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776Ceux qui réfléchissent un tant soit peu s'accordent sur le fait que le monde, notre monde à nous, c'est-à-dire l'Occident, est au plus mal et que les crises qui le secouent ne cessent de se multiplier tout en s'aggravant. Une sourde angoisse nous étreint ; de fil en aiguille nous succombons facilement aux charmes des théories du complot qui apaisent quelque peu nos douloureuses interrogations, tout au moins passagèrement. Certains, d'une nature moins affaissée, c'est-à-dire plus entière, entrent même en dissidence, persuadés qu'ils sont de faire œuvre utile. On voudrait bien qu'une nouvelle révolution soit en marche, mais il ne se passe rien, sinon le morne défilement de jours gris tendant à s'assombrir. Sommes nous donc désormais abandonnés par les dieux, nous si intelligents, si perspicaces, si modernes ? Et le temps continue à s'écouler. Chaque jour qui passe nous révèle de nouveaux scandales, de nouvelles ignominies, nous rapprochant d'une horreur dont nous commençons plus ou moins consciemment à distinguer les contours. Cette marche vers la catastrophe est-elle due à la fatalité d'un destin morbide ? N'y-a-t-il donc rien à faire pour conjurer le sort funeste qui nous attend ? Dans les contingences actuelles, en nous appuyant sur nos schémas de réflexion et sur les modes d'analyse que nous chérissons tant, la réponse est NON. Il n'y a pas de solution, aucune alternative ; nous aurons bientôt droit aux grandes tribulations !
A moins que... A moins que nous n'acceptions de nous pencher sur quelques textes fondamentaux, avec la volonté de laisser de côté nos grilles de lecture habituelles. Au vu de la situation calamiteuse dans laquelle nous nous trouvons, il semble pertinent, pour un début, de bien développer ce que cache l'évolution historique allant de la résistance de l'Esprit à l'esprit de résistance. En effet, ce phénomène, dont l'analyse est absolument capitale pour comprendre la marche du monde, n'est que très rarement abordé. Le lecteur, s'il a la patience de suivre ce texte jusqu'au bout, y découvrira de véritables trésors susceptibles de radicalement changer sa vision du monde, en bien, ce que je lui souhaite. Afin de mieux structurer ma démonstration, je ferai largement appel à une analyse de Jean Borella, spécialiste de la Tradition et de l'ésotérisme chrétien. Ce texte n'est plus tout jeune puisqu'il a été publié en octobre 1986 dans Les résistances spirituelles (Dixième rencontre d'histoire religieuse de Fontevraud) mais il conserve plus que jamais toute sa fraîcheur. Le sujet, très vaste, avec les perspectives qu'il nous ouvre, tant dans le domaine religieux, que social ou politique, ne pourra ne faire l'objet que d'un seul article. Mais son contenu est d'une telle importance qu'il n'y a rien à perdre d'essayer de le développer, mais tout à y gagner.
D'entrée, Jean Borella nous avertit de la difficulté qui nous attend : «L’art de la résistance spirituelle est le plus difficile qui soit. En résistant, au nom de l’esprit, aux formes et aux forces qui nous paraissent le menacer, nous courons le risque, non seulement de passer pour des réactionnaires obtus et routiniers, ce qui n’est rien, mais encore de nous tromper sincèrement de combat et confondre la résistance de l’esprit avec l’esprit de résistance, ce qui compromet sans remède la cause que l’on voulait défendre». Dans ces quelques lignes, Jean Borella résume admirablement la nature du drame vécu par l'Occident chrétien et que nous désignons généralement sous le vocable de crise de la civilisation.
En effet, le mécanisme fatal évoqué ci-dessus, n'a que très rarement été décrit par la littérature. Le cas le plus connu, mais ô combien incompris, est celui, rapporté par Jean Borella, que l'on trouve dans le célèbre « Dialogue des Carmélites » où Georges Bernanos fait dire à la Mère supérieure : «Souvenez-vous, ma fille, que ce n’est pas la règle qui nous garde, c’est nous qui gardons la règle». Mais aussi : «C’est qu’en réalité aucune tradition ne tient et ne dure par elle-même. La tradition n’a d’autre force que celle de notre fidélité, elle n’existe et ne vit que de notre existence et de notre vie. Que nous cessions de lui donner forme en la pratiquant et, immédiatement, la voici renvoyée au néant. Elle attend tout de nous, elle est entièrement à notre merci». Cet éclaircissement permet de commencer à nous rendre compte de la nature de la relation qui s'instaure entre l'homme et l'Esprit, relation d'abord empreinte de respect du sacré, de ce qui se trouve à part, en haut, au ciel comme l'on voudra et, d'une participation active de ce même homme à la perpétuation de la Tradition, sans que le véritable mystère de celle-ci, sa profondeur, ne lui soit à aucun moment révélé. Là se trouve le véritable acte de foi, fait de fidélité et de persévérance sans cesse renouvelées durant des années, presque aux antipodes de la prière récitée machinalement tout en pensant à autre chose, comme le font nos « fidèles » modernes.
Suivons encore Jean Borella qui éclaire quelques points importants de la relation entre l'homme et la Tradition : « Car la tradition attend que nous nous donnions à elle. Totalement impuissante à nous contraindre, en dehors du recours à la force du bras séculier, lequel finit toujours par se fatiguer, elle n’espère qu’en la noblesse native d’un homme capable de se donner à ce qui le dépasse, capable de suspendre les sollicitations de l’immédiat et de l’utile, pour devenir le serviteur de l’invisible et du Transcendant. Mais, par un miracle qui se répète pourtant à travers toute l’histoire, c’est précisément au moment où l’homme entre au service du Transcendant qu’il reçoit l’investiture de sa dignité. C’est en se donnant à ce qui le dépasse et le tire vers le haut que l’homme apprend véritablement à se tenir debout. Depuis maintenant plus de deux siècles, les révolutionnaires de toutes obédiences s’acharnent à vouloir libérer l’être humain des traditions dont ils disent qu’elles l’écrasent ou l’aliènent, afin qu’il puisse redresser sa tête sous un ciel désormais solitaire. Ce faisant, ils ne se rendent pas compte qu’ils le privent précisément de tout ce qui, dans l’ordre religieux ou politique, lui permettrait de ne pas s’affaler, chose parmi les choses, nature parmi d’autres natures. S. Augustin dit, admirablement, qu’il faut tomber vers le haut. Comment tomber vers le haut si aucun poids ne vous attire ? Ce qui fait l’homme se tenir droit, dans l’ordre des réalités morales et spirituelles, ce n’est point quelque rigidité intrinsèque et déterminante de sa nature, sur laquelle il pourrait s’épanouir spontanément pour voir l’homme réaliser sa verticalité. Ce serait oublier que l’ordre spirituel est celui de la volonté libre et qu’une volonté ne se meut que vers une fin qu’elle cherche à atteindre et qui, se situant en dehors et au-dessus de son état naturel, laisse subsister entre elle-même et cet état, cet espace vide que pourra combler notre liberté, en même temps qu’elle offre à l’homme la possibilité de s’élever au-dessus de lui-même. Seule la noblesse oblige. La verticalité spirituelle n’est jamais acquise, l’homme n’en est jamais le possesseur. Elle est toujours un don, une grâce, que la norme, le principe, accorde à celui qui s’en fait le serviteur volontaire...
Il faut donc compléter la thèse bernanosienne et dire que c’est exactement dans la mesure où nous garderons la règle que la règle nous gardera, mais que l’un ne doit pas être confondu avec l’autre : que la règle nous garde est pure grâce, pur miracle, récompense imméritée dont l’opération transformante échappe au regard de notre conscience ; que nous gardions la règle est affaire de notre bon vouloir, de notre détermination à persévérer dans la fidélité à ce qui nous ennoblit...
...Au reste pour celui qui a une fois compris la fonction matricielle et le pouvoir structurant des formes spirituelles, des langues et des rites que la tradition nous a livrées et a confiées à notre générosité, il ne saurait en aller autrement. Il sait bien que ce sont ces formes qui édifient l’humanité et la sauvent perpétuellement d’un aplatissement toujours menaçant, en même temps qu’elles offrent au rayonnement de l’esprit une expression qui ne soit pas trop indigne de sa gloire. Parce qu’elles sont sacrées, c’est-à-dire séparées, parce qu’elles rompent délibérément avec les formes profanes de la vie ». Oui la persévérance et la fidélité, sans le souci d'en obtenir une récompense, sont bien la traduction de l'amour et de la générosité. On retiendra bien, comme le précise Borella, que l'homme qui possède déjà une noblesse native qui, en se donnant à ce qui le dépasse, et en se mettant au service du Transcendant, acquiert, juste à ce moment-là, la dignité de son investiture.
Passons maintenant au mécanisme même du glissement de la résistance de l'Esprit à l'esprit de résistance et aux conséquences qui en découlent. Le lecteur a bien compris que tant que l'homme fait preuve de persévérance et de fidélité sincère dans le temps, la Tradition, ou bien l'Esprit, agit invisiblement d'une manière naturellement surnaturelle et immanente. La cohésion entre le ciel et la terre est bien maintenue et se traduit par une certaine harmonie dont chacun bénéficie dans sa propre existence. Mais vient un moment à partir duquel la fidélité et la persévérance se trouvent amoindries, – nous en examinerons les causes plus tard –, les hommes trahissent de plus en plus leur engagement au service de l'Esprit et, peu à peu, le doute s'installe, l'atmosphère générale s'en ressent progressivement au point qu'un jour, la Tradition se voit pour la première fois attaquée par les forces de la subversion. C'est alors que, conscients du danger, les hommes se mettent en tête de vouloir défendre le principe ou l'idéal dont ils reconnaissent les bienfaits et pour lequel il s'engagent. Mais à ce moment là il est déjà trop tard. Il est déjà trop tard car, dès les premières craintes, dès les premiers préparatifs visant à dresser une barrière de protection, l'exercice du principe immanent qui, jusque là se produisait invisiblement, s'amenuise, car les hommes n'en ont plus la possession tranquille. Pour quelle raison ? Parce que la simple volonté de se préparer au combat et de dresser des barricades, introduit une distance entre le principe et l'individu qui lui, croit bien faire. De fil en aiguille l'homme se sent obligé de renforcer sans cesse les barrières, si bien qu'au bout d'un moment, la résistance de l'Esprit se change en esprit de résistance promouvant ainsi la victoire des forces de révolution. Le Ciel fait chèrement payer la trahison des hommes !
La compréhension de ces notions étant d'une importance capitale pour les futurs développements du sujet, je pense utile de redonner encore une fois la parole à Jean Borella : « Considérons le cas de l’Ancien Régime ou de l’ancienne liturgie. Si pour certains, l’état de choses que les révolutions politiques ou liturgiques ont rendu « ancien » doit être conservé, et donc s’il convient de résister au changement, ce n’est pas à cause d’un pur attachement au passé comme tel, mais c’est pour l’irremplaçable valeur de ce que l’on détruit et sa supériorité sur ce que l’on substitue, ce qui signifie sa force de vie et son efficacité. Autrement dit, l’Ancien Régime, comme la messe tridentine – telle est la conviction des « résistants », – réalisaient mieux que le Nouveau Régime ou le Novus Ordo Missae, ce qui est la fin propre de toute œuvre politique ou liturgique. Et cependant, dès lors qu’il s’agit de résistance, cette valeur d’efficacité immédiatement vécue sous l’ancien régime se transforme en un principe idéal qui continue sans doute de nous éclairer, mais dont nous avons perdu la possession tranquille, condition pourtant nécessaire de sa puissance inspiratrice. Comment échapper au sentiment que tout effort de résistance et de restauration se déforme en reconstitution historique ou tombe dans ce que Pie XII, dans Médiator Dei, appelait l’archéologisme excessif ? »... ... « Telle est la situation générale que les forces de révolution imposent à la résistance. Elle est normalement intenable. Et parce qu’elle est normalement intenable, s’y tenir exige des comportements anormaux. C’est alors que l’on devient royaliste et même ultra-royaliste, ou traditionaliste, et même intégriste. Est-on royaliste sous la royauté ? Est-on traditionnaliste sous le régime de la tradition ? Ainsi s’opère, et souvent à l’insu de ceux qui y succombent, une identification de l’esprit à la résistance. Cette perversion peu évitable se produit très exactement au moment où la confiance dans les forces de résistances l’emporte sur la confiance dans l’esprit qui l’anime. On passe alors de la résistance spirituelle à la résistance-forteresse. Une sorte de tutiorisme pratique s’instaure qui s’en remet toujours au plus sûr, c’est-à-dire à la démultiplication des précautions humaines, du soin de sauvegarder l’essentiel. On renforce la discipline et les sanctions dont elle doit se garantir ; on développe la surveillance et les dénonciations avec une conscience continuellement accrue des manquements et des déviations. L’orthodoxie est définie avec une rectitude de plus en plus formelle et géométrique, de telle sorte que des écarts, jadis infinitésimaux et presque indiscernables, prennent maintenant des allures d’hérésies majeures. Et sans doute un certain goût du « caporalisme », inhérent à l’être humain, y trouve-t-il son compte, mais il faut y voir surtout le désir anxieux d’assurer l’efficacité de la résistance. Or, comme nous l’avons vu en méditant sur la signification étymologique du terme, la résistance a d’abord relation à l’occupation d’un lieu, d’un lieu culturel, évidemment, celui-là même où s’inscrivaient les formes de l’esprit. C’est pourquoi elle procède à la fortification de la place qu’elle entend continuer d’occuper. Elle l’isole du reste du monde, elle en obture toutes les fissures et les issues, rien ne doit pouvoir y pénétrer, rien ne doit pouvoir s’en échapper. Ainsi, pense-t-on, l’esprit sera bien gardé. Le réseau des protections n’est d’ailleurs jamais suffisant, la clôture n’est jamais tout à fait hermétique, d’où la nécessité de son indéfini renforcement. Il est trop évident qu’en cette entreprise la fin est de plus en plus en perdue de vue et remplacée par l’accumulation des moyens qu’on juge indispensables à son obtention. L’esprit se convertit tout entier en résistance, jusqu’au moment où l’on s’aperçoit, trop tard, qu’ont disparu les raisons mêmes au nom desquelles avait été bâtie une si haute et si puissante forteresse ».
Dans un ordre de considérations plus terre-à-terre, il convient d'apporter une précision qui a toute son importance, surtout pour la suite des développements à venir : l'altération graduelle de l'efficacité du principe inspirateur immanent résultant d'infidélités et trahisons qui se multiplient au fil du temps, il convient de bien garder à l'esprit le sens particulier de propagation qui part toujours de ce qu'il est convenu d'appeler l'élite dirigeante, avant d'essaimer petit à petit comme un cancer dans tout le corps social. C'est ainsi que les excès multiples et extravagants des cours de l'ancien régime, assez éloignés du comportement de celles des Rois très catholiques, induirent progressivement des dégradations dans le comportement du peuple, ouvrant ainsi la voie aux forces de la subversion. Nous sommes donc en présence de toute une chaîne d'altérations partant du sommet qui, à terme, finit par corrompre l'ensemble, au point qu'un édifice apparemment si solide, s'effondre au premier coup de pioche. On serait tenté de transposer ce mécanisme à des situations politiques plus récentes, ce qui serait une grossière erreur. En effet, nos régimes contemporains dits démocratiques, socialistes ou républicains, ont radicalement rompu tous liens avec le principe immanent évoqué plus haut, ayant complètement évacué le périmètre de ce qu'il est convenu d'appeler l'action de la Providence, les bienfaits de celle-ci ne pouvant plus être distribués selon un mode collectif, s'appliquent désormais individuellement qu'à ceux qu'elle entend favoriser. Nos formations politiques modernes, s'assimilent donc à de pures chimères dont la raison d'être métaphysique est de maintenir le plus longtemps possible les peuples dans l'illusion de ce monde, ce qui se traduit par une rupture totale de tous liens authentiquement spirituels, par une massification et une densification toujours accrues qui, n'étant stoppées par rien, provoquent, hélas, la mise en œuvre d'une réaction dont on aperçoit déjà les prémisses. Le seul rapprochement qui peut être fait, consiste en l'évolution même des dispositifs de protection que ces mêmes régimes modernes mettent en place afin de juguler toutes formes d'éveil des peuples à une conscience plus haute. Toujours plus actifs et invasifs et se terminant systématiquement en dictature, la détermination brutale de ces régimes à vouloir préserver « l'esprit » des chimères qu'ils représentent, a beaucoup de points communs avec la défense de la forteresse de notre premier cas de figure, mais la ressemblance s'arrête là. Nonobstant ce qui vient d'être dit, - et là je rejoins Philippe Grasset sur sa conviction d'un Christianisme subverti – l'utilisation de la doctrine des évangiles par l'Eglise de Rome, a, depuis presque le début, été gravement faussée pour une raison facile à comprendre : dans son enseignement, le Christianisme véhicule, en fait, deux doctrines complètement différentes, l'une qui s'adresse à la multitude, l'autre à des hommes déjà mûrs spirituellement, aptes à recevoir une nourriture spirituelle plus consistante. Le lecteur aura compris que, s'agissant de l'enseignement destiné à la masse du peuple, celui-ci ne dépasse pas le niveau d'une doctrine exotérique, ouverte à tous ; pour ce qui concerne les parfaits, comme les appelle St Paul, c'est bel et bien un enseignement ésotérique qui leur est destiné. Le prince des apôtres le déclare lui-même sans aucune ambiguïté : « C'est une sagesse que nous prêchons parmi les parfaits, sagesse qui n'est pas de ce siècle, ni des chefs de ce siècle qui vont être anéantis. Nous prêchons la sagesse divine, mystérieuse et cachée, que Dieu avant les siècles avait destinée pour notre gloire, sagesse qu'aucun des chefs de ce siècle n'a connue. » (I Corinthiens, II, 6-8.). Le mélange de ces deux doctrines, non séparées et diffusées simultanément comme un seul et unique enseignement exotérique, a eu pour résultat de nombreuses distorsions et, surtout, des contradictions malheureuses telles que, par exemple, l'opposition entre l'injonction célèbre « aimez-vous les uns les autres ! » et l'autre parole de Jésus Christ : « Si quelqu'un vient à moi et ne hait pas son père et sa mère, sa femme et ses enfants, ses frères et ses sœurs, et même sa propre vie, il ne peut être mon disciple » (Luc, XIV, 26). Il n'est pas difficile de conclure qu'une telle situation est bien à l'origine, sinon en large partie responsable, de la diminution, puis de la disparition de la vivification spirituelle des peuples placés sous l'influence de la Tradition catholique romaine.
Même si la diffusion des enseignements des évangiles s'est faite selon le même mode que celui adopté par l'Eglise catholique, l'Eglise orthodoxe, grâce à son intransigeance dogmatique alliée à une spiritualité bien vivante et à une réelle préservation des enseignements les plus secrets du Christianisme des origines, ne se trouve nullement dans la même situation. Il est convenu de reconnaître que le Christianisme de l'Orthodoxie orientale se révèle bel et bien être le véritable centre de gravité de la Chrétienté mondiale dans ce qu'on désigne, en Tradition, par l'aire hellénistique (Russie, Grèce, Balkans, Proche et Moyen-Orient). Sous ce rapport, et compte tenu des tensions géopolitiques actuelles et des pressions subies par la Fédération de Russie, même le lecteur peu convaincu de l'importance de la question religieuse en matière de politique internationale, devrait commencer à se poser des questions. Il va sans dire que, dans les mois et les années qui viennent, la fraîcheur de la spiritualité chrétienne orthodoxe, jouera de plus en plus un rôle d'aimant, qu'elle joue d'ailleurs déjà, attirant à elle une spiritualité chrétienne occidentale bien malade, entraînant du même coup des bouleversements métapolitiques majeurs dont il convient d'ores et déjà d'évaluer les conséquences, ainsi que, si nécessaire, les ripostes. Non, le mythe de la Troisième Rome n'est pas mort ! S'il m'est permis, je dresserai dans de prochains articles un état des lieux élaboré sous l'angle strictement religieux et métapolitique. Il était essentiel, pour aujourd'hui, de bien définir le socle intellectuel sur lequel devront s'appuyer les développements qui suivront. J'espère y avoir réussi.
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