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4266• Le cas remarquable du Premier ministre polonais et de son père défunt. • Dialogue d’au-delà de la mort sur les rapports de la Pologne et de la Russie à l'occasion d’Ukrisis. • Contributions : dde.org et Michael Krupa.
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Un article de Michael Krupa évoque opportunément la situation de la Pologne dans l’affaire Ukrisis dans un dialogue d’au-delà de la mort entre le Premier ministre Mateusz Morawiecki et son père Kornel Morawiecki, mort en 2019 à 78 ans d’un cancer de la rate. La position de Mateusz est connu, se trouvant toute entière démontrée dans la politique de la Pologne dans Ukrisis : un soutien forcené à l’Ukraine, assorti évidemment d’un alignement à 100% sur les consignes de Washington suivies avec le zèle et la volupté de l’asservissement par l’UE, et une hostilité viscérale de la Russie. Karel, son père, héros de la résistance anticommuniste, s’est fait remarquer sur la fin de sa carrière politique comme député, comme un défenseur acharné du rétablissement de bonnes relations avec la Russie pour prendre des distances de sureté des USA, et ainsi assurer indépendance et souveraineté à la Pologne.
Krupa a été rechercher diverses interventions, interviews, etc., de Kornel Morawiecki où le père de l’actuel Premier ministre polonais développe cette position dite-“réaliste”. Nous préciserions, quant à nous, qu’en plus d’être “réaliste” la position de Kornel Morawiecki était (et reste pour ceux qui la suivent) à la fois patriote et souveraine, et correspond absolument à l’orientation culturelle-religieuse (sociétale) traditionnelle de la Pologne actuelle. Or, dans cet affrontement culturel-religieux (sociétal) nécessairement transnational puisqu’il constitue un des outils dialectiques principaux de la lutte de la dissidence antiSystème contre le Système, la Russie traditionnaliste de Poutine est aussi proche de la Pologne que la direction et les élites ukrainiennes gangrénées par la peste américaniste en sont éloignées. La passion antirusse saupoudrée d’ambitions déraisonnables et inutiles d’annexion de telle ou telle partie de l’Ukraine constituent des impasses qui jettent la Pologne dans les bras de la direction politico-sociétale actuelle des USA, totalement corrompue par un nihilisme déconstructionniste marqué aussi bien par l’extension démente du wokenisme (que pensent la direction polonaise des LGTBQ+ dont le sénile Biden et l’hyper-corrompu parti démocrate sont les chantres ?) et du capitalisme progressiste et globaliste qu’on retrouve aussi bien chez Lockheed Martin que chez les GAFAM (peut-être avec le néo-Twitter de Musk en moins ?).
La seule politique raisonnable actuelle de la Pologne de Mateusz Morawiecki serait de profiter de sa situation de “front” indispensable de l’UE en Ukraine qui lui donne une position de force contre l’UE, pour chercher à modérer en sous-main la vigueur du conflit et l’hostilité à la Russie, tout en renforçant décisivement la position de sa souveraineté nationale contre l’UE et ses attaques contre les positions culturelles traditionnalistes. Manifestement, Mateusz Morawiecki n’a pas l’ampleur intuitive de la position intellectuelle de son père Kornel.
Quoi qu’il en soit, ce texte de Krupa, dans ‘ConsortiumNews’ du 28 avril 2022, a l’immense vertu d’illustrer le paradoxe et la contradiction polonaises, qu’on retrouve dans les milieux souverainistes et nationaux de nombreux autres pays, où la tendance antiSystème naturelle se trouve emportée du côté du Système par le simple enchaînement des passions inutiles, des jugements affectivistes (même chez ceux qui prétendent lutter contre les politiques affectivistes du type ‘droitdel’hommistes’, ou wokeniste). La leçon n’est pas inutile, tout comme la démonstration de l’existence et l’identification d’un tel courant.
(Michal Krupa est un historien et commentateur basé en Pologne. Il a publié dans de nombreux médias polonais et américains, dont ‘The American Conservative’ et ‘Chronicles’. Son pseudo Twitter est : @MGKrupa.)
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Cela fait plus de deux mois que la Russie a envahi l'Ukraine. La Pologne a été au premier rang des pays appelant à des sanctions plus étendues contre Moscou, armant l'Ukraine et accueillant de plus en plus de réfugiés ukrainiens.
Le Premier ministre Mateusz Morawiecki a mené la charge en Europe contre tout relâchement de la politique de sanctions antirusse de l'UE, accompagné de stratagèmes rhétoriques tels que la comparaison du président russe Vladimir Poutine non seulement à Hitler, mais aussi à Joseph Staline et à Pol Pot.
Dans une bataille de mots avec Emmanuel Macron, Morawiecki a critiqué le président français pour avoir maintenu ouvertes les lignes de communication avec le Kremlin. « Il ne faut pas négocier avec les criminels, il faut les combattre », a déclaré Morawiecki.
Début mars, Morawiecki a révélé son “plan en 10 points pour sauver l'Ukraine”, qui équivaut à peu près à un isolement total de la Russie et à une pression sur la population russe pour qu'elle agisse contre Poutine.
Morawiecki semble avoir clairement fixé son objectif de se débarrasser du dirigeant russe via un mélange de sanctions sévères, d'augmenter les pertes des Russes en Ukraine et de faire clairement comprendre que, du moins en ce qui concerne la politique polonaise, un changement de régime à Moscou est la fin désirée, en tout sauf le nom. Au diable les autres considérations. On pourrait avoir l'impression que Morawiecki agit comme si c'était la Pologne qui était militairement attaquée.
Cela pourrait toutefois en surprendre plus d'un que cet empressement à être à l'avant-garde de la guerre par procuration de l'Occident contre la Russie en Ukraine ne soit pas, pour ainsi dire, de famille. Le père du Premier ministre polonais, Kornel Morawiecki, qui a succombé en 2019 à un cancer du pancréas à 78 ans, qui était une légende parmi les opposants anticommunistes de la vieille école, en est le meilleur exemple possible.
Bien qu'il ait été le fondateur de l'un des groupes d'opposition clandestins les plus radicalement anticommunistes de Pologne dans les années 1980, ‘Solidarité combattante’, Kornel Morawiecki a fait preuve à la fin de sa carrière politique, – au cours de laquelle il était député et membre d’honneur du Sejm polonais, – d’une attitude tout à fait différente vis-à-vis de la position géopolitique de la Pologne et, par extension, de la Russie.
Si l'on devait établir un clivage idéologique simpliste entre le père et le fils, on peut dire que le père était définitivement le réaliste, tandis que le fils était et reste l’idéologue belliciste.
Dans une interview en 2018, Kornel Morawiecki a déclaré qu'il était préoccupé par le manque de relations normales entre les autorités polonaises et le président russe. Se référant à son fils, Morawiecki a déclaré :
« Ce serait bien pour la Pologne, pour nos intérêts, si nos autorités, Monsieur le Premier ministre, invitaient Vladimir Poutine dans notre pays. Cela signifierait un progrès dans les relations entre les deux pays. »
Il a ensuite posé une question que beaucoup d'entre nous, qui ne veulent pas voir la Pologne entraînée dans une guerre, se posent aujourd'hui :
« Pourquoi le président des États-Unis et la chancelière allemande entretiennent-ils des relations directes avec Poutine, alors que le président polonais, le Premier ministre polonais, évite ces relations avec Poutine ou n'essaie pas de les établir ? Je ne vois aucun geste des autorités polonaises. Cela me met très mal à l'aise. »
Nul doute que Morawiecki-père serait affreusement mal à l'aise aujourd'hui, considérant que depuis son élection en 2015 le président polonais Andrzej Duda n'a eu aucun contact direct avec Vladimir Poutine à titre officiel.
Lorsqu'en 2019, Duda a proposé au président américain de l'époque, Donald Trump, la construction d'une base militaire américaine permanente en Pologne, qui, pour des besoins évidents de relations publiques à ce moment-là, a été qualifiée par le chef de l'État polonais de "Fort Trump", Morawiecki-père a observé qu'il ne voyait pas la nécessité de construire des bases de l'OTAN en Pologne, car « c'est comme nous préparer à la guerre ».
Morawiecki-père a poursuivi avec ce commentaire :
« Nous devons essayer d'améliorer nos relations avec la Russie, nous devons essayer d'imprégner tout le système de la politique orientale d'un contenu positif, nous ne devons pas chercher ici une querelle. Il n'est pas dans notre intérêt d'aller dans une direction qui exacerbera la situation polono-russe. Ce n'est pas dans l'intérêt de la Russie, ni dans notre intérêt. »
Des mots forts d'une icône de la résistance polonaise à la domination soviétique.
Mais ce n'étaient que les salves d'ouverture. Dans cette même interview, Morawiecki-père a accusé le gouvernement que son fils présidait, ainsi que les médias et les élites, de « dresser les Polonais contre les Russes ».
Il croyait clairement qu'il était dans l'intérêt vital de la Pologne de rechercher un rapprochement avec Moscou. Parlant de l'attitude de son fils et du chef du parti au pouvoir Droit et Justice (PiS), Jaroslaw Kaczynski, envers la Russie, Kornel Morawiecki a déclaré catégoriquement que « Mateusz a tort et Jarek a tort ».
Bien sûr, de tels propos n'ont pas pu échapper aux critiques du courant dominant polonais, à la fois libéral et conservateur, qui considérait la position de Kornel Morawiecki, selon les mots d'un commentateur, comme une forme du « plus bizarre des fantasmes ».
Il a répondu en précisant qu'il n'était guidé que par ce qu'il pensait être dans le meilleur intérêt de la Pologne, et être désigné comme un pion de Moscou dans les machinations géopolitiques de Washington l’a fortement indisposé :
« On dit aussi de moi que je suis un agent d'influence russe. Le fait que quelqu'un remette en question la sagesse de la présence militaire américaine en Pologne ne signifie pas qu'il est un agent de l’étranger. »
Pour beaucoup, malheureusement, le sentiment que seules les troupes polonaises devraient être stationnées sur le sol polonais était une affirmation inacceptable, pour des raisons allant du psychologique à la pure idéologie.
Dans l'une de ses dernières interviews en 2019, Morawiecki-père affirma :
« Je veux que nous soyons indépendants. Nous nous sommes battus pour l'indépendance, pour une République solidaire et nous voulons une telle Pologne. Nous devons avoir de bonnes relations diplomatiques, économiques et culturelles avec les Russes. C'est une nation proche de nous. Notre sort polonais et le sort de l'Europe en dépendent. »
La guerre change les perspectives, évidemment. On ne peut pas dire avec certitude que s'il était en vie aujourd'hui, Kornel Morawiecki serait aussi fortement que son fils contre l'invasion russe de l'Ukraine.
Néanmoins, à moins d'une confrontation nucléaire entre les superpuissances, la Russie restera le plus grand voisin de la Pologne et les perspectives de renversement de Vladimir Poutine à tout moment semblent au mieux ténues. Quelles qu'aient pu être ses réflexions sur la guerre, et contrairement à son fils qui évite toute idée de désescalade, Kornel Morawiecki adopterait très certainement le conseil de feu le président américain John F. Kennedy : « Ne négocions jamais sous l’empire de la peur. Mais n’ayons jamais peur de négocier. »
Le philosophe politique polonais Bronislaw Lagowski a un jour noté que lorsque Napoléon Bonaparte s'est rendu en Pologne, Talleyrand lui a conseillé ce qu'il fallait dire à Varsovie pour plaire aux Polonais : « Parlez le plus mal possible de la Russie et louez l’héroïsme polonais. »
Cela semble être le modus operandi de l'Occident, – des États-Unis en particulier, – lorsqu'il s'agit de soutenir politiquement Varsovie pour son utilité dans n'importe quel type de guerre, froide ou par procuration, dans laquelle l'Occident et la Russie se trouvent engagés.
Kornel Morawiecki, l'une des rares voix publiques dissidentes sur cette question cruciale et en fait existentielle pour la Pologne, le savait bien. Quelles qu’auraient pu être ses réflexions sur la guerre actuelle, il résumait succinctement le sentiment actuel de nombreux Polonais :
« Notre politique étrangère en est malheureusement réduite à jouer le rôle de la marionnette de Washington. »
Malheureusement, dans ce cas on ne reconnaît pas le fruit de l’arbre.