Du bon usage de l’Ukraine

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Du bon usage de l’Ukraine

• Mais enfin, pourquoi les Russes ne lancent-ils pas une grande attaque générale pour en finir avec le guignol Zelenski et les derniers chars lourds de l’OTAN encalminés dans la boue non-démocratique de l’Ukraine ? • Un commentateur (dit ‘Armchair WarLord’) avance une explication qui nous a parfois effleuré l’esprit : parce qu’ils veulent épuiser jusqu’à la mort les Ukrainiens et leurs tuteurs otaniens qui ne rêvent que d’anéantir la Russie, parce qu’ils savent qu’ils ne peuvent accepter une Ukraine qui ne peut exister aujourd’hui que sur l’idée de l’anéantissement de la Russie.

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27 novembre 2023 (17H00) – Il est vrai, comme le remarque l’auteur (dit ‘Armchair WarLord’) du texte ci-dessous que nous sommes tous un peu surpris, ceux qui ont estimé dès les débuts de la guerre en Ukraine que la supériorité russe s’affirmerait, qui ont vu les Russes effectivement renforcer leurs capacités dans des proportions assez stupéfiantes dès l’automne 2022, – il est vrai que nous privilégiions en général la thèse d’une attaque russe massive et imminente pour en finir avec le régime Zelenski. La plupart des analystes militaires mesurant les réelles capacités ruses, – les Macgregor, Ritter, Johnson, – s’entendaient sur cette thèse de principe. Le fait est que non, rien n’est encore venu, tandis que la supériorité russe continue à s’accroître, et les capacités ukrainiennes (et américanistes-occidentalistes derrière) à être décimées.

Parfois passait l’idée que les Russes étaient décidés à faire subir aux Ukrainiens-occidentalistes ce dont on les menaçait du côté de Washington-Bruxelles : une usure catastrophique des capacités existantes. Disons : pourquoi pas, comme à plusieurs reprises nous l’avons envisagé. Mais au-delà, – car il ne s’agit finalement que d’une tactique dont on ne connaît pas la stratégie au service duquel elle se développe, – au-delà, quelle est l’idée ? Faire avancer la réflexion un peu à la façon Comme dont s’interroge ‘Armchair WarLord’ :

« ... Quelque chose m'est venu à l'esprit. J'ai déjà sous-estimé les Russes. Et si je les sous-estimais à nouveau ? »

...Effectivement, sa thèse est intéressante : il transforme une question sur une action d’une méthodologie militaire en une réponse concernant la forme dissimulée mais très puissante d’un conflit à caractère culturel, sinon eschatologique. L’idée eschatologique est à la mode avec les affaires de la ‘guerre de Gaza’ mais, en, plus, on a oublié les caractères également eschatologiques de “cancellation” eschatologique de la Russie et de tout ce qui est russe qui a été affirmé dès le départ de ‘Ukrisis’ et l’Opération militaire Spéciale (OMS) russe du 24 février 2022, avec très rapidement une adaptation des Russes à cette démarche, pour une riposte intellectuelle et psychologique qui soit à mesure. Pourtant, nous avons eu des signes que les Russes comprenaient fort bien de quoi il s’agit, – comme ce discours de Poutine à Valdaï, en octobre 2022 :

« Dans la traduction française de Christelle Néant (pour le site Donbass Insider), nous décomptons 6012 mots. Le mot ‘Ukraine’ apparaît deux fois (moins que le mot ‘Dostoïevski’, trois fois cités) ; les mots à racine “occident” (“Occident”, “occidentaux”) apparaissent à soixante reprises. Nous avons ainsi, en tenant compte de l’évidence ou non de la référence dans la situation présente, un parfait condensé du discours. Il s’agit d’une appréciation d’une critique radicale et civilisationnelle d’un ordre qui est en train de s’effondrer, celui de l’Occident, celui que nous nommons Système, et d’une critique fondamentale, c’est-à-dire culturelle et historique, sinon métahistorique. »

C’est de ce point de vue qu’il faut suivre ‘Armchair WarLord’, qui nous exposer une thèse à la fois impitoyable et tragique, – et impitoyable parce que tragique, la tragédie étant l’accomplissement d’un destin jusqu’à son terme voulu par les dieux, quel qu’en soit le prix. La questions sous-jacente à la thèse de ‘Armchair WarLord’ est celle-ci : on accuse Israël de suivre une politique génocidaire contre les Palestiniens : Poutine ne fait-il pas la même chose contre les Ukrainiens ? Non, répond-il, parce qu’il est plus mesuré, plus habile, – peut-être plus humain, – et, dans tous les cas, avec plus de moyens d’une stratégie implacable mais intelligemment conduite, et de façon à ne jamais céder à la barbarie des utopies et des croyances quasiment hystériques.

Il y avait trois buts à l’OMS russe, à l’origine : démilitarisation et dénazification des Ukrainiens, neutralisation de l’Ukraine. Dans le cours des premiers mois du conflit et au regard de l’impitoyable politique de “cancellation” de la Russie, – du mot-Woke to cancel’, c’est-à-dire annuler, effacer, cesser d’exister, – Poutine et les Russes ont compris...

• que la démilitarisation et la dénazification (en fait la lutte contre le bandérisme, ou nationalisme ukrainien extrême) était un travail de très longue haleine et de grande minutie, le bandérisme et la corruption ayant annexé la militarisation du pays ;

• que démilitarisation et dénazification ou “débandérisation” impliquaient purement et simplement pour la Russie une lutte à mort contre toute résurgence d’une idée nationale ukrainienne, qui ne pourrait désormais plus être qu’antirusse, – rendant absurde l’idée de “neutralisation” de l’Ukraine pour la remplacer par une sorte d’annihilation (‘cancellisation’ pour ‘cancellisation’) ...

« Les Russes savent très bien que l’itération actuelle de l’identité nationale ukrainienne est implacablement hostile à la Russie et qu’ils ne peuvent pas coexister avec elle – et ils tuent très froidement toute personne désireuse et capable (ou coercitive) de porter les armes pour sa défense sur le territoire et le champ de bataille. »

En ce sens, on pourrait faire s’équivaloir la guerre russe contre l’Ukraine antirusse et la guerre israélienne contre la Palestine anti-israélienne... Sauf que, bien entendu et à part les multiples différences des origines, les Palestiniens n’ont jamais disposé du quart du dixième des capacités de nuisance contre Israël, par rapport aux capacités de nuisance antirusses des Ukrainiens, exercées d’ailleurs préventivement par les attaques contre le Donbass ; sauf que, plus encore, il n’y a aucune idée d’anéantissement au sens le plus vil chez les Russes, qui ont pris et prennent un soin tout particulier à éviter les pertes de civils ukrainiens... Toutes responsabilités confondues, ce qui laisse un vaste espace au débat et à l’enquête, il y a eu une dizaine de milliers de morts civils en Ukraine, dont 500 enfants, en 20 mois de guerre de très haute intensité ; dans la ‘guerre de Gaza’, on comptait avec trois semaines d’offensive israélienne 10 000 morts civils palestiniens en trois semaines, dont 4 000-5 000 enfants, – et cela alors qu’à l’heure de la libération des premiers otages la polémique enfle vilainement pour le gouvernement Netanyahou à propos de l’attaque du 7 octobre, de qui a fait quoi, de qui est le terroriste de qui et ainsi de suite.

Mais laissons cette polémique d’équivalence ouverte à tous les vents de l’interprétation, du parti-pris et de l’affectivisme. Nous gardons l’essentiel des observations de ‘Armchair WarLord’ sous la forme du constat que l’affrontement, – en Ukraine et ailleurs dans le cadre grandiose de la GrandeCrise, – porte sur le statut, la structure, le comportement d’ensembles collectifs à venir, dont la forme et l’essence restent à définir précisément face au naufrage désespéré et désespérant de l’ordre occidentaliste-américaniste. On sait que bien des pays du ‘Sud-Global’, c’est-à-dire de l’antiSystème, – surtout chez les Russes où l’on trouve un foisonnement de réflexions, – parlent de villes-civilisations ou de pays-civilisations dont les propositions d’arrangement ne cessent de varier... Pendant ce temps, l’Occident-Alzheimer campe sur l’intouchable totem de la démocratie dont il décrit minutieusement la succession sans fin des échecs catastrophiques dans un pourrissement généralisé et au pas cadencé, – et sans espoir de Résurrection puisque la formule-Jésus-Christ n’est plus disponible.

Lisez donc ‘Armchair WarLord’ sur ‘New Kontinent’ le 27 novembre 2023 ; c’est court, c’est bref, pas vraiment notre style mais il y a de la place pour tout le monde ! Finalement, cette perspective est largement  du domaine des possibilités au gré de l’évolution de la situation depuis le 24 février 2022, et de la perception qu’en ont eue et qu’en ont les Russes. Cela impliquerait alors chez Poutine et chez les Russes une volonté implacable d’assurer la sécurité de la Russie sur la base d’une conception politique extrêmement ferme, avec laquelle l’Europe est complètement déconnectée et, par rapport à elle, complètement impuissante. Cette orientation placerait l’Europe et ses folles initiatives bruxelloises et atlantistes devant un redoutable problème de sécurité, – puisqu’entretemps, il est probable que le cousin atlantique se sera divisé en deux ou trois présidents, comme les papes à la belle époque, et occupé à examiner diverses formules de sécession groupées et regroupées...

dedefensa.org

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De la sous-estimation des Russes

À l'annonce de l'annonce selon laquelle les Ukrainiens se dirigent vers une mobilisation définitive et totale contre la Russie, – et en regrettant de ne pas en avoir parlé hier alors que j'avais une intuition à ce sujet, –  quelque chose m'est venu à l'esprit. J'ai déjà sous-estimé les Russes. Et si je les sous-estimais à nouveau ?

Après tout, les Russes pourraient très facilement attaquer et s’emparer de vastes pans de l’Ukraine grâce à des manœuvres à grande vitesse. Les Ukrainiens disposent d’un millier de kilomètres de flanc gauche peu défendu et à peine fortifié, allant de Kharkov à Lvov. Les Russes pourraient le traverser assez facilement s’ils le voulaient réellement et ils ont toujours eu en réserve des forces capables de le faire – et aujourd’hui, ces forces sont en très grand nombre. Dans l’état actuel des choses, les forces spéciales russes se déplacent à volonté à Soumy et à Tchernigov, s’attaquant aux garnisons à peine déployées.

Mais non, les Russes ont consolidé leur position en Ukraine dans une étendue de terrain hautement défendable à l’est du pays et sont ensuite restés là, pendant plus d’un an maintenant, tuant des soldats ukrainiens dans des proportions horriblement déséquilibrées. Quand ils peuvent défendre, ils défendent. Lorsqu'ils doivent attaquer pour maintenir la pression, ils trouvent un saillant ukrainien et le transforment en stand de tir. Là où ils ne veulent pas pousser le front vers le haut, ils tondent simplement la pelouse et se retirent – ils ont dû prendre la même ligne de forteresses à l'est de Koupyansk une douzaine de fois maintenant, se retirant à chaque fois et laissant l'AFU inonder le front et les mêmes vieilles tranchées avec de nouvelles recrues.

Les pertes ukrainiennes ont été si astronomiques que les Ukrainiens sont désormais plongées dans des mesures désespérées pour tenter de maintenir les soldats dans les rangs, enrôlant des femmes et cherchant à vider le petit bassin de jeunes étudiants privilégiés pour nourrir le front. Lorsque la guerre sera terminée, l’Ukraine sera une société brisée dans laquelle la plupart de ceux qui sont prêts à se battre pour un État ukrainien indépendant – et une identité nationale ukrainienne orientée vers l’Occident et distincte de la Russie – seront morts.

Et si c'était ça le but ? Objectivement parlant, si le plan russe était simplement de tuer autant de combattants ukrainiens que possible, aussi efficacement que possible, avec le moins de risques possible pour eux-mêmes, alors ils le font. Les Russes savent très bien que l’itération actuelle de l’identité nationale ukrainienne est implacablement hostile à la Russie et qu’ils ne peuvent pas coexister avec elle – et ils tuent très froidement toute personne désireuse et capable (ou coercitive) de porter les armes pour sa défense sur le territoire et le champ de bataille. Dans leur volonté maniaque d’expulser les Russes et de lutter pour chaque centimètre carré de leur territoire, les dirigeants ukrainiens facilitent cette démarche.

Est-ce un génocide ? Non. Les Russes combattent des combattants armés. Infliger d’horribles pertes à l’ennemi n’est pas une violation du droit de la guerre, et toute comparaison avec la guerre en cours à Gaza montrera que les Russes ont été méticuleux pour éviter les pertes civiles. Aura-t-elle pour effet de briser la nation ukrainienne à la fin de la guerre ? Oui.

Est-ce une vilaine pensée que les Russes aient pu planifier les choses de cette façon ? Très vilaine, en effet.

Armchair Warlord