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1050Dans les suites de l’affaire de la décision de retrait du poste de président du National Intelligence Council de Charles Freeman, la thèse d’une “victoire à la Pyrrhus” du Lobby (l'AIPAC pro-israélien) fait de plus en plus d’adeptes. Aujourd’hui, sur Antiwar.com (et sur IPS), ce sont Daniel Luban et Jim Lobe qui y souscrivent, à partir d’une observation minutieuse des réactions diverses du monde de la communication US.
«Although the successful campaign to keep Amb. Charles "Chas" Freeman out of a top intelligence post marked a surface victory for the pro-Israel hardliners who opposed him, the long-term political implications of the Freeman affair appear far more ambiguous.
»Freeman's withdrawal has provoked growing – if belated – media scrutiny of the operations of the so-called “Israel Lobby,” and aroused protests from a number of prominent mainstream political commentators who allege that he was the target of a dishonest and underhanded smear campaign that, among other things, accused him of shilling for the governments of Saudi Arabia and China.
»For the neoconservatives who led the charge against Freeman's appointment, his withdrawal may therefore prove to be both a tactical victory and a strategic defeat.»
Le point le plus intéressant de ce texte nous apparaît être celui qui est mis en conclusion, à partir d’une interview faite avec un ancien analyste de la Defense Intellegence Agency (DIA), le colonel Lang.
«Col. Pat Lang, the former top Middle East analyst at the Defense Intelligence Agency who signed a letter of support for Freeman, told IPS that the saga had caused a “tentative feeling of disappointment” about the new administration within the intelligence community. “It's very disheartening for people who viewed Freeman's appointment as the return to some standard of intellectual excellence or integrity,” he said, adding that Director of National Intelligence (DNI) Adm. Dennis Blair, who went to the Senate and strongly defended his appointee, may be the next target for Freeman's antagonists as they push for alarmist intelligence on Iran.
»“I'm concerned about what these characters are going to do about Blair, because Blair really stood up to them, and their general reaction to that is to wage a war of annihilation against people who do that,” Lang said.»
Effectivement, l'amiral Dennis Blair a soutenu avec force l'ambassadeur Freeman, qu’il avait personnellement et expressément recruté pour ce poste de haut niveau. Blair a affirmé son soutien d’une manière très officielle, par lettre et lors d’une audition au Sénat, notamment face au sénateur Lieberman. Ce n'est pas une hypothèse sollicitée que de penser que Blair, en tant que DNI (Director of National Intelligence), va être l’objet des mêmes soupçons que Freeman de la part du Lobby et de ses soutiens. Il est possible que des mises en cause et des polémiques éclatent, à l’occasion d’évaluations des services de renseignement. Les premières évaluations connues sous la responsabilité de Blair, le rapport annuel des services de renseignement, ont conduit à des conclusions qui ont beaucoup étonné certains, dans la mesure où ce rapport est une “déconstruction” de 9/11 et une mise en cause implicite de la sacro-sainte “guerre contre la terreur”, laquelle est le fondement de toute la pensée et de la stratégie des néo-conservateurs, du Lobby et d’Israël. On comprend, dans cette perspective, la validité de l’hypothèse de Pat Lang, d’autant que le Lobby ne semble guère montrer de mesure ni de prudence actuellement pour lancer ses campagnes de pression et de diffamation, ce qui est clairement la conséquence d’une crainte de voir la politique US “évoluer” (défavorablement pour Israël).
Un autre point doit être mis en évidence à cette occasion, qui permet de mettre en doute les analyses trop schématiques, ou trop attachées aux étiquettes vite interprétées. La présence de Blair à ce poste de responsabilité, avec deux autres militaires ayant un rang élevé dans l’administration Obama (le général James Jones à la tête du NSC et le général Shinseki comme secrétaire aux Vétérans), a fait dire à certains commentateurs qu’il s’agissait d’un “noyautage”, ou d’une amorce de prise de contrôle, bref d’une “militarisation” de l’administration Obama dans le sens d’un courant belliciste affirmé.
On constate en fait, au contraire, que nombre de militaires ont des positions modérées, beaucoup plus modérées que les civils des milieux neocons, du Lobby, et des parlementaires complètement corrompus par le Lobby et les groupes d’intérêt qui sont autour. Luban et Lobe mettent en évidence la lâcheté et la corruption du monde politique dans cette affaire Freeman, au contraire de la communauté de sécurité nationale («[T]he Freeman affair has highlighted the yawning disconnect between the career professionals in the intelligence and diplomatic communities, from whom Freeman enjoyed strong support, and political leaders in Congress and the White House, none of whom came to his defense publicly. […] While the Freeman affair may have shifted the parameters of debate on Israel policy, it has also exposed fissures and resentments between the national security bureaucracy and the U.S. political leadership»). La lettre d’information très influente Nelson Report a comparé l’attaque contre Freeman aux pratiques du maccarthysme, avec l’idée implicite de rappeler que McCarthy s’était effondré à la suite d’une attaque contre l’U.S. Army, qui avait vu une violente riposte des militaires. Dans le cas considéré, si une attaque était effectivement lancée contre l’amiral Dennis Blair, celui-ci devrait effectivement avoir le soutien des militaires et, surtout bien entendu, de l’U.S. Navy, qui occupe une position très puissante aujourd’hui. Tout cela devrait, d’autre part, tendre encore plus des rapports déjà délicats entre la hiérarchie militaire US, notamment et encore l’U.S. Navy (l’amiral Mullen, président du JCS), et la direction israélienne à cause de ses projets bellicistes contre l’Iran.
Dans ce contexte, si une attaque type maccarthyste contre Blair est possible, elle risquerait de provoquer des événements extrêmement intéressants, avec la possible confrontation du Lobby avec une parie importante de la communauté de sécurité nationale. Ce serait une évolution riche de conséquences.
Mis en ligne le 14 mars 2009 à 09H37