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617Deux phénomènes au moins ont concouru efficacement à l’effondrement de l’URSS et à la restitution des pays de l’Est de l’Europe aux délices du capitalisme sauvage.
Ils se sont combinés pour développer des effets synergiques et ne sont pas totalement indépendants l’un de l’autre.
Le premier est l’intransmissibilité de l’élan révolutionnaire.
L’énergie mentale qu’il mobilise chez les acteurs du bouleversement social, bravant la mort et faisant fi de leur intérêt privé immédiat, est tout à fait considérable.
Bien sûr des circonstances objectives exceptionnelles et une lente maturation des esprits vers cette issue radicale aux problèmes sociaux sont présentes pour le déclenchement de la révolte. Puis vient le long moment du maintien de la tension psychique qui fera aboutir les émeutes et les fera aboutir au changement.
Et une autre dose d’investissement est encore nécessaire pour le faire durer.
Outre les facteurs exogènes comme une vacance manifeste du pouvoir devenu évidente aux yeux de tous sauf pour l’aristocratie décadente, et la guerre mondialisée de 1914, des hommes apparaissent à ces moments qui incarnent l’idéal révolutionnaire, le portent jusqu’à sa réalisation.
Au fur et à mesure que s’éloigne dans le temps le moment de l’incandescence, tiédissent les ardeurs radicales et débutent les accommodements.
La génération suivante à laquelle est enseignée par des commémorations et des livres l’épopée héroïque est déjà dans un plasma post-révolutionnaire. Elle n’a pas vécu les instants héroïques galvanisants et ne les comprend plus.
Le deuxième est à repérer dans le hiatus entre l’élite dirigeante théoriquement garante de l’orthodoxie révolutionnaire et son comportement réel.
D’après B. Drweski, spécialiste de l’Europe Centrale et de l’Est à l’Inalco, assez tôt, une lutte des classes est apparue au sein du Parti Communiste de l’URSS.
Les effectifs du PCUS sont passés rapidement de quelques centaines ou milliers à plusieurs millions. Cette nécessaire hypertrophie qui a joué un rôle de promotion sociale pour les défavorisés a eu des effets pervers. Le changement de taille a dragué dans ses filets des opportunistes, les futurs oligarques. Petit à petit, des hommes d’appareil ont été contaminés par la quincaillerie consumériste occidentale.
Drweski rapporte que dès les années soixante dix, des étudiants communistes étaient envoyés à Chicago pour y apprendre les théories de Friedman.
Le peuple vivait la dissolution de l’éthique communiste et la dissonance cognitive entre les principes déclarés et la réalité de la corruption mâtinée avec une fascination pour un mode de vie éloigné de l’égalitarisme austère et un peu gris. La pénétration des images télévisuelles en particulier les feuilletons lui faisait croire que le Paradis sur terre existe et qu’il est en Occident.
Le vingtième congrès a sonné l’heure de l’amplification de l’embourgeoisement d’une caste constituée progressivement qui ne croyait plus en ce qu’elle prônait mais qui portait toujours l’étiquette de communiste. Elle a conduit le système à sa casse.
La destruction du socialisme réel avec tous ses inconvénients mais ses avantages réels pour le peuple éduqué, nourri, soigné et occupé à un travail s’est soldée par le transfert massif des biens de production collectifs vers la minorité bureaucratique convertie depuis longtemps et prête à réaliser instantanément la contre-révolution.
L’inefficacité économique de la République des Soviets n’est pas en cause.
En très peu d’années, l’URSS rendue exsangue pour avoir terrassé quasiment seule le monstre nazi, s’est relevée de la perte de 27 millions de ses habitants, les plus valeureux, les plus communistes réalisant un trou générationnel qui n’a pas été sans effets dans la généalogie de la Contre-Révolution et de l’anéantissement total de ses infrastructures.
Bien avant les Us(a), Les Soviétiques ont été capables d’envoyer des hommes dans l’espace.
La course aux armements non plus.
La défaite du bloc qui privilégiait la justice sociale à une prétendue liberté est plutôt de l’ordre immatériel de la croyance, par perte de la foi.
Nous avons maintenant en Occident cette même mécréance qui s’installe.
Les instruments de pouvoir qui subjuguent le peuple ont perdu de leur tranchant.
Des techniques de l’information, très affinées, réalisent une diffusion d’une propagande absorbée passivement et sans contrainte par des spectateurs qui offrent leur cerveau à cette imprégnation.
Le montage des JT en forme de feuilletons haletants permet une alternance entre séquences sanglantes propices à générer la peur et du divertissement people arrivant pour soulager la peur, rassurer et récompenser.
Ainsi, les démocraties occidentales ont manufacturé l’opinion et la soumission des peuples à un ordre qui les capture dans un besoin insatiable de consommation inutile et aberrante et les asservit par le crédit.
De prétendus ingénieurs sociaux modifient leurs modalités perceptives et orientent leurs émotions.
L’un des ressorts le plus usité dans ces psy-ops est la Peur.
La Peur primitive et archaïque.
La Peur qui emprunte le circuit court par l’amygdale sans passer par le cortex évolué.
La répétition des messages du danger rouge puis maintenant vert a créé des autoroutes vers l’aversion du Communiste puis du Musulman.
Pendant la guerre dite froide ( le Vietnam, le Cambodge et l’Angola n’ont pas été particulièrement gelés) une majorité pouvait adhérer à la thèse d’une lArmée Rouge à Paris en quelques heures. Les ménages s’équipaient en réfrigérateurs et d’automobiles.
Les classes laborieuses bénéficiaient de la protection sociale garantie justement par l’existence des acquis communistes à l’Est.
Désormais, le contrefort communiste dissous, plus aucune règle ne vient entraver la propension prédatrice du capitalisme.
En même temps que le cauchemar de la paupérisation de la majorité se densifie, l’accès à des informations alternatives s’intensifie.
Les deux premières multinationales en terme de capitalisation boursière, Apple et Google, participent à une réorganisation de la distribution de l’information.
La preuve est donnée par Trump de cette attitude réfractaire à l’égard des injonctions des media mainstream.
Le Wapo s’institue en Secrétariat délégué au Ministère de la Vérité en est encore une autre.
Les deux cents sites alternatifs cités par le Washington Post réalisent du mieux qu’ils le peuvent leur travail de réinformation
La preuve aussi par l’appui des 3500 Anciens Combattants au refus des peuples indigènes de se faire spolier leur terre et leur eau à Standing Rock.
La France sous-impériale peut massacrer autant que nécessaire pour elle dans ses ex-colonies.
Personne ne trouve rien à y redire.
Mais quand le Président de la France décore un chef d’Etat notoirement autocratique et rétrograde, il apparaît un degré de dissonance inacceptable pour le cerveau humain.
De plus, il est devient impossible de soutenir diplomatiquement et logistiquement des rebelles djihadistes auxquels les princes récipiendaire de la Légion d’Honneur accordent le financement et prétendre lutter contre le terrorisme islamiste.
Le surgeon occidental du régime de Tel Aviv ne peut clamer qu’il est l’unique démocratie qui vaille dans la région et emprisonner des enfants de 12 ans pour des années en raison d’un simple jet de pierre sur un tank. Il arrache des larmes de sang et de rage à des millions qui ne croient que ce qu’ils voient et vivent.
Les Britanniques, éclaireurs en la matière puisque les aînés des Français en impérialisme décadent et thatcherisme dévastateur, n’ont pas renoncé à poursuivre Blair pour ses « mensonges » plus que pour ses crimes.
Les murs du mensonge entretenu depuis plusieurs décennies sont plus que lézardés.
Ils risquent de s’effondrer à tout moment.
La religion du consumérisme est en train de perdre ses adeptes, une petite conscience écologique se mêle à un certain degré de nationalisme pour privilégier la production in situ.
Il ne manque plus que le catalyseur qui va précipiter toute cette métastabilité vers un autre état.
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