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897Attardons-nous à cette affaire du choix de l’Inde en faveur du Rafale français, que nous présentions le 1er février 2012. Ce qui nous intéresse, c’est l’accueil qui en a été fait, singulièrement dans la presse anglo-saxonne. Le plus souvent, il y a le silence : rien d’écrit sur cette affaire, et cela selon un principe sur laquelle on reviendra plus loin, à propos d’un commentaire sur l’attitude de la presse anglo-saxonne vis-à-vis du Rafale, d’un lecteur d’un des quelques textes anglo-saxons tout de même publiés, – «They said what they were told to say : “Rafale does not exist”.» (Le Rafale comme le Ron Paul de l’industrie aéronautique du bloc BAO ?)
• Sur son DEWLine, sur le site de Flight International, le 31 janvier 2012, Stephen Trimble fait un commentaire extraordinairement élusif, peuplé de “rien n’est fait”, de “les Français nous ont déjà fait le coup”, de “les spécifications indiennes étaient faites contre le Typhoon” (pourtant annoncé partout, y compris par Trimble, comme le gagnant certain), de “tout peut arriver, y compris et surtout que le programme MRCAA s’effondre (et le Rafale avec)”… Trimble est en général très prudent et aime se parer d’une objectivité de bon aloi. Disons qu’il nous assène la preuve qu’il s’agit d’une prudence-Système et d’une objectivité-Système. Le tout est pimenté de la fameuse ironie britannique, de forme imperturbable, mais tout de même un tantinet nerveuse.
«Flightglobal defence editor Craig Hoyle has confirmed the Dassault Rafale has been selected as the lowest-cost bidder for the Indian Air Force's medium, multi-role combat aircraft (MMRCA) contract.
»Please ignore, for the moment, the sound of Veuve Clicquot corks popping all over Bordeaux-Merignac. We've been down this runway before with the Rafale. The French have demonstrated a knack for fumbling away deals even after they seemed to eliminate all of the competition (cough-Morocco, cough-cough Brazil, cough-cough-cough United Arab Emirates).
»On the other hand, the MMRCA deal is structured in a way that makes it extremely improbable for the highest-cost bidder – the Eurofighter Typhoon – to come away with the contract. But we will see. Crazier things have indeed happened…»
• Philip Ewing, de DoDBuzz, fait un commentaire, le 31 janvier 2012, qui dispense le maximum de venin avec tout de même la prudence nécessaire, en un minimum de lignes qui s’appuient essentiellement sur des citations bien choisies. On relève donc deux arguments, exactement imités et repris de ceux de Trimble : d’abord “les Français annoncent qu’ils ont le marché, alors qu’ils nous ont fait le coup déjà deux fois, comme des faussaires qu’ils sont” (les Français n’ont rien annoncé du tout et il est simplement mensonger d’écrire que les marchés brésiliens et émiratis, toujours en négociation, sont définitivement perdus pour le Rafale : “…yet never finally sewn up the deals”) ; ensuite “le programme MRCAA peut s’effondrer, et le Rafale avec”…
«At any rate, as Flight’s Craig Hoyle writes, Indian officials don’t think they’ll actually lock in a deal before April, and Dassault has ostensibly made these foreign sales before, to Brazil and the United Arab Emirates, yet never finally sewn up the deals. […]
»That’s a lot of coughing. And as we’ve seen at every turn in this India story, aero-observers always hedge and make clear that things tend not to be straightforward in big India competitions. People expected the competition to fall apart after it had been narrowed down to Rafale v. Typhoon, and that skepticism apparently is still in effect.»
• Comme à l’habitude, Bill Sweetman, sur Ares (Aviation Week), présente un commentaire assez équilibré et nullement hostile à l’avion français. (Le 31 janvier 2012).
«India's decision in favor of the Dassault Rafale is a big deal. Not only is a 126-fighter order the biggest single sale in sight for a long time, but – as long as the deal is closed and executed successfully – it is a huge boost for the Rafale at a point where the fighter business is in flux, and after two notable setbacks for the French industry late last year.
»Those setbacks were the United Arab Emirates' announcement at the Dubai air show that it was unhappy with the terms of the Rafale deal offered by France, and Switzerland's choice of the Gripen. The India win makes the latter look like small potatoes, while a signed-and-sealed deal with India covers many of the upgrades that were bones of contention in the protracted UAE negotiation.
»For the same reason, Rafale's chances in Brazil have probably improved… […]
»The win also follows the Libya campaign, where both the Typhoon and the Rafale were used. However, while the Typhoon was only multi-role thanks to a non-definitive, somewhat-MacGyvered targeting pod and weapon fit, Rafale had two variants of the fully integrated Sagem Hammer stand-off guided bomb (six of which can be carried on two pylons), with a third on the way, and provided near-real-time intelligence with the Areos long range oblique photography reconnaissance pod.»
Finalement, pour ce rapide coup d’œil sur la presse anglo-saxonne, on retiendra deux commentaires de lecteurs du texte de Ewing, sur DoDBuzz. (Même lien du 31 janvier 2012.) Ils disent ironiquement et crûment ce qu’il faut penser du traitement qui est appliqué en général à l’avion français du point de vue de la communication, par la presse anglo-saxonne, et de la valeur de l’avion.
• D’un lecteur choisissant le pseudonyme de The Office : «Damn... The Rafale exists? Many years ignoring it, for very understandable reasons Dear! For weeks, Typhoon was selected as the only possible winner. My God! The Brits lost in Japan: a very big shock for BAE System. But against who? Against the JSF they contributed to build, with the result we all know. Till yesterday, we laugh because the Rafale was a bad plane indeed, unable to compete with serious US or UK fighters. When the Indians realized that after long series of corruption affairs political pressures would be associated with crime, they focused on techno and capacities. They ejected two US fighters, a Russian one and a Swedish one. And here the Rafale matters. As the Swiss told us: “Excellent but a bit too expensive.” So we said this ugly fighter is very much too expensive since it doesn’t benefit from European economy of scales and from better UK or German competiveness. Oups!... The Rafale is cheaper… My God! Just a question to finish: what will we put on the two big UK aircraft carriers (incidentally designed by …French Thales)? Stop laughing guys. We are losing sometimes because we deploy a too big unfairness. The Rafale is a very, very smart thing.»
• D’un autre lecteur, sous le pseudonyme de Jmeu : «Rafale is an excellent plane, and choosing it is the most obvious choice for any really independant country. I mean, countries not seeking to maintain lousy “special relationship” with the US, country caring about quality and efficiency. And guess what ? More and more countries do not believe anymore in US technical supremacy (and dislike the US as a whole). Facts prove they're right, regarding the JSF industrial failure or the useless F22.
»Rafale is right now the best naval fighter. It is one of the two best airforce fighter on the market (I would even say THE best until EF gets able to really engage ground targets on it's own, assuming it happens someday).
»I've been following the MRCA deal for a few years, and as you compare US and UK press releases to Indian ones, one thing is obvious : US and UK “experts” never told the truth about this plane. They said what they were told to say : “Rafale does not exist”.
»Well, it seems that Indian Air Force didn't care about US/UK PR.»
Proposer l’idée de l’équivalence “Rafale-Ron Paul” revient évidemment à fixer les commentaires de la presse-Système en général au silence, et, lorsqu’on ne peut éviter d’en parler, à la dérision mensongère. (On observera que les commentaires français vont de la satisfaction instinctive mais réduite à une réaction de comptable et de chauvinisme du premier degré, type instinct pavlovien et hexagonal, aussitôt nuancée de réserves type cartésien et finalement anglo-saxon, sur le mode “rien n’est fait”, – c’est le “Rafale : on se calme” de Jean Guisnel, spécialiste de cette sorte de démarche-Système. Nous parlons donc de la presse-Système anglo-saxonne en y incluant le suivisme irrésistible des Français du domaine.) En d’autres mots, notre équivalence “Rafale-Ron Paul” rejoint l’observation du caractère antiSystème que manifestent ces deux “évènements”, dans les circonstances où nous les observons, sans aucunement écarter des circonstances où ils ne seraient pas dans un rôle antiSystème. Ce qui nous intéresse, c’est bien la circonstance qui fait d’un événement et de celui qui en est la source, – un avion ou un sapiens, qu’importe, – un incontestable système antiSystème (et, dans ce cas, le Rafale échappant à l’emprise de l’extraordinaire bassesse de l’actuelle politique française, comme nous avons tenté de le montrer hier). C’est cela qu’il faut saluer et analyser, puisque le seul ennemi est le Système. (Dans d’autres circonstances, notamment dans certaines attitudes vis-à-vis du JSF, nous utilisons et saluons les commentaires de la presse-Système, notamment anglo-saxonne, lorsqu’elle devient, pour la circonstance, anti-Système. Alors, cette presse-Système n’est plus “Système”, et elle devient vertueuse… Toujours la même démarche, suivant la ligne intraitable de la pensée qui a fait ses comptes, et laissant les restes marginaux à l’inconnaissance.)
Ce point de vue nous amène à commenter rapidement le commentaire d’un lecteur, sur le Forum du F&C du 1er février 2012, le même 1er février 2012. Il s’agit de “Steph Steph”, qui écrit en introduction, pour présenter le sens de sa démarche : «Je vous rejoins partiellement sur votre perception de ce contrat du siècle. Les Indiens ont peut-être froissé les USA en choisissant le Rafale, mais ils avaient pris leurs précautions bien avant, en préparant avec soin le terrain.» Suivent diverses mesures, décisions, évolutions, etc., des Indiens, pour favoriser ou “préparer” c’est selon, le choix du Rafale. Bien entendu, il n’est pas question de discuter ces diverses remarques qui ont évidemment leur intérêt, mais de les situer par rapport au fait de ce que notre lecteur nomme le “relatif affront” fait aux USA. C’est sur ce point que nous divergeons : il ne s’agit pas d’un “relatif affront” mais d’une trahison qui ne sera jamais pardonnée… Les USA ne raisonnent pas en termes relatifs mais en termes absolus, et ce n’est pas parce que les Indiens ont commandé des C-17 ou des P-8 qu’il leur sera pardonné une seule seconde d’avoir éliminé la ferraille F-16 & Cie, repoussé l’injonction qui leur était faite de commander le JSF, enfin liquidé le candidat frontiste Typhoon. Le seul et vrai péché absolu, comme s’il était originel rétroactivement, est le choix du Rafale ; parce que cet avion est définitivement classé dans “l’axe du Mal”, comme tous les avions Dassault, depuis l’aventure des Mirage à l’exportation à partir du début des années 1960. (Et nullement les exportations Dassault des années 1950, type-Ouragan et Mystère, qui, elles, étaient autorisées par le jugement-Système, et Dassault ayant même bénéficié d'une aide officielle US au début de la décennie dans le cadre de l'aide militaire US à la France. Ce pays, la France n’était pas entré encore dans le domaine relaps du gaullisme.) L’indéfectibilité, marque principale de la psychologie US, ou psychologie-Système, avec l’inculpabilité, implique une “tolérance zéro” à cet égard.
Pour nous, comme nous l’avons également rappelle, l’Inde est entrée dans la possession absolue des USA depuis qu’il a été proclamé que les USA lui offrait le statut de “super puissance”, c’est-à-dire la baptisait “super-puissance” pour désigner précisément la place qu’elle occuperait dans le domaine absolument verrouillé des USA. Le 26 mars 2005, lorsque les USA “autorisait” l’Inde à commander des F-16, il était en outre précisé (AP) : «US Secretary of State Condoleezza Rice has presented to Indian Prime Minister Manmohan Singh the Bush administration's outline for a “decisively broader strategic relationship” between the world's oldest and largest democracies, a senior US official said. “Its goal is to help India become a major world power in the 21st century,” said the official…» En d’autre termes, l’Inde fait partie de la famille depuis mars 2005 et rien ne lui est autorisé qui ne soit de l’avantage exclusif des intérêts de la famille, c’est-à-dire des USA. En cas de dérogation, l’Inde est relaps et c’est l’excommunication… Ce le sera définitivement, comme l’est une bulle papale, le jour où le contrat Rafale-Inde sera signé, – étant bien entendu par ailleurs qu’il ne le sera jamais, ce contrat, puisqu’il s’agit des Français et que, d’ici là, le programme MRCAA se sera effondré pour être remplacé par le programme MRCAA-JSF. Ainsi va le monde dans sa narrative exclusive et de pure communication, et ainsi ira-t-il tant que Ron Paul n’aura pas mené à bien sa tache de faire éclater les USA… Et puis non, d’ailleurs, et l’on peut même préciser que Ron Paul n’est pas nécessaire à la chose puisque la chose va bon train dans ce sens, et qu'à part leur narrative les USA sont sur la bonne pente de l'effondrement, en pleine accélération ; alors, disons que Ron Paul est un peu, comme le Rafale-Inde pour notre lecteur, “la cerise sur le gâteau”…
Mis en ligne le 2 février 2012 à 07H36
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