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6740• Grâce à Kissinger, nous savons que l’objectif des USA est “officiellement” le démantèlement et la destruction de la Russie. • Parallèlement à cette révélation qui ne devrait surprendre personne, des alliances et des rapprochements jusqu’alors improbables, s’esquissent et se nouent. • C’est comme un souffle de guerre passait dans les esprits, l’idée que le grand affrontement ne pourra pas être évité. • En même temps, c’est la preuve absolument indubitable de la sottise catastrophique de la politique ainsi à l’œuvre, – leur ‘politiqueSystème’.
On commence par un sujet certes important mais décalé par rapport à notre propos principal. Il vient de l’article de Kissinger dans ‘The Spectator’, qui a été accueilli de diverses façons, les uns y voyant une tentative sans doute ultime du vieil homme d’État de tenter de rétablir une méthode diplomatique entre USA et Russie, fût-ce au prix de concessions pour les neocons qui rendent son projet complètement vain ; les autres y voyant sarcastiquement une affligeante rentrée dans le rang extrémiste-neocon du vieil homme.
De façon très différente, notre ami Alexandre Mercouris y a vu un événement important dans la forme, passé en général inaperçu. Mercouris note que les Russes ont toujours été moqués pour leur paranoïa de la dénonciation d’un projet ultime du bloc-BOA, non seulement d’un regime change, mais d’un démantèlement de la Russie en plusieurs régions autonomes sinon indépendantes qui constituent, par cette déconstructuration, un néantissement de la Russie historique, de sa culture, de son être et de son ontologie même. Eh bien Kissinger, lui, a mis à jour le pot-aux-roses, en toute fausse-innocence ou très-volontairement, – qui sait ?, – comme ultime avertissement à la Russie au cas où une fausse entente serait établie pour éviter un affrontement, – « Être un ennemi des USA est dangereux, être un ami des USA est mortel... »
« [Au contraire de tout ce qui a été dit de “rassurant” à la Russie], constamment répété dans les médias occidentaux et par les dirigeants, Kissinger met en lumière la réalité [qu’il existe bien un tel projet], Kissinger apparaît bien confirmer que les inquiétudes russes sont fondées... Eh bien ! Cela apparaît comme la chose la plus intéressante de son article, une chose à propos de laquelle nous devons porter la plus grande attention, car nous ne pouvons plus dire que ce ‘plan’ n’existe pas en fonction de ce fait que Kissinger laisse clairement comprendre que ce plan existe effectivement... »
Mercouris n’en dit pas plus à ce propos, et pourtant c’est bien l’essentiel. Aux exclamations des Russes traités de paranos depuis des années à cause d’elles, – “Au fou ! Les Occidentaux sont menés par des fous qui ont des projets planétaires de destruction !”, avec cette réponse : “C’est vous les Russes qui êtes fous, complètement paranos”, – Kissinger intervient et tranche : “ce sont les Russes qui ont raison, il s’agit bien des projets de Washington, avec les neocons aux commandes !”.
Cela est-il effrayant ? Rassurant, au contraire, dirions-nous, puisque nous voilà confirmés dans ce que nous pensons, – ce que nous devrions penser, pro-Poutine ou antirusses qu’importe ! Washington D.C. est bien “D.C.-la-folle”, et le ‘Collective West’ avec elle, car de tels projets ne peuvent naître que d’une folie morbide enfouie dans les ténèbres de projets diaboliques de néantissement du monde. Il est bon qu’un homme de la trempe de Kissinger, – vingt ans de plus que Biden mais plus de tête que n’en eut jamais Biden, – un homme cynique, impitoyable, sabns morale, mais redoutablement intelligent et extraordinairement habile dans la mesure de l’équilibre des forces, et de l’équilibre des esprits, – il est bon qu’in Kissinger nous dise : c’est bien le cas, ils sont fous !
Notes de PhG-Bis : « Car il s’agit bien de folie ! Je rappelle ce que j’ai déjà écrit le 11 décembre sur la fureur de PhG lorsqu’on évoque ce projet neocon de destruction de la Russie :
» “Ce ‘but’ de la politique extérieure US, – plus ‘politiqueSystème’ que jamais, – constitue donc une monstruosité, une difformité de la pensée et n’a d’explication que psychologique, c’est-à-dire psychiatrique et pathologique. La difficulté de bien faire son travail aujourd’hui est celle-ci : réaliser qu’il faut être autant médecin qu’analyste.”
» Folie pure, déconstruction et destruction de tout équilibre, de toute mesure de la pensée : l’intelligence humaine alors bien en-deça de celle de l’animal (comme disait un ami de PhG : “Comme l'avait indiqué un Schelling, martelant sur la tête des ‘philosophes’ un vieux dogme théologique : ‘Malheureusement, l'homme ne saurait être qu’au delà ou en deçà de l'animal’. On sait ce qu'il en est de nos jours de l’‘humanité’”.) »
Maintenant, voyons ce que leur folie nous a donnés et nous donne quant à l’état de l’‘empire’, à une incroyable vitesse, comme effets dans la vérité-de-situation (VdS), – et sans surprise des résultats inverses à ce qu’ils attendaient...
Il est vrai que les situations stratégiques et économique du monde, particulièrement dans les zones de tension, ne cessent de se modifier sous la pression de la guerre en Ukraine et de ses conséquences démultipliées, dont l’effet principal est l’effondrement du prestige d’influence des USA. La brutalité US dans ses rapports non-militaires (sanctions, etc.), – en plus du militaire, bien entendu !, – accélère à une rapidité et avec une puissance exceptionnelles cette dynamique.
Prenons un exemple général et somme toute qui pourrait paraître sans conséquence concrète immédiate, dans tous les cas qui n’a pas fait l’objet de quelque commentaire d’importance. On a souvent glosé sur l’incertitude de l’Inde, tenté de rejoindre le camp américaniste. Plutôt que se fixer sans ambiguïtés dans le camp antiaméricaniste. On prendra cette nouvelle et ce commentaire de M.K. Bhadrakumar comme le symbole d’une vérité ésotérique, alors que Modi intervient peu après (quelques heures) qu’une attaque ukrainienne favorisée par les USA avait pris pour cible une base nucléaire de la Russie, – ce qui entre dans le cadre des plans fous d’attaque et de destruction de la Russie que Kissinger a mentionnés dans son article :
« L'appel du Premier ministre Narendra Modi au président russe Vladimir Poutine, vendredi, marque une nouvelle étape dans les relations bilatérales entre les deux amis de toujours, tant sur le plan contextuel que dans une perspective à long terme. [...]
» Il est très significatif que Modi n'ait pas été dissuadé par le fait que, bien que ce ne soit pas l'époque des guerres, le conflit ukrainien ne fera, selon toute probabilité, que s'intensifier, et il est plus probable que jamais que la Russie soit obligée de rechercher une victoire militaire totale, car les États-Unis ne lui laissent aucune option en bloquant obstinément toutes les voies d'un règlement réaliste et en grimpant furtivement dans l'échelle de l'escalade.
» La décision de l'administration Biden de déployer des missiles Patriot en Ukraine constitue sans aucun doute une escalade majeure. Moscou a mis en garde contre les “conséquences”. Une fois de plus, Moscou a confirmé que les États-Unis ont planifié, orchestré et équipé l'Ukraine de la capacité militaire nécessaire pour attaquer profondément le territoire russe - à des centaines de kilomètres, en fait - y compris contre la base d'Engels où sont stationnés les bombardiers stratégiques russes à capacité nucléaire. Jamais auparavant les deux superpuissances n'avaient pris pour cible les actifs nucléaires de l'autre.
» Il ne fait donc aucun doute que l'initiative de M. Modi de discuter du “haut niveau de coopération bilatérale qui s'est développé sur la base du partenariat stratégique privilégié russo-indien”, notamment dans les domaines clés de l'énergie, du commerce et des investissements, de la défense et de la coopération en matière de sécurité, constitue en soi un message important. »
Il est très possible que cette initiative indienne ait été prise à ce moment précis pour signifier que l’Inde ne resterait pas inactive si des attaques d’envergure avec l’intention de viser des capacités stratégiques russes étaient entreprises d’une façon plus sérieuse par des moyens qui seraient favorisées indirectement par les Etats-Unis, par l’intermédiaire des Ukrainiens. Cette possibilité implique un avertissement indien à l’encontre des USA que l’Inde pourrait s’impliquer, jusques et y compris avec des moyens militaires, dans une telle occurrence au côté de la Russie. Des sources indépendantes indiennes laissent entendre qu’il s’agit d’un message indirect de l’Inde aux USA que les USA auraient tort de ne pas prendre au sérieux.
C’est dans un tel contexte, impliquant une volonté désormais en pleine réalisation que divers regroupements sont actuellement en cours dans l’ensemble stratégique allant du sous-continent indien au Moyen-Orient, qui indique une dynamique pour s’opposer à la poussée américaniste et du bloc-BAO contre la Russie dans le conflit ukrainien, selon une conception collective que la menace US ne concerne plus que le seul axe OTAN-Ukraine-Russie, qu’elle est perçue désormais comme concernant l’ensemble d’une énormes zone stratégique au Sud de la Russie. La Chine y participe dans sa façon, dans certains cas précis.
On détaille ici un nombre impressionnant d’initiatives qui se placent dans la logique qu’on a décrite ci-dessus et qui comprend, à côté des arrangements régionaux, commerciaux, etc., qu’ils décrivent, un aspect de cette dimension stratégique signalée.
• Il faut d’abord rappeler la visite triomphale, – le qualificatif n’est nullement exagéré, – du Chinois Xi en Arabie Saoudite. Nous faisons à nouveau appel à Bhadrakumar pour nous donner, en quelques mots, la dimension, la puissance, l’éclat et donc la signification stratégique antiaméricaniste de cette visite, – laissant à part pour ce cas les conséquences concrètes des mesures qui sont mises en place pour des développements révolutionnaires (le “pétroyuan”, par exemple, certes d’une extrême importance, mais qui n’est qu’un élément parmi d’autres de la mise en place de facto d’un dispositif stratégique mondial antiméricaniste).
« Le faste et le cérémonial de la récente visite du président chinois Xi Jinping en Arabie saoudite ont suscité la comparaison avec la banalité et l'atmosphère glaciale qui ont entouré le voyage du président américain Joe Biden dans le royaume en juillet. Toutefois, la principale différence réside dans le fait que les Saoudiens ont organisé trois sommets régionaux distincts pour Xi, – outre le sommet bilatéral, un deuxième sommet avec 21 dirigeants arabes et un troisième avec sept dirigeants de pays du CCG.
» Ce “trois en un” a permis de montrer que l'Arabie saoudite est au cœur de la diplomatie chinoise dans le monde arabe. Cela contraste fortement avec la relation transactionnelle à laquelle l'alliance historique américano-saoudienne a été réduite. »
• Les relations entre la Russie et l’Iran prennent l’allure d’une sorte d’“alliance” à composante militaire, selon l’inquiétude du directeur de la CIA Burns dans une interview à PBS. Burns, qui fut ambassadeur des USA à Moscou, sait combien les relations entre la Russie (et l’URSS avant elle) furent souvent marquées par des antagonismes divers ; son inquiétude s’exprime alors par la transformation radicale que l’on voit ainsi se former.
« Dans une rare interview, Burns a déclaré à Judy Woodruff, de la chaîne PBS, qu'il était “assez inquiet” de la relation entre Téhéran et Moscou.
» “Et ce qui commence à émerger, c'est au moins les prémices d'un partenariat de défense à part entière entre la Russie et l'Iran”, a-t-il déclaré.
» Burns a affirmé que, dans le cadre de ce partenariat, l'Iran “fournit des drones aux Russes” et que “les Russes commencent à examiner les moyens par lesquels, technologiquement ou techniquement, ils peuvent soutenir les Iraniens, ce qui constitue une menace réelle pour le propre voisinage de l'Iran, ainsi que pour un trop grand nombre de nos amis et partenaires dans le voisinage de l'Iran”. »
• La question soulevée par la dernière remarque de Burns (« une menace réelle [...] pour un trop grand nombre de nos amis et partenaires dans le voisinage de l'Iran ») nous semble relever d’une autre époque, alors que l’évolution Iran-Russie est celle d’une nouvelle époque. Les “amis et partenaires” des USA voisins de l’Iran et menacés par l’Iran, et essentiellement l’Arabie saoudite, le sont-ils réellement ? Autrement dit : sont-ils encore “amis et partenaires“ des USA ? Mercouris, parlant de l’“alliance” en train de s’ébaucher entre la Russie et l’Iran, passe brusquement à un autre sujet qui est en fait complètement connecté au précédent (vidéo du 19 décembre, 16’10”) :
« ... Il y a d’autres rapports qui, je le suspecte, ont dû alarmer encore plus Washington, selon lesquels, le Prince dirigeant l’Arabie, MbS, est en train de travailler pour organiser une rencontre au sommet entre le président iranien et lui-même, de façon à trouver une voie pour résoudre les mésententes entre les deux pays... Maintenant je ne suis pas en mesure de confirmer de tels rapports, peut-être sont-ils fondés, peut-être pas, mais tout ce que puis dire c’est que s’ils se confirment ils annoncent une révolution diplomatique au Moyen-Orient... »
• Autre “révolution diplomatique”, énorme, colossale, – on vit aujourd’hui au rythme de séismes quotidiens, – d’une simple dépêche Bloomberg annonçant que le Turc Erdogan veut très rapidement une rencontre à trois avec Assad et Poutine. C’est la deuxième fois en un mois qu’Erdogan annonce qu’il veut rencontrer Assad, cette fois il demande à Poutine d’y participer, – le Russe est libre pour y participer... Tout cela se fait dans une sorte de semi-silence ouaté de la presseSystème officielle, complètement anesthésiée, avec son pilote automatique bloqué sur Zelenski et rien d’autre. Il n’empêche que cette sorte de rencontre est une façon de clore la guerre syrienne avec une entente entre Syriens, Turcs et Russes (avec les Irakiens et les Iraniens derrière) tandis que les USA se retrouvent isolés avec les pauvres Kurdes qui ne cessent de faire des choix catastrophiques.
« C’est le résultat de ce que font les neocons. Ils arrivent avec plans très élaborés, complexes, du regime change bien sûr, et d’autres choses terribles, des guerres épouvantables, cruelles,... Mais à la fin, l’Amérique, loin de l’emporter, se retrouve perdante et c’est bien ce qui est en train de se passer en Syrie... »
... Et dire qu’il a fallu des millions de morts pour arriver à cette bouillie sanglante ! Pourtant, nous ne devons pas nous arrêter là. Nous croyons que tous ces mouvements s’accélèrent du fait de la réalisation, grâce à divers signes et comportements, dont l’intervention de Kissinger, qu’il n’y a rien à faire pour arrêter cette machine à catastrophes et à perdre, rendue de plus en plus furieuse par ses défaites, et qu’il sera nécessaire à un moment ou l’autre d’en arriver au règlement radical des choses. Nous croyons que ni la Russie, ni la Russie-Chine, ne se retrouveront seuls, car le danger est désormais ressenti par tous, et tous vont se trouver de plus en plus concernés.
Notes de PhG-Bis : « Pas un mot de l’Europe, pas la peine, PhG refuse d’en parler. La poussière sans intérêt, on la met sous le tapis. Il en résultera ce qu’il en résultera, avec l’espoir d’une rédemption possible si enfin l’UE éclatait... »
A notre sens, il devient de moins en moins possible de parvenir à un règlement qui se fasse dans des conditions d’antagonisme acceptable, où certains pourraient être tenus hors des affrontements, où de simples partages d’influence suffiraient. Le règlement de cette situation de catastrophe cosmique, de fin de cycle, passe par une secousse à mesure. Sous quelle forme ? Dans quelle mesure, justement ? Seuls les événements à venir savent ce qu’ils nous réservent, nous n’avons comme seule indication que de connaître l’identité de la chose à détruire.
La seule hypothèse que l’on puisse avancer, nous qui ne connaissons pas les secrets des dieux, c’est qu’il arrive quelque chose de décisif aux monstres qui nous menacent.
Mis en ligne le 20 décembre 2022 à 20H45