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6388L’assassinat – The Guardian quotidien d’une gauche aussi atlantiste que son équivalent français, l’imMonde titre ‘assassinat’– de Qassem Suleimani est une agression selon le doit international à plus d’un titre. L’emploi de drones ou de tout autre moyen pour accomplir des assassinats ciblés en dehors d’un contexte d’hostilités avérées selon Agnès Callamard, rapporteur spécial de l’ONU pour les exécutions extrajudiciaires et arbitraires est injustifiable au regard des lois internationales. Les assassinats commis à titre préventif sans recours préalable devant le Conseil de Sécurité de l’ONU, très accessible pour les Usa, ils en sont membres permanents, relèvent également d’une violation patente des Droits de l’Homme selon Dave Comar, avocat au sein d’un groupe de juristes à but non lucratif.
Cette intervention militaire d’un pays tiers sur le sol d’un autre pays occupé relève d’une agression qui peut être portée devant la Cour Pénale Internationale afin d’y être jugée.
L’administration de D. Trump a échoué à convaincre les membres du Congrès du danger imminent que couraient les diplomates et les militaires étasuniens en Irak. Elle n’a pu apporter aucune preuve de ce qu’elle a avancé comme argument pour l’attaque soldée par l’assassinant de Soleimani, de Abou Mehdi Mouhandis, dirigeant du Hachd al Chaabi et de six autres Irakiens qui accompagnaient le convoi chargé d’accueillir Soleimani. Les foudres de guerre démocrates qui poussent depuis des décennies à l’affrontement sur une plus grande échelle fustigent maintenant l’irrationalité de Trump qui a mis en péril la sécurité des Usa. Le parti belliciste d’Hillary espère récupérer à son profit la base anti-guerre qui a permis l’arrivée au pouvoir de leur adversaire. Des dons importants démocrates ont fusé pour alimenter ANSWER, groupe dont les militants se sont toujours élevés contre les guerres impérialistes des Usa, pour financer manifestations et campagnes d’affichage anti-guerre et anti-Trump.
Un sondage Today-Ipsos montre que les citoyens étasuniens interrogés estiment à deux contre un que les intérêts des Usa sont davantage en danger après cette exécution.
Le dirigeant des Brigades d’Al Qods était venu sur invitation des Séoud discuter des moyens de réduire l’escalade militaire en cours après la tuerie des 25 soldats de l’armée, en riposte à la mort d’un traducteur d’origine irakienne, sous-traitant de l’armée américaine. Les actions d’Aramco ont eu du mal à susciter l’enthousiasme et elles ont encore chuté après l’assassinat. Les Saoud ont été tenus en dehors de l’attaque étasunienne, on peut le croire car leur intermédiation visait à rétablir un calme relatif dans la région pour protéger le commerce.
La question de la présence d’un adulte dans la Maison Blanche est de nouveau posée.
Bandy X Lee, professeur de psychiatrie l’université de Yale, avait coordonné un ouvrage ’ écrit par 27 psychiatres sur la folie du Président. Elle réclame maintenant de Nancy Pelosi qu’elle convoque des experts psychiatres pour évaluer la santé mentale de Trump afin de le destituer.
L’opinion internationale est de plus en plus défavorable à Trump, une moyenne de 64% de personnes interrogées dans 32 pays ne lui fait pas confiance pour sa politique étrangère que le 45èmePOTUS mène depuis son arrivée à la Maison Blanche. La tendance est particulièrement nette dans les pays d’Europe occidentale, ce taux ne va pas s’améliorer après cet assassinat apprécié par beaucoup comme l’entrée dans une troisième guerre mondiale.
Il est donc illégal. Dans le camp occidental, seuls le Royaume Uni et Israël ont approuvé sans réserve. Les Britanniques ont acquiescé à un prétendu ‘droit de se défendre’ et l’Etat sioniste a applaudi cette opération audacieuse pour quelques heures après déclarer officiellement n’y avoir pas pris part. La France et l’Allemagne tout en réitérant leur soutien à l’agresseur demandent à l’agressé de ne pas répondre à cet acte de guerre caractérisé.
Mais elle est aussi d’une lâcheté insigne et d’une parfaite indignité. Selon des accords passés entre le gouvernement irakien et leur occupant étasunien, des informations sur leurs plans de vol sont échangés entre les états-majors pour éviter tout incident aérien mais sont communiqués également les évènements diplomatiques comme l’arrivée du Général Soleimani. Qassem Soleimani était suivi à la trace par les renseignements étasuniens depuis de nombreuses années, il se savait en sursis et ne faisait rien pour «échapper à leur surveillance ». Ses proches le surnommaient le ‘martyr encore vivant’ et tous savaient qu’il n’avait que peu de chances de mourir de maladie dans son lit. Les éloges funèbres du chef de la résistance chaldéenne irakien Rayyan Kaldani et celui de Ismail Haniyé du mouvement Hamas palestinien ont été particulièrement émouvants. Ils traduisent la gratitude profonde des peuples de la région pour un homme qui a tant contribué à éradiquer la monstruosité occidentale Daesh.
Cette exécution extrajudiciaire, pratique d’inspiration israélienne, est d’autant moins justifiable que Soleimani est arrivé sur invitation de l’Irak et du Qatar et de l’Arabie Saoudite pour discuter d’une issue aux réponses disproportionnées faites par les Usa à la mort d’un sous-traitant civil lors d’une attaque d’une base étasunienne au Nord du pays.
L’un des effets escomptés de cette provocation devait être le lancement d’un affrontement direct entre l’Iran et les USA, désiré par le régime sioniste depuis trente ans. Il est pour l’instant écarté. La réponse mesurée, différée de quelques jours, à l’assassinat donne l’indication que l’Iran entend vouloir rester maître du temps et de la nature de sa réaction.
17 missiles furent tirés sur la base américaine d’Aïn Al Asad à Anbar en Irak, la plus éloignée de l’Iran, ce 8 janvier en épargnant la vie de 500 soldats. Leur dortoir a été volontairement évité. Néanmoins, neuf avions ont transporté des blessés vers des hôpitaux de l’entité sioniste et près de 80 de morts sont à déplorer. Le bilan des victimes n’a été donné que par la presse iranienne et a été repris par l’organe du Hezbollah. Malgré la sophistication de l’électronique des missiles envoyés, le chiffre de zéro mort est très peu probable. C’est bien la première fois depuis la deuxième guerre mondiale que les Usa ne répliquent pas immédiatement à une attaque d’une de leurs bases. Il est vrai que le commandement de la force aérospatiale iranien a fait savoir qu’une telle éventualité entraînerait l’effacement de la carte de Tel Aviv et Ryad. Le Premier ministre irakien a été informé deux heures avant des intentions iraniennes et les a transmises à l’occupant américain.
Les frappes par la nouvelle génération de Qaim 1 et Fahad 110 ont délibérément évité le consulat américain d’après les témoins. Ce tir a permis de démontrer la très haute précision de guidage (marge de moins de 50 mètres) et la portée des missiles iraniens. Les Usa et leurs alliés-vassaux au Proche Orient prétendaient vouloir inclure l’interdiction du programme de recherche en balistique dans le traité sur le nucléaire.
Les Israéliens et le Pentagone ont bien compris le message. L’Iran est au seuil de l’arme nucléaire qu’il n’a pas réellement besoin de développer, Dimona est dans son champ d’action. Quant à Trump, il a gazouillé que l’Iran « avait reculé », le lamentable déni qui lui sauve la face n’a pas été relevé par charité et par besoin d’une désescalade sans laquelle de nouvelles destructions et des millions de morts arabes et iraniennes seraient à déplorer.
Une escalade incontrôlée risquait d’induire trop de morts sur le terrain d’affrontement entre les deux pays, or l’Irak est déjà frappé par des décennies de guerre et d’embargo et une extrême paupérisation de sa population. Le choix de l’Etat-major iranien a répondu à cet impératif stratégique d’épargne d’une population civile qui a tant subi et qui réclame le départ des occupants, tous les occupants.
Le document (vrai-faux) destiné à prévenir les autorités irakiennes du redéploiement de l’armée américaine en vue de son retrait d’Irak, n’a pas donné lieu à un démenti ferme. ‘Le brouillon’ aurait été publié intempestivement et prématurément. Cette cacophonie prouve pour le moins le désordre qui sévit dans le commandement du Pentagone. Le remerciement brutal et inopiné de deux membresimportants du cabinet du Secrétariat Mark Esper à la Défense dans les suites de l’assassinat de Soleimani renforce cette apparence d’incohérence et de l’existence de multiples centres de décision aux vues et intérêts divergents.
En qualifiant de gifle en pleine face l’attaque du site étasunien, Khamenei a sans doute bien pesé ses mots. D’autres réponses viendront compléter cette attaque introductive. Le champ de la riposte est très large et l’éventail des menaces n’est pas uniquement militaire. Quelques vedettes un peu énervées dans le détroit d’Ormuz et les places boursières occidentales avec des cours surévalués par la monétisation des dettes étasuniennes et européennes chuteront par exemple. Le prochain crash boursier sera plus destructeur et sans la ressource épuisée de l’assouplissement monétaire, il sera durable. Quelques drones bien ajustés survolant des champs pétroliers en Arabie déstabiliseront efficacement le régime des Bédouins du Nedjd. Le Boeing 737 ukrainien abattu par erreur à l’aéroport de Téhéran avait comme passagers essentiellement des Iraniens et des Irano-canadiens travaillant ou étudiant dans des domaines techniques de pointe fait circuler l’hypothèse (invérifiable) d’un avertissement lancé à la CIA.
L’assassinat de Soleimani et d’Abou Mehdi Mouhandis a eu un autre effet majeur insuffisamment apprécié par les médias occidentaux. Les manifestations populaires en Irak contre la corruption et l’inexistence des services publics ont perdu de leur élan. Ce vendredi 10 janvier à peine quelques milliers de jeunes à Bagdad et dans les principales villes du Sud ont continué leur déambulation pour revendiquer un Etat indépendant au service de ses citoyens. On estime à 400 milliards par an le montant des sommes engagées dans la corruption soit quatre fois le budget de l’Etat. Une réforme de la loi électorale a été votée fin décembre au Parlement irakien, elle devrait permettre l’élection de candidats indépendants du système ethno-tribal mis en place en 2005. La Constitution qui avait alors mise en place par un referendum dans un pays à la population assiégée avait été rédigée par un cabinet d’avocats à New York. Elle a permis la répartition des postes selon des critères confessionnels et ethniques. Des élections anticipées devraient être organisées.
Pour l’instant, le Premier ministre démissionnaire qui assure l’intérim exige avec le Parlement le départ des troupes américaines. Elles étaient revenues en force depuis 2014 à l’avènement de Daesh et de son Etat islamique que l’armée irakienne d ‘abord démantelée en 2003 par les Usa puis imparfaitement reformée n’a pu combattre.
Le mérite de l’éradication de cet Etat revient justement aux brigades d’Al Qods sous le commandement de Soleimani et de Hachd Al Chaaabi, les fameuses unités de mobilisation populaires sous la direction de Abou Mehdi Mouhandis qui regroupent 145 000 hommes partiellement intégrées à l’armée nationale. Les manifestants refusent de décliner leur confession et ne se reconnaissent qu’une seule identité, l’irakienne, ce qui témoigne d’une grande maturité politique pour une jeunesse qui n’a connu que la guerre.
Les protestataires souhaitent le départ des forces étrangères du pays soit celles des Usa et de leur coalition mais aussi et la fin de l’ingérence iranienne qui a pris de l’ampleur depuis le faux départ des Américains en 2011.
Au Liban, les manifestations populaires contre le chômage, un endettement massif du pays dont le service absorbe les ressources fiscales et une corruption endémique marquent le pas en ce début d’année. Une confrontation entre les partisans d’élus municipaux corrompus et des habitants de Beyrouth a été limitée par les forces de l’ordre. A Tripoli, des jeunes gens ont installé des blocs de ciment sur la voie publique et ont blessé des soldatsvenus les arrêter.
Le peuple iranien avec toutes les composantes de l’opposition ont participé aux hommages rendus au héros national qui transcendait tous les clivages politiques. Il est perçu comme l’homme qui a défendu le territoire iranien lors de la guerre Irak-Iran et qui a su donner à son pays le statut de puissance régionale. Les manifestations de novembre contre la vie chère, violemment réprimées, ne risquent pas de reprendre de sitôt alors qu’un sentiment nationaliste très fort a resurgi face aux dangers d’une agression étasunienne. Les manifestations samedi des étudiants près de l’Université de Téhéran ont pris prétexte de l’avion civil ukrainien abattu par erreur. Même si le mécontentement a des raisons objectives d’exploser, hausse des prix, celui du carburant en particulier habituellement distribué à bas prix dans un pays producteur de brut, dans le contexte d’un réflexe nationaliste alors que le pays est en danger, il n’exprime pas l’état d’esprit actuel de la population. L’arrestation puis la remise en liberté du diplomate britannique, soupçonné d’avoir participé au rassemblement estudiantin est une adresse aux fomenteurs de troubles dressés par l’étranger.
Les risques d’une révolution colorée sont pour l’heure écartés en Iran, comme en Irak et au Liban.
La Russie aurait dans un premier temps refusé de livrerle système anti-missiles 400 à l’Iran. Les S 300 commandés en 2009 sous la pression des menaces de sanctions étasuniennes n’ont été livrés qu’avec retard en 2016. Un centre pour leur maintenance a été construit en 2018. Alors que cela ne pose aucun problème que la Turquie, membre de l’Otan, reçoivent des S 400 pour sa défense, les Russes ont pris beaucoup de temps du temps à les proposer à Téhéran. C’est chose faite depuis juin 2019.
Cet instrument de la diplomatie russe rend(ra) inexpugnable le territoire iranien par les airs. La Syrie bénéficie de ces dispositifs grâce à la présence militaire russe sur son territoire.
Le président du Conseil public du Ministère de la Défense de Russie vient de proposer à l’Irak l’acquisition du système anti-missile S 400 pour assurer sa souveraineté et sa sécurité aérienne quelques jours après l’assassinat de Soleimani et de Mouhandis.
Fin août 2019, l’ambassadeur russe à Bagdad promettait déjà d’aider l’Irak à renforcer ses capacités de défense antiaérienne.
C’est au moins ainsi que les Usa se feront expulser de cette région.
Ils partiront.
Soleimani devait rencontrer peu après son arrivée et avant son envol prévu pour Beyrouth le Premier Ministre irakien démissionnaire assurant la fonction par intérim.
La discussion devait porter sur une proposition des Bédouins du Nedjd sinon d’alliance du moins de cessation des hostilités ouvertes entre l’Iran et l’Arabie. Une véritable ébauche d’un bloc asiatique occidental commencerait à prendre forme. En effet, les Bédouins semblent avoir pris conscience que les Usa sont devenus des exportateurs d’hydrocarbures qui les concurrencent et pour lesquels ils représentent désormais un intérêt stratégique plus maigre. Ils ont compris peut-être aussi que la ferblanterie américaine achetée à coups de centaines de milliards ne leur est d’aucun secours face à quelques drones adroitement employés. Leurs débouchés sont surtout chinois.
Adil Abdul Mahdi aurait été empêché de faire part des menaces étasuniennes exercées à son encontre auprès du Parlement irakien. Trump aurait exigé 50% des recettes pétrolières irakiennes contre la reconstruction des infrastructures (détruites par l’invasion de Bush le fils). Abdul Mahdi s’est alors tourné vers la Chine qui s’est montrée moins gourmande pour rétablir le réseau électrique. C’est dans ce contexte que seraient nées les manifestations de rue coordonnées qui ont fini par le faire démissionner.
L’intégration de l’Irak dans le projet des ‘Routes de la soie’ avait été annoncée en septembre 2019 à Pékin par le Premier ministre chinois et Abdul Mahdi. Ce samedi 11 janvier, a été rendus publique l’entrée en vigueur de l’accord sino-irakien pour l’exportation du pétrole extrait du champ d’Halfaya.
Si la Chine ne semble pas souhaiter s’engager militairement de façon frontale avec les Usa sur la scène du Moyen et Proche Orient, elle tresse les fils de sa présence économique. De quoi non seulement mettre en péril la domination militaire américaine mais aussi le dollar et le pétrodollar.
Ils partiront.