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471410 septembre 2019 – En visite à Moscou, les ministres français de la défense et des affaires étrangères y rencontraient leurs homologues russes, selon la décision conjointe prise par Macron-Poutine le 19 août à Brégançon. Tout a marché assez bien, les deux éminences françaises ayant fait leur devoir sans vraiment y comprendre beaucoup : ce qui était jugé avec sévérité sinon agressivité il y a quelques mois encore par ces deux bidasses de la Macronie est brusquement devenue admirable et fondamentalement structurant... Un exemple : la situation en Centre-Afrique (c’est RT-France, désormais fait de journalistes comme on verra plus loin, qui rapporte la chose), vue par la ministre de la défense Florence Parly :
Le 5 novembre 2018, dans une interview parue dans l'hebdomadaire Jeune Afrique :
« Je ne suis pas certaine que cette présence [russe en République centrafricaine] et les actions déployées par Moscou, comme les accords négociés à Khartoum à la fin août, contribuent à stabiliser le pays. » ;
Le 9 septembre 2019, en conférence de presse à Moscou :
« Certains veulent y voir un lieu de compétition [entre la Russie et la France]. Nous avons des différences de méthode mais je veux le croire, nous avons un même objectif : aider les Centrafricains à restaurer l’autorité de l’État sur leur pays. Lorsque nos efforts convergent dans le cadre institutionnel de l’ONU ou bien de celui de l’Union africaine, nous obtenons des résultats. A l’image, par exemple, de l’assouplissement sur l’embargo sur les armes. Nous pouvons le faire alors faisons-le davantage. »
Mais le moment le plus sympathique de cette conférence de presse survint à la dernière question, adressée au ministre français des affaires étrangères Le Drian, et question d’une journaliste de Spoutnik portant sur le statut de ce réseau en France. Toujours en pointe de l’actualité, Le Drian répondit donc à propos de RT-France, par des explications extraordinairement confuses, lues par un ministre manifestement ébahi par cette question, et bottant en touche selon les instructions de son service de communication, vers le CSA qui avait réussi un montage grandguignolesque pour impliquer RT-France dans une critique reprise en la caviardant par l’AFP et le reste de la presseSystème.
La réponse de Le Drian, quoique confuse et balbutiée sur un ton monotone, a pourtant réussi ce scoop de faire parler le ministre français et fourbu des « journalistes de RT » alors que l’argument principal opposé en France, dans les divers organes macroniens et autres ministères, à l’accréditation et l’accès de ces “journalistes” (puisque c’est le cas), est justement qu’ils ne sont pas de vrais “journalistes”. La conférence de presse terminée sur cette réponse poussiéreuse et épuisée de Le Drian, le sémillant Lavrov saisit tout de même le micro, montrant sa rapidité de réaction, son sens de l’humour et de l’à-propos, et ainsi de suite, et cette intervention qualifiée avec satisfaction par le texte de RT-France de « loin d’être anodine... » :
« ...En effet, avant de se lever, le chef de la diplomatie russe a, devant son auditoire, tenu à féliciter les journalistes de RT pour “avoir [officiellement] été qualifiés de journalistes”. »
En attendant, Spoutnik-français décrit discrètement son amertume d’avoir posé à Le Drian une question sur Spoutnik pour obtenir une réponse sur RT-France sans que rien ne soit relevé du côté français, – où l’on s’en fout, en général. Le swing et l’ardeur de cet échange, dans le chef assez branlant du ministre français qui n’y comprend, disons que dalle qui fait assez breton, méritent d’être détaillés (par Spoutnik, certes, dont on louera la retenue à faire quelque remarque désobligeante sur une confusion qui réduit ce réseau à néant) :
« Lors d’une conférence de presse à Moscou, le chef de la diplomatie française a commenté le fait que les journalistes de Sputnik ne recevaient pas leurs accréditations auprès du ministère français des Affaires étrangères et de l'Élysée.
» Répondant à la question de Sputnik portant sur l’accréditation de ses journalistes en France, notamment à l’Élysée, le ministre français des Affaires étrangères a confondu l'agence avec la chaîne russe RT:
» “Les journalistes de RT exercent en France en toute liberté, ils n’ont pas accès à un certain nombre de lieux en raison d’une vision du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) qui avait cité certains manquement à l’information.”
» Or, Sputnik n’a pas eu de problème avec le CSA et pourtant il est toujours privé d'accréditation auprès d'un certain nombre d'instances, notamment le Quai d'Orsay.
» “Moi je fais une suggestion”, a poursuivi le ministre. “La France respecte totalement ses engagements en matière de liberté d’expression, elle était à l’origine d’initiatives sur la protection des journalistes au Conseil de l’Europe et à l’OSCE, elle s’est félicitée de la déclaration de l’initiative de Reporters sans frontières qui est une déclaration internationale sur l’information et la démocratie. Et bien nous pouvons peut-être avec vous faire en sorte de poursuivre cette déclaration qui a beaucoup de force et qui pourrait être validée par beaucoup d’États dont la Russie”. »
• Quittons Moscou et ses charmes, avec l’habileté et la finesse bien connues de la diplomatie politico-militaire française en bordée macroniste de déclarations d’amour conditionnelle faite aux Russes qu’on insultait quelques mois plus tôt, pour en venir à l’Iran. Mais il s’agit moins d’événements à rapporter que d’un commentaire d’un de nos confrères souvent présents dans nos références, Alastair Crooke. Dans son dernier commentaire, Crooke développe l’idée que l’Iran a totalement abandonné la possibilité d’un accord avec les USA, et va s’arranger d’autres orientations, notamment avec la Chine, avec laquelle il négocie un gigantesque contrat d’approvisionnement en énergie de $150 milliards pour plusieurs années, et alors que les livraisons à la Chine se poursuivent malgré les sanctions et les consignes US.
Mais ce qui nous intéresse pour notre propos, c’est le début du texte de Crooke, où est rapportée l’analyse iranienne de la situation structurelle des USA, et dans ce cas de l’impossibilité systémique de parvenir à un accord avec les USA. A côté de l’argument “les USA actuels sont des gangsters et des brutes auxquels on ne peut faire confiance”, est développé l’analyse de la situation structurelle de domaine institutionnel US qui rend impossible un accord avec ce pays. Le fait de la sanction contre les autres (contre tous les autres, à la limite) est devenu constitutif et structurant dans la “politique” US et dans les institutions qui en accouchent et qui l’opérationnalisent ; c’est-à-dire, disons, les USA prisonniers de leur propre politique de sanctions... On signalera l’avant dernier paragraphe qui contient l’argument essentiel de ce F&C, notamment avec la phrase et le mot “rhizome” soulignés de gras, et rejoint, par des chemins certes tortueux mais néanmoins essentiels, l’attitude français illustrée par les deux pieds-nickelés à Moscou... (Texte d’Alastair Crooke dans Strategic-Culture.org, le 9 septembre 2019) :
« L'élite de la politique étrangère de Washington s'accorde à dire que toutes les factions en Iran comprennent qu'en fin de compte, un accord avec Washington sur la question nucléaire doit être conclu. C'est inévitable, d'une façon ou d'une autre. Pour eux, l'Iran n'est rien d'autre qu'un “cintre la montre”, jusqu'à ce que l'avènement d'une nouvelle administration rende à nouveau possible un “accord”. A ce moment l’Iran reviendra à la table des négociations, affirment-ils.
» Peut-être. Mais c’est peut-être au contraire tout à fait faux. Peut-être bien que les dirigeants iraniens ne croient plus aux “accords” avec Washington. Peut-être bien en ont-ils tout simplement assez des bouffonneries des changement de régime à l’occidental (du coup d'État de 1953 à la guerre de l’Irak contre l'Iran menée à la demande de l'Occident, à la tentative actuelle d'étranglement économique de l'Iran). Ils abandonnent ce simulacre de paradigme pour quelque chose de nouveau, de différent.
» Ce chapitre est clos. Cela n’implique pas un certain antiaméricanisme enragé mais simplement la reconnaissance par l’expérience que cette voie est inutile. S’il y a un “contre la montre”, c’est celui de l’effritement de l'hégémonie politique et économique occidentale au Moyen-Orient et non celui de la politique intérieure américaine. L’adage populaire selon lequel, par exemple, “Paris sera toujours Paris” vaut, la lumière en moins, pour la politique étrangère américaine. Et croire que l’Iran répètera les mêmes vieilles rengaines en espérant des résultats nouveaux, c’est bien entendu croire à la folie de l’Iran. Une nouvelle administration américaine héritera des mêmes gènes que la précédente.
» Au reste, les États-Unis sont institutionnellement incapables de conclure un accord substantiel avec l'Iran. Un président américain, – n’importe quel président, – ne peut lever les sanctions du Congrès contre l’Iran. Les multiples sanctions américaines à l'encontre de l'Iran sont devenues un nœud gordien de législation de plus en plus interpénétrées les unes dans les autres depuis des décennies : un vaste rhizome de lois enchevêtrées et enracinées que même Alexandre le Grand ne pourrait démêler ni trancher d’un coup d’épée. C’est pourquoi le JCPOA s'est construit autour d'un noyau d’exemptions (“waivers”) présidentielles qui doivent être renouvelés tous les six mois. Quoi qu’il puisse être convenu à l’avenir, les sanctions, – “levées” ou non, – sont pour ainsi dire “éternelles”.
» Si l’histoire récente a appris quelque chose aux Iraniens, c'est que ce “processus” si fragile entre les mains d’un président américain mercurien peut simplement être balayé soudainement, comme de vieilles feuilles mortes. Oui, les États-Unis ont un problème systémique : les sanctions américaines sont une valve à sens unique : tellement facile à ouvrir pour entrer, impossible à manipuler pour en sortir au-delà de ces dérogations incertaines émises à la discrétion d'un président en exercice. »
C’est donc le mot “rhizome” qui nous arrête, effectivement présent dans le texte initial (anglais) de Crooke (« ...a vast rhizome of tangled, root-legislation that not even Alexander the Great might disentangle ») ; parce que ce mot désignant une sorte de chose végétale et souterraine, au départ élégamment décrite (« Le rhizome est la tige souterraine et parfois subaquatique remplie de réserve alimentaire [ex : chez Iris pseudacorus] de certaines plantes vivaces »), – mais ayant pris un sens et un poids tout à fait extraordinaires grâce à la philosophie quasi-contemporaine, celle que les milieux lettrés et académiques US eux-mêmes nomment “The French Theory”, et dans tous les cas désormais appliquée partout où règne le postmoderne. En ouverture de la saga des Gilets-Jaunes, le 13 novembre 2018, PhG s’était laissé aller à un exercice d’emploi subversif du concept en l’appliquant effectivement à ce mouvement, comme réaction antiSystème d’un Système lui-même constitué en rhizome...
« Soudain, les dernières brumes arrangées et mises en scène de la célébration du centenaire de la fin de la Grande Guerre dissipées sous l’Arc de Triomphe, je m’avise que la chose ne m’est pas indifférente, – puisqu’effectivement, malgré la lourdeur du jeu des mots, “Gilets Jaunes” rime avec “Maillot Jaune”, – car c’est bien de cette chose annoncée du 17 novembre dont je parle ici. Même Ségala ressorti du grenier, empaillé séquence-Mitterrand-1981 (“La force tranquille” sur fond de clocher mauriacien et maurrassien, vous kifez ?) et invité en table-talk-show hier soir sur LCI, – décidément ma référence-Système en fait de réseauSystème, – même Ségala dis-je, trouve ça parfaitement d’une grandiose importance... Car cette diffusion aux mille branches dont nul ne sait ni la racine, ni le tronc, ni la subordination, ni la hiérarchie, qui caractérise ce mouvement étrange et déroutant des “Gilets-Jaunes” du 17 novembre, est la parfaite incarnation du rhizome de Deleuze-Guattari, les déconstructeurs-nés.
» Petit aparté wikipédiesque : “Dans la théorie philosophique de Gilles Deleuze et Félix Guattari, un rhizome est un modèle descriptif et épistémologique dans lequel l'organisation des éléments ne suit pas une ligne de subordination (comme dans une hiérarchie) – avec une base (ou une racine, un tronc), offrant l'origine de plusieurs branchements, selon le modèle de l'Arbre de Porphyre –, mais où tout élément peut affecter ou influencer tout autre...”
» Selon Mattéi, son ennemi intime mais néanmoins loyal dans son jugement, – constatez-le, il n’y a que du beau monde : “Deleuze est simplement une réincarnation du Sophiste qui affronte Platon. (‘Nous ne nous trompons pas beaucoup en considérant Gilles Deleuze comme la moderne réplique de Protagoras. A l’image du grand sophiste d’Abdère, Deleuze introduit dans le discours des simulacres un brio rhétorique et une virtuosité hautaine que l’on pourrait qualifier d’aristocratiques.’) Toute la pensée de Deleuze revient à réaliser l’inversion de Platon, et, également, à réaliser l’inversion de Nietzsche qui figure ainsi, par jugement par antithèse, comme l’un des grands vis-à-vis de Platon, et en vérité continuateur de Platon pour qui sait le lire sans l’inverser, pour satisfaire on ne sait quel obscur dessein, – ou bien, le connaît-on trop, ce dessein ?” [...]
» Bien entendu, j’ai aussitôt pensé à cette formule fameuse du “faire-aïkido”, lorsqu’on retourne contre l’adversaire la puissance et la dynamique irrésistible de ses armes à lui. Comprenez-moi bien : j’ignore ce que sont ces “Gilets-Jaunes”, ni d’où ils viennent, ni ce qu’ils obtiendront ou pas, et que m’importe au reste ; la seule chose que j’en puisse dire est qu’ils tombent à pic pour faire la synthèse de la situation de la séquence, et là se trouve l’essentiel.
» On comprend aussitôt que je les vois nécessairement comme les créateurs involontaires et sans planification nécessaire d’une situation symbolique extrême ; c’est-à-dire d’une situation antiSystème absolument vertueuse dans sa perfection puisque venue apparemment et absolument à la fois de rien pour proposer le rien au Système nihiliste terrorisé, et ainsi défier la situation de l’entropisation par la menace implicite d’entropiser cette entropisation... »
Fermons ici le ban pour remarquer que la notion de rhizome est réellement d’actualité, qu’elle peut être d’emploi multiple, qu’elle ne répond pas à des critères impératifs, qu’elle est aussi insaisissable que l’objet lui-même (le rhizome de Deleuze), bref qu’elle est parfaitement de notre temps et de son Système…
Effectivement, nous plaçons dans notre interprétation dans la même catégorie des zombies-rhizomes (ou “rhizotomates”, ce qui leur irait bien), tous ces personnages et ces “processus“ mis en situation et en place dans les démocraties du bloc-BAO, et entraînés sur des chemins de mise en accusation incantatoire et de justice vengeresse et objectivée. Là-dessus et même alentour, nul ne sait exactement le “pourquoi” et le “jusqu’où” de l’affaire, parce que tout cela est désormais mis en place à partir de narrative diverses dont le caractère central est l’indifférence totale, sinon agressive, à la réalité, le négationnisme complet de toute vérité (y compris les vérités-de-situation), pour s’en tenir au diktat délicieux du simulacre.
Tout cela a été en général développé d’une façon décisive et totalitaire selon la logique implacable du déterminisme-narrativiste qui s’est installé de lui-même ou mu par des forces étranges et extérieures au cœur des politiques, puis de la perception, puis de la psychologie des démocraties du bloc-BAO. Aujourd’hui, effectivement, nul n’en peut sortir par des voies normales et pour tout de même tenter d’y parvenir, il faut songer à rompre : même des zombies-rhizomes ou “rhizotomates” surgissent des poussées et des dynamiques tendant à contester les simulacres en place, et donc leur propre processus de zombification ; le Système produit lui-même ses antiSystème, constituant finalement le champ de bataille de son propre effondrement.
Littéralement, toutes ces choses qui constituent le ou les simulacres du Système “n’ont ni queue ni tête”, à l’image du rhizome. Elles se constituent puis se structurent avec une force peu ordinaire, ce qui est assez logique puisqu’elles renvoient à une entité “remplies de réserve” et en connections sous-terre de “certaines plantes vivaces”, sinon “plantes vivaces” elles-mêmes. Elles n’ont besoin ni de queue ni de tête puisque leur fonction est bien de se structurer et de se fortifier d’elles-mêmes. Elles sont elles-mêmes leur justification d’être, et rien de ce qui est d’habitude pris pour référence et pouvant donner sens à ces dynamiques, rien de cela ne les intéresse. Nous sommes en terre du simulacre pur.
• Dans le cadre de l’antirussisme même pas obsessionnel, ou pathologique, mais bien ontologiquement dénonciateur de toute pensée indépendante et éventuellement critique de lui-même, depuis autour de 2014, nous nous sommes installés, non pas dans la détestation de la Russie mais dans l’assurance de la culpabilité totale du Russe en tant que tel, un peu comme on va au Club Med’ et s’en remet aux Gentils Organisateurs. La mise à l’index de RT et de Spoutnik par le Macron’s Gang ne repose strictement sur rien ; c’est un appendice du rhizome antirussiste central au bloc-BAO, développé dans ce cas à l’occasion des présidentielles françaises, alors que Macron naviguait serré et en position pas très rassuré, effectivement “pour faire l’intéressant” comme on disait dans les cours de récré’ de l’ancien temps, et attirer à nouveau la lumière du système de la communication sur la campagne du futur président. Ils se sont bien entendu inspiré de “D.C.-la-folle”, car tout, surtout les sottises “en marche”, est peu ou prou d’inspiration américaniste. Par conséquent on a sur les bras l’anathème anti-RT et anti-Spoutnikassorti de mesures officiellement liberticides pour protéger la “liberté de la presse”, et les deux pieds-nickelés en mission à Moscou n’ont qu’à se débrouiller comme ils peuvent. La grosse voix caverneuse mais non sans humour de Lavrov félicitant les journalistes de RT pour « avoir[officiellement] été qualifiés de journalistes » a rendu le teint grisâtre de Le Drian encore plus terreux, – rhizome oblige…
• Pour les sanctions US anti-Iran, c’est encore plus rhizome & Co, comme Crooke lui-même le signale, en convoquant le grand Alexandre et en le défiant de jamais pouvoir trancher ce nœud gordien-là de l’épouvantable bordel des législations sans fin du Congrès. Plus personne ne sait d’où elles viennent, et tout le monde ignore à l’unanimité où elles vont ; à quoi elles servent, pourquoi elles ont été décidées, pourquoi elles ont été votées, si le président est au courant et ainsi de suite… Le Congrès, c’est comme le Pentagone, et d’ailleurs comme “D.C.-la-folle” : on n’en sera quitte qu’en éparpillant tout cela en mille morceaux. Les Iraniens, y compris les modérés au pouvoir, l’ont désormais compris, – ils l’ont encore mieux compris qu’un Poutine, – et ils savent qu’on ne peut rien traiter de sérieux avec les USA. C’est ainsi.
… “C’est ainsi” que les empires, ou les pseudo-empires, baillent et s’endorment sur leurs monceaux de paperasseries, de billets de banque imprimés par tonnes, de statistiques trafiqués pour faire croire que tout va bien, et ainsi de suite vivant dans “le meilleur des simulacres”. “C’est ainsi” que Gulliver est peu à peu ligoté par ses millions de termites lilliputiennes s’activant dans tous les sens, un peu comme on fabrique aux USA un JSF ou un USS Gerald R. Ford. Tout cela renvoie au cérémonial du Système s’activant à transmuter sa surpuissance en autodestruction, s’y inscrit comme dans un catafalque, et se laisse doucement porter par cette dynamique “sans queue ni tête”.
Pendant ce temps, ce que tentent les pieds-nickelés à Moscou, au nom des ambitions de leur Macron, et les Iraniens, de plus en plus appréciés des Chinois et des Russes également, c’est d’échapper au rhizome qui les tient comme une pieuvre multiple avec toutes ses tentacules. Il s’agit de signes épars de tensions inévitables pour tenter d’échapper au Système à l’agonie, sans qu’on puisse savoir si l’un ou l’autre à une chance de réussir, et justement quoi consistera cette réussite. Au reste, il ne faut surtout pas se fixer sur ces exemples pour croire “identifier” le Système. Aux USA même, d’où tout semblerait venir de ces engluements sans fin au rhizome du Système, les mêmes tensions se manifestent dans le chef des divers désordres que l’on comptabilise sans cesse, y compris des LGTBQ au Squad, à une Tulsi Gabbard, etc., y compris dans les réalités catastrophiques de la situation socio-économique derrière l’écran de fumée du simulacre des statistiques, etc.
Les deux exemples que nous avons suivis, avec leurs divers aspects, assez ridicules et médiocres, ou bien téméraires et résolus, ou bien encore pathétiques c’est selon, représentent, chacun à leur façon, des tentatives d’échapper à l’immobilisme paralysant et fascinatoire du simulacre qu’a installé le Système, et qui se transforme en une sorte d’énorme mouroir d’une civilisation. Il est impossible de dire à quoi peuvent aboutir ces tentatives, et même s’il est de quelque intérêt de le savoir. Elles sont là essentiellement, dans notre démarche, pour montrer les formes très diverses des soubresauts que l’agonie d’effondrement du Système engendre. De l’une ou l’autre d’elles, à un moment donné, on peut attendre que la tentative de fuite du simulacre déclenche un processus soudain et brutalement déstabilisant, et très vite déstructurant, du Système lui-même. Peut-être même cette dynamique se fait-elle en plusieurs temps, d’ailleurs sans qu’on s’en aperçoive : après tout, c’est ce que nous disions des Gilets-Jaunes dans le texte référencé, et l’hypothèse reste toujours valable, et la méthode de la même façon (se constituer eux-mêmes en rhizome pour attaquer le rhizome qu’est le Système,
«…et ainsi défier la situation de l’entropisation par la menace implicite d’entropiser cette entropisation... »)
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