Au fait, l’Iran, vous connaissez ?

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L’état totalement misérable de la diplomatie occidentale est bien illustré par l’évolution actuelle. En quelques jours, la crise iranienne désignée comme fondamentale a complètement disparu de l’écran-radar des robots qui nous servent de Talleyrand post-modernistes. Plus rien. On ne parle plus que de la crise nord-coréenne.

(…Qui est d’ailleurs plutôt une crise entre la Corée du sud et le Japon, comme nous l’observions ingénument le 10 juillet ; et c’est ce que regrette pompeusement notre référence en matière de commentaire diplomatique, l’archi-saint et très intellectuel Financial Times : « Meanwhile, South Korea and Japan have become embroiled in a dispute over whose response to the missile tests has been more appropriate, exacerbating their differences and creating an unwelcome distraction from dealing with Pyongyang. » Le “unwelcome” ressemble aux petits coups de règle nerveux tapés sur la table par le professeur agacé rappelant à l’ordre l’un ou l’autre élève turbulent. Merci de ce rappel aux réalités : la terrible menace des missiles de Kim. Drôle d’époque, n’est-ce pas Bouvard & Pécuchet ?)

Une dépêche de Associated press du 9 juillet nous informe que certains diplomates se sont avisés du problème de la relégation de la crise iranienne en deuxième division :

« Some diplomats involved in both [North Korea and Iran] issues fear international focus is shifting too much to Pyongyang, which test-fired seven missiles Wednesday. (...)

» Publicly, senior officials say Washington and other big powers can keep both balls in the air.

» “I don't agree that one issue distracts from the other,” John Bolton, the U.S. ambassador to the United Nations, told The Associated Press in a phone call from New York. “I think we are very focused on both of them and fully capable of dealing with both of them.”

» But privately, diplomats based in Europe said over the past few days that the North Korean crisis could push talks with Iran further down the international agenda.

(...)

» The North Korean crisis is, in some ways, similar to international concerns about Iran's nuclear program — and that worries diplomats and European officials involved in trying to entice Tehran into negotiations because both involve the same major players.

» “We are trying to negotiate two sanctions resolutions with the same countries involved in both cases,” said a U.N. diplomat familiar with Security Council efforts to pressure both Tehran and Pyongyang to compromise. “This will be a very complicated challenge.” »

Quelle est la cause de cette étrange dispersion? Les crises ne sont pas appréciées en tant que telles, mais en fonction des effets sur les autres partenaires, et des effets secondaires sur les relations qu’on a avec ces partenaires, tout cela avec une manipulation médiatique intense qui mobilise l’attention. (Sinon, y aurait-il des crises ? Question posée.)

Dans la crise iranienne et la crise nord-coréenne, Bush agit principalement en fonction de son opinion publique et des forces politiques de Washington. Les Européens agissent principalement en fonction de leurs relations avec les USA, qui ne doivent en aucun cas être compromises. Russes et Chinois agissent en fonction de leurs relations avec l’Ouest et avec les deux pays au centre de la crise. (De tous les acteurs, les Chinois et les Russes sont de loin les plus à l’aise et ils ne cessent de le montrer davantage. Ce sont sans doute les seuls qui coordonnent leurs propres actions diplomatiques dans les crises iranienne et nord-coréenne, avec leur droit de veto à l’ONU servant successivement de carotte et de bâton.)


Mis en ligne le 12 juillet 2006 à 08H16