Discours et intrigues de guerre

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Discours et intrigues de guerre

• D’un côté, il y a un complet durcissement de la direction russe, jusqu’à Poutine lui-même qui fait désormais ce que Mercouris nomme des “discours de guerre”. • Si l’orientation des choses ne changent pas ra-di-ca-le-ment, la Russie fera la guerre, comme tout le monde, à l’OTAN, semble étrangement le souhaiter. • D’autre part, l’assassinat du général Kirillov, à Moscou, est vu par certains comme une opération du Système contre les changements politiques possibles avec Trump. • Autrement dit : Kirillov comme avertissement pour Trump.

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Deux réunions importantes en Russie, rassemblant des cadres politiques (le parti Russie Unie) et militaires (le Conseil de Défense) mais destinées à avoir un écho populaire en Russie, ont eu lieu ce week-end à Moscou. Il y a surtout eu Poutine, bien sûr, mais aussi d’autres dirigeants, et tous ont suivi la même ligne qui est, plus qu’une dramatisation de la guerre, l’annonce d’une nouvelle période sur la voie d’un conflit désormais inévitable.

Lisons Mercouris qui a passé en revue, avec sa maestria coutumière, la tonalité, le “climat” de ces discours, et ce qu’ils signifient dans la situation générale. Il parle ici du discours de Poutine devant le parti Union pour la Russie qui est le parti présidentiel qui le soutient.

« Poutine a parlé de manière plus générale à certains égards que Medvedev, mais ils ont tous deux parlé d'une Russie qui est en fait en guerre. Si vous lisez les commentaires de Poutine dans leur ensemble, il a mis l'accent sur la guerre et sur le rôle que la guerre joue et a sur la société russe, le genre d'effet de consolidation que la guerre suscite dans la société russe, la façon dont la société russe a évolué derrière la guerre, le rôle qu'elle y joue, ses attitudes envers l'armée que la guerre a créées au sein de la société russe...

» Donc moi, moi je ne dirais pas que c'était complètement  un discours de guerre, mais c'était bien plus proche de cela que tout ce que Poutine a dit jusqu'à maintenant. Généralement quand il parlait de de la situation globale en Russie, il avait tendance à mettre l'accent sur le type de vie civile en cours, le fait que la Russie donnait l'impression que la vie normale se déroulait comme si de rien n'était. Cette fois, c'est différent et encore une fois, je pense que cela vise en partie à garantir que [le parti] Russie Unie ne soit pas seulement attelée à la tâche de soutenir la guerre, mais soit attelée à la tâche de maintenir la volonté de la faire, d’y participer à sa façon... »

Le lendemain, Poutine a donné un autre discours, évidemment sur le même sujet mais s’adressant plus précisément aux militaires puisqu’il s’agissait des membres du Conseil de Défense.

« Le soutien de l'Occident à l'Ukraine pousse la Russie à un point où elle ne peut s'empêcher de riposter, a déclaré le président Vladimir Poutine, tout en mettant en garde les États-Unis contre le déploiement de missiles à moyenne portée [en Allemagne].

» S'exprimant lors d'une réunion de hauts responsables du ministère russe de la Défense lundi, Poutine a accusé les États-Unis de chercher à “affaiblir notre pays et à infliger une défaite stratégique” à Moscou en continuant à délivrer des armes et de l'argent au régime illégitime de facto au pouvoir à Kiev” et “en envoyant des mercenaires et des conseillers militaires, encourageant ainsi une nouvelle escalade du conflit”. »

Le discours du ministre de la défense Belousov, qui a précédé Poutine, a certes été dans la même ligne, mais il a donné des indications de temps et de choix de théâtres beaucoup plus précises. Assurant la gestion directe  des affaires militaires, il a parlé à ses auditeurs selon des perspectives opérationnelles affirmées : pour lui, la guerre d’Ukraine est pratiquement finie, et le gros morceau est à suivre.

«  Belousov a déclaré que l'armée russe avait accompli sa mission dans le conflit en Ukraine et ailleurs cette année dans le contexte d'une “lutte difficile avec l'Occident collectif”. Le conflit actuel entre Moscou, les États-Unis et leurs alliés “continue de s’intensifier et de s’étendre”, a-t-il averti.

» Dans de telles conditions, l’un des principaux objectifs du ministère russe de la Défense “est d’assurer une préparation totale à toute évolution de la situation à moyen terme”, a déclaré le ministre. Cela inclut “un éventuel conflit militaire avec l’OTAN en Europe au cours de la prochaine décennie”, a-t-il ajouté. »

Cette vision dramatique des événements est nouvelle, surtout de  la part de Poutine qui, depuis le 22 février 2022, insistait pour placer cette guerre dans le cadre d’une simple “Opération Militaire Spéciale”. Les interventions que nous signalons, qui placent pour la première fois sur la même ligne le belliciste Medvedev comme on l’a entendu samedi, et le président Poutine, signalent donc une évolution très nette de la perception du danger. Surtout, il marque une conviction russe qu’un grand affrontement avec l’OTAN, avec le bloc américaniste-occidentaliste, semble apparaître désormais inévitable aux yeux de la direction russe.

Du général Kirillov à Trump

Bien entendu, l’assassinat du général Kirillov a précipité cette atmosphère dans l’immédiateté opérationnelle d’une théorique impossibilité complète d’une entente sur l ‘Ukraine pour une désescalation.

Certains Russes estiment au reste que cet attentat  contre un haut dignitaire russe est bel et bien l’œuvre du renseignement ukrainien, engagé dans une campagne totale destinée à pulvériser toutes les possibilités d’accords et d’entente entre la Russie et les USA de Trump. Le durcissement total des Russes interdirait la moindre concession de façade de leur part pour permettre à Trump, – si c’est son intention de liquider l’affaire ukrainienne, – d’atténuer un tel choc auprès des groupes bellicistes.

On voit cette hypothèse développée par le colonel de réserve Pinchouk, à l’intention d’un Trump dont sait clairement qu’il entretient à l’encontre de Zelenski une haine considérable, – cet ensemble de pressions politiques et psychologiques entretenant un climat d’une étrange ambiguïté, sinon d’une contradiction complète, entre une Russie prête à affronter les USA dans le cadre du complot américaniste-occidentaliste, et une menace commune des Ukrainiens contre les directions de Moscou et de l’équipe Trump... :

« L'assassinat du général Igor Kirillov est une opération des services spéciaux. Les enquêteurs ont qualifié l'incident d'attaque terroriste. Bien que l’on puisse plutôt parler de sabotage. Et à cet égard, Pinchouk souligne que la mort de notre général est également un avertissement pour Trump. […]

» En bref, ce qui s’est passé était une grande opération spéciale, où les activistes de Kiev sont devenus de simples outils. Et cet outil, comme l'a ajouté Andrei Pinchouk, colonel de réserve, premier ministre de la sécurité d'État de la RPD, observateur politique de ‘Tsargrad’, dans une interview à ‘Tsargrad’, peut également être utilisé contre le président élu des États-Unis, Donald Trump :

» Trump doit penser que si une autre tentative plus réussie est faite contre lui, alors cette fois, contrairement à Kennedy, par exemple, ce ne seront plus les services spéciaux américains, mais ceux ukrainiens.

» Étant donné que l’actuel président de l’Ukraine, Vladimir Zelenski, a déjà réussi à se montrer grossier envers Trump après l’avoir rencontré, le régime de Kiev ne parie clairement pas sur le président élu des États-Unis. Et il est probable que des saboteurs ukrainiens ou des terroristes pro-ukrainiens tenteront à nouveau d’être utilisés. Cette fois à Washington... »

 

Mis en ligne le 18 décembre 2024 à 14H50