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384214 décembre 2020 – Disposant sur Netflix récemment d’un documentaire d’une équipe de journalistes de HBO et réalisé par Greg Barker en 2017, je crois bien avoir disposé d’une sérieuse partie de la réponse à la question de la provenance directe de la haine qui dévore l’Amérique. Cette haine se mesure chaque jour, comme lorsque ‘Time’ , commentant son.a ‘Person of The Year’ en la.e unique et glorieux.se ‘personne’ de Biden-Harris, dit BH, désigne Trump sous le surnom de ‘Le Minotaure’. L’on gémit dans ce texte à propos de la calamité que cette Bête monstrueuse a semée, et à la pensée vertueuse et courageuse de la tâche qui attend BH, cette tâche si lourde, si épuisante, malgré la superbe et loyale victoire :
« Defeating the Minotaur was one thing; finding the way out of the labyrinth is another. »
... Ce qui nous ramène en 2016 car en 2016, avant la date fatale, c’était encore la ‘belle-époque’, avant la labyrinthe immonde où nous a conduit ‘Le Minotaure’ ; et cela me ramène à ce documentaire de 2017 dont le titre est ‘The Final Year’, qui est effectivement 2016, précisément de janvier 2016 à janvier 2017 ; et c’est le crépuscule injuste d’une superbe chevauchée qui avait entamé la tâche magnifique de “changer le monde” (“To change the world”, rien de moins, car, vous savez, entre nous mais c’est si vrai “Yes, We Can”), – ou, dans tous les cas, de commencer, c’est promis, c’est assuré.
Donc, une équipe de journalistes de HBO a suivi BHO (le jeux des initiales, on n’y résiste pas), – le gouvernement Obama dans son ‘année finale’, – et d’ailleurs le docu commence sur une réunion de Ben Rhodes annonçant à ses collaborateurs que le président, BHO, a donné son accord à ce projet. Les principaux personnages de ce ‘The Final Year’, ils sont quatre, ce sont essentiellement, outre Sa Majesté BHO-Saint évidemment,
Ben Rhodes, conseiller très proche du président, son speechwriter, son double et éminence grise intellectuelle pour la politique de sécurité nationale ;
Samantha Powers, sorte de grande gigue, ou gigas, efflanquée de haute taille d’origine irlandaise, un peu cheffe-scoute et mère-poule aussi bien de ses propres enfants que des pauvres petits enfants affamés et malades des pays africains ravagés par le colonialisme de l’homme-blanc européen, du temps affreux des “négrillons”, et aussi ambassadrice des USA à l’ONU ; présentée sous des dehors extrêmement chaleureux et humanistes et s’étant manifestée pour la chronique des envieux et des plumitifs médisants, comme une harpie-belliciste des progressistes-interventionnistes (R2P), et adepte extrêmement douée du féminisme-guerrier des “Harpies” d’Hillary Clinton ;
et enfin l’excellent et ondulant John Kerry, secrétaire d’État, tout en souplesse élégante et en finesse qui peut être d’une fermeté de fer, représentant de la vieille tradition diplomatique US et ancien combattant du Vietnam devenu leader de la contestation antiguerre d’alors.
Le climat qui règne dans ce documentaire, par ailleurs d’excellente facture et d’un rythme enlevé, – on n’a jamais dit que le diable n’avait pas de talent de metteur en scène, bien au contraire, – est fascinant de sophistication, d’adulation décontractée (pour BHO-Saint), de certitude d’exceptionnalité (“They change the world, indeed”). Tout ce qui est d’habitude un peu lourd dans ce domaine, surtout US, avec les gardes du corps et les flics divers, les hélicos, les 4x4 en colonnes, les communicants qui ne communiquent pas, les photographes officiels, tout cela devient d’une grâce aérienne, à l’image du POTUS-BHO. Ils s’envolent, d’un bureau de la Maison-Blanche à un Air Force One de Boeing, d’un rang de petits enfants africains que la cheffe-scoute Powers prend dans ses bras à une conférence donnée par BHO-Saint à de jeunes Sud-Coréens enthousiastes.
On les voit bosser dur, sérieux, entreprenants, s’échangeant des claques dans le dos, une vraie bande de copains comme vous et moi, vous voyez ? Même que le bureau annexe pour méditation et pensées ultimes de Ben Rhodes, un de ces deux ou trois dizaines de personnes qui mènent le monde, est tout-petit-rikiki ; mais l’on dirait bien que c’est voulu ; de même Lénine travaillait-il, camarade, dans un monstrueux capharnaüm mal entretenu, d’où il faisait trembler le monde.
Powers est à l’ONU comme chez elle et l’on dirait qu’elle est gardienne, femme de ménage, cuisinière et maîtresse absolue et inconterstable, cette maîtresse-femme, de l’Organisation des Nations-Unies. Kerry, lui, à l’entregent des vieux-beaux garçons, si à l’aise (il a épousé une riche héritière des Katchup, je crois), et il vient mettre juste un zeste de bonne tenue du type George Marshall ou Cyrus Vance chez tous ces jeunes gens peut-être un peu trop enthousiastes.
Ces gens ne cessent de parler de “changer le monde”, d’y installer la paix bien entendu ; il parle avec une certaine modestie affichée sionon ostentatoire, une bonne humeur communicative, un entrain plein d’optimisme, dans le futur, dans le progrès, dans la technologie, dans l’humanitarisation de l’humanitarisme. Powers salue sa femme de ménage Maria comme une copine et pleure à la cérémonie qu’elle préside, de la naturalisation en citoyenne US de Maria. Ils vous promettent tous que c’est une terrible tragédie que la Syrie, et encore heureusement que les USA sont intervenus. Kerry parle avec chaleur à son garde du corps, Rhodes au journaliste de HBO qui le filme.
Et puis, par-dessus tout, outre BHO-Saint bien entendu, au-dessus et à côté de lui, ou peut-être juste un peu plus haut que lui, l’exceptionnalisme de l’exceptionnelle Amérique. Quoi qu’il se passe, quoi qu’on en veuille, l’Amérique est là, elle sauve le monde et le monde se précipite pour l’acclamer, l’embrasser, l’aimer, et puis marcher au pas. BHO-Saint sourit de toutes ses dents. Vous vous y laissez prendre, et moi-même j’en viens à dire : quelle efficacité, quelle puissance, quelle bonne volonté, quel cœur charmant et quelle simplicité ! Je ne peux cacher l’impression d’une classe exceptionnelle qui se dégage d’Obama, souple, élégant, avec son incroyable cooltitude (composé de cool-attitude), comme disait Antoine de Caunes.
... Et puis tout d’un coup, tout s’effrite, tout s’effondre, tout se désagrège. Vous avez Ben Rhodes, l’alter ego du président pour la grande politique internationale, l’homme de l’ombre dont on ne peut se passer, le stratège du génie sérieux et tranquille, qui confie à la caméra de HBO, et cela en 2016 : « L’erreur qu’on a pu faire... Poutine ne semble pas poursuivre les intérêts de la Russie. Il poursuit les intérêts de Poutine.. Ca nous a pris longtemps pour séparer Poutine des Russes... Cet acteur hors-la-loi. » Cela veut dire quoi, comme divers clins d’yeux et phrases sibyllines nous ont préparés à le réaliser ? Que Poutine est un vulgaire gangster, qu’il roule pour lui seul, pour sa fortune, pour sa cruauté et qu’il se fout du tiers comme du quart du sort de la Russie ; car « les intérêts de la Russie », c’est de faire ce que Washington D.C. veut que la Russie fasse, et Poutine n’obtempère pas ! Ainsi est-il juste de dire que les saloperies prétendument russes, l’Ukraine, la Crimée, la Syrie, etc., sont en fait des saloperies de Poutine, ce minable petit racketteur, ce porte-flingue de bas étage. Ainsi, voilà le fin du fin de l’esprit de cette prodigieuse bande de génies sous la direction de BHO-Saint ! Vous comprenez alors pourquoi ils travaillent comme des fous à une révolution de couleur de Moscou à Saint-Petersbourg, puisque les Russes la réclament, puisque ce sont « les intérêts de la Russie »... Je vous assure qu’ils y croient tous, le dos chargé de leurs vertus, de la sauvegarde qu’ils dispensent dans ce monde de méchants, de cruels, de faux-jeton. « Seul le président Obama a une pensée globale inclusive » dit l’un d’eux, c’est-à-dire à inclure dans la super-Pax Americana.
Puisque soudain le rideau s’est déchiré... Adieu, grande classe, coolattitude, exceptionnalisme, humanitarisme humanitarisant. Vrai de vrai, ces gens qui ont attaqué l’Irak et l’Afghanistan, désintégré la Libye, qui bataillent dans combien d’autres pays sans qu’on ne le leur ait demandé en aucune façon, qui assassinent quotidiennement par drones ; ces gens qui pourrissent comme autant d’urines d’incontinent divers autres pays de leurs révolutions de couleur, – dont l’Ukraine de Kiev-2014 est le plus fameux exemple de corruption absolue et néo-nazie ; qui se fichent des lois internationales comme on se fiche de son premier papier de toilette... Eh bien, ces gens croient à leur incroyables narrative, de l’antirussisme ‘primaire d’en-dessous la ceinture’ au Russiagate monté contre Trump. Ces gens sont alors d’une nullité sans fin, quasiment luciférien sans le savoir et si élégant en le sachant, ils sont le négatif géométrique de la vérité-de-situation du monde, prisonnier de leur ‘story’, ce qu’on nomme narrative dans nos pages.
Il faut dire qu’il y a un maitre de cérémonie, un Monsieur Loyal qui fait terriblement bien son travail de bateleur. BHO-Saint, tel qu’on le voit lors de cette conférence devant des étudiants sud-coréens, ou bien est-ce des Japonais, ou même des Chinois pourquoi pas, répondre à cette question : « Vous êtes un grand leader : comment faites-vous pour parvenir à un grand leadership ? » BHO-Saint est incroyable dans sa capacité de recevoir compliments et hommages, comme on met une lettre à la poste, en douceur et selon toute évidence… Et de répondre qu’essentiellement, « il faut avoir une story pour mobiliser les foules » ; et d’expliquer ce qu’est une ‘story’, une histoire, un conte à applaudir plus que debout, dans une standing ovation ; et de leur donner cet exemple, “La Déclaration d’Indépendance, et puis ‘Tous les hommes naissent égaux’, c’est une belle ‘story’, non ?” ; et enfin, une petite hésitation, sans doute après avoir mesuré ce que signifiait cette révélation, que tout est simulacre, y compris “Tous les hommes naissent égaux”, et qu’il suffit d’avoir un bon bonimenteur, – et de lancer cette habile réserve en post-scriptum : “Et puis, cela fixe un objectif pour l’avenir”… Bravo l’artiste.
Après cette belle leçon de magnanimité humaine, nous avons droit au voyage civilisationnel. Le dernier déplacement international des deux mandats de BHO-Saint est pour la Grèce, parce que, laisse-t-il comprendre, c’est le berceau de notre civilisation, – y compris pour nous, Africains-Américains ? Pas de précision nécessaire… BHO-Saint au Parthénon, les lèvres un peu serrées, le regard lointain sur l’Histoire qui nous précède, et vous disant que c’est là, oui c’est bien là, il y a 2500 ans, qu’est née la démocratie. Il y a de quoi vous faire réfléchir, n’est-ce pas ? Parce que tout de même, cela ne manque ni de grandeur de vue, ni d’originalité.
Mais le clou du spectacle et la clef décisive de l’énigme, en vérité, c’est Ben Rhodes qui nous le donne, sur la fin du film. C’est le soir de l’élection de Trump. Plusieurs fois interrogé auparavant, Rhodes avait affirmé, sans surprise et avec bien des arguments, que Trump n’avait strictement aucune chance et qu’Hillary poursuivrait l’œuvre de BHO-Saint à laquelle lui-même, Rhodes, était corps et âme attaché. Ce soir-là de novembre 2016, il est assis, seul, sur l’appui en ciment ceinturant une esplanade, dans l’ombre en clair-obscur d’un crépuscule aux couleurs tragiques, et dans l’horrible marasme d’un immense désarroi. Le cameraman-journaliste l’interroge : “Que ressentez-vous ?” Je crois que Rhodes essaie cinq ou six fois de répondre, avec des silences interminables pour rythmer la tentative, « I mean ... uh... », « I can explain... », « I mean ... euh... », puis il abandonne : « I don’t find the words ». Il n’est même pas triste à pleurer, comme l’est Powers qu’on a montrée auparavant, il est sonné, KO, psychologiquement étendu par terre et inconscient, quasiment laissé pour mort.
Alors, on comprend me semble-t-il : tous ces gens ont cru jusqu’au bout à la “‘story’, ce qu’on nomme narrative dans nos pages” que leur susurrait BHO-Saint, et peut-être le Saint lui-même y a-t-il cru, – non, sûrement il y a cru. Voir tout cela détruit, ce rêve brisé, cette illusion perdue en devenant réellement illusion, et de la sale patte de ce milliardaire comme éternel nouveau-riche à cheveux jaunes, vulgaire, sans foi ni loi de notre-caste, ‘fucking idiot’ mais aussi ‘Minotaur’ ! On comprend qu’à cet instant naît cette haine inextinguible et inexpiable, promise à durer jusqu’à la mort de l’impie et bien au-delà, haine et malédiction de l’impie jusqu’à la dixième génération s’il le faut. Adieu l’artiste.
Ce qui attend BH, “cette tâche si lourde, si épuisante, malgré la superbe et loyale victoire” du 3 novembre 2020, cela peut être aussi une belle ‘story’ inspirée par la stature magnifique de l’Alexandre-diversité des temps modernes. BH est la projection, à quatre ans de distance, de BHO-Saint ; il en fallait bien deux, BH comme les ‘Dupont-Dupond’ de “Change the world”, Acte-II, pour poursuivre la Sainte-Mission. BH, c’est BHO sans O comme vous l’avez remarqué, puisqu’Obama a tracé la voie, montré la lumière, tracé les ouvertures et les horizons sans fin du Paradis-on-Earth. ‘Yes, They Can’, et vachement, et c’est la belle-‘story’ à nouveau sur pied, qui nous sortira du labyrinthe.
C’est comme ‘Alice in Wonderland’, en plus racisé, en mieux genrisé, en complètement hollywoodisé, et qui trouve la sortie du terrier labyrinthique où l’avait traîtreusement attirée ‘The Minotaur’ à la chevelure jaune, lâchement grimé en lapin blanc et qui s’est avéré être également un chapelier fou. Bon débarras, The-Donald ! Viré par le plus beau et le plus exemplaire scrutin, l’élection sans faute ni fraude la plus belle que nous ait offert la Grande Démocratie de la Grande République, qui arriuve à se frauder elle-même à l’insu de son pleuin gré. La ‘belle-époque’ devenue la belle-‘story’, avec BHO-Saint réincarné en BH.
Trump est et restera désormais l’objet, la cause, la raison, l’argument, l’aliment, le Bourbon et son ivresse de notre haine absolue, perpétuelle, de notre haine sans fin, comme les horizons sans fin, grossier milliardaire qui la ramène un peu trop, figure éternelle des minables Deplorable, ploucs, beaufs, que sais-je encore, qui prétendent se révolter et qui se révoltent parfois. La riposte sera, ou est déjà bien entendu, une haine encore plus forte, de la part des trumpistes et de Trump si ça lui chante. Et les lendemains, eux aussi, chanteront à pleine voix le désordre terminal de la Grande Crise.