Centre en chute accélérée et périphéries agissantes : une chanson connue

Ouverture libre

   Forum

Il n'y a pas de commentaires associés a cet article. Vous pouvez réagir.

   Imprimer

 397

Centre en chute accélérée et périphéries agissantes : une chanson connue

Varsovie (ce 6 août 2012), Damas, Bagdad, Téhéran (le 26 juillet 2012)… Canberra (ce 6 août 2012)…

Il semble que les attaques de déstructuration (Syrie, système BMDE…) portées par le Système finissent par provoquer des efforts de structuration là où il a toujours – depuis des siècles – fallut en faire (relations Pologne-Russie, relation Damas-Bagdad-Téhéran… A quoi l’on peut rajouter un nouveau venu : relations Australie-Chine)

Notons encore que ces efforts, ces débuts de restructurations (configurations souvent anciennes, mais adaptées au contexte d’aujourd’hui), ces relations entre voisins cherchant à faire du constructif… se déroulent, comme toujours dans l’Histoire et même au-delà, en périphérie des grandes ensembles homogénéificateurs entrés dans leur phase de fission (1). (Il faut entendre par “ensemble homogénéificateur” les Empires divers ou, en l’occurrence, le Système (2).)

Le mot “périphérie” peut sembler étranger dans une époque de globalisation, dans une époque encore plus où la géopolitique est réduite à l’insignifiance et l’inefficacité (contre-efficacité)… Mais toute globalisation se fait en centres et périphéries, n’en déplaise aux croyants de la vulgate du “village global” et comme le sait tout élève des écoles centrales. Et surtout, la Syrie fut encore, il y a peu, un des rares et derniers pays à ne pas être occidentalisé (plus exactement: touché par la déstructuration du Système), c’est-à-dire où subsistait quelque chose des relations humaines basée sur des traditions d’hospitalité, de culture etc. (Témoignages de seconde main d’un ami qui y est allé au début des années 2000 – ceci dit sans nier aucunement l’autoritarisme et les services secrets de feu le père Al Assad (3).)

Ces efforts de structuration “périphérique” peuvent être temporaires, encore trop inscrits dans la logique du système moderne, là où s’agira véritablement de “refaire monde” (de passer à autre chose, sortir du moderne en tant qu’il est non-monde), c’est-à-dire de refonder, retrouver une culture au sens haut du terme (civilisationnel) (4). La prise en compte explicite de cette dimension culturelle et spirituelle par la Russie (5) en est peut être un indice.

Christian Steiner

Notes

(1) Voir par exemple C. Grataloup, Lieux d’Histoire. Essai de géohistoire systématique (1996), et son principe d’Aix-la-Chapelle. Ce processus de fission d’un ensemble plus ou moins homogène et unifié, recouvrant une grande superficie géographique, avec la création à ce moment là sur ses périphéries d’inventions et d’innovations de structures nouvelles, s’observent également en matière de linguistiques, donc de création éminemment culturelles ; elles s’observent également en biogéographie et en terme d’écosystèmes (lorsque des conditions stables changent brutalement), comme les travaux de paléobotanique et de paléobiogéographie le suggèrent.

(2) Même si le cas extrême du Système se distingue des empires historiques en ce que l’homogénéification qu’il crée n’est pas celle des quelques valeurs culturelles qu’il promeut (superficielles, illusoires, vidées de leur contenu) mais, profondément, celle de la déstructuration… Mais le propre de l’entropisation n’est-il pas, précisément, de mener à un état homogène radical – le plus bas et le plus mort, certes ?

(3) voir aussi entre autre exemple la relation de Nicolas Bouvier de son voyage sur la Route de la Soie (plus exactement : de la Yougoslavie à l’Afghanistan), en 1953-1954 (L’usage du monde, 1963).

(4) Voir par exemple cet article du 7 janvier 2012.

(5) Articles du 3 mars 2012 et du 6 mars 2012.