Barroso versus Merkel, – “la panique règne”…

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Dans une interview à la Frankfurter Allgemeine Zeitung, le président de la Commission européenne José Manuel Barroso attaque vivement Angela Merkel. Il lui trouve de la naïveté. A côté et en soutien de cela, son cabinet tire à boulets rouges sur les Allemands, pour leur comportement durant les derniers mois et les dernières semaines, en pleine “crise de l’euro”.

Le Guardian du 26 mai 2010 donne quelques détails sur l’algarade. Celle-ci mérite une interprétation, qui conduit à une évaluation du climat politique actuel, à partir d’observations recueillies dans les milieux, comme on dit, “proches des institutions européennes” (voir Notre commentaire).

«José Manuel Barroso, the president of the European commission, who is believed to be supported by a majority of the 27 member states, described Merkel's campaign to reopen the Lisbon treaty as “naive”. He said that the bill of almost €900bn for rescuing Greece and shoring up the euro would have been much cheaper had Berlin acted more swiftly, and accused the German government of failing to lead public opinion in defence of the beleaguered single currency.

»Barroso's surprisingly public criticism, in an interview with Germany's conservative newspaper the Frankfurter Allgemeine Zeitung, signalled the high-level political friction in the EU over how to restore faith in the single currency.»

Notre commentaire

@PAYANT C’est avec une certaine philosophie qu’une de nos sources caractérise cette attaque du président de la Commission. Pour cette source, Barroso pense qu’il peut agir en toute impunité dans ce sens, qu’il a la majorité des pays-membres derrière lui, que les Allemands ne riposteront pas selon l’habitude de leur comportement qui est de «faire suivre certains actes assez tranchants d’une attitude de repli qui ressemble presque à de la contrition par avance…». Dans ce cas, Barroso joue sur du velours, car il exprime un mot d’ordre implicite qu’on retrouve chez la plupart des pays-membres, qui est celui de “la solidarité par tous les moyens”.

En fait, estiment nos sources, qui sont en général d’esprit frondeur, le climat politique devant les événements dont la volatilité explosive ne désarme pas est celui d’une panique larvée mais de plus en plus marquée. En l’occurrence, la mise en cause des Allemands, quels que soient les reproches qu’on pourrait éventuellement leur adresser, est une démarche qui a toutes les chances de rassurer la majorité. La technique du bouc émissaire, quoi qu’il en soit du bouc émissaire, est une excellente médication pour la panique.

Ce que décrivent nos sources est effectivement moins un antagonisme (avec les Allemands) qu’une panique générale des dirigeants politiques, qui pourrait d’ailleurs aussi bien toucher les Allemands selon les circonstances, voire être avancée comme explication pour certaines déclarations qu’ils ont faites et décisions qu’ils ont prises. Cette panique ressemble fort à une crainte généralisée d’une mise en cause de l’Europe par les événements. «Ce dont on s’aperçoit, sans réelle surprise d’ailleurs, estime notre source, c’est que la plupart des dirigeants politiques des pays européens sont incapables de penser par eux-mêmes, il leur faut absolument la référence européenne…» Cela vaut même s’il apparaît évident par ailleurs que c’est l’Europe, avec la politique ultra-libérale suivie sous les pressions anglo-saxonnes et celles du système de la communication, qui est en grande partie responsable de cette partie européenne de la crise générale.

«C’est un climat extrêmement volatile, explique encore notre source, qui peut conduire à des événements imprévus et complètement inattendu.» Pour cette source, ces événements seraient plutôt dans le sens d’un resserrement brutal de l’engagement européen, également décidé sous le coup de la panique, toujours pour la même raison de cette incapacité de penser par soi-même, et aussi la crainte de quitter les formules conformistes qui ont forgé la culture des dirigeants politiques actuels. «Il est très possible qu’au cours d’une réunion d’urgence, dans le cœur d’une nouvelle phase aiguë de la crise, les dirigeants politiques des pays-membres adoptent des mesures massives d’abandon de souveraineté au profit des institutions européennes, essentiellement de la Commission, au niveau budgétaire, comme on l’a déjà suggéré ici et là. Cette chose-là peut arriver, et une fois qu’une telle décision est prise il est bien difficile de revenir dessus…» (De toutes les façons, ce type de décision entraînerait à son tour des crises graves dans les pays concernés, en raison de l'opposition souvent très forte à cette sorte d'orientation, – bref, ce serait soigner la crise par la crise.)

Ainsi, alors qu’il y a une ou deux semaines on décomptait les pays qui pourrait envisager de quitter l’euro, cette version-là de la prospective européenne, aujourd’hui, serait plutôt de faire “encore plus d’Europe”, – sorte d’application de la formule fameuse dans l’esprit européen : “on ne change surtout pas une équipe qui perd”. Le point le plus important à souligner dans ces descriptions changeantes est naturellement l’absence totale de stratégie et de la moindre vision, y compris à court terme, de la part des directions politiques. Barroso est connu comme cet homme sans la moindre consistance, sans aucune qualité de caractère, mais quoi, – dans l’Europe devenue celle des aveugles, un borgne à ce point finit pourtant par paraître le plus résolu avec la vue la plus fine, – notamment parce que, n’ayant strictement rien fait dans la crise jusqu’ici, notamment lors de la phase septembre 2008-printemps 2009, nul ne peut lui reprocher d’erreur majeure… «Pour qu’un Barroso se permette de telles critiques, conclut notre source, il faut évidemment qu’il y ait une absence complète de résolution et de volonté dans toutes les directions européennes. La panique règne»


Mis en ligne le 26 mai 2010 à 14H55

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