Avec l’embrasement britannique, l’incendie Murdoch atteint les USA

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La situation continue à s’aggraver au Royaume-Uni pour Rupert Murdoch, qui a du abandonner aujourd’hui son offre de prise de participation majoritaire de la chaîne TV BSkyB. A côté de cela, la crise touche désormais clairement les USA, où Murdoch possède ses plus formidables publications, du Wall Street Journal aux diverses entreprises Fox, dont la chaîne TV Fox.News, au New York Post, etc. Les retombées financières du scandale commencent à être considérables : le groupe News Corp., qui regroupe tous les avoirs du groupe Murdoch, a perdu en bourse $7 milliards en 4 jours.

• Aux USA, donc, il y a d’abord une véritable “révolte” des actionnaires du groupe Murdoch contre Rupert Murdoch et ses proches. Une plainte a été déposée contre eux, selon l’argument que le comportement autorisé, sinon suscité par le clan Murdoch, dans nombre des publications du groupe, avec les conséquences qu’on connaît, ont un effet épouvantable sur la réputation du groupe et mettent en danger les avoirs des investisseurs. Le 11 juillet 2011, le site MediaMatters.org a publié un article sur cette nouvelle. (Voir aussi, sur la chaîne MSNBC, le 12 juillet 2011, une interview de Ilyse Hogue, de MediaMatters.org, exposant la situation générale en dégradation accélérée de Murdoch aux USA.)

Voici quelques extraits du commentaire de MediAmatters.org concernant la plainte du groupe d’actionnaires, qui comprend 94 pages détaillant ses critiques radicales contre le comportement et la gestion du clan Murdoch. Ce groupe annonce d’ores et déjà des actions, au sein du conseil d’administration de News Corp., contre certaines nominations et autres initiatives de Murdoch.

«A group of News Corp. shareholders led by Amalgamated Bank has sued the media company claiming several of its business decisions, as well as the recent phone-hacking scandal at News of the World, have adversely affected shareholder interests. The lawsuit claims, among other things, that “News Corp executives are ... grossly overpaid, ensuring their loyalty to Murdoch and his personal initiatives,” later stating that Murdoch is “larding the executive ranks of the Company with his offspring.”

»Among the lawsuit's complaints: the company's purchase of Elisabeth Murodoch's Shine Group has harmed the shareholder value; the board as it is comprised has numerous conflicts of interest; and the phone-hacking scandal has hurt the company's reputation and investor value. “In sum, these acts will cause a direct harm to News Corp shareholders by diluting their ability to influence the Company through the exercise of the shareholder franchise because a greater percentage of the Board will be completely beholden to Rupert Murdoch's wishes,” the lawsuit, filed Friday, stated in part. “In contemplating, planning, and/or affecting the foregoing conduct, Murdoch and the other Defendants were not acting in good faith toward News Corp shareholders, and breached or will breach their fiduciary duties owed to them. As a result of these actions, News Corp shareholders have been and will be damaged.”»

• Le Congrès est lui-même touché par l’incendie Murdoch, sous la forme d’une déclaration du sénateur Jay Rockefeller, président de la commission du Commerce du Sénat. Rockefeller s’interroge sur la possibilité que des journalistes du groupe Murdoch ait enfreint la loi, comme c’est le cas désormais avéré au Royaume-Uni, où des arrestations ont eu lieu, et il demande une enquête sur la question. Une activité illégale du groupe Murdoch tomberait sous le coup d’une législation extrêmement sévère, surveillant les actions de corruption et autres concernant des citoyens Américain, ou des compagnies US. (MediaMatters.org suggère, de son côté, que des conseillers directs de Murdoch pourraient effectivement être poursuivis aux USA, sous l’accusation d’activités illégales.)

Le Guardian rapporte, le 13 juillet 2011, l’intervention du sénateur Rockefeller.

«Senate commerce committee chairman Jay Rockefeller has asked the authorities to investigate if any journalists working for Rupert Murdoch had targeted US citizens, and warned of “serious conséquences” for the media group if that were the case. […] In a written statement, Rockefeller expressed concern that victims of 9/11 and their families could have been targeted by News Corporation journalists, although he did not offer any evidence to suggest that may be the case.

»“I encourage the appropriate agencies to investigate to ensure that Americans have not had their privacy violated,” he said. “The reported hacking by News Corporation newspapers against a range of individuals – including children – is offensive and a serious breach of journalistic ethics. This raises serious questions about whether the company has broken US law,” he said.»

En début d’après-midi, aujourd’hui à Londres, Rupert Murdoch a vécu l’humiliation suprême, dans tous les cas pour son implantation au Royaume-Uni, de devoir retirer son offre de prise de majorité dans la chaîne de télévision par cable BSkyB, qui était son principal objectif d’investissement, pour lequel il était prêt à sacrifier toutes ses autres entreprises de presse au Royaume-Uni. Le Guardian rapporte, ce 13 juillet 2011, la capitulation totale de Murdoch pour cet épisode, qui suit l’annonce de l’union non moins totale du monde politique anglais (les conservateurs ayant rejoint les libéraux et les travaillistes) pour soutenir une motion déconseillant fortement à Murdoch de maintenir son offre…

«Rupert Murdoch's media group News Corporation bowed to pressure from the public and parliament on Wednesday and withdrew its bid to take full control of pay-TV company BSkyB. All three main political parties were poised to call on News Corp to abandon its offer in a vote in the House of Commons later on Wednesday. The move leaves News Corp's key strategy for UK corporate growth in tatters. The proposed £8bn deal has been in train for more than a year, with the first offer tabled in June 2010.»

L’incendie qui dévore le groupe Murdoch est fascinant par la rapidité de son extension, qui dépasse largement les capacités de défense. La vitesse de la chose déborde constamment les tentatives faites par Murdoch de le contenir, jusqu’à voir ces tentatives (la liquidation de News of the World, par exemple) alimenter au contraire l’incendie. Il s’agit désormais d’un phénomène mondial de chaîne crisique qui secoue le monde anglo-saxon (l’“anglosphère”). Il faut évidemment avoir à l’esprit que ce qui est menacé, encore bien plus qu’un empire financier et qu’un empire médiatique, c’est certainement, par le biais de la puissance médiatique et de la puissance de corruption et la pression qui vont avec, le centre d’influence politique anglo-saxon le plus puissant et le mieux coordonné autour d’une idéologie spécifique, et dans des buts politico-militaires parfaitement identifiés. Avec cette puissance d’influence, et le groupe neocon qu’il a entretenu et financé depuis quinze ans, Murdoch a été la colonne vertébrale d’influence virtualiste qui a propulsé et soutenu la “politique de l’idéologie et de l’instinct” déterminant l’orientation et l’activisme de l’“anglosphère” et du bloc américaniste-occidentaliste depuis 9/11.


Mis en ligne le 13 juillet 2011 à 16H35