Confusion et organisation autour du sort de Julian Assange

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La confusion est considérable autour des diverses circonstances qui entourent l’arrestation de Julian Assange, puis la décision de liberté sous caution, puis l’appel aussitôt introduit contre cette décision, puis cet appel finalement repooussé et aboutissant (aujourd’hui) à la confirmation de la liberté sous caution.

Un article du Guardian, ces 15 et 16 décembre 2010 (article rédigé hier soir et “rafraîchi” par la nouvelle du rejet de l’appel contre la liberté sous caution) nous donne divers détails qui illustrent cette confusion. Outre les interférences des modalités de paiement de la caution, la première version nous disait que la Suède avait introduit cet appel, par la voix de son avocat devant le tribunal. Il s’avère maintenant que c’est le procureur représentant le gouvernement britannique (Crown Prosecution Service, ou CPS) qui a effectivement agi dans ce sens. Le Guardian, particulièrement bien informé, donne les détails des diverses explications qu’il a obtenues.

«The decision to have Julian Assange sent to a London jail and kept there was taken by the British authorities and not by prosecutors in Sweden, as previously thought, the Guardian has learned. The Crown Prosecution Service will go to the high court tomorrow to seek the reversal of a decision to free the WikiLeaks founder on bail, made yesterday by a judge at City of Westminster magistrates court.

»It had been widely thought Sweden had made the decision to oppose bail, with the CPS acting merely as its representative. But today the Swedish prosecutor's office told the Guardian it had “not got a view at all on bail” and that Britain had made the decision to oppose bail. Lawyers for Assange reacted to the news with shock and said CPS officials had told them this week it was Sweden which had asked them to ensure he was kept in prison.

»Karin Rosander, director of communications for Sweden's prosecutor's office, told the Guardian: “The decision was made by the British prosecutor. I got it confirmed by the CPS this morning that the decision to appeal the granting of bail was entirely a matter for the CPS. The Swedish prosecutors are not entitled to make decisions within Britain. It is entirely up to the British authorities to handle it.”

»As a result, she said, Sweden will not be submitting any new evidence or arguments to the high court hearing tomorrow morning. "The Swedish authorities are not involved in these proceedings. We have not got a view at all on bail."

»After the Swedish statement was put to the CPS, it confirmed that all decisions concerning the opposing of bail being granted to Assange had been taken by its lawyers. It said: “In all extradition cases, decisions on bail issues are always taken by the domestic prosecuting authority. It would not be practical for prosecutors in a foreign jurisdiction … to make such decisions.”»

L’imbroglio juridique, les informations vraies ou fausses, confirmées ou démenties, les déclarations de deux gouvernements, parfois contradictoires, parfois concordantes, – la confusion est grande autour de l’arrestation et du sort de Julian Assange. On y ajoutera les pressions US, évidemment constantes, qui doivent s’exercer aussi bien sur les Britanniques que sur les Suédois. Cette situation a pour effet d’entretenir la tension autour du sort du fondateur de Wikileaks et de susciter de plus en plus d’initiatives et de rassemblements en fonction de cette situation. Dans le Guardian du 16 décembre 2010, John Pilger (qui a contribué à la caution d’Assange) prend sous sa plume une lettre ouverte collective, signée de diverses personnalités, et signifgiant un engagement de lutte à propos de l’affaire Assange et du reste : «Thus, we pledge to not simply bear witness but to actively participate in this fight – for freedom of speech, for real democracy and for justice. We know this is only the beginning: de-masking the puppeteers facilitates action towards fairer and more just societies…»

Un autre de ces mouvements a pris forme aux USA, qui rassemblent des personnalités qu’on pourrait qualifier de “dissidentes”, mais appartenant aussi bien à la droite qu’à la gauche. Ce mouvement s’attache essentiellement à l’aspect US de l’affaire Assange, en s’opposant à l’intention du gouvernement US de demander l’extradition de Julian Assange. On trouve dans ce mouvement, qui publie un manifeste, des gens comme ceux de Noam Chomsky, Noami Wolf, Daniel Ellsberg, Justin Raimondo, etc. On peut trouver les informations diverses sur cette initiative sur Antiwar.com, le 15 décembre 2010.

«In opposition to efforts by the U.S. Attorney General Holder to extradite Julian Assange, Editor in Chief of WikiLeaks, prominent authors, academics, lawyers, whistleblower activists concerned with eroding civil liberties, government accountability, electronic freedom, opposition to war, and protection of whistleblowers have signed on to a strongly worded statement (below) condemning ‘U.S efforts to fraudulently criminalize the legitimate journalism of Julian Assange…”.

»“This statement is the first step in an ongoing campaign to support Julian Assange, WikiLeaks and to re-assert the concept that the U.S. government is accountable to its citizens,” said Linda Schade of WikiLeaksisDemocracy.org. “We will not accept the manipulation of our legal system to criminalize a journalist; a free and independent press is non-negotiable.” The project is planning an aggressive campaign to support Assange and WikiLeaks and has hosted the statement online.»

Il faut noter la rapidité avec laquelle s’est amorcé ce regroupement droite-gauche de la “dissidence” US. C’est un fait sans aucun doute remarquable, qui mesure à la fois la pression des événements et la perception de l’affaire Assange (de la crise Cablegate en général). On peut considérer qu’il s’agit éventuellement d’un événement sans guère de précédent aux USA, que cette union de la “dissidence” des deux bords, qui est un but désespérément poursuivi depuis la guerre en Irak par diverses personnalités.

En un sens, l’aspect “affaire Assange” de la crise générale Cablegate est une excellente opportunité, – cela apprécié d’un œil tactique, nécessairement froid et sans rendre justice (au propre et au figuré) à Julian Assange et à son sort. Nous parlons ici de tactique, pour considérer que l’inculpation de Assange devient un point de rassemblement à très forte potentialité de communication, avec des rebondissements, une grande confusion, etc. C’est en cela qu’on peut mesurer l’absence de sens tactique, et même stratégique, du Système, qui fournit à une opposition nécessairement disparate et pas nécessairement mobilisée au départ, voire parfois partagée sur les actions de Wikileaks, des références et des symboles extrêmement forts, suivant des actes en général grossiers et mobilisateurs, pour susciter effectivement ces regroupements et ces rapprochements.


Mis en ligne le 16 décembre 2010 à 16H51