Comme le KGB au temps de Brejnev…

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Comme le KGB au temps de Brejnev…


27 juin 2005 — Treize agents, ou contractants, sous mandat d’arrêt… Ce n’est pas Moscou-KGB, 1975, mais l’Italie et ses juges en 2005. C’est une situation étonnante, contrastant évidemment avec toutes les bonnes paroles sans nombre que se dispense réciproquement la paire GW-Berlusconi depuis 2-3 ans. Cette affaire est particulièrement significative, dans ses détails, des différences de conceptions entre Européens et Américains (les Italiens étant, dans ce cas, parfaitement européens), et aussi significative de la différence des perceptions du même phénomène : le terrorisme. Enfin, il y a la mise en évidence du scandaleux comportement des Américains, qui agissent d’une façon complètement arbitraire, sans tenir aucun compte des accords passés, de la coordination nécessaire, etc.

L’article du New York Times (repris dans l’International Herald Tribune) d’aujourd’hui explique bien l’affaire.


« The extraordinary decision by an Italian judge to order the arrest of 13 people linked to the CIA on charges of kidnapping a terrorism suspect here dramatizes a growing rift between American counterterrorism officials and their counterparts in Europe.

» European counterterrorism officials have pursued a policy of building criminal cases against terrorism suspects through surveillance, wiretaps, detective work and the criminal justice system. The United States, however, has frequently used other means since Sept. 11, 2001, including renditions - abducting terror suspects from foreign countries and transporting them for questioning to third countries, some of which are known to use torture.

» The two approaches seem to have collided for an Egyptian cleric, Hassan Mustafa Osama Nasr, or Abu Omar, accused of leading a militant mosque in Milan.

» By early 2003, the Italian secret police were aggressively pursuing a criminal terrorism case against Nasr, with the help of American intelligence officials. Italian investigators said they had told the Americans they had strong evidence that he was trying to build a terror recruitment network, possibly aimed for Iraq if the United States went forward with plans to topple Saddam Hussein. On Feb. 17, 2003, Nasr disappeared.

» When the Italians began investigating, they said, they were startled to find evidence that some of the CIA officers who had helped them investigate Nasr were involved in his abduction.

» "We do feel quite betrayed that this operation was carried out in our city," a senior Italian investigator said. "We supplied them information about Abu Omar, and then they used that information against us, undermining an entire operation against his terrorist network."

» He and other senior Italian officials in the police and prosecutor's offices in Milan were angry enough to answer detailed questions about the case, but insisted on anonymity because the investigation was continuing.

» "This whole investigation has been very difficult because we've been using the same methods we used against organized crime to trace the activities of people we considered to be our friends and colleagues," the senior Italian investigator said. "It has been quite a troubling affair."

» The Italian warrants, requested by Milanese prosecutors after two years of investigations, accuse 13 people identified as CIA officers and operatives of illegally abducting Nasr from a Milan street and flying him to Egypt for questioning. The whereabouts of the 13 are unknown, but the charges are criminal. If convicted, they face a maximum penalty of 10 years and eight months in prison. »


Affaire extraordinaire et affaire qui ne sera pas sans suite, — outre l’aspect judiciaire, — quant aux relations entre les Italiens (les Européens) et les Américains. C’est la première fois qu’apparaît de cette façon, si concrète et précise, l’abîme psychologique et stratégique qui sépare Européens et Américains sur la question du terrorisme. La réaction du juge italien montre que la situation à cet égard a atteint un point de rupture, un point de quasi-affrontement.

Ce qui va être mis en cause, c’est non seulement la coopération entre Européens et Américains mais la fiabilité des Américains en tant qu’alliés dans la coopération stratégique, leur absence total de respect pour les intérêts de leurs alliés, leur absence totale de respect pour la souveraineté de leurs alliés. L’arrestation de treize personnes appartenant ou proches de la CIA est un cas précis qui va déchaîner les passions et les comportements irrationnels. Les réactions du côté américain vont également être très violentes, même si elles sont infondées. Un analyste européen, envisageant des conséquences plus large, observait : « Si les Italiens arrêtent des gens de la CIA, comment voulez-vous qu’une coopération, même au niveau restreint où elle est actuellement, entre Italiens et Américains dans le programme d’avion de combat ultra-secret JSF ne provoque as une levée de bouliers au Congrès? »