Buy American a survécu et se porte bien

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Le “plan de stimulation” de l’économie US voté par le Congrès le 11 février, après la rencontre classique de compromis entre la Chambre et le Sénat pour concilier les deux textes votés par les deux chambres, comprend bien la clause dite Buy American. On trouve dans la rédaction de la chose les quelques aménagements de forme introduits à la demande du président Obama.

Le 12 février, Defense News rend compte de la nouvelle:

«Buy-American requirements survived in the giant economic stimulus bill that the U.S. House and Senate agreed to Feb. 11, to the chagrin of U.S. business associations. Lawmakers agreed to retain the Senate's version of the protectionist provision that requires U.S.-made products to be used in projects funded by the $790 billion stimulus bill.

»The provision says that iron, steel and manufactured goods used in projects funded by the economic stimulus bill must be “produced in the United States.” After an outcry by U.S. business associations and foreign ambassadors, who feared the language might trigger trade wars, the Senate added that the provision must be “applied in a manner consistent with United States obligations under international agreements.”

»Even with the modification, U.S. defense companies worry that foreign governments may retaliate by refusing to buy U.S.-made weapons. Nevertheless, the buy-American provision remains in compromise legislation worked out between the House and Senate on Feb. 11, said a spokeswoman for the House Appropriations Committee.

»U.S. business organizations aren't happy about it.»

L’affaire s’est déroulée, comme on disait selon le langage standard de la bureaucratie soviétique, “selon le plan prévu”. L’intervention du président Obama a abouti à un aménagement de langage qui, dirait-on, va de soi. Il semble en effet aller de soi qu’un pays qui a signé des engagements internationaux entende les respecter tant qu’il ne les a pas explicitement dénoncés. Cela confirme l’interprétation que nous avions donnée de l’intervention d’Obama: «Cette prise de position du président US, notons-le bien, concerne le “langage” de la clause Buy American, pour que les USA n’envoient pas au monde un “message” qui ferait croire qu’ils sont préoccupés d’eux-mêmes seulement, et pas du Rest Of the World.» Dans la pratique de la chose, il reste que les soumissionnaires des contrats passés dans le cadre du plan sont dans l’obligation d’utiliser du fer et de l’acier “produits aux Etats-Unis”; ils pourraient, pour bien faire, agrémenter leurs commandes et leurs contrats d’une appréciation qu’il ne s’agit en rien un acte de protectionnisme.

In illo tempore, lorsque l’influence US existait à son standard de haut niveau que l’on connaissait, à l’abri de toute critique et de toute concurrence, une telle aventure eût été une péripétie sans importance puisque tout acte de la puissance tutélaire était accepté sans murmure. Aujourd’hui, elle constitue un acte important et sérieux parce que posé dans le cadre de la crise générale, en fonction de cette crise, par une puissance dont l’influence fortement déclinante permet aux intérêts des autres nations de s’exprimer de façon beaucoup plus ouverte. Désormais, les autres pays qui entendent suivre une politique de protection se trouvent confortés dans leur démarche, d’autant qu’il s’agit d’une loi officielle et non d’une pratique dont on peut toujours arguer de la réalité et du fondement. On parlera par conséquent d’un pas non négligeable qui a été franchi dans la structure de crise qui se met en place.

Au reste et sur le fondement de la chose, on se gardera de condamner les législateurs US, de la même façon que la question du protectionnisme avec toutes ses nuances nous paraît largement ouverte dans le contexte d’un système qui s’appuie sur une hostilité mortelle au protectionnisme et qui se trouve dans une crise si profonde que tous les principes et options de son fonctionnement ont tout lieu d’être soumis à la critique la plus vive. La décision US a ceci de bon, répétons-le, qu’elle dit tout haut et de façon légale ce que les autres et même tout le monde (y compris les USA dans d’autres domaines) pratiquent tout bas. Elle force effectivement, d’une façon ou l’autre, à mettre en question l’un des diktat du système; elle conduit par conséquent à faire progresser le débat sur la validité d’un système omniprésent et qui a suscité, par ses pratiques dont celle de tenir dans la plus complète excommunication le protectionnisme et de façon plus générale toute pratique de protection avérée des intérêts économiques nationaux, une crise de la dimension de celle qu’on subit.


Mis en ligne le 13 février 2009 à 05H58