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20 août 2005 — Le délitement intérieur de l’administration GW Bush est tel, et, par conséquent, si grande l’impression de désordre et de décadence du système, que les plus grandes inquiétudes rôdent aujourd’hui sur Washington. En d’autres mots : que faire? (Titre du livre de Lénine datant de septembre 1917, au plus bas de la fortune du révolutionnaire bolchévique, alors que Kerenski tenait encore le pouvoir, que divers généraux tenaient ferme les instruments de l’ordre et chassaient impitoyablement les bolchéviques.)
C’est donc le moment de se rappeler qu’il y a la “guerre contre la terreur”. Un premier essai a été fait il y a dix jours, sans soulever de grandes passions. Il semble qu’une nouvelle tentative soit en cours ou, plutôt, qu’on tente de convaincre les responsables et le public qu’effectivement l’affaire d’il y a dix jours est sérieuse. C’est de source israélienne que viennent des informations à propos de la très forte possibilité d’une attaque d’Al Qaïda contre les Etats-Unis pour le quatrième anniversaire de 9/11. Non seulement l’alerte est sérieuse, mais le symbolisme est présent, avec l’idée d’une attaque au moment de l’anniversaire du 11 septembre 2001.
C’est UPI, l’agence de presse appartenant au groupe du révérend Moon (très partisan de la politique de force de l’administration GW Bush), qui répercute cette information venue du site israélien “Debka.com”:
« Debka.com, an Israeli web-site claiming strong intelligence sources reported a volume and heightened sense of anticipation in al-Qaida's internal communications, signals, publications and Websites — mostly in code — that recalled its electronic traffic in the months leading up to the Sept. 11, 2001, attacks.
» The sense of a big anti-American event in the making for September-October was marked, Debka.com said. For the first time since 2001, teams of new recruits are being shunted between countries, according to coded instructions passing around the internal sites, Debka.com said.
» Debka.com cited intelligence sources as saying they believed al-Qaida was able to raise sufficient fresh operational strength in its recent recruitment drive to carry out strikes in several target arenas. The web-site said Abu Musab al Zarqawi, al-Qaida's operational commander in Iraq, had proposed rotating the veteran operatives in Iraq, there for more than six to eight months, in favor of fresh men.
» “This surge of activity, electronic and human, seems to signpost an al-Qaida offensive in the works, and will no doubt raise terror threat levels in U.S., European and Middle East cities in the coming weeks,” the Debka.com report said. »
Après tout, il est possible que ces alertes soient fondées. Avec le terrorisme, on se trouve par définition dans un domaine caractérisé par l’incertitude. D’autre part, il est également concevable que les organisations terroristes jugent que l’affaiblissement et le désarroi de l’administration GW offrent une bonne occasion pour envisager une opération contre les Etats-Unis. Tout cela est possible, et il est donc possible qu’un de ces jours des semaines à venir, les Américains soient l’objet d’une attaque.
Pour l’heure, le constat qu’on doit faire est l’extraordinaire absence d’écho d’une telle possibilité, par rapport notamment à des situations précédentes où des alertes semblables furent lancées et obtinrent des effets de mobilisation d’une grande intensité. Aujourd’hui, la question du terrorisme n’exerce plus guère d’influence ni d’effet sur la situation politique washingtonienne. L’administration elle-même ne parvient pas à mobiliser ses propres organismes, agences, départements, etc, sur une même politique temporaire d’appel à la mobilisation, — comme on l’a vu notamment les 10-12 août derniers, où les informations du FBI, autant que la façon dont elles avaient été diffusées, furent fortement critiquées par divers autres services, d’autres agences, des élus, etc.
Le paradoxe de la situation actuelle où une alerte terroriste serait, politiquement parlant, le meilleur moyen de redonner un semblant de crédit à l’administration, c’est l’impuissance de cette administration à organiser sa communication autour d’une telle possibilité. C’est un signe de faiblesse et de désordre particulièrement convaincant, particulièrement dans ce système dont on sait parfaitement qu’il fonctionne de façon ontologique (si l’on peut dire, ce qui est discutable…) à partir de la communication.
Les enseignements sont par ailleurs évidents: c’est l’usage immodéré et trompeur de la communication qui a affaibli l’administration, et notamment sa capacité de communication, jusqu’à la situation décrite ici. La puissance des capacités de communication, si elle n’est pas tempérée par une orientation scrupuleuse de ces capacités en fonction de la réalité, finit par s’exercer à plein contre celui qui la manipule. De bout en bout, depuis le 11 septembre 2001, la puissance de l’administration GW et de l’américanisme a constitué un redoutable système de boomerang. Il n’est même pas nécessaire de s’extasier devant la soi-disant habileté des terroristes à “manipuler” cette situation, la manipulation s’exerçant d’elle-même, par les seules pressions internes et contradictoires du système.
Par ailleurs, et pour clore cette réflexion, le terrorisme existe tout de même, et une attaque est effectivement possible. Jamais l’Amérique n’aura été si affaiblie, si mal protégée devant cette perspective.