (Pelosi), partisane d’attendre, a bien du mal à tenir, d’autant qu’elle est poussée “dans les cordes” par la brutalité de Trump ;

• Que le DeepState a certes placé ses gens à l’intérieur du parti démocrate pour tenter de contrôler l’opposition à Trump et le désordre qui va avec, mais ces gens ne sont pas parvenus à obtenir un résultat satisfaisant (tout comme le DeepStaten’est pas parvenu à contrôler Trump avec ses trois généraux, – Kelly, Mattis et McMaster, – virés depuis) ; leur intervention marque effectivement l’impuissance du DeepStatedevant la prolifération du désordre en songeant à la catastrophique bombe nucléaire que serait une procédure de destitution contre Trump.

Ainsi, Washington D.C. est plus que jamais “D.C.-la-folle”, absolument incontrôlable, dévalant la pente de son effondrement sans que personne ne puisse la freiner. Le DeepState n’est infiltré là-dedans, au su et au vu de tout le monde, que pour mieux mesurer les effets de sa complète incompétence.

 

Mis en ligne le 23 mai 2019 à 17H53