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1438La publication US News & World Report est un des périodiques les plus sérieux aux USA, pour ce qui concerne la précision des nouvelles sur nombre de sujets, mais aussi une représentation sérieuse du point de vue conservateur-Système des positions américanistes. Nous ne sommes pas dans le monde qu’il est de coutume de juger pitoyable et sans crédit des “complotistes”, de la presse-antiSystème, des “réseaux” et autres tweets incontrôlés. Le cadre ainsi défini, l’article qui nous arrête est d’autant plus significatif, à notre sens.
Il s’agit d’un article sur le thème :“Que se passerait-il si, peu avant l’élection, l’un des deux candidats mourait ou bien abandonnait la course ?”. (Implicitement, l'on ne parle que de Clinton et de Trump.) L’article, du 31 août 2016, est de Steven Nelson, il est long, il s’appuie sur une enquête minutieuse effectuée auprès de quelques sommités universitaires et autres des questions constitutionnelles et plus largement institutionnelles, de la direction du système de l’américanisme. On peut donc consulter l’article, on aura de nombreuses indications, des analyses rassurantes, solides, prises aux meilleures sources. Tant de science et de croyance dans l’exceptionnalité de l’exceptionnel appareil constitutionnel de l’“exceptionnelle Nation” ne peut que nous rassurer... Étions-nous inquiets ? Vaste question, peut-être un peu indiscrète ; dans tous les cas, nous devrions être rassurés. Juste les deux premiers paragraphes pour avoir un goût général de l’analyse, puis un troisième, avec la premier spécialiste convoqué, qui d’ailleurs nous donne une indication intéressante pour la suite de notre réflexion...
« The presidential election could be delayed or scrapped altogether if conspiracy theories become predictive and a candidate dies or drops out before Nov. 8. The perhaps equally startling alternative, if there's enough time: Small groups of people hand-picking a replacement pursuant to obscure party rules.
» The scenarios have been seriously considered by few outside of the legal community and likely are too morbid for polite discussion in politically mixed company. But prominent law professors have pondered the effects and possible ways to address a late-date vacancy... »
» “There's nothing in the Constitution which requires a popular election for the electors serving in the Electoral College,” says John Nagle, a law professor at the University of Notre Dame, meaning the body that officially elects presidents could convene without the general public voting. “It's up to each state legislature to decide how they want to choose the state's electors,” Nagle says. “It may be a situation in which the fact that we have an Electoral College, rather than direct voting for presidential candidates, may prove to be helpful.” »
Nous n’avons certainement pas une mémoire universelle, mais une certaine expérience de cette sorte d’événement politique, et aucun souvenir d’un article de cette sorte, de ce crédit, de cette forme, qui développe une hypothèse certes possible mais normalement considérée comme si exceptionnelle qu'il n'y aurait aucune nécessité de développer, dans une publication de cette sorte, pour des élections présidentielles US depuis que nous les suivons (depuis quarante ans) ; certaines de nos sources ayant une expérience dans le même domaine ont réagi dans le même sens. Même dans cet environnement si exceptionnel que sont les USA, la chose, la publication est troublante ; d’ailleurs, au contraire et justement, “la publication est troublante” à cause de cet environnement exceptionnel (les USA) où la stabilité du pouvoir politique garantie par une Constitution elle-même exceptionnelle (notamment grâce à son aspect extrêmement vague qui permet toutes les interprétations favorables au Système) devrait si peu inquiéter qu’il n’y aurait nulle nécessité de “rassurer”...
L’article de USN&WR nous semble être du type “diffusion restreinte”, c’est-à-dire restreinte à ce seul magazine, c’est-à-dire un petit coup de sonde pour qu’on sache les choses, et pour que le contenu du message soit connu de qui il doit l’être. Il ne nous semble pas que ce “message” sera abondamment repris par la presse-Système, bien que diffusé normalement. Trop délicat, trop à la limite des sentiers très battus et rebattus. Le niveau actuel de la presse-Système aux USA est du type sous-sous-Pravda, à un point jamais vu de bassesse, de vérité totalement bafouée, d’indifférence complète pour le moindre aspect éthique de la démarche.
Au reste, peut-être cette discrétion se justifierait-elle par un manque de clarté venant de complications assez considérables dans la Constitution US, entre l’Article II et le 20ème amendement, portant tous les deux sur cette question de l’élection qui rencontrerait des problèmes graves. (L’exceptionnelle Constitution US, répétons-le, est suffisamment vague pour être un magnifique instrument d’interprétation dans le sens de la direction-Système.) Les deux textes introduisent certaines contradictions, ce qui conduit à des interprétations confuses se résumant par une sorte d’objurgation : “Ne vous en faites pas, tout est prévu, mais il faudra d’abord interpréter ce qui est prévu, dans quel sens, etc.” Quelques extraits de cette assurance confuse...
« Both major parties do have rules for presidential ticket replacements, however, and Congress has the power to change the election date under Article II of the Constitution... [...] But Congress would be up against a de facto December deadline, as the Constitution's 20th Amendment requires that congressional terms expire Jan. 3 and presidential terms on Jan. 20. [...] Yale Law School professor Akhil Reed Amar considers in a 1994 article in the Arkansas Law Review the possibility of a special presidential election being pushed to after Jan. 20, with the speaker of the House serving as acting president until an election could pick “a real president for the remainder of the term.” But he tells U.S. News that scenario probably is far-fetched... [...]
» Amar, author of a forthcoming book touching on candidate death, outlines four distinct scenarios that would warrant special consideration because of the wording of the 20th Amendment: a death before an election, a death after an election but before electors meet in December, a death between electors voting and Congress counting votes in January, and the time between Congress confirming the election results and the Jan. 20 inauguration.
» The three post-election time frames identified by Amar are distinguished by whether the candidate technically is considered “president-elect.” That designation is covered by the 20th Amendment, which allows in case of a president-elect's death that he or she be replaced by the vice president-elect. But in their narrowest sense, those amendment terms only cover part of January. Though all considerations accounting for a candidate's death are hypothetical, they could at some future point become less so... »
Pour poursuivre notre commentaire de ce texte qui se veut sans aucun doute rassurant sur ce que serait la situation en cas d’incident grave dans le cours de cette élection, on note quelques “détails” étonnants, ou bien significatifs on ne sait, – ou bien l’on sait trop bien, certes, – l’ensemble certes renforçant l’impression générale de voir cet article comme une chose étonnante ou bien significative. Le titre est neutre quoique marquant la possibilité d’un événement important (“La mort d’un candidat pourrait repousse ou annuler l’élection présidentielle”, – « A Candidate's Death Could Delay or Eliminate the Presidential Election »), mais le sous-titre est discrètement quoique franchement provoquant (“Le chaos pourrait s’ensuivre si une vacance [du pouvoir] apparaissait, chronologiquement à proximité du jour de l’élection”, – « Chaos would ensue if a vacancy emerges near Election Day »). “Chose étonnante, ou bien significative...” en effet car rien, absolument rien dans le texte n’apparaît, suggérant que le moindre chaos pourrait “s’ensuivre” dans l’hypothèse évoquée. Même impression dans la légende des deux photos (Clinton-Trump) sous l’ensemble des titres (« American democracy would break new ground if Hillary Clinton or Donald Trump left a presidential ticket vacancy before the Nov. 8 general election. ») : “new ground” (disons : “situation inédite”), alors que tous les spécialistes convoqués, citant d'ailleurs des exemples de situations politiques passées, s’emploient avec zèle, professionnalisme et acharnement à nous convaincre in fine que tout a été prévu dans la Constitution, ce texte magique qui est l’épine dorsale de l’exceptionnalisme US, pour que rien, absolument ne soit laissé au hasard, – dans tous les cas à ce hasard-là qui serait une situation hors du contrôle d Système.
Un autre point d’ordre constitutionnel nous demeure mystérieux, là encore au bonheur de notre expérience qui n’est pas complète. Nous parlons vraiment de l’aspect formel, constitutionnel... L’élection du président US est à un tour, c’est-à-dire qu’elle comprend non pas deux mais plusieurs candidats (au moins quatre ayant un certains poids : outre Clinton et Trump, le libertarien Johnson, que certains créditent dans certains cas de 8%-10% et la Green Jeff Stein, qui approche parfois les 5%). D’un point de vue formel, dans le pire des cas (le quatrième terme du scénario de Amar), il n’y a pas une sorte d’impossibilité de facto, de bon sens si l’on veut, à cause de la réduction à un candidat si un Trump ou une Clinton disparaît de la course, puisqu’il resterait alors trois candidats. Tout se passe comme si la Constitution réclamait les candidats des “deux grands partis”, notion qui n’existait pas dans la rédaction initiale du document, avec en plus la difficulté définir ce qu’est un “grand parti”, certains ayant changé, etc. On dira alors qu’il s’agit de “l’esprit de la loi”, selon une interprétation-Système qu’on comprend bien et qui suggère le remplacement d’un candidat des deux grands partis qui serait “empêché”.
(... Et la suggestion nous fait nous tourner instantanément vers Donald Trump, malgré les nombreux “bruits” autour de la santé de Clinton et ses avatars de corruption et d’illégalité, parce que l ‘“esprit de la loi” selon le Système est irrémédiablement tourné vers l’élimination de Trump. Cela est d’autant plus évident aujourd’hui que Trump tient une position de plus en plus solide et apparaît de plus en plus comme un candidat très “sérieux” [“présidentiable”, malgré sa position antiSystème], surtout avec son doublé réussi à la fois tactiquement et sur le fond, – rencontre avec le président mexicain-discours sur l’immigration illégale... Scott Adams : « It was masterfully done. I give Trump’s speech an A+ for persuasion. Trump won the week. His poll numbers should move up again next week. »)
Quittons maintenant le terrain formel, pour en venir à l’essentiel, qui est la justification et la signification de cet article-message que rien en apparence, aucune situation d’urgence ou d’aucune sorte proche ne semblerait justifier, qui pour cette raison justement nous paraît en tous points exceptionnel, qui serait unique dans ce genre à ce point du processus électoral, surtout dans une élection de cet enjeu et de cette intensité. Ainsi apparaît-il comme un “message extrêmement rassurant” sans cause aucune, sans besoin en aucune façon d’être rassuré, puisque tout semble aller officiellement parfaitement, selon le meilleur des mondes constitutionnels ; les gens de bon sens suggèrent simplement que l’“exceptionnelle” Amérique fera ce qu’elle doit et éliminera l’embarrassante bestiole, qu’Hillary écrasera comme il se doit The Donald. Cette sérénité factice qui se veut implicite, à la fois directe, indirecte et même subliminale, pour un “message” qui n’a aucune raison d’être et qui pourtant est lancé et apparaît donc comme un événement exceptionnel, devrait donc finir par contribuer largement, disons d’une façon discrète puisqu’il ne fait l’objet d’aucun éclat, à accentuer l’angoisse générale, la tension, l’exacerbation, etc., d'ores et déjà à leur comble par la communication. Il devrait souterrainement contribuer à alimenter les hypothèses de prolongements constitutionnels manipulés, brutaux sinon rupturiels jusqu’à la perception d’une sorte de “coup d’État” ; il devrait, en affirmant qu’il n’a strictement rien à voir avec elles, alimenter toutes les thèses “complotistes” du monde en paraissant lui-même comme un “complot”.
Objectivement considéré, ce “message” venu du USN&WR doit être “décrypté” comme il s’impose à nous, particulièrement par sa forme en apparence très maîtrisée, d’apparence très mesurée : l’establishment (le Système) n’écarte plus, désormais très sérieusement, une intervention pseudo-légale, d’une façon ou d’une autre, pour favoriser ou précipiter une solution “constitutionnelle” permettant de maîtriser ces élections (lire essentiellement : “éliminer Trump”) selon des normes présentées comme légales. Une remarque dans le texte, selon une de nos sources que nous avons consultées, semble très importante dans ce fait qu’elle rappelle d’une façon extrêmement anodine, comme en passant, que l’élection ne nécessité pas en vérité un vote populaire puisque ce sont les “Grands Électeurs” constituant le “Collège Électoral” qui votent, donc qu’un cas de suppression de l’élection n’empêcherait en rien l’élection d’un nouveau président : « ...“It's up to each state legislature to decide how they want to choose the state's electors,” Nagle says. “It may be a situation in which the fact that we have an Electoral College, rather than direct voting for presidential candidates, may prove to be helpful.” » Bien entendu, c’est faire l’impasse sur les réactions populaires qu’on ne mentionne nulle part dans le texte sauf implicitement dans le sous-titre (« Chaos would ensue if a vacancy emerges near Election Day »), et bien entendu c’est là l’enjeu essentiel de cette élection, et de toute tentative de manipulation de cette élection. Le risque est immense, considérable, mais le Système nous a habitués à bien d’autres erreurs, à de tels aveuglements, surtout lorsque, derrière l’apparence de la maîtrise, il apparaît évident qu’il a perdu le contrôle de la situation. Le risque considrable, colossal, de cette élection USA-2016 sans exemple ni précédent malgré les certitudes des spécialistes, c’est sans aucun doute le chaos bien plus que le pseudo-“coup d’État” réussi.
Mis en ligne le 2 septembre 2016 à 06H15
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