Dr. Paul, ou la campagne en charentaises contre le cœur du système

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Ron Paul est un sacré numéro. En un seul jour (le lundi 5 novembre), il vient de ramasser $4,2 millions de donations spontanées, ce qui représente un record absolu pour ce type d'opération sur Internet. Il approche à grands pas de son objectif financier pour pouvoir lancer sa campagne des primaires. Il veut $12 millions pour le 31 décembre et il se trouvait, hier à 16H46 (heure de Washington) à $8.122.609,23 (pour suivre la progression, et même y participer si vous voulez, allez sur le site de Ron Paul, le total de la somme étant monté à $8.134.412,65 le même jour, hier, à 22H59). Les résultats financiers, en donation, du candidat Ron Paul, sont stupéfiants et sa situation est brillante par rapport à nombre d’autres concurrents. Pour faire bonne mesure, on notera qu’il est l’un des trois parlementaires candidats à la désignation de son parti à n’avoir reçu le soutien d’aucun de ses collègues du Congrès. Si, avec cela, vous n’avez pas mesuré l’abysse qui sépare les élites du bon peuple dans la démocratie occidentale, américaniste et postmoderne, c’est à désespérer.

Pire encore pour le système, Paul fait une campagne “en pantoufles” aurions-nous envie d’écrire, inspiré par la forme de l’expression US qui signifie pourtant, plus prosaïquement, “campagne à bon marché”, – une “Paul's shoestring campaign style” titre RAW Story hierFundraising bonanza not changing Paul's shoestring campaign style»). L’organisation Ron Paul continue à être minuscule par rapport aux normes US, et il semble qu’il s’agisse d’une démarche délibérée.

«With a surging online fundraising operation that netted a record $4 million in a single day, GOP presidential contender Rep. Ron Paul (R-TX) now has the monetary muscle to make some substantial upgrades to his tiny campaign organization – but he doesn't plan to tinker with a successful formula, a DC newspaper reports.

»Paul, whose Libertarian-leaning positions and outspoken criticisms of the war in Iraq have ignited a firestorm of support on the internet, maintains a “shoestring grass-roots political operation,” reports Roll Call's Lauren W. Whittington. “In fact,” she writes, “Paul’s kitchen cabinet of advisers is virtually bare. The way the Libertarian sees it, he wouldn’t have it any other way.”

»According to Whittington, Paul relies on only two advisers, campaign chairman Kent Snyder and campaign manager Lew Moore, to steer his campaign. “They’re basically the two I depend on,” Paul told Roll Call, adding that he employed approximately just 50 staffers.

»Snyder first linked up with Paul as a college student, when he volunteered for the congressman's 1988 presidential bid on the Libertarian ticket. Moore, a more seasoned political veteran, is no stranger to outspoken Republibcans: he was a former aide to former Rep. Jack Metcalf (R-WA) – a firm believer that the Federal Reserve is illegal – and volunteered for Sen. Barry Goldwater's 1964 presidential campaign when he was only nine years old.

»Otherwise, Paul tends to eschew professional strategists. “No, we don't have any consultants,” the congressman told the paper. And other hired guns on the Paul campaign are few.»

“Démarche délibérée”, écrivons-nous, démarche singulière mais aussi démarche significative. Il semble qu’il y ait chez Ron Paul la volonté de ne pas tomber dans les normes du système même au niveau de la forme, de la structure même de son action, – les “conseillers”, les “stratèges politiques”, les “spécialistes en relations publiques” et ainsi de suite. On comprend évidemment l’esprit de la chose. Ces structures-là, à un moment ou l’autre, finissent par infecter l’esprit en enfermant celui qui accepte de s’y compromettre, en l’aveuglant, en le coupant de “sa base” et en lui interdisant par conséquent l’accès à la réalité. S’il continue dans cette voie, Ron Paul semble faire un étrange et fascinant pari. Il ne s’attaque pas tant à une politique, à une orientation idéologique, etc., qu’à la structure même du système. Cela signifie s’attaquer au cœur même du monstre. Son parcours électoral est décidément un des phénomènes à suivre de cette campagne 2008. Nous observerons avec intérêt où ces intentions vont le conduire. Cette question est à notre esprit: un homme seul peut-il encore battre le système à son propre jeu, en s'appuyant sur certaines armes de ce système (Internet)?


Mis en ligne le 14 novembre 2008 à 05H33