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3080• Biden nous refait-il, avec le même partenaire (Zelenski), le même coup de la conversation téléphonique que le coup de fil Trump-Zelenski de 2019, conduisant à une mise en accusation du président d’alors ? • CNN a dû faire feu de tout bois pour rentrer dans le rang, après avoir par inadvertance fait ce qui semble bien être du bon journalisme en diffusant des fuites sur le contenu de cette conversation Biden-Zelenski. • Comme d’habitude, on y entend Biden fulminer et annoncer le déluge de l’“invasion” russe. • Biden plus que jamais incontrôlable.
La querelle est instructive et significative : elle implique en les opposant dans un étonnant ballet-croisé trois compères que tout devrait rapprocher et souder dans un commun simulacre. Pourtant, non, ils se déchirent plutôt, tout en faisant mine de se corriger, de se nuancer, parfois même de se démentir eux-mêmes, tout cela entre noms d’oiseau et soupçons appuyés.
Les trois acteurs de la pièce, qui a un côté boulevard avec son trio habituel, dans le désordre et sans préférence ni priorité, disons par ordre alphabétique :
• Biden Joe, président des Etats-Unis, avec ses diverses casseroles, toussotements, chuchotements & insultes (la dernière en date, pour Peter Doocey de FoxNews et ci-devant proclamé :« Stupide fils de pute ») ;
• CNN, réseau de la communicationSystème, pas loin d’être le plus “à gauche” dans une dynamique où la concurrence est chaude
• Volodymyr Zelenski, président de l’Ukraine, dont on écrivait hier sur un site effectivement respectable, et dans le sens qu’on va explorer aujourd’hui, dans un incident qui prend de l’ampleur, qui est notre sujet du jour :
« Un autre aspect révélateur du désordre autour du bloc-BAO est une transformation ponctuelle, qu’on a déjà vue, et qui est toujours aussi jouissive, de la “marionnette” en critique agressif de ses soutiens corrompus et corrupteurs ; et ceux-ci se trouvant alors en position défensive, sinon en complet contrepied, plongés dans de grands troubles moraux, par exemple lorsque les Ukrainiens [Zelenski] demandent aux dirigeants occidentaux et à la presseSystème qui va avec de réduire leur rhétorique de dénonciation d’une “invasion russe” qu’eux-mêmes [les dirigeants ukrainiens] ne voient pas/plus venir. »
Il s’agit d’une communication téléphonique entre Biden et Zelenski, qui a eu lieu hier. Il s’est interposé une coupable interférence qui a dévoilé les termes de cette communication, – du moins selon des journalistes de CNN, très vite trahis par CNN (les choses se corsent). Onignore si cette affaire ira loin mais elle a tous les ingrédients pour faire un pataquès séduisant. Pour certains qui sont de plus en plus nombreux, la chose rappelle évidemment le précédent Trump-Zelenski (justement ! A propos des affaires troubles du fiston Biden, toujours les mêmes personnages tourbillonnent). Ce fut également une communication téléphonique, laquelle avait conduit à la première mise en accusation avortée de Trump.
Cela s’est passé comme ça, à l’origine : Alexander Marquardt, de CNN, avait lancé la chose par un tweet, hier :
« Une invasion russe est maintenant pratiquement certaine une fois que le sol sera gelé, a dit Biden à Zelenski, a déclaré un haut responsable ukrainien à [Mattew Chance, de CNN également]. Kiev pourrait être “mis à sac”, les forces russes pourraient tenter de l'occuper, “préparez-vous au choc de l’attaque”, a dit Biden, selon ce responsable. »
Ensuite, le coupable direct, monsieur Chance de CNN, a directement confirmé ses informations, en insistant sur les mots “brutaux” employés par le président des États-Unis :
« Dans l’émission de Jack Tapper ‘The Lead’, sur CNN, Chance a cité en direct “l’officiel ukrainien”.
» “La capitale, Kiev, cette ville ici, pourrait être ‘mise à sac’. C'est le mot [‘sacked’] qu’il [Biden] a apparemment utilisé, selon ce responsable ukrainien. [Elle pourrait être] mise à sac par les forces russes", a déclaré Chance à Tapper.
» Chance a poursuivi en citant ce qu’il a appelé un “passage très percutante” de la communication Biden-Zelenski, tel qu’il lui a été rapporté par le fonctionnaire ukrainien anonyme. “Le président Biden a dit à son homologue ukrainien que l'Ukraine devait se préparer au choc de l’attaque. C’est un avertissement assez sévère de la part du dirigeant américain”. »
Entretemps, avec une rapidité significative, Emily Horne, porte-parole du NSC (National Security Council), le “gouvernement personnel” du président pour les affaires de sécurité nationale, a tweeté furieusement, aussitôt suivie par une déclaration à Kiev du porte-parole de Zelenski dans le même sens :
« Le président Biden a déclaré qu'il y a une possibilité distincte que les Russes envahissent l'Ukraine en février. Il l'a déjà dit publiquement et nous avons lancé des avertissements à ce sujet depuis des mois. Les rapports sur quoi que ce soit de plus ou de différent sont complètement faux. »
En même temps que les informations de CNN aussitôt démenties par le NSC se répandaient dans la presse, essentiellement londonienne (‘The Independent’, ‘The Daily Express’, ‘The Daily Mail’), CNN intervenait à nouveau et faisait disparaître la séquence Chance/Tapper du compte tweeter de l’émission ‘The Lead’. Le présentateur de CNN Jim Sciutto citait fort respectueusement Emily Horne en affirmant que « des sources anonymes font circuler de fausses informations » concernant la conversation téléphonique Biden-Zelenski. Cela conduisit le journaliste Jack Posobiec à tweeter joliment :
« CNN accuse maintenant CNN de diffuser de la propagande de guerre sur CNN.
» Voilà où nous en sommes arrivé dans cette affaires de fuite autour de la conversation téléphonique Biden-Zelenski. »
Voilà pour l’objet du délit, et l’on sait bien qui est qui et où tout cela va nous mener en matière d’un peu plus de désordre. Ce qui est aussitôt plus intéressant, c’est ce qu’a déclenché cette affaire, à l’évocation du souvenir de la conversation Trump-Zelenski et des suites pour le président US (dénonciations, accusation, destitution évitée de justesse dans l’épisode août-décembre 2019). Par conséquent aussitôt se précipita une cascade de pressions venues du parti républicain, de ses experts, de ses relais médiatiques. On note par exemple qu’on se partage avec délice la vidéo de septembre 2019 montrant Joe Biden, alors vice-président à la retraite et candidat putatif aux primaires démocrates, réclamer avec la fureur de l’héroïque bonne foi que l’on rende publiques les transcriptions écrites de la conversation Trump-Zelenski.
« Les opposants politiques du président américain en exercice exigent que la Maison Blanche publie une transcription complète de son appel avec le président ukrainien Volodymir Zelenski, qui ne se serait pas déroulé aussi bien que les deux nations l’ont déclaré. Il est temps pour Joe Biden d'affronter ce que Donald Trump affrontera en septembre 2019, estiment les experts conservateurs.
» Le nouvel hashtag ‘#ReleaseTheTranscript’ a aussitôt fait l'objet d’une considérable souscription sur Twitter aux États-Unis, les opposants au président Biden réagissant à la controverse entourant sa conversation de jeudi avec Zelenski... »
On se trouve ainsi dans une situation similaire à l’affaire Trump-Zelenski, mais avec une différence de taille : alors qu’on pouvait trouver cohérente la mise en cause de Trump en raison des rapports tendus du président d’alors avec Zelenski, il s’agit ici au contraire de deux complices en théorie qui produisent une possibilité sérieuse d’une embrouille mettant en cause le président US et ami de Zelenski. La cause de cette situation paradoxale se trouve évidemment dans le comportement insaisissable et imprévisible du président Biden.
On peut en effet travailler sur l’hypothèse d’un comportement excessif de Biden, parce qu’il n’y que cela chez lui. Il y a déjà eu des accrochages entre Biden et Zelenski du fait de changements brutaux de position de Biden, comme lorsqu’il affirmait dans cette conférence de presse du 19 janvier, que « “quelques incursions” russes en Ukraine, côté Donbass, ne seraient pas considérées comme une “invasion”... » Depuis, il a rétropédalé et, alors que la tension de communication concernant l’“invasion” russe à venir tombait fortement, et d’ailleurs à l’insistance des Ukrainiens qui veulent calmer le jeu, Biden a brutalement dramatisé la situation. Il semble assez concevable qu’il ait effectivement dit ce que les fuites affirment qu’il a dit, parce qu’il s’agit d’un président qui ne semble plus avoir de retenue et qui pose des affirmations sans réplique selon ce qui convient à son humeur, souvent mauvaise. Justement, Biden est de mauvaise humeur depuis l’épisode du 19 janvier qui a fait des remous qu’il juge injustifiés, et il dit ce qui convient à son, humeur.
On voit ainsi qu’il y a deux progressions dynamiques de la crise du côté américaniste. Il y a la voie plus ou moins rationalisée et maîtrisée, qui est effectivement, actuellement, de calmer un peu le jeu pendant que se poursuit la partie des courriers questions-réponses avec les Russes ; et puis il y a la voie plus exubérante de Joe Biden, qui se fiche de la rationalité et qui répond à son humeur bien plus qu’à une recherche de la maîtrise de la situation. Autour de cette schizophrénie officielle, on trouve tous les centres de pression, les lobbies, les bellicistes, etc., qui surenchérissent sur tel ou tel incident, telle ou telle incartade de Biden, et compromettent l’entièreté du processus rationnel.
Il est pour cette raison impossible d’évaluer d’une façon rationnelle (suite) l’évolution de la situation et ses perspectives, puisqu’un facteur central s’accorde à un comportement irrationnel dû à un état sans doute pathologique. Le pouvoir américaniste est aujourd’hui dans un état structurellement crisique, comme on le sait, aggravé par des écarts accidentellement crisique affectant l’échelon suprême de ce pouvoir. Bref, ‘business as usual’.
A cet état d’incertitude persistant, et en suivant la situation à “D.C.-l’hyperfolle” où l’incident Biden-Zelenski entre dans sa phase d’exploitation (parmi les républicains) qui pourrait apporter un élément structurel de désordre de plus, vient une nouvelle dite selon le Wall Street ‘Journal’ qui pourrait s’avérer intéressante. Il s’agit d’une proposition faite par la Pologne à la Russie, d’une inspection réciproque des bases de missiles (en Pologne et dans l’enclave russe de Kaliningrad).
Le facteur original, dont il reste à voir ce qu’il signifie exactement, est que les Polonais proposent de leur côté aux Russes un accès d’inspection à la base US de missiles (‘Patriot’ sol-air, mais aussi, selon les Russes, possibilité de ‘Tomahawk’ sol-sol) installée sur leur territoire. Tout est étonnant dans cette proposition :
• qu’elle vienne des Polonais (et non des militaires US) pour une base US de grande importance, du type dont les USA n’ont pas l’habitude d’en confier la responsabilité, même temporaire et même théorique ou symbolique, à un autre, surtout pour faire faire une visite à des Russes ;
• qu’elle vienne des Polonais par rapport aux Russes qu’ils ont tenus jusqu’ici dans une considérable détestation malgré les contradictions de ce sentiment d’un point de vue ‘civilisationnel’.
Selon ce qu’il adviendra de la nouvelle, on pourra en proposer une évaluation plus précise et éventuellement plus intéressante. Pour l’instant, voici ce qu’on en dit :
« Alors que Moscou cherche à conclure un accord avec l'OTAN sur les garanties de sécurité en Europe, la Pologne, membre du bloc, s'est déclarée prête à autoriser des inspecteurs russes à entrer sur son territoire pour vérifier les installations de défense aérienne américaines, a-t-on appris mercredi.
» Selon le ‘Wall Street Journal’, qui cite des responsables polonais anonymes, Varsovie serait prêt à conclure un accord réciproque avec Moscou. En contrepartie, la Pologne souhaite que ses inspecteurs soient autorisés à vérifier les sites de missiles à Kaliningrad.
» L’idée de laisser les Russes accéder aux sites américains en Pologne a été initialement proposée par Moscou, selon des responsables américains. Le Kremlin s’est opposé à plusieurs reprises au placement de missiles étrangers sur le territoire européen et a suggéré que les installations de défense aérienne pourraient être utilisées pour tirer des balistiques sur le territoire russe.
» “Des responsables polonais ont déclaré que le gouvernement était ouvert aux inspections de défense antimissile à condition que la Russie permette l'inspection des activités de missiles russes à Kaliningrad, une enclave russe fortement militarisée située sur la mer Baltique et bordant la Pologne et la Lituanie”, indique le rapport du Wall Street Journal. »
Mis en ligne le 28 janvier 2022 à 18H00