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1417L’intéressante réflexion de Philippe Grasset sur “faire sortir le système de soi” m’a inspiré celles ci.
Sortir le système de son esprit ?
C’est effectivement une bonne question mais…comment ?
Un système étant l’“ensemble des règles, conscientes et inconscientes, qui régissent les individus d’un groupe donné, ….”, sortir du système implique donc effectivement de sortir les règles du système de notre esprit.
Mais ces règles, puisqu’elles sont devenu un système, sont s’intégrées profondément dans les esprits jusqu’à en devenir partie de la personnalité de l’individu. Il est donc extrêmement difficile de sortir consciemment “le système de sa tête”, ou si l’on dit l’avoir sorti de sa tète c’est souvent pour ne pas voir ses pieds qui y sont englués. Mais c’est possible, par l’influence extérieure comme par la volonté intérieure, de modifier une règle système qui habite notre esprit. Par contre le psychisme individuel, système lui aussi, ne survit pas sans règles, personnelles comme sociales; on ne peut sortir un système de sa tète sans en réinstaller un autre à la place. C’est une technique que maitrise tout bon guru de secte.
Bref une vie hors système n’est pas vie humaine, réservons la aux vrais maitres. Maintenant, pour les règles du système occidental, comme nous en parlons sur dedefensa, qu’en est-il ?
Quelles seraient les pensées racines du système occidental à sortir de son esprit?
La modernité, l’idée que “le progrès technologique, dans le cadre d’une société régie par des lois démocratiques, elles aussi modernisables, est la clef de la réussite d’une société” en est selon moi le fondement majeur et le terme anthropotechnique le définit très bien.
Ce paradigme peut il “sortir de nos esprits” ?
Dans un précédent texte je présentais la notion de validité comme : “La validité d’un concept est liée à son adéquation à la réalité matérielle ou psychique à laquelle se réfère le concept”.
Pour sortir d’un esprit il faut que la validité d’une pensée s’affaiblisse ou disparaisse. Qu’en est-il du paradigme de la modernité ? Jusqu’a maintenant sa validité est encore très puissante. Demandez à ceux qui n’ont pas encore accès à la télévision (dans les pays dits pauvres il en reste encore beaucoup) s’ils seraient plus heureux avec une télé chez eux et les résultats risque de frôler les 90% de oui. Donc dans l’inconscient collectif, non seulement occidental mais carrément mondial, la modernité apporte bonheur et réussite. C’est donc un paradigme totalement valide dans la réalité psychique du moment et c’est ce qui fait sa puissance. De plus si la modernité commence à être remise en question par quelques tenants de la décroissance ceux-ci sont encore trop minoritaires pour créer un système concurrent qui puisse démontrer sa validité.
Qu’exprimait le porteur du slogan “Fuck the system” si ce n’est “the system fucked me then I fuck it”.
Les indignés, produits du système, éduqués dans ses pensées racines, sont déçus non pas de la modernité, ni de la puissance du système mais du fait que celui-ci ne tienne pas ses promesses : Bon travail, cuisine équipée, frigo rempli, carte de crédit…..Et sa perte de validité vient surtout de là. On a promis le père noël aux enfants du système, on leur a montré une soi disant réalité sociale, et non seulement il n’y a pas de père noël mais en plus même pas de cadeaux et pire encore une dette sur des cadeaux non reçus. Le système n’est plus valide car ce qu’il produit est différent de la “réalité” qu’on leur a inculqué. Ils ne veulent donc effectivement pas “tuer le système” car comment un système mort pourrait il tenir ses promesses, ils veulent juste un système qui prenne en compte leur réalité psychique.
Car la relation modernité/bonheur pourrait rester un principe valide, et donc non contesté, si les progrès technologiques n’étaient pas accaparés par une poignée d’individus au dépens des autres qui voit se transformer le progrès non pas en bonheur libérateur mais en chaines qui font d’eux des “esclaves du système”. Le problème, selon moi, n’est donc pas dans un manque de validité intrinsèque au système occidental mais plutôt dans l’inversion maligne qui s’opère sur ses paradigmes par l’action des “accapareurs de la modernité”. Les indignés rejettent plus les 1% accapareurs, que le système lui même. Car la modernité n’apporte ni bonheur, ni malheur, c’est un fait, un courant métahistorique neutre. C’est la manière qu’a l’être humain de s’en servir qui est source de bonheur ou malheur. Et là c’est effectivement le “moment psychologique” collectif pour cette prise de conscience de la part du peuple occidental, le message principal que ces indignés peuvent faire pénétrer dans l’esprit collectif : Un système digne de ce nom se doit de faire le bonheur de 100% et non de 1% seulement.
Le système anthropotechnique en est il capable ? Cela reste à démontrer par les futures générations Mais, en théorie du moins, c’est possible.
Alors quelles pensées systèmes sortir de nos esprits ?
Le vrai problème serais alors plutôt à chercher dans une autre idée racine systémique, d’origine lointaine puisqu’elle nous habite depuis nos origines animales, et donc d’autant plus difficile à sortir de son esprit : “Si tu n’es pas un dominant alors tu seras un dominé”. C’est une pensée racine très présente dans les esprits du monde occidental en particulier dans ce groupe de 1 %. Une autre aussi est : “Ce que tu as acquis à la sueur de ton front est à toi et ta famille, et tu dois te protéger des voleurs”, l’instinct de posséder des richesses mais aussi des gens pour se protéger. La simple idée de posséder sa femme (ou son mari) est une pensée racine internationale, qui ne choque encore que très peu de gens. On pourrait en trouver encore quelques autres…
Les pensées racines pouvant remplacer celle-ci, quant elles arriveront à se dissoudre dans l’inconscient collectif humain, sont déjà reconnues et seraient celles de la collaboration et du partage. Quand ces deux idées racines auront remplacées pouvoir et possession dans l’esprit collectif humain alors faire le bonheur de 100% (disons 95%) de ses constituants devrait être a la portée de tout système un peu sophistiqué.
Car une des grandes leçons de notre premier apprentissage collectif de la technologie est que mettre un fusil dans les mains d’un gamin de 5 ans mène au drame. Si la société veut que le progrès technologique lui apporte le bonheur il va falloir qu’elle fasse de gros progrès au niveau de sa maturité psychologique collective. Qu’elle passe de l’inconscience collective actuelle à un certain niveau de conscience. C’est ma vision du courant métahistorique qui brasse les systèmes sociaux.
En attendant cette époque, on n’évitera effectivement pas l’étape d’un effondrement du monde occidental actuel qui, par simple nécessité de rééquilibrage géopolitique et aveuglement de ses dirigeants, se verra affaibli et obligé à partager les richesses terrestres et le savoir faire technologique plutôt que de le faire de bonne volonté.
J’ai trouvé mon slogan pour la prochaine occupation : “Fuck the 1% that are fucking our system”.
Laurent Julliard
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