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994Quelques remarques édifiantes, notamment par la référence faite dans cet article, qui concernent les rues des villes du Royaume-Uni, devant les agences de la banque Northern Rock :
«Yesterday something happened that I have not seen in my lifetime, a run on a major British bank. There were queues outside Northern Rock branches as depositors tried to get their money out.
»This is the sort of event that happened in America after the Great Crash of 1929. For Northern Rock, this is catastrophe. For the rest of us it marks the end of an era of easy money.»
Cette description à sensation extraite d’un article de Hamish McRay, du Guardian, on la retrouve partout dans la presse britannique, comme dans le Financial Times par exemple. La référence à 1929 (et au-delà, à la Grande Dépression de 1931-33), comme celle que fit Evans-Pritchard le mois dernier, est justifiée. La référence concerne la crise psychologique en train de se développer aujourd’hui, plus que la crise économique. La Grande Dépression est un cas historique parce que c’est une crise psychologique avant d’être une crise économique. Désormais cette référence à une des plus grandes catastrophes du XXème siècle, à cette catastrophe mythique, est dans tous les esprits.
La différence technique est qu’en 1929, la crise spécifique US dans son immense dimension psychologique resta confinée aux USA. Même si l’Europe connaissait ses propres crises et si les causes économiques générales jouaient pour chacune de ces crises, la crise européenne restait autonome de la crise US dans ce rapport direct et immédiat actuel qui est de l’ordre de la communication sous toutes ses formes (circulation des liquidités fictives mais surtout circulation des réactions et des spéculations toutes deux d’ordre psychologique). Ce rapport tyrannique immédiat imposé par la communication est générateur de panique précipitant vers le collapsus, il aggrave monstrueusement la crise en attaquant les psychologies. En 1929, il n’y avait pas cet enchaînement immédiat, cette cascade globale de crises directement liées entre elles, cet emprisonnement dans une même logique immédiate d’une catastrophe particulière devenant aussitôt générale. C’est la globalisation, comme nous l’explique le secrétaire US au trésor Hank Paulson ; lequel Paulson, par ailleurs et comme si ceci n’avait aucun rapport avec cela, n’a pas le moindre mot du moindre doute sur la valeur et la vertu sacrée de ce processus dont les effets les plus efficaces sont, sans discussion, de répandre lorsque l’opportunité s’en présente une catastrophe locale ou nationale dans le reste du monde.
Les mêmes remarques reviennent sous la plume, qui sont elles aussi du domaine de la psychologie. C’est une remarque d’ordre psychologique qui conduit à observer que, pour ces gens, il semble qu’il ne leur importe que de montrer une chose, contre vents et marées de la crise: que le processus de la globalisation, ça marche. C’est le cas pour l’épidémie de la crise, où la globalisation montre sa complète efficacité. On ne trouve pas un seul mot de doute parce qu’il s’agit d’une attitude psychologique inconsciente qui a fait disparaître tout esprit critique. La psychologie humaine s’est soumise à la machinerie que l'homme a mise en place. Le cœur léger et la vanité comblée, réservant ses critiques affectueuses aux banquiers imprudents et irresponsables et ses critiques impatientes aux particuliers qui viennent retirer leur argent, il applaudit à cette sujétion à la machinerie aveugle qui est la sienne. Ce n’est pas un problème économique ou un problème financier, c’est une catastrophe psychologique.
Mis en ligne le 15 septembre 2007 à 09H30
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