Un effondrement en quête d’identité

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Un effondrement en quête d’identité

Il ne manque pas de textes sur cet immense phénomène caractérisant nos Temps de tempête, que nous identifions comme l’effondrement du Système (GCES, pour Grande Crise de l’Effondrement du Système). Certains, bien entendu, sont plus significatifs, plus structurés que d’autres et renforcent la connaissance intuitive que nous pouvons avoir du phénomène. C’est dans cette catégorie que nous mettons ce texte de Robert W. Merry, editor de l’hebdomadaire de la droite paléo-conservatrice (tendance Buchanan), The American Conservative, et texte paru dans The Washington Times du 31 octobre 2017. Le titre exprime les préoccupations de l’auteur et nos propres sentiments : L’effondrement de l’ordre du monde. (Crumbling [The crumbling of the global order] veut aussi bien dire “émiettement”, “effritement” qu’“effondrement” : finalement, l’émiettement ou l’effritement ne font que décrire le mode de fonctionnement de ce qui est sans aucun doute un effondrement.)

La description du processus, son universalité extrême, sa diversité extraordinaire, c’est-à-dire le fait que rien dans la géographie, dans la politique, dans les mœurs, dans la culture, et enfin dans la psychologie n’est épargné par le phénomène, tout cela ressort très nettement de ce texte. C’est évidemment la raison de notre choix à cet égard. Un passage, surtout, nous paraît intéressant, en ce sens qu’on peut lui appliquer une formule interrogative originale et qui soutient l’essentiel de notre propre approche : quel est l’identité de cet événement de l’effondrement, quel nom peut-on lui donner ? Partant de l’étiquette passe-partout et insignifiante de “après-Guerre froide”, Merry observe :

« ... Il est évident que le statu quo est attaqué de tous les côtés. Cela suggère une explication du fait que l’ère de l’après-Guerre froide n’a pas de nom autre que celui qui indique qu’elle vient chronologiquement après la Guerre froide. Elle n’a pas de nom indiquant son identité parce qu’elle n’a pas d’identité. Il s’agit seulement d’une période d’un chaos grandissant qui suit une époque de stabilité et qui devrait mener, on peut l’espérer, à une autre époque [de stabilité]. Dans l’intervalle, nous devons nous attendre à toujours plus d’instabilité et de difficulté dans les affaires du monde. »

Suit une description de l’échec complet des États-Unis à tenter de maîtriser et d’orienter cette époque selon un ordre qui serait à leur convenance, et obtenant le résultat exactement inverse de l’accroissement extraordinaire du chaos directement du fait de leur action ; et, au-delà, la suggestion appuyée de l’auteur pour un retrait des USA sur la zone géographique d’influence dans un mouvement classique de néo-isolationnisme qui sanctionnerait l’absurdité de vouloir imposer au reste du monde un “modèle” américain qui n’est plus accepté et se révèle complètement inadéquat. Cette issue supposerait que le “modèle” américain, ramené aux origines, conviendrait encore aux USA, ce qui n’est pas nécessairement le cas. (Ce n’est pas notre conception, certes, nous qui jugeons que le “modèle” américain n’a jamais été qu’un simulacre de modèle et aussi dommageable à la population des USA que l’était l’URSS aux citoyens russes. Il faut tout de même noter que la conviction implicite de Merry pour la durabilité du “modèle” réduit aux seuls USA et à leur zone d'influence est très modérée en fonction de l'inconnue écrasante qu'est cette crise générale.)

Du plus grand intérêt, par contre, est la prise en compte de plus en plus générale de cette question de l’“identité de la crise”, qui retrouve des hypothèses telle que celle du “tourbillon crisique”. Il s’agit certes d’un intervalle entre deux mondes, mais la puissance et la rapidité des événements, autant que l’incompréhension et l’impuissance totales de la raison humaine et des actes qu’elle engendre devant ce phénomène, conduisent évidemment à penser que l’intervalle est bien un effondrement. L’ancien monde ne sera pas transformé dans le sens d’être réformé, il sera, il devra être détruit, ou bien plus sûrement il est effectivement en train d’être détruit (de s’autodétruire). Ainsi la remarque de Merry (cette époque « n’a pas de nom indiquant son identité parce qu’elle n’a pas d’identité ») va-t-elle bien plus loin que là où veut l’amener le commentateur. Il s’agit d’une de ces expressions créées pour décrire une situation et qui, une fois énoncée, dépasse largement l’intention qui a présidé à sa formulation.

dde.org

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The crumbling of the global order

The bane of Spain is Catalonia, where many want to secede from the Spanish kingdom. Madrid doesn’t want this to happen, which is why the Spanish Senate authorized the government to seize direct control of the rebellious northeastern region, which for decades has enjoyed considerable autonomy under the Spanish system. This action came after the Catalan Parliament, which has a bare separatist majority, approved a resolution to “create a Catalan republic as an independent state.”

Thus has Spain entered what The New York Times calls the country’s “greatest constitutional crisis since it embraced democracy in 1978.” That represents nearly four decades of relative democratic stability for a country that went through a horrendous civil war in the 1930s and then succumbed to nearly 40 years of dictatorial rule. And now, once again, prospects of bloodshed are real.

The emergence of this new crisis after so many good years raises a question: Why now? The answer: These events are merely part of a broader global deterioration in the status quo. The world hasn’t seen this kind of progressive decay in established structures since the chaos of 1914-1945. During that time, which followed nearly a century of relative global stability, the world seemed to come unglued — until a new global order was established through World War II and its aftermath, with America at its center.

But now that global order seems itself to be coming unglued. Consider the acidic forces and sentiments roiling the globe in these times — sectarian animosities; nationalist sensibilities; passions of ethnic identity; geopolitical rivalries; migration urgencies; angers against globalism. Clearly, the status quo is under attack from many directions.

This suggests there’s a reason that the post-Cold War era doesn’t have a name other than one that denotes it came after the Cold War. It doesn’t have an identifying title because it doesn’t have an identity. It is merely the period of increasing chaos that followed one era of stability and will lead, one can only hope, to another. In the meantime, we should brace for increasing instability and difficulty in global affairs.

Some of the more powerful developments of this era of change are the rise of China and its apparent resolve to challenge America’s 70-year Asian hegemony; the growing tensions between the West and Russia over who will control lands traditionally part of the Russian sphere of influence; the progressive feverishness and acrimony of the Middle East, unleashed in part by the U.S. incursion into the region and propelled now by sectarian passions and geopolitical interests; the looming confrontation between the United States and Iran; the transformation of Turkey from a nation facing West and extolling pluralism into an increasingly Islamist dictatorship; the emergence of a nuclear threat from North Korea; the rise of Western nationalism; and the surge in immigration that threatens European and American cultural and societal stability.

What’s striking about many of these developments is the extent to which they have generated huge unresolved questions that will have to play out well into the future. Hence, there’s no reason to believe the post-Cold war era — a time pregnant with change and conflict — will end anytime soon.

Also noteworthy is the extent to which Americans, and particularly American leaders, cling to a global status quo that is in progressive erosion. A case in point was Arizona Sen. John McCain’s recent speech before the National Constitution Center in Philadelphia. He talked about America’s “indispensability to international peace and stability and to the progress of humanity.” He said that “we are a land made of ideals,” and we must be “their champions abroad.” He said we have a “duty to remain ‘the last best hope of earth.’ “

This implies that America represents universal principles of governance and national rectitude that must be spread around the globe. But that’s the very concept that contributed to today’s Middle East chaos when George W. Bush led America into the region “to end tyranny in our world.” It helped generate the tensions in Ukraine when the Barack Obama administration supported a coup against that nation’s elected president and threatened Russia’s ancient geopolitical interests.

No, America needs fresh thinking more in tune with the profound changes washing over the globe and the new realities aborning. American global hegemony won’t work. American exceptionalism is a national conceit that has been proved ridiculous by events. Our ideals are right for us and worth fighting for, but they aren’t universal and shouldn’t be pushed upon other peoples of other lands. Exhibit A for this fundament of geopolitical realism is the Middle East, which is going its own way irrespective of American wishes and American power — not to mention American ideals of the kind extolled by Sen. McCain.

If America is to play a major role in moving the world toward greater stability and peace, it must abandon hegemonic ambitions in the name of American universalism. It must instead accept regional spheres of influence while protecting its own sphere of influence in the Americas, the Caribbean, the Gulf of Mexico and surrounding waters. It must maintain its close ties with Europe, its cultural wellspring. It must opt for a foreign policy based on the imperative of promoting a global balance of power.

Can such an approach help foster a new era of global stability? Perhaps, perhaps not. But Sen. McCain’s status quo approach will simply add further to the global chaos.

Robert W. Merry