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1337En effet, pendant que la grande bataille de Cablegate se poursuivait, le président BHO était tout entier absorbé par l’une de ses principales occupations : comment céder le maximum de terrain aux républicains encore très minoritaires dans les derniers jours de ce 111ème Congrès. C’est le cas avec l’“accord” sur les impôts (prolongation du régime d’impôts très favorables aux plus riches, qui se terminait le 21 décembre et qui devrait être prolongé de deux ans). Cette fois, le résultat obtenu a provoqué une révolte notable des démocrates. On en a deux échos, de deux fractions différentes du parti, dans deux articles.
• Le The Daily Telegraph du 10 décembre 2010 écrit :
«Barack Obama was being assailed from all sides on Thursday night as his own party launched a rebellion in Congress and Sarah Palin ramped up her potential White House bid with a withering verbal assault on the American president.
»Democrats in the US House of Representatives refused to vote on a tax package that they said gave away too much money to the wealthy. The unanimous decision, taken at a heated closed doors meeting of the Democratic caucus, was a major blow to the White House, coming just days after the president announced that he had found agreement on a range of tax proposals with Republicans.
»Mr Obama's aides had hoped that reaching a compromise would boost the president's image as a strong and statesmanlike leader, but he now faces a party in revolt and another phase of messy negotiation that will further weaken his standing. […]
»After several disappointments, the White House's secretly negotiated deal with Republicans on taxes made the patience of Democrats snap. At the caucus meeting, a chant of “Just Say No!” broke out as members discussed whether or not to accept Mr Obama's proposals. […] Democrats in the House were united in their fury at another climb-down by Mr Obama when he agreed to a $5 million threshold for estate tax, the major inheritance tax in the US, taxed at a reduced rate of 35 per cent. Seen as a needless giveaway to the rich and a sign of weak negotiating skills, one Congressional aide said it was “pouring salt on Democratic wounds” and another said “the White House just blew it”.»
• Le Los Angeles Times du 9 décembre 2010 fait rapport, lui, à propos du désappointement et de la fureur des donateurs démocrates, ceux qui financent le parti.
« President Obama's advisors are confident that liberals dismayed by his agreement to extend tax breaks for the wealthy will forgive him by the time the 2012 election kicks into gear. But the current backlash on the left may intensify the immediate challenge Democrats face in building a new campaign finance apparatus to challenge Republican-allied outside groups that flexed their muscles in this year's midterm election.
»Democratic operatives are already laying plans to set up new independent expenditure committees that can raise unlimited funds, and hope to enroll early contributors to establish a beachhead for the coming campaign. But some stalwart party donors are vowing to withhold funds because of their anger over the tax-cut deal.
»“I do not plan to support Obama and his reelection effort,” said Utah-based hedge fund manager Art Lipson, who gave hundreds of thousands of dollars to the Democratic Party and its allies in recent elections. He views the tax-cut compromise as a giveaway to Republicans that will increase the deficit. “He's got many great qualities, but he is not a fighter,” Lipson said of the president. “I've met with many donors and the level of disappointment is extreme.”»
@PAYANT Ainsi avons-nous l’explication générale de l’absence d’Obama dans l’affaire Cablegate. Le président était occupé à d’autres tâches, dans le cadre de sa tactique favorite qui est de céder continuellement aux républicains. La situation est totalement ubuesque : pour “profiter” des dernières semaines du 111ème Congrès où les républicains sont très minoritaires, Obama lance plusieurs législations importantes, se disant qu’elles seront beaucoup plus difficiles à faire passer avec le 112ème Congrès où les républicains sont beaucoup plus forts. Pour “profiter” de cette situation et faire voter les lois, il fait le maximum de concessions aux républicains, au moins autant, peut-être plus qu’il n’en aurait fait avec le prochain Congrès… Le résultat est que le parti démocrate est en train de suivre une tendance dissidente de plus en plus marquée, qui pourrait conduire à des surprises. On écarte officiellement pour l’instant l’idée d’une rupture à l’intérieur du parti pouvant conduire à un challenger démocrate de BHO pour 2012, mais le seul fait que la chose soit repoussée indique bien qu’on en a discutée. L’équipe du président est confiante et estime qu’Obama retrouvera le soutien du parti d’ici 2012, une fois la colère actuelle passée ; encore un beau raisonnement, sauf que chaque acte du président depuis la mi-2009 a alimenté, relancé et aggravé cette colère, et l’on ne voit pas pourquoi cela ne continuerait pas jusqu’en 2012…
La spécificité du cas Obama ne cesse ainsi de se renforcer. L’explication de la “marionnette” de telle ou telle force, si souvent avancée, ne tient guère. Un président US qui, dans le système, est plus ou moins nécessairement le représentant de tous les intérêts oligarchiques, n’est pas là pour précipiter les déséquilibres au-delà du raisonnable et des lois de la “physique sociale”, parce qu’il risque alors de déstabiliser gravement le système. Il est là, au contraire, pour équilibrer les différentes tendances de cette oligarchie générale, pour conserver les USA dans un bon état d’équilibre, qui passe notamment par l’existence de citoyens ayant un bon pouvoir d’achat pour faire tourner la machine. La politique actuelle constitue peu ou prou une démarche déstabilisante, et certaines grosses fortunes US, conscientes de ce problème, ont pris des positions “philanthropiques” qui tendent à tenter d'établir un certain rééquilibrage (le mouvement de philanthropie de Bill Gates et Warren Buffet, regroupant 57 milliardaires qui s’engagent à se défaire d’au moins 50% de leur fortune en dons sociaux divers).
Mais Obama est coincé, par le fait même de son appréciation rationnelle de la situation, dans l’idée d’un système politique qui n’existe plus, qui est celui du système bipartisan. Il est d’ailleurs hautement probable que cette “idée” est d’abord une fiction, ce que la jeunesse et l’inexpérience d’Obama, autant qu'une certaine suffisance lui faisant refuser les fruits de l'expérience, semblent lui avoir interdit de comprendre. Sur les problèmes intérieurs, les présidents les plus efficaces, lorsqu’ils survenaient à un moment difficile de l’équilibre économique et social, ont été ceux qui ont apposé le sceau du système bipartisan sur une politique qu’ils avaient eux-mêmes décidée et forcée. Obama semble vraiment croire que sa “magie” peut forcer à imposer des décisions bipartisanes qui lui éviteraient de prendre trop nettement position. Cette conviction menant sa politique depuis pratiquement la mi-2009, il s’est lui-même emprisonné dans un réseau de contradictions, de décisions contre-productives, ayant en général pour effet de rendre furieux ses propres partisans. L’épisode actuel est le plus spectaculaire avec cette situation extraordinaire du groupe démocrate (majoritaire) à la Chambre refusant le propre programme que le président a négocié avec les républicains. Il est extrêmement prévisible que la situation du 112ème Congrès sera pire et encore plus paradoxale ; l’on y verra Obama toujours incliné à rechercher l’accord des républicains, cette fois majoritaires à la Chambre mais encore minoritaires au Sénat, alors que ces républicains seront soumis à des tensions internes considérables, tandis que les démocrates seront de plus en plus fermes dans leur opposition, – opposition contre les républicains et contre… Obama.
Nous ne serions pas si sûrs que le semblent les stratèges d’Obama que celui-ci aura regroupé les démocrates autour de lui en 2012. Cette fin du 111ème Congrès laisse craindre au contraire un redoublement des affrontements partisans (parti contre parti) et internes (à l’intérieur des partis). On pourrait même assister à des scissions internes dans les deux partis, et un curieux projet semble en être comme un signe avant-coureur : le projet commun paar simple chronologie (voir RAW Story le 8 décembre 2010), pour des raisons exactement opposées, des deux sénateurs des tendances les plus opposées, l’indépendant Bernie Sanders du Vermont qui est un quasi-socialiste, et le républicain DeMint de Caroline du Sud, qui est à l’extrême droite du parti républicain, qui veulent pratiquer la technique du filibuster pour empêcher le vote au Sénat de cette fameuse loi sur l’imposition des plus riches.
Mis en ligne le 10 décembre 2010 à 13H58
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