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8 septembre 2005 — La campagne pour les élections législatives allemandes est entrée dans sa phase ultime après le débat télévisé entre Gerhardt Schröder et Angela Merkel. En même temps se sont dissipées certaines possibilités, que nous avions nous-mêmes exposées, que ce débat atteigne un niveau intéressant en débouchant sur les grandes questions de politique étrangère. (Par exemple, la situation aux USA après Katrina, qui représente la faillite éclatante d’un système auquel se réfèrent tous les dirigeants occidentaux, y compris les deux principaux candidats de ces élections. Du point de vue que nous proposons, il est extraordinaire que cette situation n’ait pas été évoquée jusqu’ici de façon décisive dans le débat allemand.) Au contraire, le débat électoral s’est de plus en plus cantonné aux questions intérieures polémiques, touchant notamment la fiscalité, c’est-à-dire les questions qui concernent l’apparence de la situation allemande, — ou, pour certains, de la “crise” allemande.
Pour autant, la situation pré-électorale reste un peu plus ouverte qu’elle n’était au début de la campagne (lorsque Schröder était donné archi-battu) mais cette ouverture n’entretient plus aucune des promesses quelconques d’ouverture politique intéressante. Il s’agit d’un débat politicien, retombé au niveau habituel des campagnes électorales démocratiques en Europe. Le duel télévisé des deux dirigeants a tourné à l’avantage de Schröder, mais surtout il a confirmé que le débat était sur le pur terrain intérieur polémique, loin des sujets essentiels de notre temps historique.
The Independent du 6 septembre note ceci, qui fait l’affaire pour présenter la chose (le débat et, partant, la campagne) dont on se demande si elle mérite le qualificatif d’“événement” :
« Mr Schröder emerged the clear winner in the debate, though he lags in the polls The last days before Germany's general election are set to be dominated by the conservative leader Angela Merkel's plans for a radical tax overhaul that emerged as a key theme in her television debate with Chancellor Gerhard Schröder.
» The 90-minute duel between the two main contenders in the 18 September poll was watched by a record 21 million voters on Sunday night and had been billed as Mr Schröder's last chance to swing the contest in his favour.
» A survey of viewers showed Mr Schröder had emerged the clear winner in the debate, although his apparent victory was not enough to dent Ms Merkel's lead in opinion polls which yesterday suggested that she remained on course to become Germany's first female chancellor. »
Ces événements nous conduisent à un constat bien pessimiste. Nous l’énoncerons en quelques points rapidement mentionnés.
• Le rôle et le poids diplomatique de l’Allemagne ne sont pas prêts de changer. Droite ou gauche, les questions extérieures qui fondent les grandes politiques continuent à être laissées de côté. (Pour l’Allemagne qui n’a plus de politique extérieure “naturelle” [au contraire de la France et du Royaume-Uni] depuis 1945, un débat électoral serait une possibilité de tenter d’en acquérir une. Finalement, il n’y a eu aucune tentative sérieuse dans ce sens, malgré la réunification dont on attendait une maturité à cet égard.)
• La campagne de 2002 (où Schröder porta la question irakienne au premier plan) fut bien un “accident” électoral dû à la conjoncture et à la tentative in extremis (et réussie) de Schröder de se redresser. Même s’il a montré des velléités de suivre une grande diplomatie, Schröder reste d’abord un politicien acquis au système. Il serait utile aux Français qu’il soit réélu mais il serait moins dramatique qu’on ne croit qu’il soit battu.
• On doute fortement que l’élection de Merkel (qui reste l’hypothèse très majoritairement envisagée après une poussée de l’hypothèse-Schröder), malgré les annonces bruyantes, change fondamentalement une politique extérieure allemande qui n’existe guère. Le réalignement sur Washington, — qui a d’autres chats à fouetter, — sera de pure rhétorique. Le reste continuera à être guidé par l’économie d’une part, par la position européenne centrale (et la proximité avec la France) d’autre part.
• Une issue intéressante (et très possible) de cette élection serait un résultat forçant à une grande coalition (les conservateurs vainqueurs, mais les libéraux et les Verts en recul, forçant à une alliance des vainqueurs avec le SPD). Au moins, on verrait une cacophonie réjouissante, qui forcerait peut-être les dirigeants allemands à quelques prises de position intéressantes.