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367Nous tenons la constitution du gouvernement Cameron-Clegg à Londres comme un très grand événement dans la déconstruction du système occidentaliste-américaniste. (Nous nous en expliquerons dans le prochain numéro du 25 mai de dde.crisis.) Cette coalition a déjà connu ses premiers heurts. Les déclarations sceptiques sinon hostiles à cette coalition de Charles Kennedy, l’ancien chef des LibDems (jusqu’en 2007), le 16 mai 2010 dans The Observer, en sont le dernier signe en date.
Parmi les points de friction qui peuvent devenir des points de rupture et semer un trouble de plus dans le concert cacophonique du système occidentaliste-américaniste, il y a l’Iran. C’est un point extrêmement grave à cause de ses répercutions internationales potentielles.
Les déclarations du secrétaire au Foreign Office William Hague, le jour de son entrée en fonction, selon lesquelles une attaque contre l’Iran est une option toujours “sur la table”, comme on a pris l’habitude de dire, ont causé un grand trouble chez les Libéraux Démocrates. Une source européenne qui a des contacts suivis avec les LibDems, dont on connaît la position pro-européenne, observait que «cette déclaration, faite pour plaire à Washington et bien dans la manière de Hague, a provoqué un électro-choc discret mais puissant chez certains libéraux démocrates. Pour le parti de Clegg, une attaque contre l’Iran représente une abomination, et la simple évocation de cette possibilité, une faute catastrophique et une mise en cause de certains de ses principes les plus importants, qui assurent sa base électorale».
Il existe par conséquent, d’ores et déjà, la possibilité d’évoquer un scénario-catastrophe. D’une façon assez révélatrice, il se rapprocherait par certains aspects de la crise de Suez où Londres fut le “maillon faible” de la coalition France-UK-Israël, contrairement à l’image qu’affectionnent les historiens français d’une France manipulée et faible en cette circonstance. (Comme on peut le lire par ailleurs sur ce site, les Français furent les animateurs et les “durs” de cette coalition, beaucoup plus que les Israéliens, et les seuls à vraiment tenir tête aux injonctions américaines.) Certes, la situation générale et les positions politiques sont complètement différentes, avec des acteurs dans des camps différents, avec des circonstances et des “camps” politiques très différents, mais ce qui nous importe ici est de jauger les diverses résolutions. Contrairement aux prémisses des aventures irakiennes et afghanes, le cas de l’Iran est d’une telle importance que chaque position de chacun des acteurs majeurs compterait fortement en cas d'aggravation de l'actuelle crise endémique, pouvant conduire à envisager une intervention. C’est là que le cas britanniques est intéressant.
«En cas de décision d’attaque, voire d’un ultimatum pour une attaque n’impliquant pas nécessairement une attaque, dit encore notre source
Il faut se rappeler cet excellent jugement du néo-sécessionniste du Vermont Thomas Naylor (le 26 avril 2010) sur la destinée de l’“empire” washingtonien : «“There are three or four possible scenarios that will bring down the empire,” Naylor said. “One possibility is a war with Iran…”» Cela ne signifie pas nécessairement une guerre effective. Le scénario évoqué plus haut apporterait tous les éléments capables de secouer l’“empire” jusqu’à le faire vaciller et affronter un processus de désagrégation, voire de désintégration. C’est là une des raisons pour lesquelles nous tenons la formation du gouvernement de coalition à Londres comme un événement extrêmement important. Jusqu’ici, la désagrégation du système occidentaliste-américaniste a pu être en partie freinée, ou contrôlée en apparence, grâce à l’alliance anglo-saxonne, cet axe Washington-Londres qui fut le fait du seul Tony Blair dans la situation créée par l'attaque 9/11. La défection catastrophique de Londres dans un paroxysme de crise constituerait sans aucun doute un élément également catastrophique capable de déclencher une réaction en chaîne de désintégration. Aujourd’hui, les Britanniques jouent vraiment un rôle très important dans la crise générale, même si ce n’est pas celui dont notre “modèle” à tous Tony Blair rêvait.
Mis en ligne le 17 mai 2010 à 06H10