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4 novembre 2002 — L'ONU connaît une pause symbolique, même si le travail y continue. Cette pause est due aux élections qui ont lieu demain aux USA, qui constitueront une indication intéressante sur la situation intérieure US, — dans tous les cas, sur la situation du mécanisme politique intérieur US. Les dernières indications font craindre un résultat qui perpétuerait, voire accentuerait cet étrange état de division presque parfaite révélé avec l'élection de GW en novembre-décembre 2000 (GW élu avec moins de vois populaires que son adversaires, les totaux généraux établissant néanmoins le rapport à 50-50).
Il semble maintenant acquis qu'une résolution de l'ONU sur l'Irak ne pourra pas être éventuellement adoptée, au mieux avant la fin de cette semaine. Une dépêche Associated Press du 2 novembre signalait par exemple : « U.S. officials say a vote is unlikely until late next week because of the need to revise the resolution and have the council discuss the updated draft — which will delay U.N. action until after Tuesday's U.S. midterm elections. » Il semble même que des prévisions plus réalistes, mais néanmoins optimistes puisqu'elles impliquent que serait acceptée la résolution qui circulerait actuellement (d'origine américaine et encore plus révisée dans le sens voulu par la France et la Russie), indiquent qu'il ne faut rien espérer de définitif avant la semaine prochaine. Cela fera alors deux mois que le débat est engagé, à partir du discours de GW devant l'Assemblée, le 12 septembre.
On sait par ailleurs que désormais le doute existe aux USA, non seulement sur la situation à l'ONU, mais sur la perspective de la guerre elle-même (aura-t-elle lieu ?). La mauvaise humeur d'un Krauthammer, neo-conservative notoire, est significative. Il faut rappeler encore l'article de David Ignatius, dans l'International Herald Tribune du 2 novembre, avec ce paragraphe, qui nous dit tout de la situation :
« Six months ago, when analysts such as Robert Kagan were celebrating America's cult of military strength, the common view was that the Europeans were powerless to stop Washington. It turns out that's not exactly true. The Europeans are discovering that they can use institutions such as the United Nations as a brake against what they consider America's “hyper-power.” »
En d'autres mots : sous nos yeux, c'est une sorte de “révolution” qui se met en place, une redéfinition des relations internationales après la tentative ultime des américains, depuis le 11 septembre, de limiter la définition à la seule “puissance brute”. C'est un deuxième tournant après le 11 septembre qui est en train d'être prise, — si l'on veut parler en termes politiques symboliques, une “contre-révolution” en train de se faire et de réussir, après la “révolution” du 11 septembre 2001.
• Il y a, avec les débats de l'ONU, la réalisation, après la démonstration, que la puissance américaine n'est ni omniprésente, ni omnipotente, qu'elle a ses faiblesses et que celles-ci se trouvent paradoxalement au coeur de ce que l'on a pris jusqu'ici pour son principal instrument de puissance.
• Ce que montrent les débats à l'ONU, durant ces deux derniers mois, ce sont, par rapport aux places que les thèses américaines en vogue leur assignent, les limites très contraignantes de la “puissance brute” (“hard power”) et la très grande efficacité de la “puissance d'influence” (“soft power”). C'est ce que William Pfaff définit de la sorte, dans un article paru le 24 octobre dans l'International >Herald Tribune :
« ...People are being forced to think about the nature of power, and to wonder if the United States is really as powerful as it claims to be. They note that since Bush was elected and began to assert military “hard” power, America's “soft” power has shrunk.
» Soft power encompasses diplomatic influence and political persuasion, cultural influence and prestige, and additional factors that cause others to respect a country and wish to become associated with it and to accept its values and views. Joseph Nye of Harvard University has recently written about this in terms of the importance of soft power to the United States itself. But soft power can also be used against America, particularly when America is in its Bush administration hard-power operational mode. France has been using its soft power to block the American demand for a single UN Security Council resolution that would authorize the United States to attack Iraq whenever Washington judged this appropriate. The French maintain that international law requires that the Security Council authorize whatever retaliation follows Iraqi obstruction of inspections.
» The American position was never popular with other governments, and in a low-key but persistent and unyielding way, the French mobilized that international opposition. France has UN veto power but does not threaten to use it, understanding that veto power, like nuclear power, is much more important unused than used. The United States now has provisionally agreed to return to the United Nations before any attack on Iraq, although at this writing negotiations (notably with Russia) continue on the wording of a resolution acceptable to the five permanent Security Council members. As for hard power, no other country imagines trying to construct as huge and versatile a military force as the United States possesses. What purpose would it serve? No government today imagines fighting a full-spectrum war against America. No other government except the American has the least interest in deploying its forces worldwide, with bases in scores of countries. »