Du Troisième Reich au JSF

Bloc-Notes

   Forum

Un commentaire est associé à cet article. Vous pouvez le consulter et réagir à votre tour.

   Imprimer

 353

Le JSF étant le programme le plus avancé du point de vue technologique et de tous les points de vue modernistes et postmodernistes qui vont avec, on n’est pas plus étonné que cela d’apprendre que l’accélération du programme voulu par le secrétaire à la défense Gates dépend, notamment, pour le cas exposé ici, d’un matériel datant des années 1950 à partir de machines allemandes dont la conception initiale fut développée durant la Deuxième Guerre mondiale, sous le Troisième Reich. Ces machines semblent actuellement incapables de suivre le nouveau rythme demandé et connaissent des ennuis à mesure. On sait l’importance pour l’éventuelle survie du programme de l’accélération de sa production, qui devrait permettre l’accélération du programme d’essais en vol, donc la réduction de l’enchaînement des modifications à effectuer, donc la réduction des coûts et ainsi de suite.

…Après nous avoir décrit toutes ces circonstances pressantes, la petite nouvelle de France-Métallurgie, qui est mise en ligne le 8 décembre 2009, poursuit:

«Because the F-35 relied on foreign partners for investment in its development companies in these countries have been given some of the manufacturing work. Alcoa Inc. (AA) is one the companies that will provide aluminum alloy bulkheads used to assemble the aircraft’s fuselage. These are large, complex shapes that must be made through the use of a press. In 2007 Lockheed subcontracted to Alcoa for these parts some of which are up to twenty-three feet long. In order to meet the new accelerated production goals of the program Alcoa is investing its own money in refurbishing its twenty-five ton press which will aid in making these assemblies.This one year, $110 million project will be critical to both Alcoa and Lockheed to support the new schedule. Of interest this press was actually one of two built by the U.S. Government in the Fifties to support its domestic aviation industry. It has actually been named a historical landmark by the American Society of Mechanical Engineers (ASME). This means that America’s most technically advanced aircraft will be made by equipment that is over fifty years old and is considered a historical landmark. Of further interest it is based on a German designed one from World War II. This illustrates that the U.S. and many other countries would have a hard time increasing production of such items due to limits on key industrial capability. The ability to quickly build something like this press would be hard. It is in some ways a testament to modern industrial engineering that this piece of equipment still exists and is available for this program. It also illustrates that without this kind of investment it will be hard to increase JSF production rates.»

S’il y a divers motifs d’étonnement et de réflexion dans cette nouvelle, il y a d’abord le constat concernant la planification et la gestion du programme. On est donc fondé à se demander comment Lockheed Martin (et le Pentagone, qui aurait du suivre l’affaire) a pu programmer la fourniture de pièces si importantes à partir d’appareillages qui semblent complètement hors de son contrôle, qui paraissent dans un état de marche délicat (ce qui se comprend, vu l’âge de la chose), qui semblent se trouver à un tel rythme de fourniture (nécessité de la compétitivité) qu’ils ne peuvent accélérer leur rythme de production et ainsi de suite. Cette situation est la conséquence directe du cloisonnement des conceptions dans le cadre de la globalisation perçue comme une donnée acquise, sans aucune considération pour les précautions habituellement prises pour les programmes de sécurité nationale (notamment avec le contrôle de tous les éléments de fabrication et de leurs sources).

Lockheed Martin a passé ses contrats de sous-traitance selon le seul critère de la compétitivité qui est la règle d’or du système, sans le moindre souci des questions politiques habituelles (fournisseurs étrangers, capacité de ces fournisseurs de soutenir ou d’augmenter en cas de nécessité le rythme de la production, autorité sur ces fournisseurs, etc.). Le programme JSF est effectivement l’archétype de la globalisation du système et de son échec. Il n’est pas sorti de son auberge globalisée, et l’on se doute bien que le cas Alcoa est exemplaire bien plus qu’exceptionnel.


Mis en ligne le 9 décembre 2009 à 09H47