Coup d’œil sur la partie immergée de l’iceberg

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… L’iceberg en question, c’est, – devinez, – vous avez gagné, – c’est le JSF… C’est à propos de la question du second moteur (le F136) du JSF, que le Congrès voudrait voir développer et que le Pentagone refuse des quatre fers. Au départ, le programme JSF était prévu avec deux moteurs mis en développement parallèle quoique décalé, avec rapports de concurrence et choix du moteur par l’utilisateur; il s’agit du F135 de Pratt & Whitney, d’ores et déjà utilisé sur les prototypes du JSF, et du F136 de GE/Rolls Royce, théoriquement en développement ou sur le point d’être abandonné c’est selon. (Nous avons déjà parlé de cette affaire, qui inquiète beaucoup les Britanniques, – because Rolls Royce.) Depuis maintenant quatre ans, le Pentagone présente régulièrement un budget sans un dollar pour le F136, et le Congrès rajoute un budget pour le même F136, qu’il inclut dans le budget général du JSF.

L’affaire atteint un point de rupture. Le 29 mai 2009, sur leur blog d’AviationWeek.com, Graham Warwick et Guy Norris donnent quelques extraits d’une interview du nouveau chef du programme au Pentagone, le général des Marines David Heinz, qui dirige depuis un mois le JSF Program Office (JPO). Heinz dit que le développement et la production du F136, s’ils sont poursuivis, coûteront au moins 80 avions sur 5 ans et feront monter les prix de l’avion d’une façon insupportable.

«Funding development of a second engine from within the existing F-35 budget would cut production by dozens of aircraft and push up program costs, the Joint Strike Fighter's program chief warns in an interview with Aviation Week. […]

»Forcing the program to fund development of the General Electric/Rolls-Royce F136 from within the existing JSF budget would “take 50-80 tails out of the program” over the next five years, says the program executive officer (PEO), Marine Corps Brig. Gen. David Heinz.

»The Defense Department's Fiscal 2010 budget request calls for procurement of 513 F-35s over five years, an increase of 25 over previous plans, with another 180 expected to be built for international partners over the same period. This would take annual production “into the low 200s” by Fiscal 2015, he says. Funding the F136 within the existing budget would require cutting six aircraft from the 30 planned in Fiscal 2010, Heinz says. This would make aircraft in subsequent years more expensive, pushing back international purchases and compounding the problem because the partners could not afford early aircraft, he says.

»“We would never get to 200 tails [a year]. We would build out to around 100, under-utilize the tooling and not get down the learning curve,” the PEO says. “I worry about taking tails out of the program because it will get so expensive the partners will start to pull back.”»

Derechef, le fameux Bill Sweetman, du même groupe et sur le même site, saute sur sa plume, et reprend et développe le commentaire… C’est le 1er juin 2009 qu’il intervient. Il s’étonne des affirmations du général Heinz, étant donné que les coûts du F136 sont programmés à $300 millions par an, ce qui fait au mieux, aux estimations actuelles, le coût d’un avion et demi par an. Or, Heinz prévoit la perte de 15-20 avions par an, sinon plus (la chose est assez nébuleuse), à cause de l’argent que prendrait le F136. Problème… Et conclusion intéressante de Sweetman, avec cette remarque finale: si tout ce que nous raconte Heinz est vrai, alors il est temps de stopper les mesures d’abandon de production de programmes alternatifs d’avions de combat (les F-15 et F-16 modernisés), en cas de malheur, et de soumettre le programme JSF à un audit général et sans la moindre pitié.

«That's a remarkable statement, because it forecasts nothing less than disaster if the F136 costs are not pulled out of the program. 100 JSFs per year, without getting down the learning curve, would mean an F-22-like price tag and no international customers.

»It would also mean that the USAF would get 50-60 aircraft per year - far fewer than it needs to recapitalize its fighter fleet, and sending the service on a path to a far smaller combat force with 500-800 fewer aircraft than at present.

»It's also a dire prediction, given that the entire F136 development program is budgeted at $2.4 billion and that the work is now about half done (contract award was in August 2005 and the program is due to end in 2013), with an average spend of $300 million per year. That compares to upwards of $45 billion for JSF SDD, and (at current LRIP costs) equates to one-and-a-half jets per year.

»If the JSF effort is truly balanced on so fine a knife-edge at this stage (rather than Gen. Heinz painting a bleak picture to scare Congress) then terminating alternative fighters has to be considered inadvisable – and the time has come for an authoritative, independent review of the program.»

Quelle conclusion, fort temporaire, apporter à cette passe d’armes, sinon celle que tout se déroule selon le plan prévu? Le JSF poursuit son développement vers une situation d’indescriptible bordel, avec les habituelles hypothèses à ramener à trois possibilités. Cela conviendra bien entendu à ce cas du mystérieux moteur qui semble, s’il est produit, être une bombe nucléaire qui pulvérisera le programme.

• Premier terme de l’alternative: ou bien le général Heinz ment pour affoler le Congrès, et l’on n’est pas plus avancé sur la compréhension du cas du moteur F136. On est par contre largement confirmé sur les pratiques des gestionnaires du programme, militaires et civils (JPO-LM).

• Ou bien Heinz dit la vérité et la remarque de Sweetman a toute sa valeur. Le JSF est dans un tel état de tension que le moindre changement, la moindre nouvelle contrainte le ferait exploser. Sweetman propose alors: on arrête tout et on évalue le programme. Le gang JPO-LM dirait plutôt: on continue sans le moteur en disant que tout va bien, – c’est-à-dire, en retardant sur le calendrier le moment de l’explosion.

• Ou bien Heinz dit quelque chose comme s’il disait n’importe quoi, c’est-à-dire qu’il affirme quelque chose, sans doute en mentant, mais en ne sachant par ailleurs rien de la réalité. (Après tout, cette affaire de moteur pourrait être encore pire pour le programme que ce qu’il dit.) Cela serait dans la grande tradition des patrons du JPO, et nous serions confirmés, d’ailleurs comme dans les deux autres précédentes possibilités, que nous allons vers on ne sait où, on ne sait comment et on ne sait pourquoi, et à la grâce de Dieu.


Mis en ligne le 2 juin 2009 à 13H11

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