Anti-missiles US en Europe : on prépare la rentrée

Premiers échanges notables depuis plusieurs semaines sur la crise des anti-missiles US à installer en Europe. Surprise: ils ont opposé les Autrichiens aux Américains, à partir de déclarations extrêmement vives du ministre autrichien des affaires étrangères déclenchant une riposte US.

Selon AFP, relayée hier par Defense News :

«The United States on Aug. 23 urged Austria to move beyond “Cold War thinking” after Vienna charged that Washington’s plans to deploy a missile defense shield in Central Europe against Russia’s wishes were a “provocation.”

»”We view the Cold War as being over. Such comments are not helpful and we now face a new strategic environment that requires U.S. to move beyond Cold War thinking,” said State Department spokesman Gonzo Gallegos.

»Austrian Defense Minister Norbert Darabos had said in an interview published Aug. 23 that the U.S. plans to build the defense shield was “a provocation, in my opinion.”

»”I personally find that the path the U.S. is following here is wrong. It makes no sense to build a missile defense shield in Europe. All it will do is ignite unnecessary and old Cold War debates,” he told the daily Die Presse.»

Rétablissons la chronologie, qui nous suggère la hiérarchie des valeurs, pour retrouver toute la saveur de ce dialogue à-la-Beckett.

• L’Autrichien dit àDie Presse que le projet US est une “provocation” (sous-entendu : à l’encontre de la Russie), qui a le désavantage majeur de «rallumer sans nécessité les vieux débats de la Guerre froide».

• Surprise : le système a grippé et a sans doute mal traduit. Ou bien non, après tout... Dans tous les cas, le porte-parole du département d’Etat sermonne l’Autrichien et lui reproche de ranimer des vieux débats alors que le nouvel environnement stratégique nécessite d’aller “au-delà de la pensée type-Guerre froide”. Car, nous révèle Gallegos : «We view the Cold War as being over.»

Au moins, on se comprend. A l’Autrichien qui reproche aux USA de ranimer les vieux débats de la Guerre froide, Gallegos répond en lui reprochant de ranimer les vieux débats de la Guerre froide en disant que les USA raniment les vieux débats de la Guerre froide. A défaut de résoudre la crise, voilà une belle démonstration du sens des “valeurs communes” transatlantiques, au niveau de la valeur des mots et de la compréhension réciproque.

Sur le fond, on comprend bien: tout reproche à l'encontre des USA se discrédite de lui-même puisqu'il est automatiquement retourné, en l'état, sans une retouche, contre celui qui le fait. Dites que les USA font une politique stupide et vous serez immédiatement sermonné selon le verdict sans appel que vous faites une politique stupide en disant que les USA font une politique stupide. Il fallait y penser: une critique émise contre USA est, en substance, la preuve irréfutable que l'auteur de la critique est condamnable. La chose étant conclue, tout débat sur le fond (le réseau anti-missile US est-il une “provocation”?) est complètment inutile.

Mis en ligne le 24 août 2007 à 15H56