Dieu a voté, et bien voté

Le 03 novembre 2004 —

Ces élections se sont passées étrangement. D’abord, ici en Europe, on y a cru. Cela a duré la journée du 2 novembre. Le soir, pour tous les Européens, et pour un certain nombre d’Américains, Kerry semblait soulevé par une dynamique de la victoire. La participation était plus forte et cela, nécessairement, devait renforcer le camp anti-Bush. Pour certains, c’était comme si la civilisation renaissait.

Le contraire s’est passé. Les résultats ont montré un renforcement significatif de la position des Républicains, et, surtout, de celle de GW. C’est le “camp de Dieu” qui, le 2 novembre, s’est mobilisé à l’appel de son Messie, GW. On a bien cru un moment que le scrutin en Ohio, compté et recompté, allait nous précipiter dans la confusion et l’incertitude et nous interdire, ou nous éviter, d’avoir à recevoir tout de suite la Bonne Nouvelle venue du Ciel.

Dieu a parlé et, finalement, Kerry doit s’incliner. C’est ainsi que GW va réagir et réfléchir désormais. Pour lui, cette élection est le message le plus clair que le Seigneur lui ait envoyé. Effectivement, les “fous de Dieu” américains, les born-again rassemblés en croisade, se sont levés et ont accompli la geste démocratique, comme on abat une hache sur le cou de l’Infidèle.

Le 2 novembre, nous avons vu naître et s’installer une nouvelle puissance. Toutes nos prévisions sont balayées, tous nos analyses sont ridiculisées. Nous entrons dans un âge de fer et de feu, où l’anathème servira d’analyse, où la raison devra se grimer en stars & stripes, sous peine d’excommunication.

Désormais, la plus grande puissance du monde est dirigée par un homme qui fait conseil, chaque semaine que Dieu fait, avec Dieu Lui-même. Lisez ce qu’écrit, aujourd’hui, notre ami Pepe Escobar :

« The “most important election of a lifetime” has sent a clear message to the whole world: the face of America in the next four years — barring a Richard Nixon-style impeachment — will be of unilateralism, the “war on terror” possibly progressively escalating into a clash of civilizations.

(…)

» The faith-based, apocalyptic evangelicals have won this battle against the “reality community”. Bush won despite Tora Bora, Guantanamo, Abu Ghraib. The crusade continues. In God we trust — and also in Osama bin Laden. He got exactly what he wanted. »

Regardez-le bien : la cavalcade continue, elle redouble d’énergie et d’ardeur. Une victoire électorale de cette sorte balaye toutes les défaites que peut infliger le Rest Of the World, y compris en Irak. C’est vrai que ROW, désormais, GW s’en fout plus qu’il n’a jamais rêvé de le faire. C’est vrai que la réalité, la faith-based community s’en fout.

Nous allons assister à ce choc titanesque entre le virtualisme installé au pouvoir, masque arraché, vertu sanctifiée par ses légions de born-again, et la réalité. Il se trouve que la réalité, c’est nous.