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219514 février 2018 – Paul Craig Roberts, qui a été cité hier, le fut pour la première fois sur ce site en 2005 ; faits rarissime pour dedefensa.org, il a aussitôt suscité (hier) deux commentaires (à peu près et raisonnablement inverses). Mon intérêt pour lui (PCG) n’a pas été systématique jusqu’à une certaine période dont je situe très précisément le début au “coup de Kiev“ (21 février 2014). Pour moi, là commence sa période que je nommerais “vitupératoire” si l’on me permet ce que je crois être un néologisme... La vitupération-PCG post-Kiev porte sur deux thèmes, apparus l’un après l’autre mais l’un ne remplaçant pas l’autre et les deux se poursuivant parallèlement et complèmentairement.
• Le premier thème est que la direction US au sens le plus large est faite de fous-criminels (avec son lot de corrompu universels) qui n’hésiterons pas à nous conduire à la guerre nucléaire, et même peut-être la recherchent-ils comme inconsciemment. (La direction US au sens le plus large, avec interchangeabilité des identités et des moyens, que ce soit le président, le Pentagone, la CIA, le complexe militaro-industriel [CMI], le DeepState, les neocons, Israël soi-même, Gladio, etc.)
• Le deuxième thème est que la Russie est la seule puissance à pouvoir s’opposer aux “fous criminels”, et Poutine le seul dirigeant à pouvoir conduire cette puissance. Cela reconnu, PCG en est venu très vite à reprocher à Poutine à ne pas s’opposer assez vivement aux “fous criminels”, à chaque fois (Ukraine, Syrie) intervenant très efficacement mais s’arrêtant trop vite et reculant devant la possibilité d’un affrontement même partiel jusqu’à risquer de dilapider ses gains.
Ce qui relie les deux thèmes, c’est le principe “ces fous-criminels ne comprennent que le langage de la force” (ou, comme disait l’ancien chef du service israélien Nativ lié au Mossad, Yaakov Kedmi, lors d’un talk show récent à la TV russe : « J’ai grandi dans la rue et j’ai appris dès mon enfance que vous ne pouvez pas parler poliment avec des gens agressifs. Vous devez parler aux voyous d’une façon telle qu’ils puissent comprendre »). Je comprends tout à fait ce sentiment, et parfois, et même souvent, je l’éprouve avec une forte irritation de voir les Russes laisser faire et faire trop peu ; pour autant, je crois qu’il ne faut pas perdre de vue l’écrasant dilemme de Poutine.
Je suis persuadé qu’il est, lui aussi, persuadé que les dirigeants US et le pouvoir à “D.C.-la-folle” sont dans cet état d’irresponsabilité, – il l’a souvent fait comprendre, de même que son ministre des affaires étrangères Lavrov. A cause de cela une réponse très ferme peut aussi, et peut-être même probablement, entraîner une réaction de folie justement, avec escalade immédiate, voire passage immédiat au pire qu’on puisse imaginer, – le nucléaire avec l’inéluctable conséquence de l’échange nucléaire stratégique nous assurant de quelque chose d’assez proche de l’extinction complète de la vie sur notre planète.
Je suis quant à moi persuadé qu’il y aurait une telle réaction au niveau de la décision de l’action, mais également persuadé que “D.C.-la-folle” serait bien en peine d’agir “efficacement” et jusqu'à l'inéluctable dans ce sens. Il y a déjà eu des signes extraordinaires, – et dont si peu de commentateurs se sont avisés ! – de l’impuissance de l’action au niveau le plus haut, et de l’impréparation à cet égard (voir ceci, et ceci, et cela). Je suis donc persuadé que la direction US éclaterait et s’effondrerait avant d’agir, déclenchant le processus d’effondrement général du Système. Mais qui suis-je, moi, pour prendre argument à partir de cette conviction, pour faire reproche à Poutine de ne pas faire de même et de décider de son action en conséquence ? Je n’ai aucune responsabilité, j’observe, je commente, je médite et j’écris, en toute indépendance mais sans aucune responsabilité dans l’action, ni le pouvoir d’agir, c’est-à-dire sans véritable risque. Je me trouve un peu trop confortable pour me permettre de lui reprocher son inaction, à Poutine, ou disons pour être plus juste, sa relative inaction.
Je pense qu’on surestime prodigieusement le fait même du pouvoir dans sa capacité et ses effets aujourd’hui, même sans prendre en compte la médiocrité ou non des dirigeants. On dit souvent, dans ma pauvre France, pour ceux qui ont de l’imagination, – “Ah, si on avait un de Gaulle !”. Je suis complètement persuadé que si nous avions, non pas “un de Gaulle“ mais de Gaulle lui-même, il ne voudrait pas du pouvoir parce qu’il ne saurait qu’en faire.
Il faut avoir à l’esprit que le grand homme a quitté deux fois volontairement le pouvoir, en janvier 1946 et en avril 1969, – car je considère sans aucun doute que le référendum sur la participation était un “suicide politique”, ou disons une façon de partir sans donner l’impression de baisser les bras. Ces deux départs sont autant de reconnaissance de son impuissance à utiliser le pouvoir dans le sens qu’il voulait, qu’il jugeait nécessaire, etc. Nous sommes aujourd’hui, dans le domaine capital de l’exercice du pouvoir, dans une situation infiniment pire qu’en 1946 ou en 1969.
Cela implique qu’à trop forcer l’exercice d’un tel pouvoir aussi paralysé et impuissant, on risque de faire basculer le désordre qu’on veut maîtriser dans l’extrême de la folie. Je ne dis pas cela selon un pessimisme qui serait démobilisateur, mais par simple réalisme et constat de ce que j’estime être une écrasante vérité-de-situation. Par ailleurs, je ne suis pas du tout pessimiste, – et pourquoi le serais-je, Grand Dieu ? Cela fait plus de 15 ans qu’on nous annonce chaque jour pour demain matin la victoire générale, inéluctable et irréversible du Système-en-guerre (USA & le reste) contre des ennemis en déroute et aussi dispersés que nous sommes, et autant d’années qu’ils (USA & le reste) enchaînent les déroutes comme on enfile des perles sur un collier, chaque jour une perle après l’autre, avec un admirable entêtement dans la sottise la plus aveugle.
Comparez son état aujourd’hui avec ce qu’il était à l’été 2002, lorsqu’ils nous assuraient en toute simplicité « Nous sommes un empire maintenant et quand nous agissons nous créons notre propre réalité ». Je reste et suis complètement persuadé que le Système ne peut être vaincu que par lui-même, ce qu’il s’active à faire avec un zèle extraordinaire, et qu’il nous reste à faire partout où c’est possible de la résistance, notamment en “faisant ‘aïkido’”.
Poutine est un homme de défense : prudent comme un chat et rusé comme un renard. Il fait parfois des erreurs tactiques, – qui n’en fait pas, – mais il s’en sort en général assez bien, et sans croire une seconde que la tactique peut à elle seule décider du sort du monde. Sa “stratégie à long terme” (long terme très court !) est inéluctable, parce que seul le Système décide, qu’il offre et impose cette opportunité, et que Poutine opine et s’exécute : marquer l’adversaire (le Système) à la culotte, l’accompagner discrètement comme on pousse à la faute vers laquelle il est attiré comme par fascination, être prêt à le pousser (le Système) tout aussi discrètement s’il le voit trébucher. Cela ne l’empêche pas d’affirmer que son rêve, – je suis convaincu que ce Poutine-là est sincère, – serait une bonne entente générale de tous avec tous pour pouvoir aborder de concert les “grandes menaces qui pèsent sur le monde”. Une telle profession de foi un peu naïve par rapport à ce qu’est vraiment le Système ne mange pas de pain et ne justifie pas vraiment qu’on passe le président de la Fédération de Russie au scanner furieux du soupçon d’impuissance, de faiblesse et de couardise... Et, bon prince, j’irais jusqu’à dire que cette dernière remarque vaut autant pour moi-même, dans mes instants d’irritation extrême.
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