Du nucléaire à la cyberguerre, l’Iran déplace le front

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Du nucléaire à la cyberguerre, l’Iran déplace le front

27 décembre 2011 – Depuis le 24 décembre, la marine iranienne est engagée pour dix jours dans de grandes manœuvres navales dénommées Velayat 90, dans le détroit d’Ormouz et le Golfe (mer d'Oman). Ces manœuvres sont interprétées, indirectement par les Iraniens, directement par des commentateurs étrangers (les Israéliens de DEBKAFiles), comme un défi lancé à l’U.S. Navy dans le champ de la guerre électronique. L’interprétation se place évidemment dans la logique de la “capture” du RQ-170 de la CIA par les Iraniens, qui a nourri d’intenses spéculations sur les capacités électroniques de ces mêmes Iraniens.

Du côté iranien, toutes les affirmations vont dans le sens, effectivement, d’une affirmation de puissance dans le domaine de la guerre électronique.

• Le 25 décembre 2011, PressTV.com a publié un texte bref pour annoncer une sorte de premier “communiqué de victoire“ de ces manœuvres Velayat 90... «The Iranian military has tested its most modern home-manufactured electronic warfare gear and defeated mock enemy on the second day of massive Velayat 90 naval exercise. »...] During the second day of the maneuvers, different classes of frigates and submarines, sophisticated and technologically advanced ground-to-sea missile systems, advanced equipment used for communication and the exchange of intelligence were successfully tested and utilized along with modern electro-optical systems. Meanwhile, counterattacks against possible dive bombers, exchange of logistics and deep sea patrol were carried out on Sunday.»

• Le lendemain, soit le 26 décembre 2011, le même site PressTV.com publie une déclaration d’un membre de la Commission sur la Sécurité Nationale et la Politique Etrangère du Majlis (Parlement iranien), Avaz Heidarpour. (Notez combien les déclarations de membres de cette commission se multiplient, ce qui semble donner aux spécialistes des affaires de sécurité nationale du Parlement une place importante dans la tactique générale de lutte contre le bloc BAO que suit désormais l’Iran, dans des conditions notablement différentes depuis l’affaire du RQ-170.) Heidarpour affirme la capacité de l’Iran de contrer toute “cyberattaque” de la part des USA (et du reste du “bloc”). La déclaration a un rapport indirect avec les manœuvres Velayat 90, comme elle a un rapport également indirect avec l’affaire du RQ-170. Ce qui est intéressant dans la déclaration de Heidarpour, c’est la façon dont il mélange, sans faire vraiment de différence, sans tracer de lignes de rupture entre l’une et l’autre, d’une part la véritable cyberguerre qui dépend du système du technologisme, notamment dans sa composante de guerre électronique qui implique l’affaire du RQ-170 comme les manœuvres Velayat 90, et d’autre part la guerre de l’information au niveau de l’influence et des médias, qui dépend du système de la communication… Les Iraniens semblent commencer à comprendre parfaitement, bien mieux que les membres robotisés et enfermés dans leur dialectique moralisante des services de sécurité nationale du bloc BAO, comment fonctionne le bloc BAO en tant que principal moteur du Système.

«Iran enjoys “appropriate and adequate” scientific capacities and the operational systems to counter psychological ploys employed by the US in the cyberspace, […] Avaz Heidarpour, said on Sunday. He pointed to the US efforts to influence public opinion in the cyberspace and emphasized that Washington would naturally resort to defensive and media tactics when it realizes that the time and locations are not favorable to wage battles in the Middle East. The legislator, however, pointed out that thanks to their prudence, the Iranian nation would not allow the US and Western media to gain influence on them.

»Heidarpour reiterated that Iran is fully prepared to respond to any foreign threat and possesses the capability to defend against a cyber threat or launch a cyber attack as appropriate.»

• Le 26 décembre 2011 encore, toujours selon PressTV.com, le chef de l’Organisation de la Défense Passive iranienne, le Brigadier Général Gholam-Reza Jalali, affirme que son organisation a mis au point un système complet de défense, d’un tout nouveau modèle, adapté à la défense contre des attaques menées dans le cadre de la cyberguerre. Jalali réfute toutes les affirmations selon lesquelles de récentes attaques de cyberguerre (notamment le virus Stuxnet) ait affecté les capacités nucléaires iraniennes. La texte signale que, le 19 décembre, le ministre des communications et des technologies de l’information, Ali Hakim Javadi, avait déclaré : «Iran had moved more than 90 percent of its governmental internet websites from hosting companies overseas to new locations inside the country to protect governmental data on internet networks. […] [M]ore than 30,000 Iranian websites of key organizations had been hosted by foreign-based companies, mainly in North America, the data of which could have been exposed to danger at any moment.»

• D’autres déclarations iraniennes dans ce sens, concernant aussi bien les manœuvres navales que les capacités de guerre électronique de l’Iran, se sont multipliées, parallèlement à celles que nous citons. Venues des mêmes milieux (gouvernementaux, militaires, parlementaires), elles vont naturellement toutes dans le même sens. (Elles vont également dans le sens de rassurer les pays limitrophes de l’Iran à propos des manœuvres navales, pour séparer le cas de ces pays de celui des USA et d’Israël, comme ces déclarations d’un officier supérieur de la marine, le 27 décembre 2011.)

• Dernier élément de ce dossier, pour notre part, – un article de DEBKAFiles sur les manœuvres Velayat 90. Le site israélien prend l’affaire très au sérieux et en fait une véritable défi lancé par l’Iran à l’U.S. Navy, sous forme d’un exercice de guerre électronique où l’Iran prétendrait prendre le pas sur la flotte US. (Il s’agit en fait de la Vème Flotte, basée dans cette région, avec son quartier-général à Bahreïn, avec le groupe d’attaque du porte-avions d’attaque USS John C. Stennis, et le groupe amphibie du porte-hélicoptères USS Bataan, – DEBKAFiles fait l’erreur d’établir une équivalence entre les deux groupes, qui sont d’une puissance de feu respective sans la moindre comparaison.) L’analyse de DEBKAFiles est du 25 décembre 29011 et peut être prise, du point technologique et tactique, comme un apport intéressant.

«Iran launched its 10-day naval drill "Velayati (Supremacy) 90" east of the strategic Strait of Hormuz Saturday, Dec. 24, to show its muscle - first of all to Washington in view of the Obama administration radically changed stance in favor of an attack to destroy the Islamic Republic's nuclear weapons program. It is a message that, notwithstanding the proximity of US warships in the area, Tehran can close the Persian Gulf's Strait of Hormuz to the passage of one third of the world's oil consumption; and if attacked, it will not just hit back at US targets in the region and Israel; Saudi Arabia and Jordan are additionally in its sights. […]

»The Iranian war game covers a 2,000-kilometer stretch of sea off the Hormuz Strait, in the northern Indian Ocean and in the Gulf of Aden up to the entrance to the Red Sea. DEBKAfile's military sources are waiting to see how the Iranian exercise develops in relation to the two US aircraft carriers patrolling the same waters with their strike groups, USS John C. Stennis and USS Bataan Amphibious Ready Group.

»Since capturing the American RQ-170 stealth drone on Dec. 4, the Iranians appear to be spoiling to show off their cyber and intelligence feats. They claim that with the drone, they have won control of secret US cyber technology and are now capable of overpowering the advanced military and intelligence systems aboard US aircraft carriers, warships and fighter-bomber jets. […]

»Iran is playing for very high stakes: A failed performance in the face of US forces in the region will tell the West and its Arab Gulf neighbors that the Islamic extremists of Tehran talk big but can't deliver on their threats.»

On observera aussitôt que cette affaire de “l’affrontement” en mode de cyberguerre, ou guerre électronique, entre la marine iranienne regroupée au sein des manœuvres Velayat 90 et la Vème Flotte est aussi bien une affaire de guerre électronique simulée que d’évaluation médiatique de la chose. Cela laisse bien de la place pour les interprétations, entre la simulation d’un affrontement réel et l’évaluation médiatique de cette simulation. On comprend que nous attirions l’attention sur les déclarations de Heidarpour mêlant la cyberguerre et la guerre de l’information au sein du système de la communication…

D’autre part, le simple fait de décrire un affrontement entre ces deux forces, – même simulé, et surtout simulé, – est déjà, en soi, une victoire pour les Iraniens, puisque c’est la reconnaissance de facto que la flotte iranienne est perçue comme un adversaire de la même catégorie que la Vème Flotte, par les observateurs et, fort probablement, par la Vème Flotte elle-même. L’habitude à cet égard, depuis la fin de la Guerre froide, est que l’U.S. Navy, et la Vème Flotte par conséquent pour ce cas, est quelque chose au-dessus du reste, avec laquelle rien du reste ne peut se comparer, a fortiori dans le prolongement d’imaginer un affrontement simulé recouvrant un véritable antagonisme. Quel chemin parcouru par les Iraniens depuis les jours de la guerre Iran-Irak, avec l’épisode de “la guerre des pétroliers” en 1986-1988, où l’U.S. Navy assurait la protection du flot de pétroliers dans le Golfe et n’avait à craindre que les attaques de petites “vedettes” rapides iranienne, en général toutes de bois vêtues (mais difficilement repérables par radar, certes), comme seule menace de la flotte iranienne. (En désespoir de cause malgré tout, devant ces “piqûres de moustique” qui ne se concrétisèrent jamais, l’U.S. Navy, sous la forme du croiseur AEGIS USS Vincennes, abattit “par erreur” un Airbus d’Iran Air, en l’ayant “confondu” avec un F-14 iranien, causant la mort de près de 200 passagers civils, cela sans un mot d’excuse spécifique adressé à l’Iran.)

Faudra-t-il donc s’attacher, comme le suggère DEBKAFiles, au résultat de ce simulacre d’engagement pour fixer les nouvelles normes d’un éventuel équilibre des forces ? Pour notre part, nous en doutons grandement. La partie médiatique “de communication” joue et va continuer à jouer un grand rôle dans l’évaluation de l’“affrontement”, si tant est que la chose puisse être évaluée. Nous aurons droit à des communiqués de victoire de part et d’autre. Quant à l’évaluation par les spécialistes eux-mêmes, surtout ceux de l’U.S. Navy, elle sera entachée par diverses interrogations, notamment sur les ruses éventuelles des Iraniens, dont on peut penser que les spécialistes US pourraient imaginer, dans telle ou telle éventualité, qu’ils dissimulent certaines de leurs capacités… Il y a le fog of war, en général ; lorsqu’il s’agit d’un simulacre d’affrontement de guerre électronique, on a au moins deux nappes de brouillard de plus, celle du simulacre et celle de l'électronique. Cela fait beaucoup, et réduit à mesure la visibilité jusqu'à n'y plus rien distinguer.

Reste donc le fait brut, la victoire dont nous parlons plus haut : la marine iranienne, qui s’empare de l’espace naval Golfe (mer d'Oman)-détroit d’Ormouz, pour faire des manœuvres “de défi” face à l’U.S. Navy, et l’U.S. Navy qui accueille cette initiative comme une véritable “menace” conceptuelle. Dans la guerre des perceptions, qui passe par le tortueux et complexe système de la communication, c’est une reconnaissance que la marine iranienne est un adversaire à mesure. On tient là le signe que, depuis l’affaire du RQ-170, le Pentagone considère les capacités conventionnelles de l’Iran (électronique, cyberguerre) comme un fait militaire majeur. C’est une sorte de “coup de Trafalgar”, – disons, un Trafalgar postmoderne.

Déplacer l’enjeu de la guerre

Faut-il prendre tout cela au sérieux ? Tout dépend de ce qui est, en langage postmoderne, véritablement “sérieux”. Pour cette raison, on donne tant d’importance aux déclarations d’Avaz Heidarpour, liant le facteur du système de la communication (observation et commentaires de faits eux-mêmes hautement incertains), à celui du système du technologisme comprenant la cyberguerre. Effectivement, dès que des faits de cyberguerre sont ainsi exposés en public, qu’ils font l’objet de manœuvres navales prises avec tant de sérieux, après l’affaire du RQ-170 qui laisse un goût de cendre dans tant de bouches de spécialistes et laudateurs du bloc BAO, soupçonnant une catastrophe sans précédent pour le bloc, ces faits incertains de cyberguerre deviennent également faits du système de la communication. Ce qui importe alors, c’est bien la perception de la chose.

Rien de nouveau, dira-t-on assez justement. La crise avec l’Iran, qui s’étend depuis 2005 sur un mode maniaco-dépressif, avec des moments d’intense exaltation (pour une “attaque“ contre l’Iran) et des moments de retrait dépressif qui constituent un retour aux réalités, est d’abord affaire de perception. Nous sommes dans la norme de fonctionnement de cette époque. Alors, nous dirons que la perception est passée de la menace sempiternelle de l’attaque du bloc BAO contre les installations nucléaires iraniennes, au défi jeté par l’Iran au bloc BAO en matière de cyberguerre. Par conséquent, concluons à ce point que l’Iran a réussi un maître coup : ce pays est passé de la posture défensive à la posture offensive et il fait passer le domaine de la bataille de la communication, du champ du nucléaire où il est menacé, au champ de la cyberguerre où il s’affirme menaçant.

…Car il s’agit bien d’une bataille de communication, raison pour laquelle cette assimilation entre la cyberguerre et l’influence par la communication jusqu’à presqu’intégrer les deux aspects est si important. Ce que les Iraniens tentent d’imposer, et sont peut-être en train de réussir à imposer, c’est l’idée substantivée par la “capture” du RQ-170 (en plus du démantèlement de plusieurs réseaux de la CIA) que la cyberguerre du bloc BOA contre eux est déjà en cours, et qu’ils comptent bien la mener de leur côté. On le savait conceptuellement, mais rien ne vaut une démonstration in vivo pour secouer les psychologies par le biais de la perception…

L’écho médiatique de l’affaire du RQ-170 a décisivement aidé les Iraniens sur cette voie, en portant, du point de vue de la communication, un coup terrible au bloc BAO. Les Iraniens ont fait sortir cette cyberguerre de l’anonymat et du secret et l’ont rendue publique. Leurs déclarations publiques depuis, les manœuvres navales, etc., constituent de ce point de vue, plus qu’une préparation à quelque chose d’autre, des actes publics dans le cours de cette cyberguerre déjà engagée, pour la rendre encore plus publique, encore plus visible. Dès lors, ils peuvent assurer leur position d’“agressé” et affirmer sans cesse qu’ils développent leur riposte. L’intérêt, pour eux, de briser l’aspect secret de la cyberguerre, c’est d’amener ce conflit sur le plan de la légalité internationale, de la souveraineté, etc., où ils ont évidemment l’avantage. Les piètres réponses US, jusqu’aux absurdes demandes de restitution du RQ-170 et d’un agent de la CIA, montrent effectivement la position de faiblesse des USA sur ce terrain d’une cyberguerre à ciel ouvert.

Les Iraniens peuvent s’engager dans cette voie parce qu’ils ont réussi, notamment grâce à l’affaire du RQ-170, à introduire chez leurs adversaires le doute sur les capacités iraniennes, et le doute sur leurs propres capacités par rapport à celles des Iraniens. Dans cette bataille de la perception, le bloc BAO venu du zénith absolu de la surpuissance, a tout à perdre, l’Iran tout à gagner. Dès lors, les Iraniens deviennent des acteurs à part entière, et leurs affirmations que la cyberguerre est en cours (et qu’ils entendent la conduire avec toute leur puissance nouvelle) ne peut plus être ignorée. D’ailleurs, la Vème Flotte les prend au sérieux, c’est dire.

Dans ces conditions nouvelles, la question du nucléaire iranien perd sa prépondérance obsessionnelle. Certes, il est bien entendu toujours question d’attaque contre cet élément, voire plus que jamais (voir plus bas), parce que la psychologie du bloc BAO et le discours pavlovien qui va avec ne s’abandonnent pas, et que les pressions internes de la crise générale d'effondrement du Système sont si fortes. Mais l’apparition de la cyberguerre trouble la situation générale à cet égard, en même temps que les capacités iraniennes entrées dans l’univers du possible/probable rendent une telle attaque beaucoup plus périlleuse. En un sens, le bloc BAO se trouve privé d’un atout important : sa stratégie était en réalité d’épuiser l’Iran par une cyberguerre secrète (avec les divers adjuvants hautement toxiques de l’action clandestine), mais ce scénario se heurte désormais à la publicité faite à cette guerre, et à la volonté iranienne d’y participer d’une façon antagoniste, avec le plus de publicité possible.

Quoi qu’il en soit de l’avenir de ce changement de la situation stratégique déterminée par la perception, on observera une fois de plus combien la puissance du système de la communication est essentielle dans l’évolution de la situation. Il semble bien que l’affaire du RQ-170, avec son impact énorme, aient complètement changé les perceptions des uns par rapport aux autres, – d’une part, de l’invincibilité US, ainsi mise en cause d’une façon décisive, d’autre part, des capacités iraniennes figurant soudain comme respectables, sinon menaçantes. La vérité de la situation ne compte pas, non plus que les faits, – ce qui n’est que bonne justice, cette “vérité” et ces “faits” dans de tels domaines étant absolument indéterminables et contestables, et réglés en réalité par la puissance de la communication (ou son absence dans certains cas). La perception règle tout et, dans le cas du RQ-170, elle a basculé dans un sens défavorable à la puissance du bloc BAO, et très favorable à la puissance iranienne. Le reste va de soi, sinon coule de source.

…Pour autant, la logique de la situation hors des contingences humaines ne va nullement vers une sorte de rétablissement d’un équilibre qui contribuerait à réduire la tension de la crise, – au contraire, dans ces temps eschatologiques. L’intérêt central de ce changement de situation est qu’il intervient au moment où une attaque contre l’Iran devient de plus en plus métahistoriquement concevable, – c’est-à-dire, selon une logique supérieure, du type d’un déterminisme providentialiste, – à cause des situations désespérées respectives des directions américaniste et israélienne. Nous voulons dire par là que la pression des évènements va dans ce sens, tandis que les capacités du bloc BAO de lancer une telle aventure sont en dégradation accélérée et que l’Iran se trouve dans la position si différente qu’on a décrite, qui n’est pas loin d’une position de force. Il y a une contradiction évidente entre ces deux tensions, du moins pour la raison humaine ; cette contradiction “du moins pour la raison humaine” est néanmoins logique, parce qu’elle correspond précisément à ce caractère eschatologique de la situation déjà rappelé, dans le cadre général de la crise d’effondrement du Système.

On peut sentir mieux cette perception en lisant la dernière chronique de Justin Raimondo (le 26 décembre 2011). Dans ce texte plus hermétique qu’à l’habitude pour lui, mais surtout plus symbolique, Raimondo répercute un sentiment en plein développement dans les milieux dissidents US autant que dans les milieux qui se rassembleraient éventuellement autour de la candidature de Ron Paul comme une candidature antiSystème (dont Raimondo est fort proche). Il s’agit du thème catastrophiste appliqué aux USA, à la veille d’une année électorale formidablement incertaine et explosive… «This may well be our last Christmas in the old America – an America untouched by serious civil turmoil since the era of Lincoln, unbowed by the business cycle since the days of FDR. We are living out the very last hours of the American Century…»

Raimondo décrit effectivement une situation d’urgence, de panique, perçue presque comme désespérée par la direction de l’américanisme, avec des menaces de soulèvements, – ce qu’on observe in fine dans la radicalisation du discours de Ron Paul… Et cette radicalisation passant, selon Raimondo, notamment par l’hypothèse iranienne : «There is no Savior, no man on a white horse or divine sacrificial offering who can stop or appease the gathering demons: they will quaff their chalice of blood, have their pound of flesh, these cannibals of the spirit who demand human sacrifice as the price of propitiation. Blood, honor, “national security,” “world leadership,” the “free world” – these are the words they will invoke, the ritual prayers to the great god Mars that will excuse the thousands killed, tens of thousands maimed – and for what? […] For the reelection of a failed president – who would gain the opportunity to blame Iran for the economic catastrophe we brought upon ourselves.»

…Ce qui conduit au rappel d’une appréciation donnée, in illo tempore (le 26 avril 2010) par un “néo-sécessionniste” (perspective dans tous les esprits, cela, le “néo-sécessionnisme”) du Maryland, Thomas Naylor : «“There are three or four possible scenarios that will bring down the empire […] One possibility is a war with Iran…»